A mi-chemin entre la presse people et les plus sérieux débats relatifs à l’islam en France, un arrêt de la Cour de cassation du 7 mai 2019 statue sur la plainte pour diffamation d’une femme qu’on peut facilement identifier comme la courageuse Jeannette Bougrab.
Cette décision est très importante car il est rare que la Cour de cassation statue sur le concept d’islamophobie. C’est la deuxième fois en deux ans et de toute l’histoire de cette juridiction.
Deux points étaient en discussion : la réalité de la relation avec Charb, tué lors de l’attentat de Charlie Hebdo, et la qualification d’islamophobe qu’une personne lui avait imputée sur twitter.
Si, sur le premier point, la Cour de cassation considère que le prévenu avait pu légitimement mettre en doute la réalité de la relation entretenue avec le dessinateur, sur le second, le plus intéressant finalement car d’une portée générale, il est retenu qu’il est fautif de qualifier à tort quelqu’un d’islamophobe et que cet adjectif est donc actuellement PEJORATIF !
La Cour de cassation, dans ce dernier contentieux, est chargée de refléter l’état des mœurs et des mentalités majoritaires dans la société française. Elle tire donc les conséquences de l’élection de Hollande en 2012 et Macron en 2017 pour considérer que la majorité de la population tient l’islamophobie pour une attitude intellectuelle négative, méprisable voire condamnable…
Voilà qui n’est guère rassurant. Faut-il en vouloir à Jeannette Bougrab de s’être plaint d’être qualifiée d’islamophobe, quand d’autres, il est vrai peu nombreux, ne récusent pas le terme et même – on pense évidemment à Christine Tasin – s’en disent fiers ?
Car le résultat de ce verdict est finalement de conforter l’idée propagée par des hommes politiques et journalistes, entre autres, qu’il n’est officiellement pas bien vu d’être islamophobe, d’avoir peur de l’islamisation de la France, que finalement ce ne serait pas légitime.
La Cour de cassation entérine cette solution, semblant en réalité avoir procédé par chiasme, selon le schéma suivant.
Nier la réalité d’une relation sentimentale (J. B. étant par-dessus le marché assimilée à une « escroc », une « imposteur » et une mythomane cherchant à se victimiser) => cela relève de la liberté du débat public
Accuser d’islamophobie => c’est porter atteinte à l’honneur de la personne, sans possibilité d’excuser par la « bonne foi » du prévenu.
On a bien l’impression que la Cour de cassation a procédé effectivement à un tour de passe-passe et on serait tenté de rétablir plutôt l’ordre du raisonnement de la façon suivante :
Nier la réalité d’une relation sentimentale en qualifiant de menteuse et escroc => c’est porter atteinte à l’honneur de la personne sans possibilité d’excuser par la « bonne foi » du prévenu.
Accuser d’islamophobie => ce n’est pas condamnable car cela relève de la liberté du débat public. On a le droit d’être islamophobe.
Cela semblerait bien plus logique, non ?
On sent encore planer un certain malaise autour de l’islamophobie dans le débat public, à l’heure où, pourtant, tant de gens prennent la plume pour dire que l’islamophobie n’est pas assimilable quant à sa nature à l’antisémitisme, l’handophobie ou l’homophobie par exemple.
Il semble que la personne attaquée en justice par Jeannette Bougrab était Sihem Souid :
https://twitter.com/SouidSihem
https ://www.ojim.fr/portraits/sihem-souid-police-islamique-vos-papiers/
Voici ce qu’on peut lire dans l’arrêt de la Cour de cassation, les lettres étant utilisées dans la décision pour anonymiser son contenu (elles ne correspondent pas aux initiales réelles, au surplus) :
« à la suite de l’attentat terroriste ayant causé la mort de douze personnes, dont F… N…, dit N…, perpétré dans les locaux de l’hebdomadaire Charlie Hebdo, le 7 janvier 2015, de plusieurs interventions de Mme H…, se présentant comme la compagne de N…, dès le lendemain, dans différents organes de presse, pour faire part de sa douleur et de son indignation et de la publication, le 10 janvier 2015, dans un quotidien d’un article intitulé “La famille de N… dément tout “engagement relationnel” du dessinateur avec G… H…”, qui a fait état des déclarations de M. U… N…, frère de la victime, présenté comme s’exprimant à la fois en son nom et en celui de ses parents, Mme A…, alors chargée de mission au ministère de la justice et chroniqueuse à l’hebdomadaire Le Point, a mis en ligne sur son compte Twitter les 15, 16 et 18 janvier 2015, respectivement, les propos suivants : “H… est une escroquerie”, “Il y en a marre des imposteurs qui, de plus, divisent les gens avec leurs discours islamophophes”, “Bien entendu si #Y… et #H… se sentent diffamées j’attends avec impatience leurs plaintes pour diffamation à ces 2 mythomane” et “se victimiser afin que les gens aient de la compassion à son encontre. Vomir aussi son islamophobie #H…” ; que, s’estimant atteinte dans son honneur et sa réputation par ces propos, Mme H… a porté plainte et s’est constituée partie civile le 4 février 2015 ; que Mme A… a été mise en examen puis renvoyée du chef susénoncé devant le tribunal correctionnel, qui l’a relaxée et a débouté Mme H… de ses demandes ».
Devant la Cour de cassation, A (selon toute apparence S. Souid) était défendue par la société civile professionnelle Spinosi et Sureau.
(voir l’article :
La cour d’appel avait retenu une faute civile à son encontre et l’avait condamnée à verser 2 000 euros à la plaignante à titre de dommages-intérêts.
Le raisonnement de la cour d’appel, validé en cassation, n’était d’ailleurs pas d’une absolue clarté car il était retenu que cette prise de position (l’islamophobie) est « d’autant plus attentatoire à son honneur et à sa réputation qu’elle fait suite à l’attentat revendiqué au nom d’une idéologie islamiste dont a été, notamment, victime celui qu’elle présente comme son compagnon ». Oui et alors ? quel rapport ?
Sur le second point, s’agissant de la réalité de la relation avec Charb et l’usage de mots clairement péjoratifs (escroquerie, imposteur, mythomane, victimisation), Jeannette Bougrab est curieusement déboutée de son recours, selon les motifs suivants :
« les passages relatifs aux relations entre F… N… et Mme H…, en ce qu’ils imputent à celle-ci d’avoir faussement prétendu qu’elle a été la compagne du défunt et, par voie de conséquence, d’avoir menti sur cette situation, impute à la partie civile un fait portant atteinte à son honneur ou sa considération suffisamment précis, de nature à être, sans difficulté, l’objet d’une preuve et d’un débat contradictoire ; l’arrêt n’encourt pas pour autant la censure, dès lors que, ainsi que la Cour de cassation est en mesure de s’en assurer, les passages litigieux, qui se sont inscrits, à l’époque des faits, compte tenu de l’émotion qu’ils ont suscitée, dans un débat d’intérêt général, font suite, ainsi que l’arrêt le précise, au démenti exprimé par un frère de F… N…, en son nom et au nom de sa famille, sur les relations entre le défunt et la partie civile, démenti dont la directrice-adjointe de l’hebdomadaire pour lequel il travaillait s’est fait publiquement l’écho sur sa page Facebook, et reposent ainsi sur une base factuelle suffisante, n’ont pas dépassé les limites admissibles de la liberté d’expression, au sens de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme ».
Loin d’avoir recherché si Sihem Souib disposait d’éléments de connaissance personnels lui permettant d’employer un tel langage de charretier (ou de chamelier ?), la Cour de cassation considère qu’elle pouvait ainsi cracher sur Jeannette Bougrab simplement en s’autorisant des propos de la famille de Charb décédé…
On ne saura finalement pas objectivement quelle était la vérité, la famille de Charb n’étant pas forcément la mieux renseignée quant à sa situation sentimentale et alors même que Jeannette Bougrab s’offrait de prouver la réalité de cette relation.
Justice a-t-elle vraiment été rendue ? Je laisse chacun en juger en son for intérieur…
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Aucune phobie ne constitue un délit. Par contre l’incitation aux réactions à caractère raciste est délictueux. Un exemple, le média national en Belgique impose une personne d’origine africaine pour la météo. Rien à redire sinon qu’on est en Europe et il parait, d’après le débat télévisé qu’il n’y a pratiquement pas d’étrangers en France…Donc pas nécessaire..Des gens réagissent disons, mal, claquent leur racisme et hop, c’est les coupables ! Je dis non, le fautif est la station de radio, c’est elle qui a énervé, et inverse les rôles ! Quant aux phobies, j’en ai quelques unes, je vais me renseigner si elles sont délictueuses…agoraphobie, tabacophobie, crétinophobie,….
on peut être islamophobe et s’en glorifier,
personnellement, je suis plutôt islamoréfractaire, je vais écrire à la Grande Cour de Justice pour demander si cela est classé dans les délits, et de quel niveau ?
Messieurs les Juges, que risque-t-on en France si on déclare être islamo-réfractaire ???
C est une histoire banal avec macron notre dame le blacks au blacon Aves des élastiques qui le soutien ou faire croire à un sauvetage unp enfants c’est du pipo
Non seulement la Cour de cassation, comme il est bien dit, a « procédé par chiasme », mais ainsi elle a feint d’ignorer et validé la rouerie de la partie adverse. En effet S. Souid s’est servie du prétexte de la remise en cause de la relation entre Charb et J. Bougrab dont sans doute elle se fiche, pour mieux entâcher et délégitimer sa parole, le but étant toujours le même : exclure de la libre expression, voire de la société les mal pensants en arguant du crime d’islamophobie.
Ne devrions-nous pas abolir de notre vocabulaire ce terme et son concept qui sont les armes terriblement redoutables de ceux qui nous ont choisis comme leurs ennemis… mortels ?