Des articles de presse ont été consacrés récemment à la question de l’existence de tribunaux islamiques en Grande-Bretagne.
Le moins que l’on puisse dire est que la lecture des trois que j’ai trouvés n’est pas très éclairante :
https://fr.sputniknews.com/international/201605271025348462-britanniques-pratiques-tribunaux-charia/
Ces tribunaux sont présentés comme officieux, donc ils ne recevraient aucune reconnaissance de la part des autorités britanniques.
Cependant, pour qu’on puisse parler de tribunal, il faut que soit en cause la justice et donc qu’existe une possibilité de coercition afin de mettre en exécution une décision judiciaire. A défaut, l’appellation de tribunal est inexacte et il s’agit d’un conciliateur.
La justice peut être rendue en revanche par un organe non étatique, l’arbitre ou tribunal arbitral, dont les décisions peuvent recevoir une reconnaissance étatique et éventuellement le secours de la force publique quand la sentence arbitrale a reçu l’exequatur. C’est d’ailleurs ainsi que fonctionnait la « justice des cadis » de Mayotte, lorsque ces derniers avaient des fonctions judiciaires :
L’exequatur peut être refusée quand la sentence viole l’ordre public, autrement dit des principes essentiels du droit, parmi lesquels figure l’égalité entre l’homme et la femme. Si vraiment les tribunaux islamiques concernés avaient rendu des décisions discriminatoires à cet égard, l’exequatur aurait dû être refusée par les tribunaux britanniques. Ceux qui auraient accordé leur exequatur dans de telles conditions auraient alors commis une faute et ce serait finalement le système judiciaire britannique, étatique, qui ne serait pas à la hauteur.
Or, les articles de presse que j’ai lus ne disent rien à ce sujet.
Finalement, on ne comprend donc pas grand-chose, si ce n’est qu’au nom du respect du « modèle communautariste britannique », le gouvernement ne veut pas agir.
« Selon le Figaro, « le gouvernement n’a pas l’intention d’obtenir la fermeture de ce système parallèle de justice, tolérance liée au modèle communautariste britannique ». »
Pourtant, il me semble que l’on a tout simplement affaire à une dérive sectaire qui ne dit pas son nom.
Une enquête sera cependant menée, non pas par la police, mais par une dénommée Mona Siddiqui dont on nous dit qu’elle est « professeur de théologie islamique et d’études interreligieuses ».
« Mona Siddiqui dirigera l’enquête, qui devrait s’étendre sur dix-huit mois, pour déterminer si la loi britannique est violée au nom de la charia. «À un moment où beaucoup d’attention est portée aux musulmans au Royaume-Uni, cela sera une enquête approfondie et opportune sur ce qui se passe réellement dans les conseils de la charia», a-t-elle déclaré » selon le Figaro.
Selon Sud Ouest, cette brave femme, dont le nom laisse supposer qu’elle n’est pas une Anglaise de souche, a déclaré :
« [Cela] nous aidera à comprendre si la charia est dévoyée ou instrumentalisée, et si oui dans quelle mesure« .
Magnifique : il est bien connu que la charia est un très beau système…
Bref, tout cela n’est pas rassurant, donne l’impression d’une tentative d’enfumage de grande envergure et confirme que les frontières de l’ »Absurdistan » ne s’arrêtent pas à la France.
Cela confirme aussi que les journalistes parfois font des articles qui prétendent aborder le système judiciaire en n’y connaissant pas grand-chose, donc en n’étant pas capables de se livrer à une analyse approfondie.
Est reproduit l’article du Figaro ci-dessous, le plus pertinent, même s’il lui manque cette dimension critique également.
La Grande-Bretagne enquête sur les tribunaux islamiques clandestins
Plusieurs dizaines de tribunaux officieux appliquent des règles de la charia au Royaume-Uni. Le ministère de l’Intérieur se penche sur les discriminations engendrées.
Correspondant à Londres
Le gouvernement britannique lance une enquête sur les pratiques des tribunaux islamiques officieux établis dans le pays. Entre 30 et plus de 85 «conseils» de la charia, qui se présentent parfois comme des «cours de justice», agissent de façon plus ou moins clandestine en Grande-Bretagne. Ils arbitrent des litiges civils, le plus souvent liés au droit de la famille, dans le respect de la loi islamique, sans que leurs décisions n’aient de portée légale.
Le gouvernement, s’il reconnaît en partie le rôle «positif» de ces assemblées, s’inquiète des discriminations à l’égard des femmes qui peuvent en découler. «Il n’y a qu’un seul État de droit dans notre pays, qui donne des droits et des garanties à chacun des citoyens», a rappelé la ministre de l’Intérieur Theresa May. Pour autant, le gouvernement n’a pas l’intention d’obtenir la fermeture de ce système parallèle de justice, tolérance liée au modèle communautariste britannique. Il n’est pas rare de voir des avocats inscrits au barreau recevoir une formation sur les préceptes de la loi islamique, afin d’en tenir compte dans les procédures civiles concernant leurs clients musulmans.
Un «juge» poursuivi pour apologie du terrorisme
À l’origine, ces conseils islamiques devaient par exemple permettre à des femmes dont le mariage religieux n’a pas été enregistré civilement d’obtenir le divorce en dépit d’un refus de leur époux. L’enquête du ministère de l’Intérieur vise à vérifier s’ils ne produisent pas l’effet inverse: légitimer des mariages forcés ou rendre des décisions défavorables aux femmes. C’est notamment le cas, selon des préceptes coraniques, lors de divorces ou de successions. Les femmes reçoivent moins que les hommes dans un héritage, selon la loi islamique.
Le professeur de théologie islamique et d’études interreligieuses Mona Siddiqui dirigera l’enquête, qui devrait s’étendre sur dix-huit mois, pour déterminer si la loi britannique est violée au nom de la charia. «À un moment où beaucoup d’attention est portée aux musulmans au Royaume-Uni, cela sera une enquête approfondie et opportune sur ce qui se passe réellement dans les conseils de la charia», a-t-elle déclaré. Elle sera assistée d’avocats de renom spécialistes du droit de la famille, d’un ancien juge et d’imams.
Cette investigation s’inscrit dans le cadre d’un renforcement de la lutte de l’État britannique contre l’extrémisme religieux. Le prêcheur islamique Anjem Choudary, qui comparaîtra dans un mois devant la Cour de justice de Londres pour avoir contribué à la radicalisation de dizaines de djihadistes de l’État islamique, se présente comme un «juge» de la charia. Certaines autorités musulmanes modérées contestent une application de la charia par ces soi-disant tribunaux basée sur une vision conservatrice de l’islam.
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Il semblerait que ces tribunaux existent à Mayotte –département français– et que la zoubira aurait fait le nécessaire pour fonctionnariser les cadis, peu avant son départ du ministère …
Mais black-out la dessus ! Quel journaliste d’investigation aurait l’audace d’y mener une enquête ?…
Cela viendra sans doute très vite aussi en métropole …
MerciChrisje ne mets pas le lien je préfère éviter tout rapport fût-ce par site interposé avec ce personnage, excuse-moi
Chris, vous pouvez lire mon article sur Mayotte paru il y a peu sur Résistance républicaine (lien dans l’article commenté) où je fais le point sur cette question ! Actuellement, les cadis se retrouvent sans fonction judiciaire. Mes recherches sont à jour, il n’y a pas d’investigation particulière à mener à ce sujet.
Merci Maxime !
J’avais raté ce bulletin.. Merci d’avoir aussi bien pioché le sujet !
Christine : ce blog est une mine de réinformation indispensable …Quel boulot !
A très bientôt en Corse, avec Pierre pour décompresser un peu ! Bises
Merci cher Chris, la Corse ce n’est pas l’envie qui nous manque… dès qu’on peu ton vous fait signe ! En tout cas merci surtout à Maxime et à tous les contributeurs qui font un travail de fou !