Voici un sujet idéal pour ceux qui sont en ce moment allongés dans leur transat sur la plage, face à l’océan et le regard rivé sur l’horizon de leur tablette ou smartphone … Votre épouse appréciera, plutôt que de laisser traîner un regard lubrique sur la concurrence féminine qui défile sur la plage.
PREAMBULE
Pendant longtemps la mission première des paquebots a consisté à assurer les transports de courrier, de personnes et de marchandises, en particulier de migrants d’un continent à l’autre avant que les progrès de l’aviation et en particulier les jets transocéaniques ne prennent définitivement le relais.
Si les petits paquebots miniatures racontent l’aventure de leurs modèles grandeur nature, nous découvrirons qu’ils ont même anticipé celle-ci avant d’entretenir leur mémoire ! Aujourd’hui, les paquebots ont été détournés de leur mission première de transport de personnes et de fret d’un continent à l’autre et ne servent plus qu’au tourisme, aux loisirs, à la transmission de virus et au « coke en stock », l’accueil de migrants … Ce sont davantage ceux de la première époque prestigieuse dont nous désirons rappeler le souvenir, ceci au travers d’une évocation que nous vous souhaitons aussi ludique, qu’agréable et instructive.
INTRODUCTION
La collection de paquebots Dinky Toys qui vous sera présentée ci-après est contemporaine de ces navires et a en grande partie anticipé l’histoire de ces derniers qui devait encore s’écrire. Si l’écrasante majorité de ces géants des mers ont aujourd’hui disparu, il nous reste l’humble et émouvant témoignage de leur destin au travers de ces objets miniatures qui relatent une fantastique épopée où se côtoient anecdotes et histoires propre à la « jet-set » qui précéda celle des liaisons aériennes transcontinentales.
Les paquebots ont été les fiers ambassadeurs de leurs pays respectifs, de leurs coutumes, arts, modes et gastronomies. Mais aussi la source d’épisodes sentimentaux, de rencontres, de sujets pour les écrivains, de promotion pour de nombreux artistes, d’échanges diplomatiques, d’intrigues, de compétitions commerciales, mais également de progrès techniques, de records de vitesse, tel le Ruban Bleu dont l’Oncle John vous a déjà parlé ici, ainsi que de courage et de lâcheté lors de drames de la mer. De naufrages, de périls de guerres, d’incendies …
Les versions miniatures de ces bateaux ont été conçues d’abord comme des jouets pour enfants bien avant de devenir aujourd’hui des pièces de collections et même d’enrichir des musées avant d’obtenir – qui sait – le statut d’objet d’art ?
De grands fabricants de jouets ont fidèlement reproduit à échelle réduite ces témoins d’une époque.
Cette évocation se limitera ici à présenter le fabricant Dinky Toys. Par la suite, l’Oncle John envisage de vous présenter les réalisations d’autres fabricants qui ont succédé au pionnier de ce sujet relativement confidentiel.
D’autres fabricants de jouets ont aussi produit des paquebots ainsi que bien d’autres marques artisanales qui ont, elles aussi, enrichi cette gamme de collections très particulières et peu connues du grand public. Leur mérite n’en est pas moins grand. A notre connaissance, aucune relation détaillée n’a encore été produite sur ce sujet en français.
DINKY TOYS
Dinky Toys est le premier fabricant industriel à s’être aventuré dans la production de paquebots miniatures en zamak (alliage de zinc, aluminium, magnésium et cuivre). Ceci à partir de 1934 et jusqu’en 1940. Dinky Toys a choisi pour ses paquebots l’échelle peu courante du 1/ 1800ème, tandis que la plupart des autres fabricants, tant industriels qu’artisanaux se sont alignés sur l’échelle du 1/1200ème ou 1/1250ème. Il en résulte que ces paquebots sont relativement petits et exigent peu de place pour pouvoir être exposés dignement. Les deux plus grands, les Queen Mary et Normandie mesurent 17,5cm de long et le plus petit, Queen of Bermuda 10cm.
Ces paquebots jouets, bien que construits en quantité industrielle, ont particulièrement souffert de la fatigue du métal (zinkpest ou maladie du zamak) et bien peu ont réussi à traverser intacts le temps. Sans parler de leurs boites d’origine pratiquement introuvables. Voici la présentation animée d’un collectionneur français émérite, M. Philippe Danjou. Celui-ci nous présente le premier coffret de six paquebots commercialisés par Dinky sous la réf. 51 ainsi que les Normandie et Queen Mary vendus sous la réf. 52.
Si la collection exceptionnelle de Philippe Danjou se présente dans un état strictement d’origine, celle de l’Oncle John a été restaurée en profondeur car plusieurs de ces paquebots lui sont parvenus cassés en plusieurs morceaux … Il a donc fallu les recoller et les repeindre sauf le RMS Empress of Britain, le Rex, le Queen Mary et le Normandie.
Mis à part les deux derniers nommés, moulés en deux parties et vendus séparément, les six autres paquebots de cette collection d’avant-guerre étaient tous moulés en une pièce. Tous les mâts étaient constitués d’une simple tige métallique noyée dans la masse et peints. A noter que, noblesse oblige, le Normandie était produit par Meccano France, tandis que les sept autres paquebots, sauf l’Europa allemand et le Rex italien étaient tous des paquebots britanniques fabriqués en Grande-Bretagne. Ces paquebots étaient entièrement moulés en alliage de zamak. Lors de leur reproduction par Dinky Toys tous ces paquebots étaient « vivants » et aujourd’hui tous sont « morts » à l’exception du Queen Mary qui a été préservé pour l’histoire.
Le coffret 51 produit par Dinky Toys proposait donc six paquebots référencés 51 b, c, d, e, f, g.
Le premier, l’Europa, réf. 51B, était un vaisseau allemand de la Norddeutscher Lloyd construit aux chantiers Blohm & Voss en 1928. Bateau identique à son frère le Bremen ils ont tous les deux fait remporter aux Allemands le fameux ruban bleu du paquebot le plus rapide sur la traversée de l’Atlantique nord. A ce jour, cinq nations se sont emparées de ce ruban tant convoité : les Britanniques, les Allemands, les Italiens, les Français et les Américains.
Après la Seconde Guerre mondiale, l’Europa a été cédé à la France en réparation des dommages de guerre et en remplacement de la perte accidentelle du malheureux Normandie. Complètement refondu et rebaptisé Liberté, il a navigué sous les couleurs de la Transat jusqu’en 1961 en compagnie du vétéran et glorieux Ile de France avant d’être tous les deux livrés aux chalumeaux et remplacés par le France en 1962.
Voici son histoire mouvementée : cliquer ici.
Le suivant, réf. 51C n’est autre que l’italien Rex de l’Italian Line qui a ravit le Ruban bleu à l’Europa en 1933. Fierté du régime fasciste, il fut le plus gros et plus rapide paquebot italien du XXème siècle. Il assurera son service commercial jusqu’en 1940. Utilisé un temps comme navire hôpital entre l’Afrique du nord et l’Italie, il sera finalement bombardé, incendié et coulé par la RAF en septembre 1944.
Le Rex sera par la suite la vedette d’une célèbre scène du film Amarcord de Federico Fellini. Pour plus de détails sur le Rex, c’est ici.
La réf. 51D représente le RMS Empress of Britain issu des chantiers John Brown & Company en Écosse. Il fut affrété par la Canadian Pacific Steamship Company et fut le plus grand paquebot utilisé sur la liaison Canada-Royaume Uni entre 1931 et 1939. Victime de la guerre, il fut bombardé et incendié par la Luftwaffe, puis torpillé et coulé par le sous-marin U-32 le 28 octobre 1940. Ce fut le plus grand paquebot perdu par les Alliés durant la Seconde Guerre mondiale (en savoir plus).
Le Strathaird, réf. 51E de la compagnie P&O a assuré son service pendant trente ans de 1931 à 1961 ce qui équivaut à la longévité normale de service d’un navire. Affecté principalement aux hémisphères sud de la planète, sa coque était peinte en blanc et ses cheminées couleur chamois.
Durant la Seconde Guerre mondiale, il fut affecté au transport de troupes avant de retourner à la vie civile : plus de détails
Le Queen of Bermuda, réf. 51F est le plus petit paquebot de la série Dinky Toys. Entré en service en 1933, il fut exploité entre New York et les Bermudes. Il servit la Royal Navy durant la Seconde Guerre mondiale et juste après celle-ci. En 1949 il revint à la carrière civile et fut finalement démantelé en 1966, suite à la faillite de son armateur Furness Bermuda. Plus de détails.
Enfin, le Britannic, réf. 51G est le troisième bateau de la White Star Line à porter ce nom et a été construit en 1930 aux chantiers Harland & Wolff à Belfast (celui qui a construit le Titanic). Il assurait la liaison Liverpool-New York. Propulsé par des moteurs Diesel, il fut le dernier paquebot ayant appartenu à la White Star Line qui fusionna avec la Cunard en 1934 et fut retiré du service en 1960. Plus de détails.
La série 52 de Dinky Toys comprenait seulement deux navires, les géants Normandie et Queen Mary. Concurrents dans la réalité autant que chez Dinky, ces deux-là étaient vendus à part dans deux coffrets agréablement illustrés de leur image peinte par un artiste talentueux et inconnu (du moins par l’auteur de ces lignes). Normandie était fabriqué par Meccano France, tandis que Queen Mary voyait le jour chez Dinky U.K.
A propos du Queen Mary, lors de ses premières productions chez Dinky Toys, le nom du paquebot réel n’avait pas encore été déterminé. Dès lors, les premiers exemplaires Dinky Toys portaient le chiffre 534 correspondant au projet de construction du paquebot réel encore en chantier. A partir de fin 1935 Dinky Toys lui appliquera son nom de baptême définitif Queen Mary et le commercialisera sous la Réf. 52 A (sans rouleaux) et 52B (avec rouleaux pour permettre aux enfants de le faire avancer). Dinky Toys reprendra la fabrication du paquebot après la guerre jusqu’en 1949. Le modèle de l’Oncle John correspond à la première série de 1934 portant le chiffre 534 !
En savoir plus sur le Queen Mary, c’est ici.
La grande classe avec Normandie ! Probablement le paquebot le plus somptueux de tous les temps. Victime malheureuse d’un incendie accidentel à New York le 9 février 1942, nous ne saurons jamais s’il n’aurait pas été capable de ravir à nouveau le Ruban bleu au Queen Mary dans le duel « fratricide » qui les a opposés. Je suis sûr que si le Queen Mary pouvait parler, il reconnaîtrait volontiers que ce fut son adversaire le plus coriace. Le Normandie fut distribué par Dinky sous les réf. 52C (sans rouleaux) et 52D (avec rouleaux).
Pour connaître l’histoire de ce géant des mers inoubliable, c’est ici.
Après la guerre, Dinky Toys a poursuivi quelques temps encore la production du Queen Mary, pour Normandie, je l’ignore ? Et il a fallu attendre 1962 pour que Dinky Toys reproduise, cette fois à l’échelle du 1/1200ème, le splendide paquebot France réalisé en zamak et en plastique.
Ce fut le dernier paquebot produit par la célèbre marque aujourd’hui disparue. Et le dernier ambassadeur de France sur les mers. |
Pour en savoir plus sur le France, c’est ici.
Pour finir, il est intéressant de remarquer que Dinky Toys a pris soin de reproduire des paquebots de compagnies maritimes différentes et qu’il lui aurait été impossible de prévoir l’histoire de ceux-ci. Aujourd’hui, nous comblons cette inconnue qui serait sans doute restée définitivement dans l’oubli si Dinky n’avait pas eu le génie de reproduire ces splendides témoins d’une époque révolue. |
Pour approfondir le sujet, voici un lien qui raconte en détails cette époque à la fois glorieuse et discrète qui a mélangé l’histoire à la miniature, c’est ici.
En bonus, l’Oncle John vous présente deux épaves Dinky dont il disposait en double, à savoir le Queen Mary et le Rex, tous deux en ruines et qu’il s’est amusé à restaurer le plus fidèlement possible par rapport aux paquebots réels dans l’intention de réaliser plus tard un diorama maritime en vue de les mettre en situation. En effet, la plupart de ces paquebots se sont réellement croisés en vrai. Ici le Queen Mary et le Rex se croisent dans l’Atlantique Nord en 1938.
Puis le clin d’œil de Tino Rossi, grand amateur et animateur musical de paquebots au temps de leur âge d’or
Oncle John
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Merci Oncle John, j’ignorais que Dinky Toys avait produit des modèles réduit de bateaux. Aujourd’hui les Editions Atlas ressorte des Dinky Toys fabriqués en Chine, je ne sais pas si Atlas va ressortir ces modèles réduits de bateaux.
Je ne pense pas qu’Atlas relancera cette collection car elle n’intéresserait que les personnes de 90 ans … Les voitures miniatures Dinky produites en Chine concernent la génération de la soixantaine qui retrouvent en elles les jouets de leur enfance. Ces bateaux remontent déjà loin dans l’histoire et n’intéressent presque plus personne ce qui les rends d’autant plus rares. Je me demande même si les Dinky diffusés par Atlas sont toujours en cours de production? Je ne pense pas car le marché concerné est servi.
Encore un superbe article de nôtre érudit Oncle G / John. Et un remerciement pour avoir mis en évidence cette partie de mes collections de jouets anciens.
Juste question technique: quelle est la taille d’une maquette de paquebot comme celles que l’on voit ici ?
Je l’ai indiqué dans l’article. La plus grande fait 17,5cm et la plus petite 10cm.
L’époque où la France était encore un pays, et pas une banlieue du continent africain en son entier, capable de construire des navires, et pas cette caricature qu’elle est devenue! Qui fait dans sa culotte devant l’Algérie et autres pays, Algérie qui fustige l’ex-colonisateur mais qui accepte l’aide de ce dernier pour maîtriser des incendies. Personnellement, je les aurais laissé cramer!
Bravo cher oncle John
Pour moi c’est une sorte de planète inconnue qui ne m’attire pas mais je suis en admiration devant des passionnés qui vont aussi loin dans leur connaissance qui n’est pas qu’intellectuelle… et les maquettes en sont une belle preuve!
Quand les générations qui nous suivent savent s’y lancer avec la même ardeur on ne s’inquiète pas pour elles et leur équilibre ! Longue vie au marin au long cours!