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Notre agriculture est en mauvais état : voici 2 portraits de résistants à la mondialisation, à la PAC, au gaspillage, à l’agriculture industrielle…
On dit vouloir sauver la planète, mais c’est notre civilisation qu’il faut préserver.
Aujourd’hui on pointe le secteur de l’agriculture comme l’un de ceux qui concentre tous les maux de la planète. Si l’agriculture est un problème, faisons-en une solution !
Charles et Lauriane Durant, dans l’est de la France (photo ci-dessus).
Produire, vendre et manger 100% en local, voilà le rêve de la micro-ferme du Vieux Poirier en Alsace. Six ans après leur installation, Charles et Lauriane Durant tentent de concilier leurs convictions avec la réalité d’un système qu’ils veulent participer à changer !
Une microferme compte moins de 5 hectares.
Un trou dans le mur de parpaings gris. Un seau jaune s’agite devant comme un appât. Quelques secondes plus tard, un premier groin rose sort, suivi d’une bonne dizaine d’autres. Charles les emmène plus loin dans la cour et c’est la ruée vers le granulé. Nous sommes à Schopperten, dans l’Alsace du nord, l’Alsace bossue, précise Charles pour désigner ce secteur bien particulier du département. En 2015, le couple était lauréat du concours Fermes d’avenir, ce qui les a bien aidés pour faire grandir leur projet de micro-ferme : 2,30 hectares, 120 porcs. Nous sommes le plus petit élevage du grand Est à en vivre, s’enthousiasme le trentenaire souriant et vif. Objectif de la ferme du Vieux Poirier : associer maraîchage permacole, élevage et agroforesterie sur une petite surface, en respectant l’environnement et les animaux.
En 2015, la micro-ferme fut lauréate du concours Fermes d’avenir.
Porcs d’attache
Il y a six ans, Charles et Lauriane Durant rachètent l’entrepôt d’un chauffagiste. Un énorme bordel plutôt, rigolent-ils. Pour leur installation, ils déboursent sur deux ans 230 000 euros pour les travaux. L’élevage porcin leur a permis de s’assurer d’emblée un matelas de revenus réguliers. Une valeur sûre en Alsace, pays de viandards. Il faudrait trois fermes comme la nôtre pour nourrir le village de 400 habitants. Ils assurent être la seule micro-ferme bio de France à produire de la charcuterie fumée, bio, sans allergènes : saucisse de Strasbourg, lard paysan fumé, saucisson fumé… Ici, avant de sécher un produit, on le fume afin de le stabiliser, car notre climat est plus humide. Leur produit vedette : le jambon cuit, sans sel nitrité, sans gluten ni lactose.
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Le Vieux Poirier se fournit en porcelets chez un naisseur bio du coin. Un porcelet de 13 kg leur coûte 105 euros. À la ferme, Charles les nourrit avec de la graine de lin à cause du manque de traçabilité sur le soja. Le lin avoisine les 550 euros la tonne, pour le moins cher en bio, contre 180 en conventionnel, détaille-t-il pour expliquer la cherté des produits bio. La viande est un aliment précieux et doit rester un repas de plaisir, mais c’est devenu un truc pour se remplir le ventre, regrette l’éleveur.
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Je me suis rendu compte que le bio n’allait pas assez loin.
Avec 120 porcs, le Vieux Poirier fait figure de petit poucet derrière les poids lourds de l’agroalimentaire. Nos cochons sont peu nombreux mais ils sont bien traités et ne restent pas sur le carreau au moindre pépin de santé, remarque Charles avec un brin de fierté. Pour lui, bien traiter l’animal, c’est d’abord respecter au mieux son cycle de vie. Après celui la qualité des aliments, il prend l’exemple du sevrage. Plus une femelle sèvre vite, plus elle pourra avoir une portée vite. Les industriels le font en quelques jours. La truie est juste une machine à faire des petits cochons, et au bout de deux ans, elle est foutue, constate-t-il, dépité par cette aberration. Un certain label de qualité impose 21 jours. C’est mieux, mais c’est encore la moitié de ce qu’il faudrait faire. Notre naisseur bio les sèvre à huit semaines et ça doit faire huit ans qu’il les a, développe-t-il en comparaison.
Contrairement à Charles, fils d’agriculteurs, Lauriane est une enfant de la ville. En découvrant la vie des champs, j’ai eu un gros choc. Je pensais que le monde paysan était en co-création avec la nature. En fait, elle est utilisée comme une machine. Je me suis rendu compte que le bio n’allait pas assez loin.
Le couple voudrait s’orienter vers le végétal pour se diversifier.
Alors, si l’élevage porcin devrait rester leur fonds de commerce, ils souhaiteraient à terme consacrer la moitié de leur activité au végétal. En 2017, ils ont ainsi planté 200 arbres fruitiers et arbustes tout autour de la parcelle principale. L’idée, c’est de planter des variétés qui se gardent sur le long terme, pour déborder sur les saisons et avoir des fruits frais huit mois de l’année, pour pouvoir manger local tout le temps. Un bocage se redessine avec 800 autres en haies brise-vent, d’autres pour les parcs des animaux.
Il faut maintenant attendre que ça pousse : 15 ou 20 ans pour les deux pins mis en terre à l’automne. Ce sera pour les enfants. À un moment, il faut bien planter pour les prochaines générations, dit-elle, inspirée par L’homme qui plantait des arbres de Jean Giono. De la cuisine aux huiles essentielles en passant par les vertus médicinales ou le bois de chauffage, les atouts du pin ne manquent pas.
Planter le futur
Le végétal, c’est le truc de Lauriane. Elle souhaiterait planter en forêt. Nos regards se tournent vers la lisière du sous-bois public à quelques centaines de mètres. L’eau, on en aura moins à l’avenir. Cultiver dans un jardin-forêt qui conserve l’humidité pourrait être une solution pour beaucoup de choses. Elle montre la mare à sec à quelques mètres de notre table. Quand on a acheté le terrain, c’était une piscine, ça débordait parfois. Il y a trois ans, on pompait à trois mètres de profondeur. Aujourd’hui, on va chercher l’eau à dix mètres !
Charles et Lauriane ne cachent pas qu’ils auraient pensé et aimé aller plus vite dans leur installation. Avec la méningite de Lauriane l’année dernière et des pannes de matériel à répétition, ils ont dû marquer le pas. La construction d’un étang pour réintroduire des écrevisses a ainsi dû être reportée au printemps suivant.
Le couple a intégré le Collège culinaire de France en tant que producteur-artisan de qualité.
Toutefois, il y a du mieux ailleurs, positivent-ils. D’abord, l’honneur d’avoir intégré le Collège culinaire de France en tant que producteur-artisan de qualité. Et puis la pratique s’améliore : Il y a six ans, Charles mettait 6 heures à découper un cochon, il ne met plus que 45 minutes, plaisante sa femme.
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Elle-même a mis le temps de sa convalescence à profit pour écrire un livre, qui est sorti le 11 mars dernier. Le sujet : la micro-ferme en agroécologie. Il y a trois parties : notre parcours, notre regard sur l’agriculture en France – la partie plus engagée – et enfin une partie guide, qui donne nos conseils d’installations, et communication. On parle de nos échecs aussi, parce qu’on ne se veut pas des marchands de rêve.
Il est possible de rencontrer la famille Durant sur plusieurs grandes foires bio de l’Hexagone. Nous souhaitons en faire une par mois. Nous avons vraiment l’envie de bouger un peu et de montrer notre beau pays à nos enfants.
La Microferme écologique, Lauriane et Charles Durant
Parution 2019, éditions Terran, 320 pages
Références
Ce livre est le récit d’une aventure personnelle : celle de Lauriane et Charles, qui ont décidé de devenir paysans. Mais c’est aussi une réflexion sur l’agriculture française et un guide d’installation.
Patrimoine : il faut sauver la villarde !
Catherine Duboucher, éleveuse et présidente de l’association de sauvegarde de la race villarde.
Il faut sauver la villarde !
La villarde a longtemps peuplé les pâturages du Vercors. Mais, dans les années 1970, cette vache montagnarde a bien failli disparaître. Aujourd’hui, des éleveurs passionnés relancent cette race mixte, réputée pour son lait et sa viande. Rencontre avec Catherine Duboucher, éleveuse et présidente de l’association de sauvegarde.
À l’approche de Catherine, trois vaches traversent leur champ à la hâte, suivies par leurs petits veaux. Grandes – plus d’1,40 mètres au garrot – et bien charpentées, le mufle rose, la robe couleur froment et les cornes en forme de lyre, elles ont fière allure. La Villarde est une bête reconnaissante, fidèle à son éleveur.C’est une race rustique, adaptée à un terrain accidenté. Ces vaches sont de bonnes marcheuses, explique Catherine Duboucher, éleveuse avec son compagnon Bernard Idelon à la Ferme des Villardes, à Izeron, en Isère.
Dès 1989, le couple commence à former un troupeau de vaches de Villard-de-Lans, aussi appelées villardes, dans ce village de plaine situé dans le périmètre du Parc naturel régional du Vercors.
À cette époque-là, ça ne courait pas les rues !, rit Catherine en parlant de cette race mixte, c’est-à-dire capable de produire du lait, mais aussi de la viande de bonne qualité, très goûteuse et persillée.
Vache en voie de disparition
Car la villarde a bien failli disparaître de la circulation.
Petit retour en arrière : cette vache est originaire des Quatre-Montagnes (Autrans, Méaudre, Lans-en-Vercors et Villard-de-Lans), au cœur plateau du Vercors. Elle fait partie d’une grande famille de vaches blondes, appelées comtoises et peuplant au XIXe siècle une bonne partie de la Franche-Comté et du sud- est de la France. Ses cousines, l’albanaise, la bressane ou encore la mezine, ont toutes aujourd’hui tiré leur révérence.
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En 1929, environ 15 000 villardes paissent tranquillement dans le massif du Vercors. Mais dans les années 1960, la chute des effectifs est brutale. Pourquoi donc ? Un document de l’Institut de l’élevage évoque des causes multiples : L’abandon de la traction animale, d’abord, puisque cette vache multitâche était aussi utilisée pour travailler dans les champs. Et puis aussi une prophylaxie [les mesures prises pour éviter des maladies, ndlr] agressive contre la tuberculose et la brucellose et la mise en place d’une politique locale de spécialisation des exploitations. En gros, il fallait produire plus, et donc privilégier la montbéliarde pour le lait et la blonde d’Aquitaine pour la viande.
La villarde souffre de n’être excessive en rien, bien que la réunion de toutes ses aptitudes en fasse précisément l’intérêt.
Une villarde produit en moyenne 3000 à 3500 kilos de lait par an (soit environ deux fois moins qu’une montbéliarde, par exemple), même si les “meilleures” peuvent monter jusqu’à 4500 kilos. Elle souffre de n’être excessive en rien, bien que la réunion de toutes ses aptitudes en fasse précisément l’intérêt. Elle est en bon état et satisfait des détenteurs éclairés qui savent reconnaître et apprécier son équilibre, son tempérament et la qualité de ses productions, signale encore la description de l’Institut de l’élevage.
Quoiqu’il en soit, dans les années 1970, il ne reste plus que quelques dizaines de villardes. En 1976, avec le soutien du ministère de l’Agriculture, plusieurs programmes sont lancés pour sauvegarder des races bovines en voie de disparition en France. Dans le Vercors, diverses actions de conservation sont organisées avec la poignée d’éleveurs restants (collecte des semences des derniers taureaux, création d’un “livre généalogique”…).
Le retour de la villarde
En 1996, la naissance de l’Association pour la sauvegarde et la relance de la race bovine Villard-de-Lans sur le Parc naturel régional du Vercors va accélérer la renaissance de la vache. Deux ans plus tard, les agriculteurs du plateau obtiennent l’AOC (Appellation d’origine contrôlée, qui deviendra AOP, Appellation d’origine protégée) pour le bleu du Vercors-Sassenage, un onctueux fromage à pâte persillée. Bonne nouvelle pour la villarde :en compagnie de la montbéliarde et de l’abondance, elle est inscrite comme race autorisée.
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Un nouveau cahier des charges, actuellement en cours de validation auprès de l’Union européenne, indique même que les éleveurs laitiers concernés devront avoir au minimum 3 % de bêtes de race de Villard-de-Lans, et au moins une vache par troupeau. Malgré les effectifs à la hausse, il manque encore une vingtaine de villardes pour atteindre cet objectif !
Catherine Duboucher aurait tout de même préféré un taux de 10 %, pour plus de cohérence. En effet, une partie de la communication autour du fromage local – et notamment au Salon de l’agriculture – porte sur la villarde ! En tous cas, il a fallu changer d’état d’esprit. Dans les familles, les parents qui ont éradiqué cette vache sont parfois encore là. Il y a une histoire. Ce n’est pas forcément facile de revenir en arrière, dit Catherine, qui préside l’association de sauvegarde depuis plus de dix ans.
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La viande, c’est comme le bon vin : il faut savoir en parler !
Circuits courts
En 2009, avec l’hérens et l’abondance, la villarde entre dans l’Organisme de sélection des races alpines réunies. Son rôle ? Rassembler toutes les données sur les animaux. Nous avons encore besoin d’un travail technique de recherche, sans séparer le rameau lait et le rameau viande, mais en travaillant sur les deux filières en même temps, affirme Catherine. L’éleveuse, dont l’exploitation est orientée sur la viande, ajoute : La viande, c’est comme le bon vin : il faut savoir en parler ! Nous allons bientôt démarrer un travail sur la viande pour démontrer sa typicité et mieux la mettre en avant.
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À Izeron, les villardes de Catherine sont principalement nourries de pâturage et de foin. L’été, elles montent en alpage.L’autre facette de la Ferme des Villardes, c’est la production et la transformation de noix et petits fruits. Les confitures et la viande sont vendues en circuits courts (magasins de producteurs, Ruche qui dit Oui !…). Quand on a commencé avec les villardes, il y trente ans, les gens disaient qu’on n’allait pas tenir. En circuit de vente traditionnel, on n’y serait pas arrivé.
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Sans les circuits courts, Catherine aurait eu plus de difficultés à vivre de son élevage.
Aujourd’hui, Catherine Duboucher élève des vaches de race Hérens et trente mères villardes, plus la suite c’est-à-dire les génisses de renouvellement d’élevage, soit environ 50 villardes en tout. Nous avons ici presque 10 % du cheptel français ! En effet, en 2018, 427 femelles villardes (dont 303 vaches adultes) sont inventoriées par l’Institut de l’élevage (contre 140 en 1981 !). À titre de comparaison, la France comptait 670 000 montbéliardes en production en 2016. On peut considérer que la race est sauvée. Mais cela peut vite rebasculer en cas de problème sanitaire…, affirme Catherine. Les documents de la PAC ou le ministère de l’Agriculture parlent encore clairement de race menacée d’abandon. Mais Catherine préfère utiliser le terme de race à faible effectif… Plus positif.
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Quelles belles démonstrations que ces deux exemples ! Bravo à ces gens dévoués ! Espérons que d’autres entreprises de ce type, nombreuses, verront le jour !
Magnifiques articles avec un retour à la véritable agriculture, celle qui respecte la nature, les animaux et les hommes.
Il faudrait faire une carte de France des éleveurs et des maraîchers patriotes qui font de la permaculture ou agrecologie.
Excellent sujet sur les races laitières , nous savons que tous ces corrompus de députailles européens , veulent la disparitions des races bovines françaises , pour nous faire « bouffer » de la viande poussée aux OGM et aux hormones et bourrer d’antibiotiques , avec leur saloperie de traité TAFTA et CETA , ils sont tous bon à être pendu haut et court !
Magnifique reportage qui sent bien la France d’autrefois avec des braves gens qui ne comptent pas leur temps et leur sueur , ce sont eux qui vont réamorcer l’avenir lorsque tout va s’écrouler dans notre monde fait de merde et de fric. Oui ce monde géré par des imbéciles qui n’ont rien compris que lorsque la pétrole sera arrivé a sa dernière goutte ils seront tous a poils car contrairement aux idées reçues ce n’est pas la science qui va sauver le monde mais le bon sens et la modestie en allant rechercher ce qui se faisait avant le pétrole .Un ancien ministre écolo a déclaré récemment en direction des gens calmez vous ce n’est pas avec des éoliennes que vous irez sur Mars , tout était dit !