Macron nomme un de ses ex-ministres au parquet de Paris : ça passe crème ?

À moins de deux ans de l’élection présidentielle, voilà une nomination qui risque bien de ne pas passer inaperçue.

Au point de créer une rentrée politique au parfum de scandale ? En plein 15 août, alors que la France processionne ou sommeille sous un soleil de plomb, que nos hommes et femmes politiques sont en vacances et que l’opinion encore éveillée a les yeux rivés sur la seule Alaska, on apprend par le Journal officiel qu‘Emmanuel Macron vient de nommer par décret Charlotte Caubel procureur adjointe au parquet de Paris.

Tout irait bien si nous n’étions pas dans une fin de règne qui commença par l’affaire Fillon en pleine campagne de 2017 et qui s’achève par la condamnation de Marine Le Pen, avec le risque que la favorite de 2027 ne puisse concourir.

Un Président sans majorité, qui bat des records d’impopularité et qui est déjà suspecté d’instrumentaliser la Justice à des fins politiques ne pouvait pas procéder à une nomination aussi contestable. Et déjà contestée pour deux motifs, dont un seul suffirait pour lui ôter toute crédibilité : son manque d’indépendance et son incompétence.
Charlotte Caubel, une proche de Macron, Borne et Édouard Philippe !

Charlotte Caubel, magistrat de profession, n’est pas une macroniste de rencontre mais une vraie, une pure, une engagée. Sa carrière décolle en 2017 à la faveur de la première élection de Macron : en mai 2017, elle est nommée conseillère justice au cabinet du Premier ministre Édouard Philippe. Devenue inspectrice de la Justice, elle est nommée, en septembre 2020, directrice de la Protection judiciaire de la jeunesse au ministère de la Justice, aux côtés de Dupond-Moretti. En mai 2022, pour le second quinquennat, l’ascension se poursuit : elle est nommée secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée de l’Enfance au sein du gouvernement Élisabeth Borne. Non reconduite dans les gouvernements suivants, elle est membre du parti Horizons d’Édouard Philippe. Et maintenant que se profile la fin du macronisme, voilà qu’elle accède à l’un des postes les plus sensibles au parquet de Paris, à moins de deux ans d’une présidentielle dont les deux favoris sont son chef de parti et Marine Le Pen, déjà inquiétée par la Justice ! Le Monde précise qu’elle a été soutenue par Borne et Darmanin, l’actuel garde des sceaux. Comme modèle d’indépendance…
À ce sujet — Selon un sondage, Macron et Bayrou s’écroulent, Retailleau s’envole !

Le CSM avait émis un avis défavorable pour Créteil !

Alors, est-ce sa compétence incontournable qui a guidé Emmanuel Macron dans cette nomination ? Visiblement pas, car il y a de cela quelques mois, fin avril, son nom avait déjà défrayé la chronique politico-judiciaire car le CSM (Conseil supérieur de la magistrature) avait rendu un avis défavorable à sa nomination  au poste de procureur de Créteil, alors qu’elle était déjà soutenue par le ministre de la Justice Gérald Darmanin. « La perspective de son arrivée à la tête d’un important parquet de la région parisienne avait suscité des interrogations dans la magistrature, écrit Le Monde, compte tenu de son expérience, jugée plus faible que celle d’autres candidats. »

Manque d’expérience, manque d’indépendance politique peut-être, mais aussi, toujours selon Le Monde, risques de conflits d’intérêts ! En effet, « sa situation familiale pouvait également être la source de conflits d’intérêts réels ou apparents : son époux, Alexandre Bompard, est le PDG de Carrefour et l’ancien patron de Darty, deux entreprises avec des liens directs ou indirects avec le Val-de-Marne ». Toujours selon Le Monde, elle avait alors été classée 16e sur 17 dans la liste des prétendants au poste selon leur expérience ! Alors, qu’en est-il de l’expérience requise pour le poste – excusez du peu – de procureur adjoint au parquet de Paris ?

Le précédent Richard Ferrand
Cette nomination qui devrait à juste titre susciter la polémique, ou tout du moins soulever quelques interrogations, révèle que le macronisme n’entend pas laisser la place sans coup férir : et si les urnes lui sont défavorables, tout lui est bon pour tenter de se maintenir et d’empêcher ses adversaires politiques d’accéder au pouvoir ou, s’ils y parviennent, d’avoir les coudées franches pour gouverner. La nomination de Charlotte Caubel est en cela comparable à celle de Richard Ferrand au Conseil constitutionnel : pour l’un comme pour l’autre, la question de la compétence et de l’indépendance est clairement posée. Les appels hypocrites au respect des décisions de la Justice comme on les a entendus chez Borne et Bayrou au moment de la dernière censure du Conseil constitutionnel n’en deviennent que plus dérisoires. Et, puisqu’on parle de censure, une chose est sûre : avant celle qui pourrait frapper Bayrou dans quelques semaines, Macron cherche à bétonner ses derniers bastions. Il n’empêche : il faudra bien que le peuple s’exprime et juge le macronisme, dans tous ses échecs et ses abaissements. Jusque dans cette emprise partisane sur l’appareil judiciaire.

Boulevard Voltaire 

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8 Commentaires

  1. Dans le Reich, on profitait de la période estivale des vacances pour faire passer les décisions inadmissibles.

  2. Bah ou, n’empêche que Macron est un fin stratège! il a plein pouvoir pour encore 2 années, pourquoi s’en priver!
    Ils sont en vacances au R N ? disparus de la corculation! Je plaisante, eux aussi ont droit aux vacances mais les destinations restent confidentielles.