Nostalgie : les coups d’Etat ne sont plus ce qu’ils étaient dans le temps

Portrait du commandant Ababou, auteur de la tentative de putsch de 1971 au Maroc
Le commandant Ababou, auteur de la tentative de putsch de 1971 au Maroc

Dans le temps, on attendait les coups d’État avec impatience. Que ce soit dans son propre pays ou ailleurs. Ils nous distrayaient et nous divertissaient.

Et, grâce à Dieu, il y en avait tout le temps.

Les militaires paradaient dans les rues en tenue de combat avec chars et automitrailleuses. On bousillait carrément les tenants du pouvoir. Les petits et les grands. La radio émettait de la musique martiale. Les cafés offraient du thé gratuitement. Les commerces des biscuits et des bonbons. On criait vive celui-ci, à bas celui-là, à mort cet autre. On fêtait quelque chose dont on n’avait aucune idée. C’était la joie absolue, quoi.

Ces coups d’État survenaient surtout en été. Il fait chaud. Les militaires s’emmerdent. Les hauts gradés, surtout. Ils s’imbibent de whisky. Et le whisky leur donne de bonnes idées. On met cap sur le palais royal ou le palais présidentiel.

Ça tombait bien. Au Maroc, les vacances scolaires d’été traînaient à n’en pas finir. Plus de trois mois à passer sous une chaleur torride. On s’emmerdait à mort. Il n’y avait rien d’autre à faire que de taper sur une balle rikiki et rapiécée.

On n’a pas été frustrés. Deux coups d’État fabuleux surviennent en juillet 1971 et en août de l’année suivante.

Les étés de 1971 et 1972 ont été les plus mémorables de ma jeunesse.

C’étaient des putschs militaires dirigés contre le roi Hassan II.

Le premier survint alors que le roi fêtait son 42e anniversaire en grandes pompes. Il y avait des ministres, des ambassadeurs, des personnalités de haut rang marocaines et étrangères, des artistes… L’alcool coulait à flot. Puis, les putschistes, des jeunes, sont arrivés de loin et ont commencé à tirer. Après l’alcool, c’était le sang qui coulait à flot.

Le putsch a échoué. Mais tout s’est très bien passé. Il y eut beaucoup de morts, de pleurs, de condamnations, d’exécutions (notamment l’exécution de dix officiers supérieurs – dont quatre généraux – retransmise en direct à la radio. Un délice). Bref, il y avait tout ce qui fait un vrai coup d’État et qui ravit le cœur et enchante l’esprit.

C’étaient de magnifiques journées inoubliables, même si on n’arrive toujours pas à comprendre comment une pléiade d’officiers supérieurs, qui commandaient des unités de renommée de l’armée marocaine, ne sont pas arrivés à terrasser un chacal.

Les putschistes devant le tribunal militaire de Rabat
Les putschistes devant le tribunal militaire de Rabat

Le second putsch a eu lieu alors que le roi revenait d’une visite en France. Son avion est intercepté par 6 avions de chasse F-5 de l’armée marocaine. Ils tirent sur l’avion du roi, mais n’arrivent pas à l’abattre. Il y eut de nouveau beaucoup de morts et d’exécutions. C’était beau, mais terriblement désolant aussi.

Six avions de chasse qui n’arrivent pas à abattre un petit avion civil ! Un désastre national !

Il y eut encore un soulèvement armé l’année suivante, en 1973. On l’appelle à tort coup d’État. C’étaient des civils. Ils voulaient lancer un mouvement de rébellion armé genre Che Guevara. Ce fut un fiasco. Il y eut beaucoup de morts. Seize militants du mouvement ont été passés par les armes le 1er novembre 1973.

L’initiateur de ce mouvement, un résistant et membre de l’Armée de libération nationale dans les années 50 et 60, Fqih Basri, qui a longtemps vécu en exil, est rentré au Maroc en 1995. Il est mort en 2003 en demandant la grâce et la bénédiction du roi.

L’obséquiosité des Marocains n’a pas de limite.

Quoi qu’il en soit, c’étaient de sublimes coups d’État. Comme on n’en voit plus aujourd’hui.

Le putsch de Niamey semble être une rigolade en comparaison.

Les temps ont bien changé.

Les coups d’État d’aujourd’hui sont mous et froids. Sans saveur. On ne s’en rendrait même pas compte si BFM TV n’en parlait pas.

Qui pourrait croire que ce qui s’est passé à Niamey est un vrai coup d’État ?

Il ne répond pas aux normes traditionnelles des coups d’État tels que perpétués de façon ancestrale en Afrique et ailleurs.

Pas un seul mort. Pas une seule goutte de sang. Pas une seule exécution. Pas d’emprisonnement. Une honte, ce coup d’État.

Il se résume à offrir des vols gratuits pour Paris et Rome aux ressortissants français et étrangers résidant au Niger.

Le président soi-disant déchu du Niger, le Mohamed, roucoule allègrement dans sa résidence. Comme si de rien n’était.

Mais, nom de Dieu, enlevez-lui au moins son téléphone.

Et, s’il résiste, coupez-lui les couilles.

Ça, au moins, ce seraient de bonnes couilles d’État.

Messin’Issa

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8 Commentaires

  1. Excellent Messin’Issa. C’est vrai que le coup d’État nigérien est bien terne comparé aux jolis troubles que vous évoquez. Tout se perd, même la fête.

  2. Bonjour,

    Le massacre de Skhirat n’était pas un putsch : à mes yeux et avec le recul, c’est le premier attentat islamiste moderne.

    Ces crapules ont massacré, prioritairement, les Juifs marocains qui assistaient à la réception.

    J’avais un camarade de lycée, dont le père a été tué ce jour-là …

    Cette tuerie m’a beaucoup marqué.

    Le massacre de Skhirat est longuement évoqué dans les souvenirs du Collabo Benoist-Méchin qui y a assisté …

    • Non, tu exagères, mon ami. J’ai vécu ce coup d’Etat. Rien à voir avec l’islam et les juifs.
      La plupart de officiers qui ont mené ce coup d’Etat étaient de vrais patriotes.

      • Bonjour,

        Non,je ne suis pas du tout d’accord.

        Ce massacre avait, clairement, un caractère antisémite.

        Les tueurs ciblaient particulièrement les Juifs.

        Comme le père de mon camarade.

        D’ailleurs, l’une de ces ordures, réfugiée en Suède, déversait de là-bas sa haine contre les Juifs.

        https://fr.wikipedia.org/wiki/Radio_Islam

        Les éxécutants étaient totalement fanatisés et bourrés de drogue par leurs chefs.

  3. Eh oui, la nostalgie est là. Aujourd’hui, pour un coup d’État, il ne faut pas grand chose :un pick-up Toyota avec une mitrailleuse, dix grenades, quelques fusils, quelques gaillards déterminés. Ça n’a plus la même gueule qu’avant. Tout se perd. Dès qu’un colonel-général a reçu un quelconque diplôme, même celui de CAP de coiffeur pour dames, il se dit : je suis plus instruit que le président, il me faut le renverser. D’où les nombreux coups d’État en Afrique. Ah le bon temps d’Amin Dada ou de Jean Bedel Bokassa! En ce temps-là, les peuples savaient se tenir.

  4. Le commandant Ababou voulait renverser le roi du Maroc Hassan 2 pour mettre en place un régime militaire afin de supprimer la monarchie en Juillet 1971 comme Khadafi le faisait en 1969 en Libye bien avant sa disparition tragique avec la guerre de l’empire Amerloque en 2011. Les putschistes Marocain ont été jugés en 1972 et exécuter Donc les guignols Nigériens qui ont renverser le Mohamed Barzoum ne sont que des Cons pas tenter et puis il faudrait bien qu’on coupe toutes relations diplomatiques avec le Niger car ils nous détestent !

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