Présentant principalement des peintures européennes datant du 14e siècle au début du 19e siècle, le musée du Prado est l’une des pinacothèques les plus importantes de la planète. Déambuler dans ses allées et ses salles pour découvrir les œuvres de Velázquez, de Goya, ou encore de Murillo est déjà une belle expérience en soi… Mais la visite devient plus profonde en connaissant certaines anecdotes insolites.
Aux origines : un musée royal pour concurrencer la France
Les origines du Prado remontent à l’ouverture en 1819 d’un musée royal de peinture et de sculpture. Celui-ci a été inauguré sous l’impulsion de Maria Isabel de Bragance, troisième épouse de Ferdinand VII. L’ouverture de ce musée s’est faite à la fin de la guerre d’indépendance contre la France en 1814… France qui avait ouvert la voie à ce type d’initiative avec l’inauguration du Louvre en 1793.
À son ouverture, le musée royal de peinture et de sculpture exposait environ 300 œuvres espagnoles. Il n’était ouvert qu’un jour par semaine et se visitait uniquement sur autorisation ou recommandation d’un membre de la cour.
Le musée est devenu national en 1868.
Le musée préféré de Salvador Dali
Toute sa vie, Salvador Dali a voué un culte au plus grand musée espagnol, qu’il considérait comme étant « incontestablement le plus beau musée de peintures anciennes du monde »…
Cette histoire d’amour a commencé en 1922, quand Dali a ressenti « l’impression la plus forte » en admirant les toiles de Vélasquez lors de son premier voyage à Madrid. Il venait cette année-là de passer l’examen d’entrée à l’école spéciale de peinture de l’académie royale des beaux-arts de la ville.
Une fois admis à l’école, Dali s’est régulièrement inspiré des grands maîtres espagnols en visitant le Prado. Il y allait le dimanche matin pour analyser, crayon en main, les plus grands chefs-d’œuvre.
Après avoir rencontré le succès, le peintre espagnol a continué à s’y rendre régulièrement, en simple visiteur ou encore pour y faire des conférences.
Guernica : un tableau longtemps exilé
Peu de gens le savent, mais Guernica a été réalisé suite à une commande de la République espagnole pour l’exposition universelle qui avait lieu à Paris en 1937.
Le 28 avril de cette année-là, des avions italiens et allemands, pays qui soutenaient Franco et les nationalistes, ont bombardé et détruit la ville basque de Gernika. C’est ce tragique massacre qui a inspiré le tableau à Pablo Picasso.
Après l’exposition universelle, le tableau a voyagé un peu partout dans le monde, avant de terminer sa route au Moma de New York… Et c’est là que Guernica est resté pendant plus de 40 ans. En toute logique, Picasso refusait que le tableau soit exposé en Espagne sous Franco.
Lorsque Pablo Picasso est mort le 8 avril 1973 en France, Guernica était encore au Moma. Il a fallu attendre 1981, soit 6 années après la mort de Franco, pour que le tableau soit exposé au Prado.
Quentin Pak
Complément sur Guernica
Il y a 42 ans, le chef-d’œuvre de Pablo Picasso, Guernica (1937), revenait enfin de New York en Espagne. L’œuvre était conservée par le Museum of Modern Art (MoMA) de New York depuis plus de quarante ans. Au cours d’un voyage silencieux et apparemment routinier, un avion de ligne a ramené Guernica (1937) en Espagne pour la première fois le 10 septembre 1981.
Pour bien comprendre la signification de ce voyage tant attendu, il est essentiel d’en connaître l’origine. En 1937, Picasso a été chargé de réaliser une peinture murale pour le pavillon espagnol de l’Exposition internationale de Paris. Cependant, au début de cette année-là, l’artiste originaire de Malaga n’a pas encore une idée précise du thème qu’il va aborder dans son œuvre. L’inspiration pour cette œuvre est venue de la manière la plus inattendue et la plus tragique qui soit. Le 26 avril 1937, la ville de Guernica, en Vizcaya, a été bombardée pendant la guerre civile espagnole. Cet attentat, le premier de l’histoire, a profondément marqué l’esprit de Picasso, qui suivait de près les événements dans son pays natal. Cet événement a été une source d’inspiration pour l’artiste originaire de Malaga, qui a commencé à travailler sur la peinture murale en mai 1937 et l’a rapidement achevée le 4 juin de la même année. Le résultat est une œuvre qui capture l’horreur et la désolation causées par la guerre.
L’Exposition internationale de Paris se termine en novembre 1937. Cependant, en raison de la situation politique en Espagne, le tableau ne peut pas revenir. Guernica (1937) entreprend alors un tour d’Europe en tant qu’ambassadeur de la cause républicaine dans diverses expositions temporaires destinées à sensibiliser le public à la guerre. Enfin, en 1939, après le triomphe des rebelles et l’instauration du régime franquiste en Espagne, Picasso décide de confier son œuvre au MoMA pour qu’elle y soit temporairement conservée. Le Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía, sur son site web Rethinking Guernica, inclut la lettre, ainsi que d’autres documents relatifs à la peinture, adressée au MoMA, notifiant la nomination de l’avocat et homme politique Roland Dumas en tant qu’exécuteur testamentaire chargé de superviser le transfert de Guernica en Espagne.
Ce n’est qu’en 1981 que Guernica a enfin pu retourner en Espagne. L’opération, baptisée « Cuadro grande », s’est déroulée en secret et n’a été connue qu’à l’arrivée pour des raisons de sécurité. L’avion a atterri le matin du 10 septembre, avec 319 passagers et 19 membres d’équipage à bord, dont aucun n’avait la moindre idée de la précieuse cargaison qu’ils transportaient dans la soute. À l’atterrissage, le commandant de bord, Juan López Durán, a surpris tout le monde par haut-parleur en annonçant : « Mesdames et Messieurs, bienvenue à Madrid. Je dois vous dire que vous êtes venus accompagner le Guernica de Picasso dans son retour en Espagne« , alors que le tableau n’était en fait jamais venu dans le pays. Isabel Almazán et Beatriz Ganuza, deux membres du personnel de cabine du vol, ont raconté en 2021 comment elles ont vécu ce moment (pour lire les informations sur le site web d’Iberia, cliquez ici).
Une fois arrivée à Madrid, l’œuvre a d’abord été installée dans le Casón del Buen Retiro, qui a été spécialement aménagé pour l’exposer dans des conditions de sécurité particulières, avec une protection en verre blindé. Ce lieu revêtait une importance particulière car il faisait partie du musée du Prado, dont Picasso était le directeur. Plus tard, en juillet 1992, l’œuvre a fait un dernier voyage au Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía.
Sources:
https://madridsecreto.co/dia-guernica-volvio-madrid/
https://grupo.iberia.es/pressrelease/details/13370
https://celebracionpicasso.es/fr/noticia/el-regreso-del-guernica-espana
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J’ai été très déçu par ce tableau que j’ai vu en vrai à Madrid , et dont j’avais tellement entendu parler.
Je pense que le sujet de la peinture a causé son retentissement et non, la peinture elle-même.
Bon, ensuite c’est une affaire de goût.
C’est vrai le prado est un des plus beau musée du monde! L’architecture est elle même représentative de l’art espagnol. Je ne suis pas un admirateur de Picasso, mais il faut reconnaître que sur ce point, il n’avait pas mauvais goût !