Allah sait-il que, parmi ses créatures, il en est d’indomptables ? Les apostats !

Apostasie: Ce n’est pas le mot, mais l’idée que l’on peut trouver dans le Coran. Il utilise le verbe « riddah » (« revenir en arrière ») , signifiant par là que l’apostasie est le retour en arrière d’un musulman qui avait emprunté le bon chemin , celui d’Allah (« charia ») et qui a ensuite « suivi  les pas du Diable » (2, 208). Les apostats (« murtad« ) sont « ceux qui n’ont plus la foi après avoir cru » (3, 86 et 90). « Ils ressemblent à quelqu’un qui a allumé un feu ; puis quand le feu a illuminé tout à l’entour, Dieu a fait disparaître leur lumière et les a abandonnés dans les ténèbres où ils ne voient plus rien. » (2, 17). Le nom « Al-Irtidâd » ( « apostasie, acte d’abandonner de l’islam ») est un terme forgé plus tard par les jurisconsultes musulmans.

Les guerres d’apostasie

Après la mort du Prophète, les tribus arabes qui s’étaient ralliées à Mahomet ont tenté de rompre cette alliance. Les historiographes musulmans ont qualifié les combats qui s’ensuivirent entre ces tribus rebelles et les troupes des premiers califes (« successeurs ») de  Mahomet, de « guerres de la « ridda » (« guerres de l’apostasie »).

Cependant, il dut s’agir plutôt d’un conflit politique entre le nouvel état islamique et le système tribal, aussi bien que d’une résistance économique à la mise en coupe réglée des peuples soumis à l’islam. Un des chefs s’opposant au pouvoir montant de l’état islamique fut Musaylima. A l’instar de Mahomet, il recevait des révélations en prose rimée et prêchait une religion nouvelle, centrée sur le dieu unique al-Rhaman. A l’issue de ces guerres, les califes contrôlèrent l’ensemble de la péninsule arabique.

Ce récit fonde la perception de l’apostasie comme crime d’état.

Les « annulatifs de l’islam »

Les juristes musulmans établirent avec le temps une liste d’ « annulatifs de l’islam », actes dont chacun fait automatiquement d’un musulman, un apostat. Voici les 10 annulatifs les plus importants :

1er Annulatif : Le « shirk » (Associer des partenaires à Allah)
2ème Annulatif : L’intercession par des mécréants
3ème Annulatif : Ne pas considérer les mécréants comme infidèles
4ème Annulatif : Croire que les lois humaines sont meilleures que la « charia »
5ème Annulatif : Haïr quelque chose de la religion
6ème Annulatif : Se moquer de la religion
7ème Annulatif : La sorcellerie et la magie
8ème Annulatif : Soutenir les mécréants contre les musulmans
9ème Annulatif : Détourner les gens de la voie d’Allah
10ème Annulatif : Abandonner totalement la religion
«Cette liste n’est pas limitée. Les sujets qui peuvent conduire un musulman ( ou musulmane) à renier l’islam, ne sont pas définis à l’avance. Ils dépendent du temps et de l’espace et surtout du prince des croyants.
Par exemple, une musulmane qui épouse un infidèle qui ne se convertit pas préalablement à l’islam, devient une apostate, car l’endogamie est une prescription coranique (2, 221 ; 4, 25). Ce qui explique que la majorité des Français qui se marient avec des musulmanes, prononcent la profession de foi et deviennent automatiquement des adeptes de Mahomet.»[1]

Le mythe de la liberté de religion consentie par l’islam

 » Nulle contrainte en religion !«  (2, 256) Qui n’a entendu cette phrase de la part d’un apologiste de l’islam prétendant qu’elle garantit la liberté de religion par le Coran ? Or cette mansuétude ne manque pas d’intriguer au vu des centaines de menaces qui abondent dans le Coran contre toute espèce de mécréants (juifs, chrétiens, « associateurs« , « polythéistes« , « hypoctites« , « gens du Feu« , « adorateurs du Talgut« …).

– La première hypothèse est que c’est une parole du prophète adressée aux Mecquois, au début de sa prédication pour demander qu’on n’empêche pas ses premiers auditeurs de se convertir à sa nouvelle religion. Il s’agirait alors d’une liberté d’entrer dans l’islam… et non d’en sortir.

– Selon d’autres interprétations, si ce verset signifiait que l’islam reconnaissait pleinement la liberté religieuse, il aurait été abrogé par ce qu’on appelle « le verset de l’Epée » : « Après que les mois sacrés expirent, tuez les associateurs où que vous les trouviez. Capturez-les, assiégez-les et guettez-les dans toute embuscade. Si ensuite ils se repentent, accomplissent la Salat et acquittent la Zakat, alors laissez-leur la voie libre, car Dieu est Pardonneur et Miséricordieux. » (9, 5).

– Sans même chercher si loin, il suffit de lire le verset en entier et le suivant: « Nulle contrainte en religion ! Car le bon chemin s’est distingué de l’égarement. Donc, quiconque mécroît au Rebelle tandis qu’il croit en Dieu saisit l’anse la plus solide, qui ne peut se briser. Et Dieu est Audient et Omniscient.« (2, 256). « Dieu est le défenseur de ceux qui ont la foi: Il les fait sortir des ténèbres à la lumière. Quant à ceux qui ne croient pas, ils ont pour défenseurs les Tagut, qui les font sortir de la lumière aux ténèbres. Voilà les gens du Feu, où ils demeurent éternellement. » (2, 257). C’est-à-dire que chacun est libre de choisir le mauvais chemin mais qu’il en paiera le prix fort.

De même, certains ne citent que le début du verset suivant : « La vérité émane de votre Seigneur. Que celui qui le veut croie donc et que celui qui le veut soit incrédule« . Ils se gardent de citer la suite :  » Nous avons préparé pour les injustes un Feu dont les flammes les cernent. Et s’ils implorent à boire on les abreuvera d’une eau comme du métal fondu brûlant les visages. Quelle mauvaise boisson et quelle détestable demeure! (18, 29).

Ce sont là deux purs exemples de la « taqîya » par omission (« kitman« )

Pour montrer que l’islam ne veut contraindre personne, on cite cet autre verset : « Si ton Seigneur l’avait voulu, tous les habitants de la terre auraient cru. Est-ce à toi de contraindre les hommes à être croyants alors qu’il n’appartient à personne de croire sans la permission de Dieu » (10:99-100). Ce verset vient en réalité seulement réaffirmer qu’Allah, et non les hommes, reste maître du jeu en matière de conversion car « Il égare qui il veut »( 14, 4).

Châtiments de l’apostat

Le Coran mentionne le châtiment de l’apostat dans l’au-delà : « Quiconque a renié Dieu après avoir cru… – sauf celui qui y a été contraint alors que son coeur demeure plein de la sérénité de la foi – mais ceux qui ouvrent délibérément leur coeur à la mécréance, ceux-là ont sur eux une colère de Dieu et ils ont un châtiment terrible» (16, 106).

Le Coran annonce aussi le châtiment des apostats dans le vie terrestre  « Ils ont professé l’incrédulité, puis ils ont juré par Dieu qu’ils n’avaient pas prononcé de telles paroles. Ils furent incrédules après avoir été soumis. Ils aspiraient à ce qu’ils n’ont pas obtenu et n’ont trouvé à la place que la faveur que Dieu et son Prophète ont bien voulu leur accorder. S’ils se repentaient, ce serait meilleur pour eux; mais s’ils se détournaient, Dieu les châtiera d’un châtiment douloureux en ce monde et dans l’autre et ils ne trouveront, sur la terre, ni ami, ni défenseur. » (9, 74).

« Ceux qui rompent le pacte qu’ils avaient fermement conclu avec Dieu coupent ce que Dieu a ordonné d’unir, et sèment la corruption sur la terre. Ceux-là sont les vrais perdants (2 : 27). -. Or ceux qui « sèment la corruption sur la terre« , Allah autorise à les tuer : «  C’est pourquoi Nous avons prescrit pour les Enfants d’Israël que quiconque tuerait une personne non coupable d’un meurtre ou d’une corruption sur la terre, c’est comme s’il avait tué tous les hommes. » «  La récompense de ceux qui font la guerre contre Dieu et Son messager, et qui s’efforcent de semer la corruption sur la terre, c’est qu’ils soient tués, ou crucifiés, ou que soient coupées leur main et leur jambe opposées, ou qu’ils soient expulsés du pays. Ce sera pour eux l’ignominie ici-bas; et dans l’au-delà, il y aura pour eux un énorme châtiment. »(5, 32-33).

Cela réduit à néant l’argumentation des musulmans « libéraux » d’aujourd’hui, qui tentent d’opposer la prétendue douceur du Coran sur l’apostasie aux autres textes de l’islam. [2]

Les hadiths condamnent les apostats à mort

“Le sang d’un musulman qui confesse que nul n’a le droit d’être adoré à part Allah et que je suis son Apôtre ne peut être versé que dans trois cas : en châtiment pour un meurtre, une personne mariée qui a des relations sexuelles illégales et celui qui renonce à l’islam (l’apostat) et laisse les musulmans (ne fait plus partie de la communauté).”(Bukhâri 9 :83 :17 et Muslim 16 : 4152).

« Le Prophète a dit :« Si quelqu’un quitte l’islam, tuez-le ! »  (Bukhâri 9.84.57).

Le repentir doit être proposé aux apostats avant l’application de la sentence qui ne prendrait effet qu’après une courte période d’attente (qui peut être de 3 jours). Il s’agit d’une mesure recommandée  par certains juristes de la Tradition, s’appuyant sur la notion de repentir dans le Coran (3, 89 ; 5, 34 ; 9, 5 ; 9, 11) mais cette échappatoire n’est pas toujours proposée à l’apostat car son crime, portant atteinte à la religion et à l’Etat, est considéré comme le plus impardonnable qui soit : » En vérité, ceux qui ne croient plus après avoir eu la foi, et laissent augmenter encore leur mécréance, leur repentir ne sera jamais accepté. Ceux là sont vraiment les égarés. » (3, 90).

L’islam, religion naturelle de l’homme

Selon le Coran, l’islam est « la religion naturelle » (dîn al-fitra), cette croyance est innée en chaque homme : « Dirige tout ton être vers la religion exclusivement [pour Allah], telle est la nature qu’Allah a originellement donnée aux hommes – pas de changement à la création d’Allah -. Voilà la religion de droiture; mais la plupart des gens ne savent pas » (Coran 30.30). Ce qui se retrouve dans le hadith réputé authentique : «Le Prophète a dit: « Il n’y a pas de nouveau-né qui ne soit musulman à sa naissance. Ensuite ce sont ses parents qui le changent en Juif, en Chrétien ou en Adorateur du feu. De la même façon qu’un animal donne naissance à un bébé parfaitement constitué. Le voyez-vous démembré ? » (Bukhâri 1359).

Cela permet un élargissement considérable de la notion d’apostasie, puisque tous les non-musulmans ont renié, qu’ils le sachent ou non, leur appartenance à leur religion primordiale !

L’action ou la délation contre les apostats sont des actes de piété

Contre les apostats, « la meilleure communauté qu’on ait fait surgir sur la terre » (3, 110) est la gardienne du Bien, elle en sera récompensée : « Et qu’il se trouve parmi vous un groupe qui appelle au bien: leur ordonnant ce qui est convenable et leur interdisant ce qui est blâmable : voilà ceux qui seront heureux » (3, 104). Le hadith n’est pas en reste : « D’après Abou Sa’id Al Khoudri, le Prophète a dit : « Celui d’entre vous qui voit un mal qu’il le change par sa main. S’il ne peut pas alors par sa langue et s’il ne peut pas alors avec son coeur et ceci est le niveau le plus faible de la foi ». (Muslim n°49).

« Sans aucun doute, j’ai entendu l’Apôtre d’Allah dire : « lors des derniers jours, il apparaîtra de jeunes personnes insensées qui diront les meilleures paroles mais dont la foi n’ira pas a- delà de leur gorge et ils quitteront leur religion comme une flèche quitte le jeu. Alors, où que vous les trouviez, tuez les, car celui qui les tuera aura une récompense au Jour de la Résurrection« . (Bukhâri, Livre 84,  n°64).

« Chaque individu a le droit de saisir les tribunaux étatiques pour juger un apostat »[3]. Il s’ensuit que personne n’est à l’abri d’une accusation d’apostasie, même celui qui se croit sincèrement fidèle à la foi musulmane.

Formules d’évitement dans le droit musulman contemporain

Le double jeu du droit pénal et du droit musulman : les pays arabes ont inscrit dans leurs constitutions le principe de la liberté religieuse mais la plupart n’ont pas inclus dans leurs codes pénaux une disposition sur l’apostasie (sauf la Soudan et la Mauritanie qui la condamnent à mort). « L’absence de disposition pénale ne signifie nullement que le musulman peut librement quitter sa religion. En effet, les lacunes du droit écrit sont à combler par le droit musulman (« charia« ).[4]. De plus, »le concept de l’apostasie s’est vite élargi pour comprendre aussi bien ceux qui abandonnent l’Islam que ceux qui en ont une conception divergeante ou constituent des opposants politiques. »[5]  Si tous les apostats ne subissent pas la peine de mort, ils sont tous considérés en pays musulman comme morts civilement : ni mariage, ni possession de biens, ni héritage, ni testament, ni garde de leurs enfants ne leur sont reconnus.

Tentatives inabouties pour faire reconnaître la liberté de changer de religion aux musulmans de France

Il est symptomatique qu’à plusieurs reprises la question de la liberté de changer de religion ait bloqué l’intégration des musulmans dans le cadre laïque du droit français. Ce fut le cas en Algérie en 1870, lorsque les « indigènes musulmans » eurent la possibilité, par le décret Crémieux, de demander la naturalisation française, à condition de renoncer publiquement à 5 pratiques du droit coraniques dont la condamnation de l’apostasie. Ce fut encore le cas, en 2000, lors de la rédaction de la « Charte des musulmans de France » quand certains groupes ont obtenu que soit effacée « la liberté de changer de religion« [6]. En 2021, la « Charte des principes pour l’islam de France« , citant l’inévitable verset  « Nulle contrainte en religion« (cf. plus haut), déclarait enfin que « La liberté est garantie par le principe de laïcité qui permet à chaque citoyen de croire ou de ne pas croire, de pratiquer le culte de son choix et de changer de religion. Ainsi les signataires s’engagent à ne pas criminaliser un renoncement à l’islam, ni à le qualifier « d’apostasie » (ridda), encore moins de stigmatiser ou d’appeler, de manière directe ou indirecte, à attenter à l’intégrité physique ou morale de celles ou de ceux qui renoncent à une religion. ». Cette charte a été rejetée par quatre associations composantes du CFCM. La crise au sein de cette fédération d’associations musulmanes n’est pas encore résolue.

Situation actuelle des apostats de l’islam

Même dans le cas où la criminalisation de l’apostasie n’est pas inscrite dans la loi, les apostats vivent constamment sous la menace d’un assassinat. Ce fut le cas de Salman Rushdie, poignardé aux USA, 33 ans après la sortie des Versets sataniques. C’est le cas aujourd’hui de nombreux youtubeurs qui interviennent régulièrement à travers le monde, rendant public le cheminement personnel qui leur a fait quitter l’islam. Quelques exemples en langue française, dont les deux premiers à visage découvert :

Majid OUKACHA «Même en France, quitter l’islam est mal vu, tabou et dangereux », publié le 03/07/2024.  https://youtu.be/uWZZe1OPtes

Jack le Fou, entretien à la télévision québécoise, le 03/10/2024.  https://youtu.be/hfPbptEvEwk

Mustafa QADRI, « Pourquoi j’ai quitté l’islam » in Résistance républicaine, publié le 26/06/2020.  https://resistancerepublicaine.com/2020/08/26/mustafa-qadri-pourquoi-jai-quitte-lislam/

Hamdane AMMAR, « Pour les islamologues musulmans, l’islam ne tue pas celui qui le quitte : mensonge ! », in Riposte laïque, publié le 30/05/ 2024.  https://ripostelaique.com/pour-les-islamologues-musulmans-lislam-ne-tue-pas-celui-qui-le-quitte-mensonges.html

Et un peu d’humour en anglais avec sous-titres en français : David WOOD, « Comment faire apostasier un musulman », publié en 2018. https://youtu.be/XSHkAsTZz8g

En conclusion, sur le sujet crucial de l’apostasie qui coûta la vie à d’innombrables martyrs, l’islam est loin d’avoir clarifié sa position. Si bien que ceux qui se recommandent aujourd’hui de ses textes ne peuvent que se débattre dans cette ambigüité. Les uns brandissent un ou deux versets soigneusement découpés pour proclamer la liberté de croyance ; les autres peuvent puiser, par centaines, les arguments islamiquement authentiques qui légitiment la persécution des téméraires qui s’émancipent de leur religion…

[1] Hamdane AMMAR, « L’apostasie en islam : la mort ! », in Riposte Laïque, publié le 11 novembre 2016. https://ripostelaique.com/lapostasie-en-islam-la-mort.html

[2] Antienne des « nouveaux penseurs » de l’islam et de leurs auxiliaires, voir par ex. Emmanuel PISANI, « Apostasie en islam. Vers la liberté religieuse ? », in Etudes, revue d eculture contemporaine, publié dans le numéro 4221, novembre 2015.  https://www.revue-etudes.com/article/apostasie-en-islam-vers-la-liberte-religieuse/17156

[3] Sami ALDEEB, « Le délit d’apostasie en droit arabe et musulman  1994 », publié  le 30/11/2015.  https://sami-aldeeb.com/french-le-delit-dapostasie-en-droit-arabe-et-musulman-1994/

[4] Sami ALDEEB, op. cit.

[5] Sami ALDEEB, ibid.

[6] Eric CHAUMONT et Marie-Thérèse URVOY, « Apostasie », In Dictionnaire du Coran, ss. la direction de Mohammad Ali Amin MOEZZI, Robert Laffont, Paris, 2007, p. 66 .

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