Le concert du mois : Antonin Dvořák

Dès sa naissance, Antonin (ou Anton) Dvořák a été béni des dieux, puisque, comme votre serviteur, il a vu le jour un 8 septembre. Certes il y a 110 ans d’écart entre les deux naissances, mais on ne va pas se prendre la tête pour ces vétilles. C’est donc dans la petite ville tchèque Nelahozeves située le long de la Vltava (ou Moldau) que Dvořák est venu au monde. Comme à l’accoutumée, je ne vais pas me lancer dans une biographie fastidieuse de ce contemporain de Smetana (Wikipédia fera ça très bien). Comme à l’habitude, on va commencer par une ouverture, Carnaval, composée en 1891, qui fait partie d’une trilogie Nature, Vie, Amour. La première des trois est Dans la nature, puis Carnaval, et enfin Othello. Dans la partie plus lente de l’ouverture, on pourra entendre un magnifique solo de cor anglais, instrument mis en valeur dans la dernière des symphonies.

Autre tube de Dvořák, son Concerto pour violoncelle écrit durant l’hiver 1895 lors du séjour du compositeur aux États-Unis.  Dvořák avait déjà écrit un concerto pour cet instrument, mais sans jamais l’orchestrer. Le concerto pour violoncelle est le plus abouti des deux autres (concerto pour piano et concerto pour violon) et incontestablement la plus belle œuvre écrite pour cet instrument. Certes, des méchantes gens vont vous affirmer (je l’ai réellement entendu !) que ce n’est pas très difficile, vu le peu de concertos composés pour le violoncelle ! Si on part de Beethoven, on trouve un Triple concerto pour piano, violon et violoncelle, chez Schumann un concerto pour cet instrument, chez Brahms un Double concerto pour violon et violoncelle. Chez Saint-Saëns on trouve deux concertos, chez Tchaïkovski Les variations Rococo pour violoncelle et orchestre…pas du meilleur Tchaïkovski, à mon goût. Chostakovitch, deux concertos, bien sûr dans la musique contemporaine il en existe d’autres, mais jamais autant que pour le piano ou pour le violon.

Maintenant place à la musique avec une petite remarque ; vous allez entendre un extrait du Requiem allemand de Brahms et un extrait du premier mouvement du concerto, vous ne trouvez pas que ça se ressemble ?

Je vais vous proposer une version du concerto avec deux monstres sacrés : Mstislav Rostropovitch et Carlo Maria Giulini, difficile de trouver mieux !

Dvořák séjourna aux États-Unis de 1892 à 1896, il ramena de cette période Le quatuor américain, La suite américaine et La symphonie du Nouveau Monde écrite entre janvier et mai 1893. Elle sera créée le 16 décembre 1893 au Carnegie Hall de New York. Contrairement à une idée assez répandue, Dvořák n’utilisa aucune mélodie indienne. Accessoirement, une question demeure : Dvořák a-t-il été frappé de la malédiction de la neuvième comme Beethoven, Schubert, Bruckner et Mahler ? Question existentielle ! À présent, je vais vous proposer une version de la symphonie que je ne prétends pas être la meilleure, mais les interprétations ne manquent pas et il a bien fallu choisir. Un des critères pour cela est le suivant :

Vous pouvez remarquer qu’à la mesure 24 il y a une barre de reprise ; la fin de celle-ci se situe à la mesure 180 (les petits points sont situés à gauche et non pas à droite), ce qui signifie que l’orchestre doit revenir à 24 et d’ailleurs de 177 à 180 on voit “1”, donc au “deuxième passage” il y a une différence qui permet la transition avec ce qui suit, le développement. Or un certain nombre de chefs ignorent purement et simplement cette indication et parmi eux Karajan lui-même ! (de toutes façons il ne fait jamais les reprises, même avec les autres compositeurs). Autre critère de choix, l’année d’interprétation : 2021 est absolument exclu, en raison des muselières imposées aux interprètes. C’est donc le chef letton Andris Nelsons que nous allons trouver à la tête de la l’orchestre symphonique de la Radio Bavaroise.

LES DANSES SLAVES

L’écriture des Danses slaves a été suggérée à Dvořák par l’éditeur Simrock qui avait déjà publié les 21 Danses hongroises de Brahms…et cela avait rapporté beaucoup d’argent ! Dvořák se mit à l’ouvrage et commença par un premier recueil de huit danses, opus 46 en 1878. 8 ans plus tard, mais non sans hésitations, Dvořák publia un autre recueil de huit danses, opus 72. Initialement écrites pour piano à quatre mains, elles furent orchestrées par le compositeur. Je vais vous faire écouter la danse numéro six, opus 46, Sousedská dans les deux versions :

Les deux liens suivants vous permettront de vous familiariser avec la version piano à quatre mains :

À présent la version pour orchestre, une version de référence ! Le Royal Philharmonic Orchestra dirigé par Antal Dorati ! C’est son troisième enregistrement après ceux avec les orchestres de Minneapolis et de Bamberg (je possède les trois, of course, plus la version de George Szell et naturellement celle pour piano à quatre mains !)

Et, pour terminer, La suite américaine :

J’aurai l’occasion de revenir sur Dvořák, car sa musique me touche particulièrement, elle sent la terre de Bohême (comme Smetana, mais l’œuvre de Dvořák est plus riche en terme de compositions).

Filoxe

Un petit cadeau ? la partition complète de la Symphonie du Nouveau Monde :

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17 Commentaires

  1. Filoxe,
    ado j’ai été bercé à la Moldau. Ma mère se faisait le plaisir de passer ce disque le samedi (le jour où elle ne travaillait pas) sur l’électrophone familial.
    60 ans plus tard on n’oublie pas, 60 ans plus tard ce bonheur résonne toujours dans ma tête.

    Bon, sur ce, je vais maintenant lire ton article qui ne peut être que passionnant 👍.

    • Merci, sais-tu qu’il y a des transcriptions de la Moldau pour piano, pour orgue et même pour harpe ? Quand on connaît bien l’œuvre originale, c’est intéressant d’essayer de retrouver le son de l’orchestre dans ces transcriptions.

  2. Merci pour cet excellent billet mais un conseil il faut aussi découvrir la musique de Leos Janacek 1854-2928. Autre immense musicien tchèque. Oeuvres pour piano, opéras, musique de chambre…un morave humaniste d’une grande profondeur spirituelle et panthéiste. Musique qui peut surprendre mais l’entrée par l’opéra avec Jenufa, Katia Kabanova, …nous permet de découvrir un compositeur d’une grande modernité rythmique. Conseil :q la musique pour piano et en particulier”Sur un sentier recouvert” interprétation magnifique d’Aldo Ciccolini. Janacek a beaucoup œuvré à Brno lieu de naissance de Milan Kundera qui vient de décéder.

    • Bonjour Lohengrin moi ce qui me plait chez Janacek c’est “de la maison des morts” et “la petite renarde rusée”. Il y a tant de compositeurs tchèques très peu connus, un que j’aime beaucoup est Vitezslav Novak, si je trouve une oeuvre sur le net je mettrai un lien. A l’epoque on ne trouvait ces disques d’import que chez Supraphon, mais depuis les téléchargements pirates et bien souvent pourris, les éditeurs et distributeurs abandonnent la partie.

    • Merci Filoxe pour vos articles !
      J’adore Janacek moi aussi, Jenufa surtout, et son oeuvre pour piano. Dans les Brumes (que je m’acharne à travailler) et sa sonate X 1905. Puissance dramatique et mélodies aux inflexions étranges d’Europe de l’Est, c’est une musique magnifique.

  3. Bonjour Filoxe. Merci pour ces concerts. Prochainement le concero pour violon avec I Perlmann ?

    • Très bonne idée j’ai trouvé le lien par contre c’est une image fixe…oui mais c’est aussi Perlman ! 🎻🎻

  4. Merci filoxe, la musique de Dvorak est souvent trop reduite à la symphonie du nouveau monde et le concerto pour violoncelle, en parlant de violoncelle, les concertos sont bien plus nombreux dans la musique baroque. Une petite pièce très connue aussi qui s’appelle “humoresque”
    https://youtu.be/LR9msTsmpZs
    en espérant un nouveau volet concernant les pièces vocales et opera comme le très beau “Rusalka”

    • Votre commentaire est tout à fait pertinent. La musique de Dvorak est trop souvent réduite aux œuvres de cet article et c’est pour cela qu’il y aura une suite : ouverture “Dans la Nature”, “Concerto pour piano”, “Quatrième symphonie” et naturellement l’humoresque et très certainement la sérénade pour cordes.

    • Rusalka est en effet un opéra magnifique, surtout avec Renée Fleming ! L’ode à la Lune est un de ses chevaux de bataille ! On peut également citer le bouleversant Stabat Mater mais aussi un magnifique requiem auquel on ne pense pas assez souvent, focalisés sur les grosses machines de Mozart, Verdi et Fauré. Ci-dessous un extrait qui me donne des frissons chaque fois que je l’écoute !
      https://youtu.be/IqcaluyQVH0

  5. Bonjour @Filoxe ; merci pour cet article précieux et l’ensemble des autres.

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