Laïques en Israël – l’heure de l’autonomie a sonné
Connaissez-vous un certain docteur Ram Frouman ? Eh bien, je vais vous le présenter. C’est un écrivain, un intellectuel, qui est aussi le président du Forum Laïque en Israël. Ce cher monsieur a apparemment tapé dans le mille en trouvant la solution idéale au problème religieux de l’Etat juif d’Israël.
En ses propres termes publiés dans le journal Ha’aretz, on peut lire : Nous sommes des laïcs, un secteur comme n’importe quel autre secteur. L’heure de l’autonomie est venue.
Le président du forum laïque, le Dr Ram Froman, exprime dans un article de « Haaretz » la conclusion inévitable du public laïque suite aux résultats des élections : lutter pour l’indépendance laïque.
Contenu de l’article :
Depuis plus d’une décennie maintenant, j’ai consacré une partie considérable de ma vie à essayer de convaincre le public laïc libéral en Israël qu’il doit accepter d’être une minorité sans capacité gouvernementale, et agir en conséquence. Même si je souhaitais un résultat différent, je n’ai pas été surpris par la discrimination. C’était écrit sur le mur depuis longtemps, et trop peu de gens sont prêts à lire l’écriture.
Je recommande de regarder à nouveau la réalité. Un bloc fort s’est formé devant nous qui unit ultra-orthodoxes, kipa Srouga et traditionalistes sous le lien entre nationalisme et religion. Ce bloc est majoritaire dans le pays. Ce n’est pas une égalité, parce que nous avons aussi annexé à « notre » bloc des gens de droite qui détestent Bibi, mais qui ne sont pas prêts à s’asseoir avec des Arabes, des Arabes orthodoxes qui se sentent proches des Juifs religieux peut-être même plus que nous, et des Arabes qui ne sont pas prêts à s’asseoir avec quiconque. Par conséquent, l’autre bloc est réel et solide, et le nôtre est fragile. Le gouvernement de gauche que nous avions eu beaucoup de mal à former, s’avère inopérant et s’est paralysé sur de nombreuses questions qui nous tiennent à coeur. Il n’a duré qu’un an.
… même si ces tendances ne peuvent pas être changées, nous possédons encore quelque chose entre nos mains : l’auto-aveuglement qui conduit la plupart d’entre nous à continuer à croire qu’il serait possible de s’emparer du pouvoir et de briser le cercle. Cet aveuglement nous empêche de nous unir et de faire usage du pouvoir politique dont nous disposons.
La première étape sur la voie du changement est de reconnaître que nous sommes un secteur – l’un des nombreux secteurs de la société israélienne et rien d’autre. Tout comme le sont les Arabes, les ultra-orthodoxes et les Kipa Srouga. Néanmoins, nous sommes trop faibles pour former un État. Nous devons prendre soin de nous. La deuxième étape consiste à prendre conscience que la majorité dans l’État d’Israël ne partage pas les mêmes valeurs que nous. Avant, je pensais qu’il suffisait d’établir un parti laïc qui accepterait de siéger dans n’importe quel gouvernement, à condition qu’il s’occupe des droits du secteur laïc – ce n’est plus valable. Aucun parti laïc ne pourra siéger dans un gouvernement où il y a environ 35 mandats de Ben Gabir, Smotrich et des ultra-orthodoxes, sans perdre complètement sa boussole morale.
La troisième étape consiste à réaliser que dans un avenir prévisible, nous ne pourrons pas changer le régime et parvenir à un gouvernement hégémonique… donc notre objectif devrait être de fortifier l’autonomie autour de nous. Cela commence par la demande d’un système éducatif indépendant et se poursuit par la demande de valeurs et d’autonomie culturelle dans les lieux où nous vivons. Dans la situation actuelle, il semble que bientôt nous aurons également besoin d’une autonomie juridique et gouvernementale, dans un cadre municipal ou régional.
Quand je parle d’autonomie, j’entends généralement deux réserves : la première – ils ne nous la donneront pas, et la seconde – techniquement, ce n’est pas pratique. Concernant la première, je peux seulement dire que l’autonomie n’est pas donnée, mais prise. Je crois que notre secteur a suffisamment de capacités sur lesquelles nous pouvons nous appuyer pour exiger et recevoir telle ou telle autonomie. Quant à l’impraticabilité, oui, c’est une tâche complexe et pleine de grandes difficultés techniques. Et alors? Tout est résolu d’une manière ou d’une autre. Si nous réalisons que notre seule chance de continuer à vivre ici d’une manière qui convient à nos valeurs laïques libérales passe par l’autonomie. Ensemble nous trouverons des solutions à toutes les difficultés.
Mais le plus grand désastre sera si, même après ces élections, nous continuons à fermer les yeux et à croire que seuls des problèmes d’ego nous ont empêchés de gouverner. Si c’est la voie, nous n’aboutirons nulle part. Si nous changeons nos habitudes, je crois que nous trouverons un moyen de vivre ici avec dignité, même si ce n’est pas dans le cadre existant d’un État.
Dans sa lancée, le Dr Frouman devrait plutôt se poser une question honnête, comme par exemple : quel est son degré de judaïsme ? Si la gauche n’est pas juive et refuse de s’adapter aux règles du judaïsme, bien que celles-ci ne soient pas imposées à tous les citoyens, il devrait simplement chercher un autre pays qui répondrait à ses demandes. La Charte israélienne souligne bien : État juif et démocratique.
L’impossibilité de cette prétendue solution est qu’elle émietterait l’État juif d’Israël. N’oublions pas qu’Israël abrite en son sein, une multitude de secteurs. Si ceux-ci faisaient de pareilles demandes, l’État juif d’Israël se dissoudrait, partirait en fumée.
Alors cher Monsieur Frouman, j’ai une solution beaucoup plus aisée et plus pratique : Changez de pays. Allez ailleurs ! Vous savez, les démocraties actuelles s’évaporent à cause de l’adoption de solutions absurdes, analogues à la vôtre…
Rien ne vous contraint de vivre en Israël.
Thérèse Zrihen-Dvir
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