En Allemagne, le débat fait rage : faut-il interdire l’AfD ?

Le politologue Albrecht von Lucke a sévèrement critiqué les électeurs de l’AfD

Article du quotidien « Die Welt »

Émission télé « Hart aber fair » – « Dur mais juste » – du 7 octobre

« La plupart des électeurs AfD ne savent même pas ce qu’est l’ordre libéro-démocratique »

Dominik Lippe

Sur « Hart aber fair » lundi soir, il était question du sujet d’actualité : l’interdiction de l’AfD. Un ancien adhérent du parti parlait de membres « totalement radicalisés ». Le publiciste Albrecht von Lucke a fait le procès des électeurs de l’AfD – mais a mis en garde contre une interdiction.

« Nous n’avons pas besoin d’une procédure d’interdiction de l’AfD, mais d’une nouvelle politique », a assuré Markus Söder (CSU) lundi à Munich. « Combattre l’AfD veut dire pratiquer une politique meilleure que celle de la coalition en feux tricolores. » Dans le parti allemand apparenté (la CDU, NdT), règne en partie une autre opinion à cet égard. Après le dernier esclandre au Landtag de Thuringe, un groupe de députés intergroupes parlementaires autour du politicien de la CDU, Marco Wanderwitz intensifie ses efforts visant à mettre en route une interdiction du parti d’extrême droite.

À « Hart aber fair », on a traité le sujet lundi. « Le cas AfD : à interdire purement et simplement ? », a demandé Louis Klamlroth aux députés au Bundestag, Michael Kellner (Verts) et Serap Güler (CDU), au dissident de l’AfD, Alexander Leschik, à l’animatrice Ruth Moschner ainsi qu’aux journalistes Ronen Steinke et Albrecht von Lucke.

« Je ne veux pas regarder en arrière et dire que je n’ai pas essayé », a précisé Michael Kellner, co-initiateur du projet d’interdiction de l’AfD. C’est une leçon de la République de Weimar de pouvoir brandir « l’épée la plus tranchante » et de faire interdire des partis par la Cour constitutionnelle fédérale en cas de danger imminent. L’AfD serait contraire à la Constitution et à l’État de droit. Les projets de déportation de personnes issues de l’immigration rendus publics sont, dans leur racisme, à considérer comme « attaque à notre loi fondamentale », a déclaré le politicien des Verts. Il faisait référence à cet égard à la rencontre d’extrémistes de droite, de membres de l’AfD et de la CDU à Potsdam, où il avait discuté de « remigration ».

Le débat sur l’interdiction ne doit pas se limiter à des formulaires discursifs, dit Kellner. « Il doit être débattu dans la cavité cardiaque de notre démocratie, au Parlement. »

Avec leur nom, leur origine et leur croyance, eux et leur famille seraient les premiers à être concernés par une AfD en tant que responsable gouvernemental, a expliqué Serap Güler dans une initiative personnelle. Malgré cela, elle ne se rallierait pas à la demande. À son sens, la jurisprudence est « secondaire ». De son point de vue, « l’argument très, très important » est l’effet politique. Dans le meilleur des cas, la Cour constitutionnelle interdirait le parti avant le vote du Bundestag, en lui enlevant ainsi la structure et le financement. Mais elle tient cela pour « très irréaliste ». Dans le pire – et plus réaliste – des cas, la procédure durerait plus longtemps, si bien que l’AfD pourrait se profiler comme victime et pourrait entrer au Bundestag « de plein fouet ».

« Dans un cas comme dans l’autre, l’AfD occupera le rôle de victime et l’exploitera pour elle », a garanti Ruth Moschner et pour cette raison, exigera de s’engager pour une demande d’interdiction. « Nous ne pouvons tout de même pas rester inactifs et regarder ce qui se passe », a insisté l’animatrice. Elle-même serait une « électrice fière » et active à titre bénévole depuis ses treize ans. En août 2023, elle avait fait partie, outre Olivia Jones et Nora Tschirner, des premiers signataires de la pétition « Examinez une interdiction de l’AfD ». Il lui est essentiel de faire partie des premiers signataires de la pétition, dit-elle. « Il m’est très important de m’engager parce que c’est également un aspect de ma compréhension de la démocratie. » Elle n’entend, à son avis, parler constamment que « d’attendre pour le moment » malgré les résultats électoraux en hausse de l’AfD.

Moschner avait une alliée en la personne de Ronen Steinke. Ce serait un privilège de contempler le parti avec une certaine désinvolture ou de le confronter à des arguments. Il est « plus que temps pour un contrôle ». Le comportement du politicien de l’AfD, Jürgen Treutler, président par ancienneté du Landtag de Thuringe aurait montré que le parti voulait en premier lieu « déclencher le chaos » et « rendre ridicule les Parlements ». En dernier ressort, les juges de la Cour constitutionnelle de Thuringe auraient dû faire office « d’arbitres », pour régler le conflit. Mais Björn Höcke serait désormais lui aussi partie prenante de la nomination de ces juges. « Cette acquisition rampante de pouvoir a déjà lieu » a averti l’auteur. « Nous n’avons pas de temps à perdre en Thuringe. »

Avec Alexander Leschik, une personne qui a vécu l’évolution de l’AfD de près a rejoint le groupe. Quand il est devenu membre à l’âge de 16 ans, le parti n’était pas encore « solide quant au programme ». Lui- même aurait accédé rapidement au comité directeur fédéral de la Junge Alternativ – Jeune Alternative -. Au cours de la phase de fondation on aurait toutefois manqué de trier les « extrémistes radicaux ». Aujourd’hui, même les fonctionnaires du parti sont « radicalisés de fond en comble », a souligné l’auteur de « Sous le charme de l’AfD ». L’aile modérée de l’AfD n’existerait plus. Il avait dû admettre avoir échoué politiquement. En 2019, il a quitté la Junge Alternative, deux ans plus tard le parti. Malgré cela, il est « fondamentalement contre une interdiction de l’AfD ».

Leschik a appelé à différencier le parti et ses électeurs, qui seraient en majorité d’inébranlables partisans de l’ordre de base démocratique. « Je dois malheureusement vous dire que dans le doute ils ne savent même pas en majorité « ce qu’est l’ordre de base libéro-démocratique », a riposté Albrecht von Lucke. En Thuringe, il s’avère que l’AfD n’est « même plus perçue comme extrémiste » dans le groupe d’électeurs de 18 à 24 ans. Mais même le publiciste a mis en garde contre une demande d’interdiction. Interdire un parti serait un « grave intervention » et aucunement une « petitesse », si bien qu’une procédure durerait « certainement » plus qu’un an. De plus, une majorité ferait défaut pour la demande. « Elle est condamnée à échouer. »

Traduction de Jean Schoving pour Résistance républicaine

https://www.welt.de/politik/deutschland/article253892412/Hart-aber-fair-Die-meisten-AfD-Waehler-wissen-gar-nicht-was-die-freiheitlich-demokratische-Grundordnung-ist.html

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6 Commentaires

  1. Cela me fait de la peine de voir tourner en rond, ne sachant pas comment ils peuvent s’en sortir. Les allemands sont pourtant au fait de savoir ce qu’est une idéologie en ayant imposé la leur pendant des années entre 1933 et 1945. Et là ils n’ont pas compris, Merckel n’a pas compris qu’en laissant migrer des millions de musulmans chez eux, il est clair que ces musulmans installent et instaurent avec le temps leur idéologue en Allemagne, qui est aujourd’hui désarçonné, démuni de solutions face à l’idéologie musulmane qui prend le pouvoir en Allemagne. Donc l’Afd n’est qu’un parti politique de résistance. Vouloir faire autrement, cela sera impossible… En Europe tous ces pays ayant laissé migré tant de musulmans, avec le nombre, ces pays seront fracturé en deux, coupés en deux idéologies qui s’affronteront, comme c’est en France, les patriotes face à l’islamisation.. Cela ne changera plus avant longtemps..

  2. Quand qq chose ne plait pas à la gauche, c’est vite vu, on l’interdit.
    Darmanin a bien interdit GI qui n’avait absolument commis aucun délit.
    Par contre le parti néonazi LFI, ne sera pas interdit….

  3. Si vous parlez à des Teutons , ils vous diront qu’ils en ont marre de ceci et cela et si vous dites  » mais vous parlez comme l’AfD » grand cri ,  » mais non , jamais l AfD , ce sont des n.zis!! »

  4. Tu es politologue ou militant politique parti prenante, Lucky Lucke ?
    Je réentends les accusations médiatiques des électeurs du FN des années 80 comme étant des imbéciles. Et quand on peut interiewer un authentique pauvre hère dans la masse, c’était d’autant mieux…

    Mais qu’est ce qu’on se fiche de votre avis et de vis émois, les hiérarques !
    Le seul légitime c’est le peuple que vous méprisez et que vous tyrannisez.

    Accessoirement : quelle tête de faux-derche il a le seigneur et maître.
    Je comprends mieux la guillotine maintenant…

  5. Merci, monsieur Schoving pour la traduction.
    Est-ce que l’AfD voudrait chasser tous les étrangers ou bien seulement ceux qui vivent sur le dos de l Allemagne et peut-être les nouveaux arrivés ?

  6. Couillons, ces Allemands, chez nous on a le Front républicain. Une bien belle invention qui a permis de maintenir les mêmes nullités qui ont ruiné la France, permis l’immigration sauvage et incontrôlable, muselé la liberté d’expression. Une invention made in France, brevetée SGDG.

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