Point sur le port du voile et la Cour européenne des droits de l'homme

A propos de la loi contre la burka et les  jugements qui ont été rendus par la  Cour européenne des droits de l’homme. On aimerait qu’elle nous épargne des formules trop précautionneuses laissant planer une épée de Damoclès sur les Etats interdisant le voile dans certaines circonstances.

Pour l’instant, cependant, plusieurs décisions ont été prises qui s’opposent aux prétentions de requérants musulmans.

La décision de 2014 relative au voile intégral donne quand même tort à la plaignante et donc raison à la France.
Une autre rendue en novembre de l’année dernière donne aussi tort à une requérante qui se plaignait de ne pas avoir été renouvelée dans ses fonctions d’agent public contractuel français pour avoir refusé de quitter le voile au travail.
L’arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l’homme le 26 novembre 2015 vient en effet affirmer que la laïcité à la française est soluble dans le droit européen des droits de l’homme.
http://www.gouvernement.fr/sites/default/files/contenu/piece-jointe/2015/11/affaire_ebrahimian_c._france.pdf
L’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme était invoqué dans cette affaire par une assistante sociale exerçant dans un hôpital, à laquelle il avait été interdit de porter le voile musulman, ce qui vaut pour tous les agents publics. Son refus d’obtempérer avait justifié le refus de renouveler son contrat.

L’Etat français faisait valoir la nécessité de protéger les patients de l’hôpital de tout risque d’influence ou de partialité. C’est au nom de cet impératif de la protection des droits et libertés d’autrui que la laïcité à la française peut perdurer aux yeux de la Cour européenne des droits de l’homme.

Il faut espérer que cette appréciation sera aussi celle de la Cour de justice de l’Union européenne bientôt appelée à trancher la question de savoir si un employeur privé peut licencier une salariée qui refuse de retirer son voile en présence de la clientèle, lorsque des clients ont exprimé qu’ils étaient gênés par le port du voile par la salariée.

Pendant ce temps, si les juridictions françaises tiennent bon, la loi el Khomry essaie de changer la donne dans le secteur privé. Pour  peu que la Cour de justice de l’Union européenne invalide la position de la Cour de cassation, ce sera une sorte de feu vert pour le gouvernement socialiste…

Heureusement, des avocats conseils d’entreprises commencent à exprimer leur désaccord.
J’explique cela dans trois articles :
http://collisiondegalaxies.over-blog.com/2016/04/cedh-26-novembre-2015-l-interdiction-du-voile-islamique-dans-l-exercice-d-une-fonction-publique-n-est-pas-contraire-a-la-convention.
http://collisiondegalaxies.over-blog.com/2016/04/projet-de-loi-el-khomry-des-praticiens-critiquent-la-disposition-relative-a-la-relgion-au-travail.html
http://collisiondegalaxies.over-blog.com/2016/04/port-du-voile-au-travail-l-arret-de-la-cour-de-justice-de-l-union-europeenne-ne-devrait-plus-tarder.html

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9 Commentaires

  1. CETTE STUPIDE COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME N’A AUCUNE LÉGITIMITÉ CAR ELLE NE JUGE PAS AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS.

    • J’avais compris (si je me trompe vous m’excusez) que cette déclaration ne serais pas encore ratifiée par la France!
      Les droits de l’homme c’est une belle chose mais tellement torchonnée qu’elle est devenu un serpillière.

      • Elle est pleinement en vigueur depuis 1974 et le recours individuel des citoyens disponible depuis 1981. Elle fait d’ailleurs maintenant double emploi avec l’Union européenne pour ainsi dire. Bienvenue dans l’univers de Kafka…

  2. “…de ne pas avoir été renouvelée dans ses fonctions d’agent public contractuel français pour avoir refusé de porter le voile au travail.”
    Pour avoir refusé de porter le voile au travail ?!
    Il n’y a pas une petite coquille, là ?

  3. Bonjour,
    Merci Maxime.
    J’aimerais une analyse de votre part sur l’articulation Droit français / Droit de l’ U “E”.
    Quels sont les bras armés juridiques de l’ U “E” ?
    Par quels mécanismes s’imposent-ils à nous ?
    Quelles marges de manœuvre nous reste-t-il actuellement ?
    Etc,etc

    • c’est une question très complexe sur laquelle j’aurais du mal à faire une synthèse dans l’immédiat ! Vous devriez avoir encore pas mal de choses à lire de moi dans les jours à venir, sur cette question je passe mon tour 🙂
      Je n’aime pas le droit européen et j’en fais très peu, tout simplement… schématiquement, on peut dire que les décisions de la CJUE s’imposent à la France comme celles de la CEDH et en cas de condamnation, la France doit mettre la main au porte-monnaie généralement. Pour les voies de recours, ces juridictions intervenant après nos juridictions nationales, aucune voie de recours n’est possible. La seule solution est de dénoncer le traité si ces cours semblent abuser en se livrant à des interprétations trop éloignées des attentes des Etats signataires, bref si elles prennent trop de liberté avec la lettre des traités qui les instituent. Peut-être cela suffit-il finalement pour avoir une conception claire de l’articulation des pouvoirs normatifs pour les questions qui nous intéressent. C’est en fait l’application du principe de supériorité des traités sur les lois internes, et le droit interne plus généralement car un Etat peut être condamné même dans le cas où la restriction à un droit fondamental procède de sa Constitution ! Néanmoins, nos juridictions continuent à dire que la Constitution est le texte qui a le plus d’autorité, ce qui est vrai en théorie puisque les traités peuvent toujours être dénoncés, mais en pratique, tant qu’ils ne le sont pas, même la Constitution est asservie aux traités.

      • Bonjour,
        Merci, Maxime, de ces précisions : justement des analyses sur le rôle respectif, le mode des nominations des juges etc, etc de la CJUE et de la CEDH seraient pleines d’intérêt …
        En fait, nous subissons ces producteurs de notre Droit sans du tout les connaître , au moins pour l’écrasante majorité des citoyens français.

        • absolument, et cela vaut aussi pour nos juges qui exercent, dans une certaine mesure, un pouvoir politique. Les Révolutionnaires avaient une conception étriquée du juge, mais cela ne suffisait pas à cantonner ses pouvoirs. Alors que faire, comme écrivait Villeneuve ? L’élection a ses limites (et c’est la meilleure façon d’instituer des tribunaux islamiques). Les sanctions financières pour les juges dont les décisions sont cassées pourraient être une voie à explorer et les primes pour ceux qui jugent bien… mais ceux qui sont en haut de la hiérarchie (Cour de cassation, Conseil d’Etat, CJUE et CEDH, sans compter le Conseil constitutionnel) ont un pouvoir politique qu’il serait irréaliste de nier. Ce sont eux finalement qu’il faudrait élire, ceux qui sont en haut de l’échelle, et les autres pourraient engager leur responsabilité en cas de jugement manifestement mauvais… c’est un pis aller.

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