Poursuivant son contrôle des libertés, le régime algérien, après un nouveau Code pénal controversé, soumet au parlement un projet de loi sur la procédure pénale qui concentre tous les pouvoirs judiciaires (enquête, instruction, inculpation, condamnation) entre les mains du procureur de la république, un grave précédent, inédit parmi les États membres de l’ONU.
Le mardi 22 avril courant, le ministre algérien de la Justice, Lotfi Boudjemaa, a divulgué la nouvelle architecture de la procédure pénale algérienne devant les députés de l’Assemblée populaire nationale.
En présentant d’abord les bénéfices supposés de cette réforme, le ministre a employé une approche subtile pour mieux dissimuler son intention véritable: accroître la pression qui entrave déjà toute expression libre en Algérie.
Selon lui, le nouveau texte est marqué par l’introduction de mesures alternatives en matière de poursuites pénales au profit des personnes morales accusées d’infractions financières. Il leur suffira désormais de rembourser l’argent détourné au Trésor public pour que ces poursuites soient levées, et ce, justifie le ministre de la Justice, dans l’intérêt de la protection des deniers publics et de l’économie du pays.
De ce point de vue, ce volet de la réforme s’inscrit dans la propagande du président algérien Abdelmadjid Tebboune, qui affirmait fin 2022 avoir récupéré 20 milliards de dollars détournés par la «issaba» (gang), un terme qui l’inclut pourtant, désignant les ministres, généraux et hommes d’affaires corrompus de l’ère Bouteflika.
Ce montant déjà exorbitant a été porté à 30 milliards de dollars par Tebboune lui-même, lors d’une annonce faite en décembre 2023 devant le parlement réuni.
Afin de donner de la crédibilité aux approximations de Tebboune, l’actuel projet de loi relatif à la procédure pénale, prévoit une amnistie en échange de la restitution, en dollars ou leur équivalent en dinars, des fonds transférés à l’étranger. Le ministre de la Justice a également annoncé la mise sur pied d’une agence spéciale dans la gestion de ces sommes.
Selon l’agence de presse officielle APS, cette nouvelle procédure pénale a en outre été présentée aux parlementaires comme étant «en phase avec les évolutions de la société, tout en assurant la protection des droits et libertés, conformément aux conventions internationales ratifiées par l’Algérie».
En réalité, ce texte cache un grave recul en matière de protection des libertés et introduit une procédure d’inculpation unique en son genre dans le monde. En effet, en Algérie, le procureur de la république va devenir, en plus d’être le représentant du ministère public, un juge à tout faire. Ainsi, il est prévu qu’il prenne d’abord en main les attributions de la police judiciaire, alors que les enquêtes menées par cette dernière exigent des connaissances scientifiques pointues et une expérience de terrain que le procureur n’a pas. Ce dernier cumulera ensuite les fonctions de juge d’instruction avec celles de la magistrature, assise qui détermine les chefs d’accusation et prononce les peines.
C’est désormais le procureur général (dit de la république) qui s’occupera de tout. Même les recours en appel seront initiés auprès du procureur afin qu’il casse lui-même ses propres décisions.
Ce «renforcement des prérogatives du parquet général» a été présenté par le ministre algérien de la Justice comme une «simplification des procédures de la comparution directe».
En d’autres termes, en Algérie, plus rien ne garantit les droits des présumés coupables, qui peuvent être arrêtés, jugés, condamnés et emprisonnés sur décision du seul procureur général.
On peut se demander pourquoi cette réforme prévoit de retirer certains dossiers aux juges au profit du parquet général. Pourrait-on envisager que ce transfert au parquet général soit une conséquence de l’éventuelle hésitation des juges à appliquer les dispositions du nouveau code pénal algérien, un texte promulgué en avril 2024 par le président algérien, fortement critiqué pour sa nature liberticide et contre lequel l’Union nationale des ordres des avocats algériens s’est mobilisée dès 2023?
Portant un coup fatal à l’indépendance de la justice en Algérie, le ministre de la Justice a annoncé que la nouvelle loi sur la procédure pénale prévoit la «réorganisation des pôles judiciaires pénaux et la définition de leurs compétences». De fait, le procureur de la république ne sera plus un représentant de la société, mais un simple instrument utilisé par le régime pour condamner ses opposants.
Plus que jamais, l’Algérie s’enferme dans une réalité propre, où la folie liberticide des dirigeants ne connaît aucune borne. La toute-puissance accordée au procureur anéantit de facto une justice déjà tributaire des appels téléphoniques, faisant planer l’arbitraire et la terreur sur les Algériens.
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La liberté en France ? Macron donc ?
Je ne suis pas d’accord, ils ont acquis la liberté de venir chez nous. S’ils n’étaient pas libres, nous n’en aurions aucun sur notre territoire . Il y en a presque un million en France.
Il y a un dicton algérien qui dit :
« Le chameau doit toujours s’assurer qu’il n’a pas lui-même une bosse avant de rire de celle de son camarade. »
l’Algérie devient ce que l’on appelait un « pays sous-développé ».
Pour être poli on parle maintenant de « pays en voie de développement »…ce qui n’est pas le cas de l’Algérie.