L’arrestation de l’activiste algérien des réseaux sociaux, Saïd Bensedira, le 27 avril dernier en France, où il est actuellement placé sous contrôle judiciaire après une garde à vue de 48 heures, et la saisie de ses téléphones et de son ordinateur, ont créé la panique au sein du régime d’Alger. En effet, la junte militaire, et particulièrement le clan des protagonistes de la décennie noire, qui a fait de Bensedira l’un de ses porte-voix les plus emblématiques, est aujourd’hui face à un dilemme: sortir du bois pour réclamer officiellement la libération de son agent, ou bien ne pas se dévoiler, au risque de voir Bensedira faire de très précieux aveux aux enquêteurs français.
Le plus médiatique des agents des services de renseignement algériens à l’étranger, Saïd Bensedira, a été arrêté le 27 avril par la police française à l’aéroport parisien de Roissy-Charles de Gaulle, d’où il allait rejoindre Barcelone, en Espagne. Après une garde à vue de 48 heures, il est toujours retenu en France et placé sous contrôle judiciaire. Bénéficiant d’un statut de «réfugié politique» à Londres, son lieu de résidence habituelle, Saïd Bensedira ne cesse ces derniers temps de se mouvoir entre les capitales britannique, française et espagnole, un triangle où vivent en exil les plus irréductibles opposants au régime militaire algérien.
Il est surtout un habitué de la capitale française, où il a ses entrées dans les services diplomatiques et consulaires algériens, véritables nids d’agents infiltrés en France, ainsi que chez certains rejetons de puissants généraux algériens établis à Paris, comme Chafik Chengriha, fils du chef d’état-major de l’armée algérienne, et Mouloud Mhenna, fils du patron des renseignements extérieurs algériens.
Tout laisse croire que le transit de Bensedira à Paris, le 27 avril dernier, aurait un lien avec le kidnapping, mardi 30 avril, de l’influenceur et opposant algérien Amir Boukhors, alias Amir Dz, enlevé par de faux policiers français. Il devait être apparemment transféré en Espagne, où l’attendraient Bensedira et d’autres barbouzes algériennes qui allaient le convoyer vers l’Algérie. Un nouveau raté pour la junte d’Alger qui croyait brandir Amir Dz comme un trophée, en vue de continuer à maintenir sa chape de plomb sur le pays.
En lieu et place de ce coup qui a échoué, l’arrestation de Bensedira a créé une vive panique au sein des services de la Direction générale de la documentation et de la sécurité extérieure (DGDSE, renseignements extérieurs algériens). Les moyens mis en place, via des proxys et des associations bidon à la solde du régime algérien, en vue de libérer le plus vite possible cet agent, en disent long sur la crainte de voir les informations qu’il détient tomber dans d’autres mains.
Selon le journaliste algérien en exil Hichem Aboud, Boualem Boualem, le puissant conseiller et directeur de cabinet du président algérien Abdelmadjid Tebboune, aurait été dépêché en catimini à Paris en vue de négocier la libération de Saïd Bensedira. Toute cette effervescence s’explique par le fait que Bensedira a alerté lui-même ses employeurs que ses deux téléphones portables, ainsi que son ordinateur personnel, ont été saisis par la police française.
Que doit bien contenir ce matériel pour mettre ainsi la junte militaire dans tous ses états? Certainement des vertes et des pas mûres, car Bensedira, alias «Le rat de Londres», est en lui-même une mine d’informations sur la face sombre du régime algérien, au service duquel il travaille depuis la fin des années 1980. Il a été informateur des services de renseignements algériens, qu’il s’agisse de la Sécurité militaire (SM) ou du Département du renseignement et de la sécurité (DRS). C’est le début du démantèlement de ce dernier qui a précipité sa fuite vers l’étranger.
Un ancien agent du DRS, Karim Moulai, réfugié en Écosse, a divulgué en 2010 la véritable identité de Saïd Bensedira, au moment où ce dernier postulait à un statut de réfugié politique à Édimbourg, statut qu’il finira par décrocher à Londres, avant de rejoindre plus tard le fugitif Khaled Nezzar en Espagne. C’est ce dernier qui le désignera comme son porte-voix l’étranger, et en fera un salarié de l’ambassade d’Algérie à Bruxelles, où le chef du bureau de sécurité lui remet, de main en main, 4.000 euros mensuellement.
Bensedira mettra aussi à profit sa proximité avec les généraux algériens et leurs services de renseignements pour arrondir ses fins de mois, en arnaquant ou extorquant à tour de bras de l’argent auprès de hauts responsables et entrepreneurs algériens, quand il ne les soumet pas ouvertement à des menaces, intimidations et autres chantages lors de ses sorties sur les réseaux sociaux.
Pour cacher ces basses œuvres, qui lui ont valu de nombreuses plaintes en France, Bensedira a toujours réussi à dribbler la justice française, allant jusqu’à se confectionner un faux dossier médical attestant, ordonnances et médicaments psychotropes à l’appui, qu’il suit des traitements contre des troubles psychiatriques.
Mais quand il veut se donner un air plus sérieux, Bensedira se présente, à qui veut le croire, comme un homme politique algérien, ayant milité dans les rangs du Rassemblement national démocratique (RND), parti de l’ancien Premier ministre Ahmed Ouyahya, actuellement en prison. Il revendique à ce titre et dit assumer le fait d’appartenir à un système inchangé depuis l’indépendance de l’Algérie, un système qu’il qualifie à juste titre de «corrompu», mais dont il défend le caractère éradicateur à l’égard de tous ses opposants, et qu’il dit soutenir face à la menace des islamistes et du Maroc.
Les protagonistes de la décennie noire (Toufiq, Djebbar Mhenna et Nasser El Jenn) sont très embêtés par l’arrestation de l’agent Bensedira. Officiellement, ils ne peuvent pas demander une action de l’État algérien en direction des autorités françaises, sous peine de proclamer l’identité de leur agent. En même temps, ils ont une peur panique de ce que peut révéler le matériel de Bensedira saisi par la police. Il faut savoir que Bensedira est un agent précieux, dédié aux sales besognes, y compris contre le clan présidentiel. C’est lui qui a été le fer de lance de la campagne féroce qui conduit à l’arrestation de Farid Bencheikh, ancien patron de la Direction générale de la sûreté nationale algérienne (DGSN).
«Que faire?», doivent bien se demander les septuagénaires de la décennie noire qui ont repris le contrôle des renseignements intérieurs (Nasser El Jenn) et extérieurs (Djebbar Mhenna). Il faut prendre sa retraite et laisser la place à des jeunes. Les barbouzeries à l’ancienne sont obsolètes dans le monde d’aujourd’hui.
Pcc : Juvénal de Lyon
928 total views, 3 views today
Encore un Dizikilibri ?
C est une histoire arabe bien compliquée.
Pas intéressant.