Une fidèle lectrice de RR m’a demandé ce qu’il en était concernant la question du dessalement de l’eau de mer. J’ai trouvé l’idée très intéressante et aussi très importante. C’est pourquoi j’ai écrit ces quelques lignes suivantes bien modestes, afin de donner quelques notions sur ce sujet.
Nous, patriotes réfractaires, avons grand soif de retrouver une France saine, équilibrée, de bon sens, qui retrouve la tête en haut, avec des médias et une justice qui renouent avec leurs métiers en abandonnant les rôles de propagandistes et idéologues gauchistes qu’ils occupent maintenant depuis de nombreuses années. C’est une évidence. Mais au cas où certains d’entre nous auraient soif de boire de l’eau dessalée artificiellement, ou de l’eau douce naturelle, peuvent ils le faire et si oui sans aucun danger ?
Pour le moment, la majorité des pays de la planète ne manque pas d’eau potable. Ce qui n’est pas le cas de tous. De même, en fonction de la façon dont l’eau potable est gérée, un avenir, peut être relativement lointain, déclenchera la nécessité pour les pays non demandeurs actuellement de recourir aux méthodes dessalement de l’eau de mer.
Déjà le dessalement représente la principale source d’eau potable pour un grand nombre de pays (îles, pays à climat désertique ou subdésertique, etc…) dont, notamment, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Koweït et le Qatar, très dépendants de ce mode d’approvisionnement. Ces pays produisent 32 % d’eau dessalée totale grâce à leurs ressources en pétrole, mais aussi 55 % de la saumure1. Le coût étant important, cette technique reste réservée à des États ayant des ressources financières et énergétiques consistantes, Moyen Orient, pays développés.
Mais, plus près de nous, il est intéressant aussi de savoir qu’à Malte le dessalement représente 60 % de l’eau potable de l’île. Avec les avancées scientifiques et technologiques depuis les années 1970 , Malte ne connait plus ni pénurie ni coupure d’eau grâce aux trois usines de désalinisation qui utilisent la technique « osmose inversée » (voir plus loin). L’eau hautement contrôlée en laboratoire est potable et buvable, bien que son goût ne plaise pas à tous.
L’Espagne est au 4ème rang mondial, après l’Arabie Saoudite, les Pays du Golfe et les USA. Barcelone a inauguré le 22 juillet 2009 sa première usine de dessalement d’eau de mer, la plus importante du territoire européen, ce qui permet d’alimenter 1,3 millions d’habitants. Qui l’eut crû, Lustucru ?
La Méditerranée représente environ un quart du dessalement mondial.
L’accroissement annuel de la capacité de dessalement reste de l’ordre de 7 p. 100. De telles installations existent dans plus de 120 pays, la moitié étant concentrée au Proche-Orient, au Moyen-Orient et aux États-Unis.
Les premiers programmes de recherche et développement concernant le dessalement de l’eau de mer ou eau saumâtre2, sont apparus au cours des années 1950 et 1960. Quatorze procédés ont été considérés alors comme prometteurs, et ont été analysés. Finalement seuls deux d’entre eux ont survécu à l’épreuve du développement industriel : la distillation et l’emploi de membranes (osmose inverse, électrodialyse).
Et l’eau douce, peut-on la boire ? L’eau douce est une eau pratiquement non salée et représente moins de 2,5 % de la totalité de l’eau sur Terre, dont moins de 1 % est sous forme liquide et peut donc être utilisé par l’homme. L’homme peut consommer de l’eau douce, même si certains scientifiques conseillent de ne pas la boire régulièrement. Pourquoi ??
En France, les ressources disponibles en eau douce s’élèvent à 191 milliards de m3/ ans, soit 3 262 m³ d’eau disponible par an et par habitant. Sachant que les besoins en eau douce de la France sont estimés à 32 milliards de m3/an, seuls 17 % des ressources disponibles sont utilisées pour les activités humaines3.
Pour la petite histoire, le lac Baïkal, situé dans le sud de la Sibérie, représente le plus grand réservoir naturel d’eau douce liquide au monde avec 23 000 milliards de mètres cubes d’eau ! Il est inscrit au Patrimoine mondial de l’Unesco pour sa richesse écologique et sa faune exceptionnelle qui figure parmi les plus riches et originales de la planète.
La thermodynamique4 est importante dans les techniques de dessalement.
La salinité des océans et des mers ouvertes varie légèrement autour d’une composition moyenne.
Les mers fermées ont une salinité plus faible ou plus élevée suivant l’intensité de l’évaporation et la nature des eaux de rivières qui s’y jettent. Quelques exemples :
DESSALER L’EAU CONDUIT À FRACTIONNER UNE QUANTITÉ INITIALE D’EAU SALÉE, EN DEUX PARTIES, L’UNE DÉPOURVUE DE SEL, L’AUTRE PLUS SALÉE.
Une certaine dépense minimale d’énergie théorique sera nécessaire alors pour effectuer ce fractionnement en fonction du pourcentage d’eau pure produite. Ci-dessous, et ramené au mètre cube d’eau pure, voici deux cas, celui d’une eau titrant 35 kilogrammes par mètre cube de chlorure de sodium (assimilée à l’eau de mer) et celui d’une eau saumâtre titrant 5 kilogrammes par mètre cube de chlorure de sodium.
Dans la pratique, qui est loin des rendements thermodynamiques parfaits, quel que soit le processus utilisé, le dessalement de l’eau de mer (35 kg de sel par mètre cube) demandera une quantité importante d’énergie. Dans la réalité industrielle, elle est de l’ordre de 11 à 16 kilowattheures par mètre cube d’eau douce produit. Le dessalement est donc lié à la disponibilité d’une énergie abondante.
Nous allons voir maintenant les trois principaux procédés de dessalement de l’eau de mer, la distillation, l’osmose inverse, et l’électrodialyse à membranes sélectives.
Pour la décrire simplement, on peut dire que la distillation consiste à chauffer de l’eau de mer pour former de la vapeur, qui est ensuite condensée pour obtenir de l’eau douce. C’est une méthode énergivore. Il existe trois méthodes principales de distillation.
Il s’agit d’un énorme consommateur d’énergie : 1 000 kilowattheures par mètre cube d’eau douce produit. Lorsque l’énergie n’est pas gratuite, il est indispensable de recycler les pertes au condenseur.
L’eau de mer (eau salée) traverse deux fois les étages successifs de distillation. La première fois, à contre-courant, elle assure la condensation de la vapeur produite dans chaque étage tout en récupérant les calories de condensation. La deuxième fois, après avoir reçu un complément de calories provenant de la chaudière, elle fournit par évaporation instantanée (flash) la vapeur produite dans chaque étage, maintenu chacun à une pression inférieure à la pression saturante correspondant à la température de l’eau dans l’étage.
Pour résumer simplement la distillation, on peut sortir le schéma suivant :
Il s’agit d’un autre procédé de distillation qui consiste à récupérer la chaleur de condensation avec un apport d’énergie sous forme mécanique. Il faut souligner l’extrême importance des prétraitements et des traitements internes antitartre et anticorrosion, en l’absence desquels les rendements s’effondrent.
La capacité unitaire est limitée par l’impossibilité de construire des compresseurs de très grandes dimensions qui ne soient des monstres mécaniques d’un entretien délicat. C’est donc le choix qui sera fait pour des besoins modestes (inférieurs à 1 000 m3/j).
Pour les très grandes installations, la production d’eau douce est souvent couplée avec celle d’énergie électrique, l’usine de dessalement se trouvant intégrée dans une centrale thermique.
Une tentative a été d’employer l’énergie solaire, énergie rayonnante diffuse et variable. L’usage du multiflash à énergie solaire ou d’autres procédés élaborés n’a conduit qu’à des échecs.
Pour résumer simplement la distillation solaire, on peut sortir le schéma suivant :
L’osmose inverse est la méthode la plus couramment utilisée. Pour la résumer simplement, on peut dire qu’il s’agit de forcer l’eau de mer à traverser une membrane semi-perméable qui retient les ions de sel et d’autres solides dissous, en laissant passer uniquement l’eau pure.
Toute la difficulté était de trouver les bonnes membranes, qu’elles soient bien conçues. Un grand nombre de types de membranes ont été essayées, tenant compte de leurs compositions et de leur longévité.
La structure des membranes a été modifiée dans le temps en les rendant composites : la fonction de résistance mécanique est assurée par un type de matériau et la fonction semi-perméable par un autre, supporté par le premier. De même, la forme de la membrane, initialement disposée comme une feuille plane, a été modifiée en tuyau, spirale, fibre creuse.
Les orifices des membranes semi-perméables sont très petits (de 0,1 à 20 nanomètres5). Les membranes sont donc particulièrement sensibles à l’entartrage chimique et au colmatage par les matières en suspension et par certaines matières organiques naturelles. Les prétraitements chimiques et de clarification doivent être de haute qualité et maintenus en permanence.
Cette méthode est moins utilisée que les deux précédentes. Elle utilise des membranes d’échange d’ions pour séparer les ions de sel de l’eau de mer. Elle agit par la mobilité des ions d’un électrolyte soumis à un champ électrique. Procédé bien connu. Les anions sont transférés vers l’anode, et les cations vers la cathode.
Ces technologies peuvent être utilisées individuellement ou combinées pour améliorer l’efficacité du dessalement de l’eau de mer. Cependant, le dessalement de l’eau de mer reste généralement coûteux en raison de la consommation énergétique élevée nécessaire pour faire fonctionner les installations.
Le procédé de distillation (surtout multiflash) est longtemps resté le seul utilisé pour les installations de grandes capacités (> 10 000 m3/jour) surtout lorsque l’énergie est gratuite ou bon marché (huiles de bunker, pays producteurs de pétrole, vapeurs basse pression perdues).
L’osmose inverse est apparue dans les années 1970. Utilisée à l’origine pour les eaux saumâtres, elle est venue progressivement concurrencer la distillation pour le dessalement de l’eau de mer, tout d’abord pour des productions relativement faibles, surtout en raison des investissements moins importants qu’elle exige.
Depuis les années 1990, elle a été mise en œuvre pour des installations de capacité élevée, comme en 1995 en Arabie Saoudite (128 000 m3/jour), en 2005 en Israël (320 000 m3/jour) ou encore en 2006 en Algérie (200 000 m3/jour) et en Australie (125 000 m3/jour).
L’électrodialyse voit son domaine confiné aux eaux saumâtres, où elle est très combattue commercialement par l’osmose inverse. Quelques unités de dessalement par osmose inverse commencent à apparaître en France, sur des sites de stations balnéaires principalement.
Cela dit, le marché du dessalement de l’eau de mer reste encore ponctuel.
Le Professeur Têtenlair te souhaite un bon rafraîchissement !
Professeur Têtenlair
1 Une saumure est une solution de chlorure de sodium (sel) dans l’eau, à une concentration supérieure à celle de l’eau de mer.
2 On appelle une eau saumâtre, une eau dont la teneur en sel est inférieure à celle de l’eau de mer habituelle. Cette dernière contient environ 35 g /l alors que l’eau saumâtre n’en contient que 1 à 10.
4 « La thermodynamique est une branche de la physique qui étudie les propriétés des systèmes où interviennent les notions de température et de chaleur. Elle traite des relations entre phénomènes thermiques et mécaniques. La thermodynamique traite des échanges entre les diverses formes d’énergie, des états et des propriétés de la matière, des transformations d’état et des phénomènes de transport. Elle est la science qui traite de la production, du stockage, du transfert et de la conversion de l’énergie. (Référence « Le Larousse ») ».
5 Un nanomètre est égal à un milliardième de mètre.
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Je voudrais rappeler que depuis les années 60 et l’apparition des sous marins nucléaires, ceux ci s’alimentent en eau potable par la technique du dessalement sinon ils n’ont pas d’autre moyen pour en avoir étant donné qu’ils restent des mois sous la surface.
Effectivement, et demandez à Israël !
D’une pierre 3 coups: si on se chauffait en hiver en congelant des tonnes d’eau de mer, on tirerait 0,1 MWh de chaleur de chaque tonne de glace douce fabriquée, et ensuite la glace qui fondra en été pour refroidir la maison sera douce.
Excellent article, mais on peut être beaucoup beaucoup plus optimiste.
En osmose inverse par exemple, il semble que le CNRS soit sur un très bon coup, mais que des questions de propriété industrielle entravent le développement… jusqu’à ce que les Chinois s’y mettent…
Dommage, parce que le plus souvent les pays qui ont soif sont en bord de mer et ont du soleil ou du vent à revendre pour produire de l’énergie renouvelable : en couplant les 2 on peut avoir l’espoir raisonnable de créer un environnement LOCAL tout à fait vivable pour la moitié sud de l’humanité.
Merci de ces informations, ami.
À moins d’avoir envie de savoir ce que signifie » avoir vraiment très mal au ventre » ne buvez JAMAIS d’eau distillée.
…car elle est indigeste. En effet elle est dépourvue des sels minéraux présents dans l’eau douce naturelle en très faible quantité, mais sels minéraux auxquels nous sommes adaptés et qui nous sont nécessaires.
« En 2022, plus de 21 000 stations de dessalement d’eau de mer sont opérationnelles dans le monde, soit presque deux fois plus qu’il y a dix ans, et le secteur connaît une croissance de l’ordre de + 6 % à + 12 % de capacité par an.
En 2030, les capacités de dessalement des pays du Moyen-Orient devraient quasiment doubler.
La majorité des pays du Golfe dépendent désormais en grande partie de l’eau dessalée pour la consommation de leurs habitants : aux Émirats arabes unis (EAU), 42 % de l’eau potable provient d’usines de dessalement représentant plus de 7 millions de mètres cubes (m3) par jour, 90 % pour le Koweït, 86 % pour Oman, 70 % pour l’Arabie Saoudite.
Avec l’essor des solutions disponibles pour répondre à tous les besoins, ces technologies sont désormais demandées sur pratiquement tous les continents et le Moyen-Orient ne représente plus que 50 % des capacités installées dans le monde ». Référence : https://www.ifri.org/fr/publications/etudes-de-lifri/geopolitique-dessalement-deau-de-mer
Des centaines de millions de gens boivent de cette eau, ils n’ont pas tous mal au ventre !! Merci à toi.
Vous savez que j’aime mettre mon grain de sel ( ca tombe bien ici ) partout même quand on ne me le demande pas .Mais quelle est la composition chimique de l’eau H2O ( PURE ) à cela vous y ajouter divers sels minéraux ainsi que des micro-organismes . Quelle est la composition chimique de l’eau distillé H2O ( NON PURE ) elle ne contient aucuns sels minéraux en revanche elle contient divers micro-organismes sauf si elle se trouve en milieu stérile .
Boire de l’eau distillé n’est aucunement NOCIF POUR VOTRE SANTE.
En revanche vous ne vous nourrissiez pas de solide pendant un l’abs de temps suffisamment long et ne buviez que de l’eau distillé vous seriez fortement carencé et mettriez votre santé en grave danger .
L’osmose inversée est une très bonne methode naturelle mais elle a l’inconvénient de filtrer aussi les autres minéraux on obtient une eau à près de 0 th( dureté), de plus par son fonctionnement, le système est de faible rendement.
Tu as raison, ami Le chti français.
Cependant, le système de l’osmose inversée a pris du poids de la bête.
La distillation était pendant longtemps restée la seul utilisée pour les installations de grandes capacités (> 10 000 m3/jour). L’osmose inverse utilisée à l’origine pour les eaux saumâtres, est venue progressivement concurrencer la distillation pour le dessalement de l’eau de mer, tout d’abord pour des productions relativement faibles, surtout en raison des investissements moins importants qu’elle exige. Depuis les années 1990, elle a été mise en œuvre pour des installations de capacités élevées, comme en 1995 en Arabie Saoudite (128 000 m3/jour), en 2005 en Israël (320 000 m3/jour) ou encore en 2006 en Algérie (200 000 m3/jour) et en Australie (125 000 m3/jour).
Boudu! professeur, quel article!Je n’en suis pas resté sur ma faim, euh ma soif. Merci pour toutes ces explications. Une petite question, je sais, je suis un emmerdeur, quel est l’impact du dessalement sur le milieu aquatique et la faune marine ? Sans être écolo, je m’interroge…
Merci de tes encouragements, ami Argo.
Bien évidemment, dès que l’on déplace un élément naturel pour le remettre quelque part, cela modifie un peu (ou beaucoup) les choses.
Selon l’ONU « Pour chaque litre d’eau douce produit, c’est 1,5 litre de « saumure » (eau, à une concentration supérieure à celle de l’eau de mer) chargée de produits chimiques qui est rejeté ».
Il paraîtrait que le fruit des usines de dessalement impacterait sur la température des océans car la saumure rejetée peut avoir jusqu’à 4 °C de plus que l’eau de mer environnante.
Il paraîtrait aussi qu’il y aurait un impact sur la vie marine de par certains éléments dans les saumures (mercure, plomb…) qui pourraient s’avérer être toxique.
En définitive le dessalement de l’eau de mer est très accessoire et on n’en connaît pas trop les conséquences.
Bonjour,
Un grand merci pour cet article très intéressant.
J’ai lu, récemment, dans « Pour la Science » je crois, qu’on avait mis au point de nouvelles membranes osmotiques très performantes.
Merci ami Antiislam.
Également, tu as parfaitement raison, les membranes osmotiques sont très complexes et font l’objet d’améliorations régulièrement, voire de changement de structure.
Merci pour tes articles toujours intéressants aussi.
Oh là là ! Quel article très instructif et détaillé ! Quel travail ! Merci !
Merci MSDO. J’en suis très sensible !