J’imagine un beau bateau, retapé à neuf, dans le genre ancien dragueur de mines, qu’on aurait baptisé le » Rambo Railleur «, navigant fièrement pour le compte d’une association, White Peace, qui croiserait sans relâche sous pavillon tricolore au large des côtes italiennes.
Avec à son bord de vrais fanas de la pêche au gros. De ces pêches qui réclament autre chose que du 20/100eme sur un bas de ligne montée pour l’éperlan. Non, là, ça exigerait une canne fibre de verre spécial thon rouge, un Mitchel de 30 cm de diamètre pour du crin capable de remorquer un Scania et des hameçons coudés dans du fer à béton.
De la cambuse au poste de veille, de la soute au hunier, des types et des nanas qui sauraient que pour ferrer à coup sûr, même quand la mer est grosse et le poisson boudeur, on appâte toujours avec un tampon de Pôle Emploi, une quittance des allocations familiales ou une carte de séjour fraîchement certifiée par la préfecture.
Là, nom de Dieu, on peut dire que ça mord ! Là, il faut du biceps pour mouliner sans casse tout en donnant le mou nécessaire à la reprise ! Là, on sent dans toute la longueur de canne les tentatives de la bête qui tente de s’échapper, là-bas, à plusieurs dizaines de mètres sous la surface de l’eau. Ah ça oui, Le matériel est mis à rude épreuve, le nylon chauffe et le brin plie à la limite de la rupture, mais putain ! ça vaut le coup ! que d’émotions ! Que de souvenirs !
Bien sûr, une fois la prise ramenée sur le pont, avant qu’elle ne cesse de gigoter faute d’oxygène, le geste pro ( et tellement désintéressé ) consiste évidemment à tout remettre à l’eau. On sait qu’une faune des fonds marins s’en nourrira avec appétit. Comme quoi rien n’est perdu. Tout se recycle. Enfin, un bateau conçu pour la bonne cause qui pourrait embarquer des militants amoureux du grand large pour un stage de formation en haute mer…
Chatelain
Note de Christine Tasin
Cette parabole mettra en colère certains de nos lecteurs, qui ne comprendront pas. Nous le publions malgré tout, pour deux raisons. La première est que c’est un superbe texte, qui joue avec les mots, que l’amour du beau est et doit demeurer quelque chose d’essentiel pour nous et que celui de la caricature et de la dérision doit demeurer un exercice lié à notre langue, tant nous sommes loin ici des pauvres insanités et vulgarités débitées par des rappeurs relaxés au prétexte d’art… Deuxième est que, face à l’invasion migratoire, l’inquiétude est juste et la recherche de solution, fût-elle fantasmée, est nécessaire pour dire nos angoisses et notre refus de l’inacceptable.
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Bravo, Châtelain, un texte imaginaire mêlant avec bonheur humour et symbolique, je partirais bien à la pêche avec vous !
Dis-moi Chatelain,
Saurais-tu barrer un des deux P.H qui rouillent à St Nazaire?
Parce qu’on pourrait pêcher pendant un mois ou deux sans avitailler..
Je déplore principalement et Notamment surtout l’usage d’une publicité inconsidérée Pour le moulinet Mitchel et le Scania 😉
Mais n’eut-il pas été plus simple de laisser traîner des bouées bio-dégradables portant les mots CAF, histoire d’économiser du fil à Thon car il y a thon et Thon!
De quoi de qui de qu’est-ce ?
Le moulinet Mitchel est une référence…
… Et les Scania sont choisis par les meilleurs chauffeurs du monde ! (preuve irréfutable, JE ROULE EN SCANIA)
Ne parle pas de domaines qui te dépassent espèce d’ignorant. ?
Merci à l’ami Chatelain d’avoir « commis » ce texte jubilatoire, et à Christine de l’avoir publié.
User sans modération de la richesse et de la singularité de notre langue fait partie intégrante de notre combat civilisationnel. L’humour, la dérision pour dire l’inacceptable peuvent parfois s’avérer plus efficaces qu’une froide démonstration.
Pour en revenir à la beauté de la langue, la nôtre, je souhaite vous faire part de l’un de mes étonnements : pas un jour ne se passe d’ailleurs, sans que je ne sois, négativement, surprise….
merci Olivia pour ce témoignage je confisque pour publication demain
Comme le dit Christine, et je l’en remercie, on n’est pas dans le premier degré, loin s’en faut ! Mais ça fait quand même du bien de passer par la licence littéraire, comme vous le dites, pour crier sans bruit.
Ceci dit, j’avoue que certaines mesures expéditives me sembleraient plus efficaces que d’autres. Et d’après ce que je crois saisir de l’actualité la plus récente, des embarcations n’auraient plus l’opportunité de toucher la côte. Ce que c’est que la violence des flots, tout de même !…
Cette invasion actuelle est un véritable génocide; toutes les solutions sont à étudier, puisque les Etats ont cru bon d’abolir les frontières, la plus belle invention de l’ homme.
La pêche au gros ou le safari au lion, il y a sûrement des amateurs de sensations fortes indécentes mais tellement palpitantes.
J’avoue que j’ai du mal à saisir.
Vous voulez récupérer les embarcations des clandestins… Et balancer ces derniers à la flotte ?
Ou vous comptez « juste » les ramener à leur port de départ ?
Notez que les deux me conviennent, mais, j’aurais tendance à pêcher à l’explosif moi !
(les vieilles habitudes sont parfois tenaces)
Pour le crin capable de tirer un Scania, je ne peux que vous faire confiance, mais j’ai du mal, mon Scania, sans remorque hein, pèse, 7,2T tout pleins faits, êtes vous sûr de vos chiffres ou est-ce juste une licence littéraire ?
(simple curiosité de ma part)