Petit repère historique pour commencer : le 30 janvier 1943, soit 10 ans jour pour jour après la prise de pouvoir d’Hitler, Dönitz est nommé amiral de la Kriegsmarine en remplacement de Raeder.
Pour cette deuxième et dernière partie, nous suivrons les destins des U-505, U-995 et U-96.
La première partie est ici :
U-505 : on a toujours besoin d’un U-Boot chez soi !
On l’avait surnommé « Dan », le capitaine de vaisseau D.V. Gallery, commandant du Task Group 21.12, composé des navires de l’U.S. Navy suivants : le nouveau porte-avions d’escorte Guadalcanal et des destroyers d’escorte Pillsburg, Pope, Chatelain, Flaherty, Jenks. Dans la nuit du 8 au 9 avril 1944, les aviateurs américains repèrent un sous-marin en surface. Bien que l’U-Boot se dérobe en plongée, les aviateurs le retrouvent à 6h04 le 9 avril. Commence le processus habituel : poursuite, lancer de grenades sous-marines et de charges profondes. Un peu après 11 heures, l’U-515 (commandant de vaisseau Werner Henke) coulait. 37 hommes et la totalité des officiers furent tirés de l’eau. Prisonnier à bord du Guadalcanal, Henke aurait déclaré à Gallery : « Vous avez fait prisonnier un commandant décoré de la Croix de Fer avec feuilles de chêne, pourquoi ne faites-vous pas prisonnier un sous-marin entier ? »
Cela faisait longtemps que cette idée trottait dans la tête de Gallery. Le 4 juin 1944, Gallery et ses hommes ont eu la surprise de voir un U-Boot surgir sous leur nez ! C’était l’U-505.
Cela faisait deux jours que l’U-505, repéré par les navires de Gallery, avait plongé, pensant que les ennemis perdraient le contact, mais il n’en fut rien. À bord du sous-marin, l’air se viciait, plusieurs hommes éprouvaient des malaises. La situation empirait de minute en minute, les nerfs de certains hommes étaient à bout, d’autres membres de l’équipage, intoxiqués par l’oxyde de carbone, manœuvraient les appareils comme des somnambules. Rester en plongée n’était plus possible. Le commandant Lange décida d’attaquer, et voici le témoignage d’un des matelots :
« Le commandant fit prendre à son sous-marin la position la meilleure pour lancer ses torpilles. À ce moment, j’étais assis entre les deux tubes lance-torpilles de l’arrière, paré à faire feu. J’entendais Lange qui donnait des ordres par le téléphone, alors qu’on hissait le périscope de combat. Je savais que que ce combat serait le plus dur que nous aurions jamais livré. Les minutes paraissaient durer des éternités. Soudain, j’entendis le fracas des charges profondes qui éclataient à proximité. Le commandant cria :
» Los ! (feu !)
« Je lançais la torpille du tube tribord. Mais l’enfer éclata au-dessus de nous. Les explosions se succédaient de plus en plus proches derrière notre coque si frêle. Plus de lumière. L’U-505 s’enfonçait. Tous les appareils, y compris les gouvernails étaient hors d’état de fonctionner ou détruits. Nous descendions de plus en plus profondément et vite, très vite. C’était la fin.
« Anblasen ! (La pression aux ballasts !) cria notre commandant.
« Dieu merci ! L’air comprimé put encore remplir son rôle et brutalement le sous-marin fit surface. Faisant feu de toutes leurs mitrailleuses, des avions nous survolaient. Notre commandant fut blessé, un matelot tué. Un des derniers, je sautai à l’eau. Durant deux heures, je nageai avant de pouvoir être sauvé par un destroyer américain ».
(Texte tiré du livre de Léonce Peillard, « La bataille de l’Atlantique »).
Gouvernail bloqué et moteurs électriques en marche, le sous-marin tournait en rond. Au bout d’innombrables péripéties, un équipage américain réussit à prendre le contrôle du submersible. Il fut remorqué jusqu’au Bermudes qu’il atteignit le 19 juin. Aujourd’hui l’U-505 est exposé à Chicago, ville natale de Gallery.
L’U-505 est un sous-marin de type IX C mis en service le 26 août 1941.
La (très) longue carrière de l’U-995
L’U-995 est un sous-marin de type VIIC mis en service le 16 septembre 1943. Pendant le second conflit mondial, il va effectuer neuf missions, la dernière se déroulant du 2 février au 6 mars 1945, dans l’Arctique. Le 8 mai 1945, il est désarmé, saisi par le Royaume-Uni qui l’offre à la Norvège qui va l’utiliser comme navire-école (ainsi il échappe à la destruction opérée par les Britanniques des U-Boote saisis. L’U-505 aurait dû faire partie du lot, mais Gallery fit valoir qu’il avait été capturé et non remis à la fin de la guerre).
Le premier décembre 1952, l’U-995 prend le nom de Kaura dans la marine royale norvégienne. Il est de nouveau désarmé en octobre 1965. Le dernier commandant de l’U-995, Hans-Georg Hess fait tout pour que le bâtiment intègre la Bundesmarine, mais sans succès. Le 25 septembre 1970, le submersible arrive à Kiel pour des réparations et une restauration qui s’achèveront le premier octobre 1971. Le 13 mars 1972, l’U-995 est envoyé au mémorial de la marine à Laboe pour devenir un navire-musée que j’ai visité…il y a longtemps !
Le U-96, star du petit et du grand écran
Dans l’ouvrage de Léonce Peillard que j’ai évoqué plus haut, l’U-96 est juste mentionné sans plus de détail ! LU-96 fut mis en service le 14 septembre 1940. Son commandant, Heinrich Lehmann-Willenbrock a coulé dans un bref laps de temps 125 580 tonneaux de navires ennemis. Durant l’année 1941, lors de sa septième patrouille l’U-96 accueille un correspondant de guerre, Lothar-Günther Buchheim, Il doit photographier et décrire la vie à bord pour des raisons de propagande. C’est en 1975 que ce correspondant de guerre écrit Das Boot, qui sera diffusé sous forme de série télévisée à la télévision. La série sera adaptée en film. Je peux affirmer sans hésitation que ce film de 1981 est le meilleur qui ait jamais été réalisé sur la guerre sous-marine. Même si les noms des personnages sont fictifs, les torpillages, grenadages, le passage avorté du détroit de Gibraltar, la rencontre fortuite par gros temps avec l’U-572 (il a évité la collision de peu), tout cela s’est réellement produit.
Ce qui est inexact, en revanche, outre les noms des personnages (le correspondant de guerre est cependant représenté), c’est d’une part que l’U-96 n’était pas basé à La Rochelle, mais à Saint-Nazaire. Il n’a pas été coulé au retour de mission mais le 30 mars 1945 par des bombes américaines dans le port de Willelmshaven. Durant toute sa carrière, l’U-96 n’a déploré la perte d’aucun marin. Ce qui fait la force du film de Wolfgang Petersen, c’est le soin accordé aux détails, tout est scrupuleusement conforme à la réalité, l’exiguïté du bateau, les marins barbus car impossible de pouvoir tous se raser, les torpillages en surface, la terreur des sous-mariniers lors des grenadages. Ce film est infiniment supérieur à tous ceux qui ont traité le sujet, comme U-571 et surtout comme la série supposée être la suite. C’est comme le covid : on confond « personnes mortes du covid et personnes mortes avec le covid », c’est la même chose pour Das Boot (1981) et la série Das Boot de 2018. Le premier est un film de guerre, le second une série avec la guerre, à fuir tant les invraisemblances et les erreurs historiques pullulent. Une version longue de Das Boot est d’ailleurs disponible en DVD et Blu-ray. Je vous le conseille !
Je vous propose pour terminer trois vidéos évoquant ce film, d’abord la version techno :
https://www.youtube.com/watch?v=MlwqOVnXuc4
La remise en route des moteurs après un grenadage sévère :
https://www.youtube.com/watch?v=HUInWKK8ROc
La bande originale du film :
https://www.youtube.com/watch?v=Qxx_heoUO-U
Et s’il est vrai que tout finit en chanson, une scène étonnante, le pacha (casquette blanche) qui demande de la musique, dans un premier temps le nazi de service (le seul qui sera toujours bien rasé), là pour la propagande, préfère quitter la table, il revient peu après et se fait charrier par son commandant. Sous le portrait de Dönitz : le correspondant de guerre.
https://www.youtube.com/watch?v=xYA7YVPCfww
En annexe, les caractéristiques des principaux U-Boote de la Kriegsmarine. Lorsque je n’étais pas sûr des mes informations, ou qu’elle étaient manquantes, j’ai noté « NC ».
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Depuis longtemps, j’ai le désir de faire un article sur le sabordage de la flotte de Toulon. D’abord parce que j’habite à 20 minutes de Toulon, et parce que c’est un acte absolument inouï que de saborder toute une flotte militaire moderne.
Je brûle d’envie de rédiger un tel article, et, je t’en donne l’info avant que tous les médias français n’en parlent 😊, je vais bientôt le faire.
c’est une excellente idée en effet, ça a été une monstruosité dans la droite ligne de la reddition de la France aux mains de pétain.
POST 2 SUR 2
Mon article cité dans la première réponse sur les deux (https://resistancerepublicaine.com/2020/10/23/mers-el-kebir-churchill-salaud-ou-heros/) avait fait l’objet de discussions passionnantes avec d’autres amis patriotes, dont certains ne partageaient pas mon article suscité, notamment Moktar. Ce dernier n’a pas perdu beaucoup de temps puisqu’il a publié sur RR, le lendemain même de mon article (!) un article manifestant son désaccord avec ton serviteur que tu peux lire en cliquant sur le lien suivant :
https://resistancerepublicaine.com/2020/10/24/jaccuse-de-gaulle-dincitation-a-la-destruction-de-la-flotte-francaise-a-mers-el-kebir/
En fait mon ami Moktar n’a rien écrit du tout, car il explique dès le début qu’il retransmet un article qui avait été écrit par Manuel Gomez – ex-journaliste écho d’Alger; écrivain-historien. Ce qui change tout.
En effet, j’ai lu beaucoup d’articles écrits par Manuel Gomez sur de nombreux sites (principalement Dreuz) et je connais bien cet homme par ses articles. Il faut savoir qu’il voue une haine cosmique contre De Gaulle. De Gaulle lui fait pousser des boutons rien qu’à entendre son nom. Il passe ses années à vouloir démolir De Gaulle de tous les côtés en essayant de démontrer que ledit De Gaulle n’a strictement absolument rien fait de bon de sa vie, mais n’a fait que des choses scandaleuses, honteuses, et inacceptable.
Voilà l’avis de Monsieur Gomez sur le général De Gaulle. À partir de cela, on se pose de sérieuses questions sur l’objectivité de cet homme lorsqu’il écrit des articles sur De Gaulle.
Et enfin, je t’invite à lire mon post que j’avais écrit dans le forum suivant l’article de Monsieur Gomez répercuté sur RR par mon ami Moktar que tu trouveras en première position suite audit article ou bien, pour y arriver immédiatement, en cliquant sur le lien ci-dessous :
https://resistancerepublicaine.com/2020/10/24/jaccuse-de-gaulle-dincitation-a-la-destruction-de-la-flotte-francaise-a-mers-el-kebir/#comment-442405
POST 1 SUR 2
Avec un peu de retard, ami patriote Filoxe, je viens de lire tes deux articles sur les U-Boote.
C’est un sujet original et absolument passionnant. Tu dis que tu es un passionné par le second conflit mondial, et je le suis également. De plus, pendant très longtemps je ne m’intéressais pas beaucoup au premier conflit mondial, mais depuis une dizaine d’années je le trouve tout aussi passionnant que le deuxième conflit mondial. Entre les deux les mentalités, les matériels, la logique des ordres, la société ont beaucoup changé. Je m’intéresse donc beaucoup à chacun d’entre eux en tenant compte de l’époque où ils se sont déroulés.
Tes deux articles sur le point précis des U-Boote sont tout à fait passionnants. Merci de m’avoir appris beaucoup de choses, comme d’autres lecteurs patriotes je suppose.
Et comme d’habitude félicitations pour la qualité de tes articles et l’iconographie qui les accompagne.
Enfin, pour terminer cette première partie de réponse sur les deux, comme dit ci-dessus étant passionné par le second conflit tout comme toi, j’ai écrit dans RR évidemment, en date du 23/10/2020 un article intitulé « Mers el-Kébir : Churchill salaud ou héros ? » que tu peux lire en cliquant sur le lien ci-dessous :
https://resistancerepublicaine.com/2020/10/23/mers-el-kebir-churchill-salaud-ou-heros/
Au début de la guerre, sous-marinier était un boulot prestigieux et assez peut risqué. Mais quand les alliés ont disposé de l’ASDIC et percé le mystère de l’ENIGMA, il fallait vraiment être courageux ou inconscient pour faire ce métier : dans le tableau on peut voir que 492 VIIC ont été coulés sur 654 construits – plus de 75% ! 3 chances sur 4 d’y rester…
@ Filoxe. J’ai lu énormément de livres sur le sujet, écris par des commandants de sous-marin qui ont vécu cette période. Mais le plus haletant que je recommande vivement est celui intitulé « Dix huit secondes pour survivre » du commandant Werner Herbert. Dans son dernier article de modélisme, l’Oncle John vous montre une image de l’U 505 produit par le fabricant Aurora:https://resistancerepublicaine.com/2022/01/31/quelques-chefs-doeuvre-de-modelisme-plastique/
Le film « Das Boot » est à la mer ce que « la bataille d’Angleterre » est au ciel, le meilleur produit à ce jour sur ces sujets. J’ai aussi eu la chance de visiter l’U 995 à Laboe. Ce site et son extraordinaire musée de la marine allemande vaut largement le détour. Il me reste à construire l’U 505, superbe maquette produite en son temps par Aurora et qui dort dans ma « cave » à grands crus …
Il y a eu des essais sous-marins de dernière génération fonctionnant au peroxyde d’azote, mais c’était trop tard pour changer le cours de la guerre!