Relisons Victor Hugo visionnaire : « à qui la faute ((L’Année Terrible, VIII, 1872) Il suffit de remplacer le mot « livre » par « école »…
Christine m’a demandé de transformer ce commentaire en article, pensant qu’en ce dimanche veille du 7 octobre cela aurait du sens… et face à la violence préhistorique, animale, excluant toute humanité, toute culture et par l’évocation de la culture, vénérée, ô combien par Hugo. C’est mon coup de coeur dominical.
Victor HUGO
1802 – 1885
A qui la faute ?
– Oui.
J’ai mis le feu là.
– Mais c’est un crime inouï !
Crime commis par toi contre toi-même, infâme !
Mais tu viens de tuer le rayon de ton âme !
C’est ton propre flambeau que tu viens de souffler !
Ce que ta rage impie et folle ose brûler,
C’est ton bien, ton trésor, ta dot, ton héritage
Le livre, hostile au maître, est à ton avantage.
Le livre a toujours pris fait et cause pour toi.
Une bibliothèque est un acte de foi
Des générations ténébreuses encore
Qui rendent dans la nuit témoignage à l’aurore.
Quoi! dans ce vénérable amas des vérités,
Dans ces chefs-d’oeuvre pleins de foudre et de clartés,
Dans ce tombeau des temps devenu répertoire,
Dans les siècles, dans l’homme antique, dans l’histoire,
Dans le passé, leçon qu’épelle l’avenir,
Dans ce qui commença pour ne jamais finir,
Dans les poètes! quoi, dans ce gouffre des bibles,
Dans le divin monceau des Eschyles terribles,
Des Homères, des jobs, debout sur l’horizon,
Dans Molière, Voltaire et Kant, dans la raison,
Tu jettes, misérable, une torche enflammée !
De tout l’esprit humain tu fais de la fumée !
As-tu donc oublié que ton libérateur,
C’est le livre ? Le livre est là sur la hauteur;
Il luit; parce qu’il brille et qu’il les illumine,
Il détruit l’échafaud, la guerre, la famine
Il parle, plus d’esclave et plus de paria.
Ouvre un livre. Platon, Milton, Beccaria.
Lis ces prophètes, Dante, ou Shakespeare, ou Corneille
L’âme immense qu’ils ont en eux, en toi s’éveille ;
Ébloui, tu te sens le même homme qu’eux tous ;
Tu deviens en lisant grave, pensif et doux ;
Tu sens dans ton esprit tous ces grands hommes croître,
Ils t’enseignent ainsi que l’aube éclaire un cloître
À mesure qu’il plonge en ton coeur plus avant,
Leur chaud rayon t’apaise et te fait plus vivant ;
Ton âme interrogée est prête à leur répondre ;
Tu te reconnais bon, puis meilleur; tu sens fondre,
Comme la neige au feu, ton orgueil, tes fureurs,
Le mal, les préjugés, les rois, les empereurs !
Car la science en l’homme arrive la première.
Puis vient la liberté. Toute cette lumière,
C’est à toi comprends donc, et c’est toi qui l’éteins !
Les buts rêvés par toi sont par le livre atteints.
Le livre en ta pensée entre, il défait en elle
Les liens que l’erreur à la vérité mêle,
Car toute conscience est un noeud gordien.
Il est ton médecin, ton guide, ton gardien.
Ta haine, il la guérit ; ta démence, il te l’ôte.
Voilà ce que tu perds, hélas, et par ta faute !
Le livre est ta richesse à toi ! c’est le savoir,
Le droit, la vérité, la vertu, le devoir,
Le progrès, la raison dissipant tout délire.
Et tu détruis cela, toi !
– Je ne sais pas lire.
873 total views, 1 views today
Savoureux.Peut-être que certains ne méritent pas de lire . (Je n’ai pas écrit « de vivre », hein !)
L’école du savoir est devenue un lieu où l’ignorance et la bêtise marchent sur le chemin de la vie main dans la main. L’école publique, obligatoire, qui a délivré jadis le peuple de l’ignorance en lui permettant d’acquérir des bases qui lui ont permis de s’émanciper est devenue un lieu de contestation politique et de prosélytisme islamiste, où les professeurs sont complices pour certains, où vivent dans la terreur pour d’autres.
Entendez le surtout au sens où ils nous révèlent qui nous sommes , en ca ils nous justifient et nous font exister .De mémoire ce vers était une justification de ceux qui s’opposait à l’ordre établi .Wihtman était un transcendantaliste , celui qui ne sait pas lire est et reste un esclave ,ne peut se transcender et se libérer de ses chaines .Tout ce qu’ils ne veulent pas que nous fassions.
» Car toute conscience est un noeud gordien. »
Par sa subjectivité la littérature nous permet de nous défaire de ce nœud. J’oserais même faire un parallèle avec ce que disait Walt Whitman dans un de ses poèmes » Un jour le grand architecte te justifiera » , les livres peuvent prendre ce rôle
ils nous construisent , nous façonnent et nous structurent .