Témoignage d’un ancien médecin du 3ème R.P.I.Ma : utilisation de la chloroquine

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Chloroquine, je t’aime moi non plus…

Par philippe PAUX, médecin à Carcassonne, ancien médecin du 3ème R.P.I.Ma

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J’ai une longue histoire d’amour et de haine avec la Chloroquine. Elle débute dans les années 1981, sur les bancs de l’Institut de Médecine Tropicale du Service des Armées, le Pharo à Marseille. Cet institut est pour moi le parangon des écoles de formation à l’exercice de la médecine tropicale. Pendant un an, c’est le dur apprentissage de toutes les maladies exotiques, les soins de santé primaire, l’épidémiologie, la chirurgie d’urgence, la chirurgie de la lèpre, avec à l’issue un concours très sélectif.

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Le paludisme est l’un des sujets les plus étudiés, il est vrai, que la maladie est bien connue dans cette école de santé militaire, le découvreur du parasite et prix Nobel étant l’illustre médecin militaire Alphonse Laveran.

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Très indiscipliné, un peu blagueur, j’étais dans le collimateur d’un des professeurs de médecine tropicale et bien sûr le jour du grand oral, il m’interroge sur un sujet tortueux et improbable. Je m’en souviens encore, car ma note injuste et vengeresse de 5 sur 20 m’avait profondément humiliée. « Action protéolytique de la Chloroquine au niveau intra-érythrocytaire sur plasmodium falciparum » – excusez du peu. Ma carrière de médecin tropicaliste commençait à peine et la chloroquine m’avait déjà fait mal.

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C’est lors d’une mission en tant que médecin du fleuve Maroni en Guyane que je rencontre pour la première fois Dame Chloroquine. Notre rencontre fut catastrophique, non pas sur le plan physique, car finalement d’un aspect classique, un peu pâle peut-être et à la rondeur maigrichonne, mais alors son goût, quelle merde !
C’est une expérience inoubliable d’avoir en bouche Dame Chloroquine, tant son goût est immonde, certainement le plus horrible que j’ai eu la malchance de rencontrer, son amertume caustique et sa saveur acerbe mériteraient le déclassement immédiat des trois étoiles de notre ami Goujon à Fontjoncouse et la prison pour attentat à la saveur. J’ai mis plusieurs années à comprendre pourquoi cette saveur immonde, pouacre et nauséeuse faisait fuir le commun des mortels : empêcher son absorption en plus grande quantité, car Dame Chloroquine tue et assassine quand elle est avalée en excès.

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C’est aussi une expérience inoubliable d’avoir à soigner, traiter et soulager fièvre et sueur, frissonnement et frémissement, tremblement et tressaillement avec quelques comprimés de Dame Chloroquine que l’on nommera maintenant de son vrai nom Nivaquine, un nom plus féminin et donc plus doux. Médicament miracle du « grand sorcier blanc », il l’a été alors, et à Apatou, à Gran Santi, à Maripasoula, à Saul, les tribus d’indiens Wayanas ou Emerillons, les « Noirs Marrons » du Surinam n’avaient d’yeux, non pas pour le Doliprane, non pas pour le Lexomil, mais simplement, que pour le cachet magique du « grand sorcier blanc » que j’étais alors.
Une transpiration frissonnante et frémissante et, vite, un traitement de 5 comprimés, cinq jours de Nivaquine et fini les maux insupportables dans les suites immédiates. Quelques mois de pirogues sur les eaux tumultueuses du fleuve tempétueux à distribuer ces presque bonbons blancs ont marqué mon début d’un amour sans fin pour ce que qu’ils avaient : un pouvoir miraculeux sur les hommes tremblant en chaud inconforts pour certain ou malédiction tremblante du Dieu Nature pour les autres.

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L’histoire continue sur un autre continent. La belle et imprévisible Afrique, où pendant plusieurs années le « grand sorcier blanc » va sévir en Côte d’Ivoire et constater toujours le pouvoir magique de Mme Nivaquine. Hélas, une diminution de ses capacités à détruire le méchant parasite, transmis par un méchant moustique femelle buvant le sang des hommes afin de nourrir ses œufs, apparaît. Dame nature qui n’a jamais aimé la contradiction et jalousant certainement un succès qu’elle jugeait immérité va tout faire pour casser le pouvoir prodigieux et prestigieux de Mme Nivaquine. C’est ainsi que nous assistons au mariage de Dame Chloroquine et de Sieur Proguanil, s’appelant maintenant et communément Savarine. A deux, il est plus facile de lutter contre ce méchant parasite qui tue toujours et anéanti encore.
Néanmoins, Mme Nivaquine exerce toujours une immense emprise sur les peuples ivoiriens, Baoulé ou Bété, Sénoufo ou Malinké, Dan ou Dida, et beaucoup d’autres peuples. Elle sert d’ailleurs souvent d’échange coutumier ou de monnaie, tant au marché de Bouaké ou de Korhogo que sur les contrôles policier ou douanier « Bakchich ou plutôt don charitable pour ne pas dire corruption ».

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Mais Dame Chloroquine, je t’aime moi non plus, car tu tues aussi, tu butes, tu fusilles, car poison tu es et poison tu resteras. Combien sommes-nous médecins tropicaux ou sous les tropiques à avoir constaté intoxications mortelles volontaires ou accidentelles à la tant aimée Nivaquine. J’ai toujours en mémoire cette enseignante, jolie dame à la quarantaine enjouée, sereine et épanouie, qui par un geste d’appel à une souffrance de cœur, a avalé une dizaine de comprimés, comme elle aurait pris une dizaine de Lexomil. Sa fin fatale sous mes yeux attristés en regard des siens implorant son sauvetage, puis mes mains massant son cœur arrêté par la faute de Dame Chloroquine m’ont terriblement touché. Dame Chloroquine je t’ai haïe alors.

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Les années passent et les missions en Afrique perdurent et du Tchad au Gabon, du Congo au Mali de la Centre-Afrique au Sénégal, du Burkina au Cameroun, le pouvoir de Dame Chloroquine est toujours intact pour leurs peuples pauvres et disetteux et combien de fois le « grand sorcier blanc » d’une main généreuse et un peu voleuse de l’état français distribuait de sa propre dotation le cachet miracle, comme les publicitaires du Tour de France distribuent les gadgets pour les enfants et les grands enfants.
Médecine généreuse sans aucune efficacité sur les formes graves de paludisme tant la résistance à la Chloroquine en Afrique est grande, je l’ai pratiqué année après année et je continue à penser que la Chloroquine par son prix dérisoire a aidé des millions d’êtres humains à se protéger d’une maladie loin d’être plus meurtrière et assassine que notre CoVID -19 (220 millions de malades et 400 000 morts par an), mais cela est une autre histoire.

Maintenant en ces jours difficiles, un nouveau combat débute contre une force terriblement folle, insidieuse et cauteleuse. Contrairement au paludisme qui est une maladie transmise par un ennemi visible, le moustique se prénommant Anophèle, injectant un parasite le plasmodium, l’infection à COVID-19 est particulièrement perfide et insidieuse. Son virus est transporté et diffusé par quelques milliers de minuscules gouttelettes de salive que l’on nomme Flügge, nom aussi barbare que le virus qu’elles transportent. Celles-ci se déposent partout et dès qu’elles pénètrent à travers les voies aériennes nez, bouche et œil (par le canal au doux nom de lacrymonasal), les poumons vont se défendre corps et âme contre cet hôte indésirable, car terriblement agressif sur ses alvéoles.

Et alors, et alors? Hé, Hé la chloroquine est arrivée éée!
Non elle est plutôt revenue.
Que de débats, de positions, de bla-bla sur Dame Chloroquine.

Et voilà que revient un nom, le Professeur Didier Raoult.

Je le connais un peu depuis longtemps (1981) et de loin car croisé lors de nos études en médecine tropicale à Marseille. Puis quelques cas de rickettsioses dans les suites de ma carrière m’ont mis en rapport avec lui. Par la suite, j’ai toujours suivi intellectuellement sa carrière, formidable au demeurant, son curriculum par ses publications est probablement le plus imposant en quantité de la vie médicale. Je l’ai suivi ces dernières années par ses articles sur le journal Le Point et ses prises de position à l’encontre de beaucoup d’idées reçues comme l’utilisation à contre-courant des antibiotiques à titre systématique, son doute affirmé devant le réchauffement climatique et ses conséquences, voilà ses deux plus connus contrepieds à la « Neymar ». J’ai été aussi très heureux que ma fille fasse son internat dans son service à la Timone et ait comme meilleures amies ses proches collaboratrices.

Un seul mot sur lui, « Grand sorcier blanc »: « atypique » point à la ligne.
Et alors, et alors : que faut-il en penser de Dame Chloroquine?
Il ne faudra pas s’étonner que des dizaines d’années de médecine de guerre et de médecine tropicale m’ont convaincu que le maitre mot dans ce type d’hécatombe mortelle et funeste est le pragmatisme. OUI à l’utilisation de la chloroquine sous COUVERTURE SPECIALISEE.

OUI, Il faut donner la CHLOROQUINE au bon moment, jamais tout de suite. Car sa fonction anti-inflammatoire est préjudiciable en début d’infection (action sur les cytokinine et l’interféron). Laissons donc nos propres défenses immunitaires gagner le combat. Mais à partir du moment où elles sont dépassées, là où l’inflammation explose et dépasse sa simple fonction de défense, il faut agir. C’est au moment où les premiers signes d’atteinte pulmonaire au scanner apparaissent, que l’on peut (doit?) donner cette ancienne potion magique. Ceci découle du plus simple pragmatisme en période de guerre et d’extrême urgence sociétale. C’est celui du petit « grand sorcier blanc » retrouvé.

A titre personnel, comme beaucoup de médecins, je suis paré à me traiter dès les premiers signes objectifs d’atteinte pneumonique, mais pas avant. JAMAIS à TITRE PREVENTIF au moindre rhume, toux ou fièvre.

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Voilà la position d’un médecin de terrain, d’un petit gradé dans la hiérarchie de la médecine exerçant loin des salons feutrés où la médecine se chuchote et a besoin de multiples et complexes ordinateurs, longues études étendues et courbes diverses. J’ai appris de Mopti à Bobo-Dioulasso, de Grand Bassam à Bouaké, de Korhogo à Brazzaville, de Bangui à Ndjamena, de Moundou à Bardai, de Tchibanga à Maripasoula, de Camopi à Grand Santi, et de mon petit cabinet de Carcassonne, que Dame Chloroquine à dose adaptée n’est pas dangereuse et pourquoi pas, comme mon illustre Maître et Confrère Didier Raoult, l’utiliser à bon escient, au bon moment, à la bonne dose et sous la surveillance de spécialistes.
Dame Chloroquine, je t’aime aujourd’hui et je t’aimerai peut-être à l’infini, l’avenir proche, nous le dira….
Fermer le ban

Le Doc en mode combat

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PS/ Pour mes amis consœurs, confrères mieux vaut utiliser la forme d’hydroxychloroquine (Plaquenil) que la chloroquine brute (Nivaquine), car plus active sur l’inflammation. La chloroquine et l’hydroxychloroquine bloquent les réponses lymphocytaires T à la stimulation induite par les mitogènes et inhibent la production de certaines cytokines, d’interféron α et de facteur de nécrose tumorale (TNFα). Est-ce pour cela qu’elles pourraient être efficaces sur ce tsunami sanitaire ? J’aurais aimé poser cette question à celui qui m’a humilié d’un 5 sur 20, il y a de nombreuses années….
P.s. : Pour mes amis des Troupes de Marine et de la Légion, vous avez certainement vu le clin d’œil à nos missions Maroni sur la photo avec « un ti décolage, la ti-la goute, le pété pied », seule la qualité du rhum a changé.

Source : https://danielbaoule.skyrock.com/3331331840-posted-on-2020-03-28.html

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11 Commentaires

  1. Je ne comprends pas cette agitation autour de la quinine. Dans les années 1950, au Congo, chaque soir nous prenions notre dose de quinine, ensuite nous avons eu la nivaquine et personne n’en est mort. Il y a même une réplique dans le film Out of Africa où un des personnages demande à Karen Blixen « Vous prenez votre quinine ? » .. tellement c’est classique …

  2. En tant qu’ancien militaire ,jaie comme tout le monde avalé tous les jours mon cachet de « nivaquine « .Mais a notre retour en France nous constations tous que nous avions des pertes de mémoire (immédiate),nous étions couverts de piqures de moustics des pieds a la tète.et pour certains la maladie (Paludisme),se déclarait 15 ans aorès étre rentré en France alors qu’en afrique ils ne l’avaient pas attrappé.Conclusion avec ou sans cachets notre organisme se défend !
    Mais le remède n’est-il pas plus dangereux que la maladie!
    Regardez tous les ans ce vaccin que l’on nous présente contre la grippe et qui s’avère encore une fois a coté de la plaque!!!ce n’est pas la bonne souche vous dirpnt’ils !Alors pourquoi continuer ce vaccin ridicule a grande publicité qui ne sert a rien!!

  3. J’ai le même parcours mais sur le plan professionnel .J’ai parcouru l’A.O.F ( pour faire râler les anticolonialistes) pendant près de 40 ans.Au début c’était nivaquine tous les matins ( gout infect) mais avec un peu d’eau le cachet passait très bien effet secondaire néant. Puis il y a eu la chloroquine que l’on prenait qu’une fois par semaine cachet le triple de la nivaquine même gout même verre d’eau effet secondaire ,( j’ai 78 ans j’attends toujours ) je n’ai jamais dépassé les doses prescrites 1 cachet par semaine , résultat de temps en temps un peu de palud mais infime , montée de la température transpiration fatigue le tout durant deux à 3 heures et c’est tout. Alors personne ne parle de la nivaquine à prendre 15 jours avant son départ en afrique et 1 mois après son retour.. Je ne sais pas combien ça coute maintenant mais à l’époque c’était le tube de 100 comprimés pour 5 francs., et sans ordonnance.Voila ma petite expérience .

    • Bravo a rellement conseiller
      Merci à nos chercheurs et honte à ceux qui se croie superieurs

  4. Coronavirus : Des médecins du Lot en colère après avoir reçu des masques de l’État vieux de 19 ans et inutilisables
    Des médecins libéraux de Figeac dans le Lot ont fait part de leur mécontentement après avoir reçu de la part de l’État, des masques datant de… 2001. Ces derniers sont totalement inutilisables.
    https://actu17.fr/coronavirus-des-medecins-du-lot-en-colere-apres-avoir-recu-des-masques-de-letat-vieux-de-19-ans-et-inutilisables/

    • Ça vous étonne ? Le gouvernement en est à faire les poubelles pour masquer son incompétence.

    • c’est l’Afrique, mon ami, c’est l’ Afrique ! Figeac ! ça n’intéresse pas le pouvoir qui voit loin, si loin ….

      au final, ils seront mieux traités que nous sur le continent africain avec toute l’aide exigée par l’ONU

  5. Excellent témoignage, qui nous indique que la « guerre » contre le COVID 19 peut-être gagnée, comme le répète le professeur Raoult. Merci docteur !

  6. merci pour cet article ; c’était bien clair pour moi, de la façon dont elle devait être donné , c’est à dire avec une surveillance particulière en milieu hospitalier ! c’est ce que disait Le Prof Raoult depuis le début ! Alors les médecins qui revendiquent de pouvoir la donner, évidemment je ne sais pas (enfin si je sais par rapport à tout ce qui a été dit ) , mais voilà un médecin traitant est il en capacité de surveiller son malade tout le temps , il me semble que non ! ce n’est que mon avis !

  7. « C’est au moment où les premiers signes d’atteinte pulmonaire au scanner apparaissent »
    Encore faut-il que le commun des mortels ait accès à un scanner.
    Parce que jusqu’à présent, comme pour le test, il n’a lieu que quand le patient est mourant.

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