Une soirée avec Rossini

 

Illustration : Pesaro, ville natale de Rossini. En médaillon, photographie du compositeur réalisée en 1865.

Nul autre que Gioachino Rossini pouvait naître un 29 février et mourir un vendredi 13 ! Le compositeur gastronome est né à Pesaro le 29 février 1792 et mort à Passy le 13 novembre 1868. Son œuvre la plus connue est le Barbier de Séville, d’après Beaumarchais (Le barbier de Séville ou la précaution inutile), créée le 20 février 1816 à Rome, cette première représentation connut un échec retentissant. Ci-dessous un extrait de Wikipédia :

« La première interprétation eut lieu le 20 février 1816 au Teatro di Torre Argentina à Rome, avec Gertrude Giorgi-Righetti (Rosine), Manuel Garcia (Almaviva), Luigi Zamboni (Figaro), Bartolomeo Botticelli (Bartolo), et Zenobio Vitarelli (Basile). Ce fut une succession de catastrophes : non seulement la cabale montée par Gaspare Spontini, rival de Rossini, fonctionna à merveille mais le ténor Garcia, qui avait voulu s’accompagner à la guitare (qui était désaccordée), fut sifflé. Rossini en habit noisette au clavecin pour le continuo, fut chahuté. Vitarelli trébucha et saigna du nez. Pour couronner le désastre, un chat traversa la scène et la salle entière se mit à miauler. La représentation se poursuivit dans un désordre indescriptible. Le lendemain, Rossini déclara qu’il ne participerait pas à la deuxième représentation. Une fois couché, il fut réveillé par la foule venue acclamer le compositeur ébahi ».

À présent, il est temps de tordre le coup à une légende tenace. La veille de la création à Rome, Rossini n’aurait pas écrit l’ouverture, il l’aurait fait durant la nuit, puis il aurait fait imprimer la partition avec les parties pour chaque instrument ! Ça ne tient pas debout ! En réalité, le compositeur avait déjà composé cette ouverture pour Aureliano in Palmira (26 décembre 1813) et Elisabetta, regina d’Inghilterra (4 octobre 1815). Nous allons écouter la version de 1813 :

Source YouTube

Vers la fin de sa vie, on dit que Rossini aurait réalisé une version pour quatuor d’hommes :

https://www.youtube.com/watch?v=T55VGSISxIE&list=RDT55VGSISxIE&start_radio=1

 

Les paroles m’ont fait un peu peur « jamais vaincus, poil au.. », on pouvait s’attendre au pire !

En raison de la notoriété du Barbier, je resterai un peu plus de temps sur cet opéra que vous pourrez trouver en intégrale à la fin de l’article, voici le célèbre largo al factotum :

 

Pour la cavatine Una Voce Poco Fa, si on retrouvait la Callas ?

https://www.youtube.com/watch?v=kG0BIOgl-aQ&list=RDkG0BIOgl-aQ&start_radio=1

On quitte le Barbier un instant pour une ouverture parmi les plus célèbres, La gazza ladra (la pie voleuse) :

https://www.youtube.com/watch?v=3MIbDR1QRHs&list=RD3MIbDR1QRHs&start_radio=1

Retour au Barbier avec l’air de la calomnie dont vous trouverez le texte ci-dessous : à gauche les paroles originales, au milieu leur traduction littérale et à droite les paroles utilisées dans la version française de l’opéra que nous allons d’ailleurs écouter

Texte original
Traduction littérale
Texte français
(version Castil-Blaze, 1824)
La calunnia è un venticello
Un’auretta assai gentile
Che insensibile, sottile,
Leggermente, dolcemente,
Incomincia, incomincia a sussurrar.
Piano, piano, terra terra,
Sottovoce, sibilando,
Va scorrendo, va scorrendo
Va ronzando, va ronzando
Nell’orecchie della gente
S’introduce, s’introduce destramente
E le teste ed i cervelli
Fa stordire e fa gonfiar.
Dalla bocca fuori uscendo
lo schiamazzo va crescendo,
Prende forza a poco a poco,
Vola già di loco in loco,
Sembra il tuono, la tempesta
Che nel sen della foresta
Va fischiando, brontolando,
E ti fa d’orror gelar.
Alla fin trabocca e scoppia, si propaga, si raddoppia,
E produce un’esplosione
Come un colpo di cannone,
Come un colpo di cannone,
Un tremuoto, un temporale,
Un tumulto generale
Che fa l’aria rimbombar.
E il meschino calunniato,
Avvilito, calpestato,
Sotto il pubblico flagello,
Per gran sorte va a crepar.
La calomnie est un petit vent
Une petite brise très gentille
Qui, imperceptible, subtile,
Légèrement, doucement,
Commence, commence à murmurer.
Piano, piano, terre à terre,
À voix basse, en sifflant,
Elle glisse, elle glisse
Elle rôde, elle rôde
Dans l’oreille des gens
Elle s’introduit, s’introduit adroitement
Et les têtes et les cervelles
Étourdit et fait gonfler.
En sortant de la bouche
Le tapage va croissant,
Il prend force peu à peu,
Vole déjà de lieu en lieu,
Il ressemble au tonnerre, à la tempête
Qui au cœur de la forêt
Va sifflant, grondant,
Et vous glace d’horreur.
À la fin elle déborde et éclate, se propage, redouble,
Et produit une explosion
Comme un coup de canon,
Comme un coup de canon,
Un séisme, un orage,
Un tumulte général
Qui fait retentir l’air.
Et le pauvre calomnié,
Humilié, piétiné
Sous le fléau public,
Par grand malheur s’en va crever.
C’est d’abord rumeur légère,
Un petit vent rasant la terre.
Puis doucement,
Vous voyez calomnie
Se dresser, s’enfler, s’enfler en grandissant.
Fiez-vous à la maligne envie,
Ses traits lancés adroitement,
Piano, piano, piano, piano,
Piano, par un léger murmure,
D’absurdes fictions
Font plus d’une blessure
Et portent dans les cœurs
Le feu, le feu de leurs poisons.
Le mal est fait, il chemine, il s’avance ;
De bouche en bouche il est porté
Puis riforzando il s’élance ;
C’est un prodige, en vérité.
Mais enfin rien ne l’arrête,
C’est la foudre, la tempête.
Mais enfin rien ne l’arrête,
C’est la foudre, la tempête.
Un crescendo public, un vacarme infernal
Un vacarme infernal
Elle s’élance, tourbillonne,
Étend son vol, éclate et tonne,
Et de haine aussitôt un chorus général,
De la proscription a donné le signal
Et l’on voit le pauvre diable,
Menacé comme un coupable,
Sous cette arme redoutable
Tomber, tomber, terrassé.

https://www.youtube.com/watch?v=ZjQpnnCpuGE

Et voici maintenant la version originale :

https://www.youtube.com/watch?v=YUtoL-IDUlk&list=RDYUtoL-IDUlk&start_radio=1

Je termine avec le Barbier et ce sextuor époustouflant qui conclut le premier acte. De gauche à droite et en commençant par le deuxième rang, on trouve Basile, le comte Almaviva, Figaro, Rosine, Marceline et Bartolo, ce dernier totalement dépassé par ce qui lui arrive. On pourra remarquer le « crescendo rossinien » typique du compositeur.

 

Profitons à présent du ballet de Guillaume Tell :

https://www.youtube.com/watch?v=XDR3mWsS3UA&list=RDXDR3mWsS3UA&start_radio=1&t=329s

Rossini, c’est aussi ÇA :

https://www.youtube.com/watch?v=xgszJkLgyok&list=RDxgszJkLgyok&start_radio=1

On a tous entendu parler du tournedos Rossini, recette créée en l’honneur du compositeur mais on ne sait pas s’il en est l’inventeur.

Un peu de sérieux à présent avec le Stabat Mater créé à Paris le 7 janvier 1842 :

https://www.youtube.com/watch?v=lx79MjEGteo&list=RDlx79MjEGteo&start_radio=1&t=3200s

Et voici le finale avec les chœurs et l’orchestre du conservatoire de la Réunion dirigés par Pablo Pavon. Votre serviteur est à l’extrême droite (je fais référence à son placement, je précise) et nous chantons l’œuvre par cœur, mieux que les professionnels. On excusera la mauvaise qualité d’image mais la position de l’opératrice n’était pas idéale.

https://www.youtube.com/watch?v=UyHiVMILC04

En 2010 les caméscopes étaient encore très lourds ce qui explique qu’il manque la fin que voici, ne tirez pas sur les amateurs, merci !

 

Comme promis, l’intégrale du Barbier (version Abbado) :

https://www.youtube.com/watch?v=oSjyDH4MJCc&list=RDoSjyDH4MJCc&start_radio=1&t=1679s

DERNIÈRE MINUTE 

Le hasard fait bien fait les choses, dernièrement j’avais écrit sur Vivaldi. Or, on vient de trouver dans une cave de Liverpool des manuscrits qui ne laissent aucun doute sur leur authenticité, oui c’est bien du Vivaldi. Malheureusement au début des années 60 quatre jeunes délinquants Paul, John, George et Ringo se sont appropriés ces musiques en faisant croire qu’elles venaient d’eux, décidément on ne peut faire confiance à personne ! Mais vous savez ce qu’on dit : Le mensonge prend l’ascenseur, la vérité prend l’escalier mais elle finit toujours par arriver.

Filoxe

 

 

 

 

 

 

 

 

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1 Commentaire

  1. Bonjour Filoxe, Ah Herman Prey dans le barbier! Quelle prestance et quelle fougue! Le duo des chats quelle merveille! Bien que je préfère la version donnée par E. Schwarzkopf lors de son recital d’adieu en 1969. Rossini à aussi laissé libre cours à ses démons dans une oeuvre appelée « péchés de vieillesse ». Je ne suis pas d’accords quand tu dis que les Beatles ont pillé Vivaldi, le seul titre inspiré par « Il prete rosso » est Eleanor Rigby, inspiré de loin des « quatres saisons » sur les conseils de Jane Asher, petite amie à l’époque, de Paul, Rossini ne s’est d’ailleurs pas gêné pour spolier le succès du barbier à Paisiello. Le stabat mater  » mieux interprété que des professionnels », je répondrai en toute modestie que l’on est jamais aussi bien vanté que par soi même! 😅😅😅 bonne fin de semaine.