Anna Akhmatova, grand phare de la poésie russe du XXe siècle

Ses portraits sont innombrables. Les artistes peintres ont été nombreux à vouloir transporter sur leurs toiles son physique très expressif – son cou fin, ses yeux langoureusement entrefermés, son fameux nez busqué et sa frange. Parmi eux figurent notamment Nathan Altman, Kouzma Petrov-Vodkine, Zinaïda Serebriakova, Iouri Annenkov, tandis que tous les portraits d’Anna nés de leurs pinceaux sont remplis de tragique. D’ailleurs, cette image de femme fragile et triste, elle l’a elle-même créée dans ses poèmes (Fenêtre sur la Russie).

Anna Akhmatova (1889-1966) est une des plus grandes poétesses russes du XXe siècle et une figure majeure du mouvement acméiste, qui prônait un retour à l’expression poétique claire et précise. Son vrai nom est Anna Andreïevna Gorenko. Née près d’Odessa, elle grandit dans un milieu aisé à Tsarskoïe Selo, où elle commence à écrire très jeune, puis fréquente le milieu culturel russe et européen.

Biographie succincte

Après un mariage avec le poète Nikolaï Goumilev, dont elle eut un fils, elle connaît une vie marquée par les tragédies personnelles et politiques. Goumilev est exécuté en 1921, accusé de contre-révolutionnaire ; son fils est emprisonné à plusieurs reprises par le régime soviétique. Malgré ces persécutions, Akhmatova reste en Russie et continue d’écrire, souvent clandestinement, refusant l’exil.

Elle fut persécutée par le régime stalinien, bannie de l’Union des écrivains et qualifiée de « mélange de nonne et de prostituée » par le ministre de la culture Andrei Jdanov. Ce contexte nourrira son œuvre la plus célèbre, le recueil Requiem, qui témoigne de la souffrance collective sous la terreur stalinienne. Sa poésie mêle un style épuré et un profond humanisme, reflétant la douleur et la résistance.

Œuvre et thèmes

Anna Akhmatova est reconnue pour ses petits poèmes lyriques ainsi que pour de grands cycles poétiques portant sur le temps, la mémoire, le destin de la femme créatrice et les drames du peuple russe sous le régime soviétique. Son style imite le rythme de la parole naturelle, et ses poèmes traduisent un juste équilibre entre émotion brute et retenue formelle.

Parmi ses recueils célèbres : Le Soir (1912), Le Rosaire (1914), Anno Domini MCMXXI (1921) et bien sûr Requiem (écrit entre 1935 et 1940, publié en Occident en 1963), œuvre emblématique de la poésie de la terreur.

Extraits et poèmes traduits

Un court extrait de Requiem, portrait douloureux d’une mère attendant son fils en prison :
« Je me tiens toute la nuit dans la cour,
Et la pierre est froide sous mes pieds… »

Illustration de « Requiem » : ce poème dramatique a été écrit en mémoire des victimes des purges soviétiques. Il exprime la douleur collective avec sobriété et dignité, témoignant du courage d’Akhmatova face à la terreur.

Un autre poème célèbre :
« Le temps, le temps… je ne connais rien de plus lourd… »

Ces poèmes, traduits dans de nombreuses langues, ont contribué à faire d’Akhmatova une voix universelle de la résistance culturelle.

Influence et reconnaissance internationale

Son œuvre a largement dépassé la Russie, influençant la poésie contemporaine mondiale. En 1965, alors qu’elle est âgée, elle reçoit un diplôme honorifique à Oxford, témoignant de la reconnaissance internationale de sa poésie.

Elle est souvent surnommée « la reine de la Neva » (rivière de Saint-Pétersbourg) ou « l’âme de l’Âge d’Argent » de la poésie russe.

Anna Akhmatova est morte en 1966 et a été enterrée près de Komarovo, dans la région de Saint-Pétersbourg.

Recueil de poèmes et de fragments écrits par la poétesse entre 1945 et 1959 et retrouvés après sa mort.

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1 Commentaire

  1. Merci Jules pour cette magnifique découverte ! Je vais essayer de trouver un exemplaire de ses oeuvres. Bonne journée.