De quoi est constitué 96 % de l’univers ? Pas de ce qui se voit (3 /3)

PARTIE 3 SUR 3

Petit rappel de la chronologie des articles de la matière noire et de l’énergie sombre.

Le titre commun aux trois articles traitant de ces deux éléments est le suivant : « De quoi est constituée 96 % de l’univers ? Pas de ce qui se voit. Impossible de zapper ça ! Partie X sur 3 ».

Sur ces trois articles, deux ont traité de la matière noire, et un est consacré à l’énergie sombre, le présent article. Les deux articles traitant de la matière noire sont déjà parus et tu peux y accéder pour le premier en cliquant ici, et pour le deuxième en cliquant ici. Cela fait deux articles sur les trois en tout.

Le dernier article des trois est celui-ci et traite de l’énergie sombre.

Bon, j’espère que tu as compris !

L’ENERGIE SOMBRE 

Les spécialistes ont été stupéfaits de découvrir qu’une énergie sombre dominait largement l’espace, et que son énergie répulsive éloignait les galaxies les unes des autres.

Ils ont toujours pensé que bien qu’il continue à s’agrandir, l’Univers ralentirait son expansion, ou peut-être même s’effondrerait sur lui-même. Dans un tel cas, la gravitation l’emporterait sur la vitesse de l’Univers.

Seulement voilà, amis passionnés, en étudiant l’expansion de l’Univers depuis ses débuts, les spécialistes on réalisé que celui-ci non seulement ne ralentissait pas, mais accélérait.

Depuis le Big-Bang, l’espace est entré en expansion et n’a jamais cessé, éloignant les galaxies les unes des autres, alors que ces dernières ne sont pas en expansion et restent identiques. La Terre, le système solaire, ne sont pas en expansion.

C’est Edwin Hubble qui a découvert que les autres galaxies s’éloignaient de la Voie lactée. Il avait observé que les galaxies lointaines s’éloignaient plus vite que celles qui nous étaient proches. Il a découvert qu’il pouvait étudier leurs vitesses en étudiant leurs longueurs d’ondes à travers un prisme. C’est ce qu’on appelle mesurer le décalage vers le rouge. Ce qui est extraordinaire, c’est que l’on se sert toujours, encore maintenant, de cette technique pour évaluer les distances dans l’espace. Hubble a découvert que plus une galaxie était à une distance importante, plus elle s’éloignait vite de nous, et plus son décalage vers le rouge était important.

Ainsi, les scientifiques ont décidé d’utiliser le décalage vers le rouge pour mesurer l’histoire de l’expansion de l’univers. Seulement voilà, ami astronome amateur, comment remonter à plus de 12 milliards d’années en arrière ? Pour cela ils utilisent des supernovas de type 1a. Une supernova est une étoile qui explose. Quand cela se produit, l’étoile rejette une grande partie de sa matière et beaucoup d’énergie en lumière. Ces supernovas sont éclatantes et lumineuses partout et tout le temps dans l’espace. En effet, les supernovas de type 1a sont les plus lointaines jamais observées. Elles ont pour particularité de toutes briller avec le même éclat, permettant ainsi de jalonner l’univers sur de très grandes distances. Mais maintenant, il y a le JWST !

Quelle est donc cette force qui permet cette expansion de l’Univers impressionnante ? C’est ce que les scientifiques appellent l’énergie sombre. C’est une énergie invisible à laquelle personne ne s’attendait, ni ne comprenait. Cherchons un peu à comprendre…

Pour affirmer qu’un objet s’éloigne de plus en plus de l’endroit où on observe, il faut être en capacité de pouvoir mesurer la distance qui nous sépare de l’objet et ce, de façon répétitive. Il est impossible de faire de l’astronomie sans avoir une bonne connaissance des distances des différents objets célestes : étoiles, galaxies, et amas essentiellement, mais d’autres également. Et c’est une tâche très difficile en astronomie que l’évaluation des distances.

Pendant longtemps, les astronomes se sont contentés de cataloguer les objets lointains qu’ils observaient dans le ciel, notamment les nébuleuses dont la lumière est bien diffuse. Chacun a essayé d’être performant par des techniques de mesure des distances. Il y a eu l’astronome français Charles Messier (1730-1817), puis l’astronome britannique William Herschell (1738-1822), puis l’astronome américaine Henrietta Swan Leavitt (1868-1921), puis l’astronome danois Ejnar Hertzsprung (1873-1967), d’autres, et bien évidemment Edwin Hubble.

Jusqu’aux années 1920 les astronomes ne savaient même pas si ces structures appartenaient à la Voie lactée ou étaient des structures extras galactiques. La solution à ce problème fut trouvée grâce à l’étude de certaines étoiles, appelé céphéides.

Une céphéide est une étoile variable, géante ou supergéante jaune, de 4 à 15 fois plus massive que le Soleil et de 100 à 30 000 fois plus lumineuse, dont l’éclat varie de 0,1 à 2 magnitudes selon une période bien définie, comprise entre 1 et 135 jours, d’où elle tire son nom d’étoile variable. Cette étoile géante variable pulse donc selon un rythme très régulier et de façon périodique.

Sur le schéma ci-dessous on voit très bien la variation de luminosité d’une céphéide entre le 4 mai, le 9 mai, et le 31 mai. Cette céphéide se situe dans la galaxie dénommée M100 (catalogue de Messier) ou NGC 4321.

L’astronome américaine Henrietta Swan Leavitt (1868-1921) observa au début du XXème siècle, grâce à 25 de ces étoiles dans le Petit  Nuage de Magellan, que le logarithme de leur luminosité moyenne croissait linéairement avec le logarithme de la période de leur oscillation.

Comme toutes ces étoiles se trouvent à la même distance de la Terre, les céphéides sont des chandelles standards pour mesurer l’univers. Il suffit pour cela d’observer la période et la luminosité d’une  céphéides n’importe où dans le cosmos, et de comparer ces observations avec la luminosité correspondante sur le diagramme période-luminosité d’Henrietta Swan Leavitt.

Depuis, les céphéides sont encore utilisées, mais pour aller plus loin d’autres chandelles standards sont utilisées, et sont appelés supernovae de type la.

Lorsque Hubble et Lemaître établirent la loi de variation de la vitesse des galaxies en fonction de leur distance à la Terre, et représentèrent cette variation sur un diagramme, appelé diagramme de Hubble, ils n’avaient accès qu’à des objets célestes dans notre environnement proche et des vitesses modestes par rapport à la vitesse de la lumière. Lorsque les galaxies sont plus lointaines et pour atteindre les plus grandes distances visibles par nos télescopes, il est nécessaire d’utiliser des chandelles standards comme les supernovae de type la.

Ça va bien, ma cousine, tu suis toujours tu n’es pas encore endormie ? Alors on continue.

Voici ci-dessous le diagramme d’Edwin Hubble, publié par lui-même en 1929, et montrant la variation de la vitesse des galaxies en fonction de la distance à ces objets. Cette mesure permit une première estimation du taux d’expansion de l’univers (dit taux de Hubble).

Et maintenant, ci-dessous, le diagramme de Hubble obtenu à partir de la mesure des distances et vitesses des supernovae de type la, nous donnant accès au taux d’expansion de l’Univers et à sa variation dans le temps.

Ces objets lointains sont alors caractérisés par leurs luminosités et leurs décalages vers le rouge. Leurs luminosités nous permettent de connaître leurs distances, car elles décroient comme le carré de celle-ci avec la distance. Le décalage vers le rouge est une mesure qui se confond avec le rapport de la vitesse des galaxies sur celle de la lumière lorsqu’il est petit, comme dans le cas du diagramme d’Hubble de 1929, et s’étend à des valeurs bien plus grandes lorsque les objets considérés sont, soient éloignés, ou soit de façon équivalente anciens.

En effet, il faut se rappeler que la lumière ne se propage pas à une vitesse infinie mais à 300 000 km/s. Ainsi, la lumière reçue depuis des galaxies très éloignées ne nous renseigne que sur l’état de celle-ci dans le passé : en observant le ciel, les astronomes remontent dans le passé de l’Univers.

Les supernovae de type la les plus lointaines ont un décalage vers le rouge z de l’ordre de 1.5 et existaient il y a plusieurs milliards d’années-lumière (je te rappelle qu’une seule année lumière = 10 milles milliards de kilomètres).

La loi de Hubble indique que la vitesse est proportionnelle à la distance ; la constante de proportionnalité est appelée constante de Hubble. Elle joue un rôle fondamental en astrophysique et cosmologie, car son inverse est relié à l’âge de l’Univers. Ainsi, en arpentant notre Univers proche et en déterminant la constante de Hubble, les astronomes peuvent déterminer quand le Big-Bang s’est produit, c’est-à-dire il y a environ 13,8 milliards d’années.

Lorsque Edwin Hubble a découvert que les galaxies s’éloignaient les une des autres (Univers en expansion) ce fut un choc pour la communauté scientifique. Chaque équipe a refait des calculs différents de son côté et elles sont toutes arrivés au même résultat : l’Univers est en expansion permanente et de plus en plus rapide.

Cela suggère que dans l’Univers il y a une force répulsive qui l’emporte sur la gravitation. Cette énergie qui semble emplir l’Univers et accélérer son expansion avec le temps est maintenant connue sous le nom « d’énergie sombre« . Et l’énergie sombre a créé l’espace en emmenant dans son voyage les galaxies. Les galaxies s’éloignant, mais ne s’agrandissant pas elles-mêmes, il se crée ainsi de l’espace.

L’énergie sombre et très différente de la matière noire. Elle ne se rassemble pas en amas comme le font les galaxies ou les étoiles. On pense qu’elle est assez uniforme car on retrouve la même accélération dans quelque direction que ce soit. Mais certains pensent qu’il pourrait y avoir quand même une structure dans sa répartition. L’énergie sombre est l’énergie du vide, l’énergie du rien. Même le néant a de l’énergie.

Les scientifiques pensent que l’énergie sombre a été créée en même temps que la matière noire au moment du Big-Bang. Selon eux, bien qu’ayant toujours existé dans l’Univers, les forces gravitationnelles de la matière noire l’ont contenu, ainsi que la chaleur et la densité suivant le Big Bang, ralentissant l’expansion de l’Univers au cours des neuf premièrs milliards d’années suivant le Big-Bang.

Cela a changé il y a 5 milliards d’années, quand l’Univers est devenu assez vaste pour que la matière noire soit dispersée dans l’Univers. L’énergie sombre a, alors, été moins affectée par la pression de la matière noire et ainsi l’Univers est entré en expansion à une vitesse accélérée.

En fait, après le Big-Bang, l’énergie sombre était insignifiante et n’avait pratiquement pas d’influence. Puis, quand l’Univers s’est refroidi et est devenu moins dense et plus vaste, la gravitation a perdu de son importance et l’énergie sombre a pris le pouvoir. C’était il y a 5 milliards d’années. L’énergie sombre a commencé à dominer les forces attractives de l’univers. Depuis ce temps-là, en étudiant les courbes de la force gravitationnelle, on s’aperçoit qu’elles diminuent progressivement au profit de l’énergie sombre.

L’expansion permanente de l’Univers est due au fait que l’énergie sombre, l’énergie répulsive, écarte les galaxies entre elles, et dans ce nouvel espace il se crée une nouvelle énergie sombre qui continue l’expansion de l’Univers mais encore plus vite car plus forte.

Et voilà, tu sais tout (ou presque !)

La prochaine fois, nous ferons un tour (étalé en trois parties) pour discuter ensemble de la physique – mécanique et l’intrication quantique mais, rassure toi, simplement expliquées ! Et oui, prix Nobel oblige…

Professeur Têtenlair

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17 Comments

  1. Si ça créé de l’espace dans l’univers il y aura plus d’espace pour commencer la guerre des étoiles ça éviterait de la faire sur Terre non? Qu’en pensez-vous cher professeur ?

  2. Cher Prof, est il possible d’avoir la liste exhaustive de tes articles. En effet, je souhaiterais me faire une compilation imprimée de tout tes articles. Encore mille merci pour ton travail.

    • Ami connaisseur Fonzy, tu me fais beaucoup d’honneur, et je te remercie. L’essentiel est que mes modestes articles éveillent le plus de gens possibles aux merveilles de l’astronomie.
      En ce qui concerne la liste de mes articles, mon ami François t’a répondu. Je l’en remercie.
      Peut-être as-tu remarqué qu’à la fin de chaque article (et ce pour tous les articles parus dans RR de toutes les rubriques) tu as le symbole du PDF au-dessous de la dernière ligne.
      En cliquant sur ce symbole l’article s’ouvre à l’écran sous forme PDF. Puis, par la petite flèche indiquant le bas mais situé en haut et à droite, tu peux télécharger l’article en PDF.
      Tu peux ainsi, sur ton ordinateur, regrouper tous les articles dans un dossier.

    • En sus de la méthode « PDF » suggérée par Cachou une fois que tu as ouvert pdf il te reste à faire imprimer et tu peux avoir les articles que tu veux pour les lire à tête reposée dans ta chaise longue au soleil 😉

  3. Salut Prof ! Quel bonheur que cette troisième partie. Merci pour ce travail de vulgarisation. Je ne sais si cela est de ton ressort, mais une explication, à la façon Tetenlair, sur la théorie des cordes, me ferait bien plaisir (ou des références à consulter).

    • Tu tapes dans le mille, car j’ai déjà pensé à plusieurs reprises faire un article sur la théorie des cordes. Et je le ferai relativement bientôt.
      Je souhaite également faire un article sur ce qu’est le boson (notamment, évidemment, le boson de Higgs). Mais j’hésite un peu, car ces notions sont un peu complexes, et il sera peut-être difficile de les simplifier. Je vais m’y pencher à l’avenir.

  4. REPONSE A AMI ARGO 1 SUR 2
    Merci, ami Argo, de toutes tes félicitations et gentillesses. Comme tu le sais elles me vont droit au cœur.
    Ne te fais pas de soucis, c’est parce qu’il n’y a, en sciences, jamais, absolument jamais de questions bêtes, que ladite science progresse régulièrement.
    Dans la mesure où l’énergie sombre est déduite de raisonnements et n’a jamais été observé de quelque façon que ce soit, que l’on n’en connaît absolument ni la consistance ni l’origine, ont ne peut rien affirmer de sa constitution pour le moment. Bien que pour l’origine, certains ont daté son apparition. Mais, bon…
    Quant à la réaction des gens aux pompes à essence… comme dans beaucoup d’autres situations de la vie…. !!! Nous sommes dans l’ère de la communication à outrance, ce qui devrait rapprocher les gens. Et bien je crois que nous vivons une époque où l’égoïsme et les réactions primaires n’ont jamais été autant développés.

  5. REPONSE A AMI ARGO 2 SUR 2
    Très rares sont ceux désormais qui savent prendre du recul sur les événements immédiats et plus anciens. 90 % des gens sont devenus des bêtes qui réagissent primitivement à des situations qui les contrarient. Plus les communications se développent, plus les individus vivent dans l’isolement. Nous savons tous que dans les immeubles pratiquement personne ne connaît son voisin d’en face. Au mieux « Bonjour – Bonsoir », et encore….
    Le prochain article (qui sera publié en trois parties) de ton humble serviteur sera particulièrement curieux car contre intuitif. J’ai essayé, durant ces trois parties, d’expliquer le plus simplement et le plus ludiquement possible la physique- mécanique et l’intrication quantique. Prix Nobel de physique oblige !
    Amitiés à toi ami Argo

  6. Cher professeur Tête -en-l’air, que de savoir dans votre auguste tête. Article formidablement didactique. Merci du temps que vous nous consacrez. Une petite question d’un béotien irrécupérable, question sûrement stupide, l’énergie sombre est-elle d’origine électromagnétique ou pas? Pour le reste, sur notre vieille Terre, ce matin, des automobilistes en sont venus aux mains pour faire le plein. J’ai assisté, en sortant du supermarché, au pugilat. Cela m’a rendu d’humeur sombre, comme la matière, et je suis effondré, comme les étoiles en fin de vie. Que les hommes sont bêtes! Heureusement, pas tous. Sous le vernis civilisationnel, le primate refait vite surface. Merci pour cet article, ou plutôt ce cours, amitiés !

    • Merci, ami Antiislam de ta gentillesse et de tes articles toujours aussi passionnants.

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