Illustration. Dans une adaptation très réussie en bande dessinée, le dessinateur Xavier Coste, au travers d’encres sublimes, restitue cette immersion aquatique totale qui fait toute la poésie de «L’enfant et la rivière». — © Xavier Coste / Editions Sarbacane
Pour voir « Ne laissons pas la nature aux écolos ! (1), c’est ici
«L’enfant et la rivière»: pas besoin des « écolos » pour grandir au contact de la beauté simple du monde
La nature est trop précieuse pour la laisser aux écolos.
A l’heure ou la nature est confisquée politiquement par les écolos en délire, il est intéressant d’évoquer ici «L’enfant et la rivière», ce merveilleux roman pour écoliers écrit par Henri Bosco.
Sur la forme…«L’enfant et la rivière» est un roman très bien écrit.
L’auteur emploie souvent le passé simple à la première personne du singulier et du pluriel.
On imagine l’écolier d’aujourd’hui à qui on le ferait lire, découvrant désemparé l’emploi du passé-simple («nous vîmes», du verbe voir…), courant vers son professeur : « Il y a une faute, là ! ». (L’écolier d’aujourd’hui rencontre le passé-simple tout au plus à la troisième personne du singulier, à l’écrit : «il courut»… le reste est devenu trop compliqué et le français une langue étrangère -voir note 1).
René Chiche, dans sa critique de l’enseignement actuel, écrivait en janvier 2020 :
En classe [lycée], j’ai face à moi des élèves qui sont le produit de l’école : ils ont passé 15 ans en salle de classe et se retrouvent pourtant dans un état dramatique de quasi-illettrisme.
Bientôt, à l’école il n’y aura plus de livres – et on s’étonne de la «baisse du niveau». C’est un fait peu connu, du moins peu commenté, mais il est là, irréversible : les livres désertent l’école, remplacés par les ordinateurs.
https://www.fdesouche.com/1307689-bientot-a-lecole-il-ny-aura-plus-de-livres
Article paru dans le Temps à l’occasion de la sortie de l’adaptation en bande dessinée.
«L’enfant et la rivière», les eaux merveilleuses du pays de l’enfance
Conte écologiste
Grand classique de la littérature scolaire, «L’enfant et la rivière» d’Henri Bosco a donné le goût de l’aventure à des millions de jeunes lecteurs. Au cœur de ce roman d’apprentissage coule la Durance, fleuve provençal sauvage aux eaux peuplées de poissons et de songes
C’est un livre un peu oublié, sur lequel on tombe par hasard dans les étagères en formica d’une ancienne chambre d’adolescent ou dans les rayonnages en contreplaqué d’une bibliothèque de village. Publié en 1945, réédité à partir de 1972 au sein des collections jeunesse de Gallimard qui participeront à son immense succès populaire, L’enfant et la rivière de l’écrivain français Henri Bosco, vendu à trois millions d’exemplaires, aura forgé l’imaginaire de plusieurs générations d’écoliers.
Ce court roman – 160 pages – raconte les aventures de Pascalet, habitant d’une métairie provençale où il vit avec ses parents et sa tante Martine. Lors des veillées, le jeune garçon fasciné entend parler de la rivière si dangereuse qui coule tout près d’ici, juste derrière les prés. Si elle n’est pas nommée dans le roman, Bosco évoque en réalité la Durance de son enfance. Lui-même a 3 ans quand sa famille vient s’installer sur ses rives. A 7 ans, il écrira, raconte-t-il, une toute première ébauche de son Enfant et la rivière et puisera ici l’inspiration d’une grande partie de son œuvre – de L’âne Culotte au Mas Théotime –, quitte à être caricaturé en écrivain régionaliste pour enfants.
Pour Pascalet, cette rivière qui lui est interdite va devenir l’aimant de tous les désirs, l’objet de tous les rêves. «Mais au-delà coulait une rivière», martèle Bosco pour annoncer la transgression à venir. Comme prévu, le garçon ne va pas résister longtemps à l’appel: sa fugue en barque durera dix jours.
Le fleuve et la rivière
Pour prendre la mesure du récit, il ne faut ne pas imaginer la Durance en gentil ruisseau bucolique. Né à 2500 mètres près de Briançon, le capricieux cours d’eau irrigue toute la Provence en serpentant entre Luberon et Alpilles. Hannibal et ses éléphants, Charlemagne et ses troupes, Napoléon de retour de l’île d’Elbe ont emprunté sa vallée. Durant des millions d’années, la Durance fut un fleuve puissant qui se jetait dans la Méditerranée dans la plaine de la Crau. Vers 18 000 avant J.-C., des mouvements tectoniques ont dérouté son lit, la forçant à aller se «noyer» – néguer en provençal – dans le Rhône à Avignon, la rétrogradant de fleuve en simple affluent. Cruelle humiliation géologique!
Pour l’écrivain Jean Giono, frère en Durance d’Henri Bosco, son identité de fleuve est pourtant incontestable: «Quand on voit cette eau violente, musclée, bondissante, qu’elle se jette où elle voudra, c’est un fleuve!» La Durance, écrit-il, «crie, hurle, hennit et chante». La tradition locale en fait l’un des trois fléaux de Provence, avec le mistral et l’impopulaire parlement d’Aix-en-Provence (où était voté l’impôt). Au fil des années, l’homme tentera de dompter ses crues légendaires. L’inauguration du barrage de Serre-Ponçon en 1960 marque le début de sa domestication.
Partout, plantes et eaux, rives et arbres, s’animaient, à la nuit tombée, d’une vie confuse et mystérieuse
Pascalet explore, lui, au fil de sa barque une Durance encore sauvage, entre eaux vives et eaux dormantes. Son initiation sera faite au travers de sa rencontre avec Gatzo, un jeune gitan qu’il arrache aux griffes d’un clan de bohémiens. Avec lui, il apprend l’art de la pêche, le maniement des hameçons, des nasses, du trémail. Il se gorge du chant des oiseaux, du souffle du vent dans les saules.
«Les rainettes, écrit Bosco, coassaient par peuplades entières, quelquefois sauvagement. Plus tard, chantait, non loin de nous, une tribu plus douce de crapauds. Je les aimais. Partout, plantes et eaux, rives et arbres, s’animaient, à la nuit tombée, d’une vie confuse et mystérieuse. Un canard s’ébrouait dans les roseaux; une chevêche miaulait sur un peuplier noir; un blaireau brutal fouillait un buisson; une fouine, glissant de branche en branche, faisait imperceptiblement frémir deux ou trois feuilles; au loin glapissait un renard rôdeur.»
La rivière est devenue monde, reliant l’enfant, la rivière et le cosmos. Le retour à la rive civilisée et à ses cheminées fumantes marque la fin de l’aventure. Un temps disparu, Pascalet retrouvera finalement son ami Gatzo, qui deviendra un frère.
L’eau et les rêves
Toute la poésie de ce conte écologiste tient dans cet équilibre entre la puissance de l’interdit et cette quête du paradis perdu de l’enfance que Bosco cherchera dans son œuvre toute sa vie durant, par la puissance de l’écriture et du songe.
Le philosophe Gaston Bachelard, l’auteur de L’eau et les rêves, plaçait l’auteur de L’enfant et la rivière tout en haut de son panthéon personnel, «le plus grand rêveur de notre temps»:
«Tant de pages d’Henri nous viennent en aide pour réimaginer notre propre passé!» (G. Bachelard)
«L’enfance, poursuit Bosco, ce n’est pas autre chose que mon pays natal.»
Au milieu duquel coule la Durance.
- Henri Bosco, «L’enfant et la rivière», Folio, Gallimard, 160 pages
- Henri Bosco et Xavier Coste, «L’enfant et la rivière», Editions Sarbacane, 2018
Note 1 de Christine Tasin
Le passé simple ? C’est encore pire que cela… Ils ont fait des ré-éditions des Club des 5 (entre autres) complètement réécrits au… passé composé, sans parler des changements apportés aux personnages et aux histoires pour être politiquement corrects
Politiquement incorrect, "Le Club des Cinq" est censuré et… simplifié !
Politiquement correct : "Le Club des Cinq" ne va plus à la messe !
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Nombre d’enfants de l’école des années 60 ont eu cet ouvrage dans les mains . Très beau .!
Et le club des cinq , la bibliothèque rose , verte , rouge et or . Que de souvenirs !
La collection des contes et légendes faisait partie des cadeaux de Noël!
Tout cela n’échappe pas à nos formateurs.de l’esprit . Pour le coup on pourrait dire qu’ils s’incèrent partout et même là où ne s’y attendrait le moins . On sait désormais que le cerveau de nos enfant est un enjeu important pour façonner les esprit au mondialisme;
Pas besoin de tous ces donneurs de leçon écolos ou pas pour apprécier la nature à sa juste valeur . Nous pouvons très bien nous passer d’eux mais eux se croient indispensables.
Bonjour,
Dans les années 60, les hebdos de BD comme « Spirou » respiraient l’amour de la France.
Que de BD consacrées à des destins de patriotes, de Résistants : tout ce qui fait ricaner, en 2020, le journaliste moyen de « Libération’ …
Hum ! merci pour cet article, qui me donne la lumière et ces illustrations au trait précis , de la légèreté , du bonheur …je vais m’y pencher sérieusement, pas le choix !