Si nos croyances et nos fantasmes sont plus forts que notre raison, nous sommes mal partis (2)

« De quelques questions fondamentales“ 2ème partie : imagination, fantasmes et fantaisies…

L’homme est ce qu’il croit
                                                                     Baghavad Gita
                                                                      (il y a 3000 ans)
Dans ma recherche sur les racines du mal, je ne souhaite m’attarder sur aucun segment particulier de la population (les capitalistes, les francs-maçons, les juifs, les Bilderberg…) ni sur aucune caractéristique particulière (soif de pouvoir, sadisme, cupidité…) car ils ne peuvent fournir que des explications partielles et ne peuvent pas rendre compte de l’universalité du phénomène.
Il y a en effet une caractéristique que tous les humains possèdent (et les humains seulement).
Une caractéristique qui peut avoir des conséquences magnifiques d’un côté et parfois horribles de l’autre: l’imagination, la fantaisie, les fantasmes.
(Dés le départ je voudrais corriger une fausse interprétation possible:
J’AIME LA FANTAISIE ET L’IMAGINATION.
Je veux juste mettre en garde contre les malheurs provoqués par le fait de confondre nos fantaisies avec la réalité, ce qui est un défaut on ne peut plus courant et la définition même de la folie.)
THÈSE N° 1 : NOUS VIVONS DANS NOS FANTASMES 95% DU TEMPS.
Les fantasmes, selon ma définition, sont des inventions de l’esprit qui n’ont pas été vérifiées. Il est important de savoir que même si tel fantasme est probable à 99%, c’est toujours un fantasme jusqu’à ce que je l’ai vérifié.
Selon cette définition, nous vivons dans des fantasmes au moins 95% du temps :
– FANTASMES SUR CE QUE NOUS SOMMES :
Cela inclut des croyances telles que : « Je dois faire tout, tout seul »,  « Je ne suis aimé/ apprécié que si…. », « Mes désirs profonds ne sont pas pris au sérieux », « Ils se fichent de ce que je ressens !“ et bien d’autres encore…
                                                         
– FANTASMES SUR LES AUTRES:
Cela inclut des croyances telles que: « Ne fais jamais confiance à qui que ce soit », « L’homme est par nature égoïste », »Chacun ne cherche que ses avantages », A l’état de nature l’homme est bon“,     et bien d’autres encore….
                                                 
– FANTASMES SUR LA VIE:
  Cela inclut des croyances telles que:  « La vie est un combat », »Tuer ou être tué, c’est le loi de la nature », « Dieu nous aime », « La vie est injuste! », et bien d’autres encore….

                                                  
– FANTASMES SUR LE MONDE:
  Cela inclut des croyances telles que :« Nous avons besoin d’une croissance permanente“ (et donc illimitée), « Rien de nouveau sous le soleil », « La terre est plate », « Avant, tout allait beaucoup mieux » et bien d’autres encore….
Tous ces fantasmes ont aussi d’autres noms : interprétations, conjectures, hypothèses, théories, croyances, modèles de réalité, etc…
Ils sont très utiles tant qu’on ne les confond pas avec la réalité, tant qu’on ne se convainc pas qu’ils SONT la réalité, ce que malheureusement 95% des gens font (moi y compris, parfois )
On pourrait aussi définir le fantasme comme notre capacité unique dans le monde vivant à concevoir ce qui n’existe pas, ou pas encore. (pour éventuellement le réaliser, dans un 2ème temps).
A cet égard, la fantaisie peut donner des oeuvres magnifiques (l‘Adagio d’Albinoni, la cathédrale de l’Epine, qui est une merveille à couper le souffle, un poème d’amour de Ronsard, « La Garde » de Rembrandt ou Apollo 13 en route vers la lune) mais aussi des résultats monstrueux (la « solution finale » des nazis, les tortures de l’Inquisition, le génocide des Arméniens…)
Cette capacité à fantasmer (qui nous distingue radicalement des animaux) est-elle seule responsable?
NON! Il y a un deuxième facteur qui entre en jeu:
THÈSE Nr.II : NOUS CROYONS EN NOS FANTASMES
C’est là que commence notre vrai problème : nous croyons en nos fantasmes, nous confondons nos fantasmes avec la réalité, nous nous convainquons qu’ils SONT la réalité (définition simple de la folie)
Dans un autre article je proposais de changer le nom d’Homo Sapiens en Homo Demens
Ce ne serait pas si grave si nous gardions cette folie par devers nous. Mais nous éprouvons le besoin impérieux de la partager avec le reste de la l’Humanité! Par le fer et par le feu s’il le faut!
Au nom de cette « réalité » (qui n’est qu’un fantasme) on dévalorise les autres (qui croient en un fantasme différent et sont tout aussi convaincus de connaître « la réalité »), on les emprisonne ou les on les tue…
Pensez aux „sorcières“ brûlées en Europe, à l’extermination des Indiens en Amérique, à l’Holocauste dans l’Allemagne nazie, aux 20 millions de morts de faim en Union soviétique, au génocide des Tutsi en Afrique, au génocide des Khmers rouges au Cambodge, au meurtres de masse au Darfour, etc….
Et tout cela parce que nous croyons en nos fantasmes…
Sommes-nous condamnés à répéter encore et encore ces terribles côtés sombres de notre espèce?
N’y a-t-il aucune lueur d’espoir? Aucun moyen de sortir de cet état de folie?
SI, IL Y EN A UN…
Mais avant d’écrire à ce sujet, je voudrais vous suggérer un petit exercice :
Sans réfléchir longtemps, nommez 10 fantasmes qui étaient considérés comme la réalité dans le passé (par exemple « La terre est plate » ou « Le soleil et les étoiles tournent autour de la terre »)
Ensuite, veuillez citer 10 « faits » qui, selon vous, sont réels (par exemple, « Le monde est fait d’atomes » ou « La croissance économique apporte la prospérité pour nous tous »)
Et puis pour chaque « fait » posez-vous ces questions :
Comment puis-je savoir si c’est „vraiment vrai“?
De qui ai-je appris cela ?
Suis-je absolument sûr à 100% que c’est vraiment vrai?
Y a-t-il d’autres preuves qui semblent contredire ce fait?
Quelles sont les trois autres explications possibles (hypothèses, théories, croyances…) que vous pouvez imaginer pour expliquer ce fait/ cette situation/ cet événement?
THÈSE n° III : LA METHODE EMPIRIQUE CRITIQUE  (M.E.C.)
La méthode empirique critique énonce :
1. QUE NOUS NE POUVONS PAS CONNAITRE LA RÉALITÉ ABSOLUE ET QUE NOUS NE LA CONNAITRONS JAMAIS. Ceci est bien sûr aussi une hypothèse. La question importante est: cette hypothèse est-elle utile ou non ?
2. que nous ne pouvons proposer que des MODÈLES APPROXIMATIFS, des interprétations,  des hypothèses de la réalité, des MODÈLES QUI NE PRÉTENDENT PAS ÊTRE  DES VÉRITÉS ABSOLUES.
Le plus grand mérite de la science a été de déclarer, et c’était (et c’est toujours) vraiment révolutionnaire, qu’un modèle N’EST PAS LA RÉALITÉ, („La carte n’est pas le territoire“ écrivait Korzybski dans „Science and sanity“) , que la réalité nous reste inconnue, et que la valeur d’un modèle dépend du nombre de phénomènes qu’il peut expliquer et de sa capacité à prévoir certaines évolutions et certains comportements futurs.
Korsybski l’a résumé dans sa phrase célèbre : La carte n’est pas le territoire. La carte n’est qu’une  représentation  incomplète du territoire.
Revenons à notre vie de tous les jours : si nous pouvions nous souvenir de ce « simple » fait, nous nous débarrasserions du coup  de 95 % de nos problèmes.
EXEMPLE 1 : Un homme sourit à ma femme, elle sourit en retour et mon humeur est déjà assombrie : « Pourquoi sourit-elle à des hommes inconnus ? De quoi ai-je l’air maintenant? De l’ idiot du village?!
Le soir, il y a une dispute à propos de quelque chose de complètement différent (le tube de dentifrice trop pressé, par exemple). La nuit, nous dormons séparément…
Quelle était la réalité : Deux sourires.
Tout le reste n’était que fantasmes avec leurs conséquences : tempêtes émotionnelles, disputes, séparation…
EXEMPLE 2 : Première Guerre mondiale, 1914 : l’Allemagne attaque la France et gagne d’abord sur tous les fronts. L’armée française fuit vers Paris. Comme dernier espoir, les généraux français veulent arrêter l’armée allemande au bord de la rivière « La Marne », au nord de Paris.
Des centaines de taxis et de bus sont utilisés pour envoyer des troupes fraîches. Les avions allemands observent les mouvements des soldats près du fleuve. Les généraux allemands l’interprètent comme l’arrière-garde des soldats français en fuite. Mais c’était un vœu pieux, un fantasme ! En réalité, c ‘était l’avant-garde des troupes fraiches  francaises arrivées depuis Paris: Les fameux taxis de la Marne.
      La bataille de la Marne fut une victoire française.
Conséquences de cette erreur d’interpretation des généraux allemands: Guerre de tranchées, quatre ans de batailles, des millions de morts, des souffrances indescriptibles et tout cela à cause d’une mauvaise interprétation.
Napoléon procédait autrement : il étudiait toutes les possibilités, toutes les hypothèses, même celles qui semblaient absurdes, et préparait des plans pour chacune de ces éventualités.
Grâce à cela, il fut qualifié de génie militaire.
À cet égard, chacun de nous pourrait devenir un génie. Il suffirait de cesser de croire en nos fantasmes et de ne les considérer que comme des HYPOTHÈSES POSSIBLES PARMI D’AUTRES.
Avec une telle attitude, les guerres de religion, par exemple, s’arrêteraient immédiatement.
Savez-vous pourquoi sunnites et chiites se massacrent depuis 1400 ans?
Les chiites croient que seul un successeur de la famille de Mahomet peut être à la tête de l’islam.
Les sunnites pensent qu’un successeur élu peut être le chef de l’islam (calife) même s’il n’est pas membre de la famille de Mahomet.
Et c’est pourquoi ils s’entretuent DEPUIS 1400 ans et jusqu’à  ce jour (Syrie, Irak, Yemen …).
Catholiques et protestants faisaient de même en Irlande jusqu’à récemment, au nom de Jésus bien sûr !
Encore des exemples? Nous n’avons que l’embarras du choix ! Dans tous les pays, à tous les niveaux…Mais ce serait ennuyeux et je préfère proposer des exercices concrets qui permettent
à chacun de prendre de la hauteur et ne plus se laisser enfermer dans nos fantasmes „bien-aimés“: (évidemment qu’ils sont „bien-aimés“ sinon nous nous en serions débarrassés depuis belle lurette!)
Amities
Edmond le Tigre
PREMIER EXERCICE : Chaque fois que vous pensez ou croyez quelque chose sans le vérifier, vous êtes dans le domaine du fantasme. Pour avoir une idée de la fréquence à laquelle cela se produit, achetez un petit bloc-notes à garder sur vous en tout temps. Faites un trait chaque fois que vous fantasmez
Exemples: – Le PDG vous appelle et vous pensez : « Oh mon Dieu, j’ai loupé quelque chose?
                  – Vous avez un rendez-vous et craignez d’être en retard
                  – Vous voyez une personne attirante et fantasmez sur elle
En général, chaque pensée sur le passé, sur l’avenir, sur les autres, sur vos relations et sur le monde fait partie des fantasmes.
Le soir comptez les traits et laissez-vous surprendre !
DEUXIÈME EXERCICE : Si vous avez une pensée qui vous tracasse, cherchez trois alternatives possibles. Exemple: Vous avez un rendez-vous avec quelqu’un. Àprès une demi-heure, il n’est toujurs pas là et vous commencez à vous énerver :
« Comment peut-il me faire attendre comme ça ? C’est d’un sans-gêne!!! »
Trois alternatives : – Peut-être est-il  coincé(e) dans les embouteillages…
                              – Il n’a pas pu me prévenir car les piles de son mobile
                                sont épuisées…
                              – Nous nous sommes peut-être mal compris sur l’heure
                                du rendez-vous…
(Attention! Il s’agit d’alternatives possibles et plausibles)
Maintenant vous avez quatre options, l’option spontanée initiale + les trois alternatives: vous pouvez choisir, vous avez acquis un degré de liberté supplémentaire, Vous êtes devenu plus libre !
Si vous faites cet exercice, et je vous le recommande, vous constaterez qu’il n’est pas aussi facile  qu’il en a l’air: Vous constaterez que vous n’avez pas envie de renoncer à l’option spontanée initiale: Vous vous accrochez à elle, vous êtes accro à elle, même si elle est déplaisante car personne n’aime être plaqué…
MAIS VOUS NE L’ÊTES PAS, C’ÉTAIT JUSTE UN FANTASME!!!
Amitiés
Edmond le Tigre

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5 Commentaires

  1. Il ne peut pas y avoir 3 alternatives : seulement 3 possibilités ou 3 choix possibles ;
    UNE alternative est un choix entre 2 possibilités (latin « alter » = autre. Donc une possibilité ou une autre.
    Désolée, je ne cherche pas à donner des leçons mais entre les fautes, tant de français que d’orthographe qu’on trouve partout, (je ne parle pas des fautes de frappe ou des corrections intempestives des programmes informatiques) je me dis que, décidément, « c’était mieux avant » ! 😇

    • Rigolons un peu !
      3 choix : C1, C2 et C3.
      Donc alternatives entre C1/C2 ; C1/C3 et C2/C3 !
      Si 3 choix, 3 alternatives dixit le matheux !
      Bon, j’ai compris cependant la leçon de français…

  2. Merci beaucoup pour cet article éclairant. Merci de votre gentillesse de vous être donné le mal de l’écrire pour nous, qui ne sommes que des inconnus que vous ne rencontrerez jamais.
    Je fonctionne comme ça – quand je fais attention à être conscient -, mais on est souvent « pris par surprise » dans le flot de la vie et on n’a pas le temps ou l’occasion de le faire dans l’urgence (au volant) ou la surprise d’un situation, et là, ce sont les programmations mentales innées et acquises qui entrent toutes seules en fonction. Les peurs les premières.

    A titre personnel, je me rends bien compte que la façon dont j’envisage la réalité n’est qu’une suite de paris (/modèles) plus ou moins bien éclairés. On avance dans l’incertain et on espère que notre vision/nos lunettes/notre compréhension s’amélioreront avec le temps et les efforts.

    L’astrophysicien Jean-Pierre Petit aime à dire que : « La Science n’est qu’un système organisé de croyances. »

  3. J’ai un fantasme récurrent : Manu Macron veut ma peau, il veut me faire crever de froid, de faim, il en veut à mon fric, à ma santé, à mes biens, il veut me remplacer. Ah ben non, c’est pas un fantasme, finalement, c’est juste la réalité.

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