Selon la Cour de cassation, sur les sites militants, on pourrait appeler au boycott…

Appel au boycott et loi Pleven : la Cour de cassation, indulgente avec un opposant d’Israël, le sera-t-elle autant avec les islamophobes ?

Le 23 mai dernier, sa chambre criminelle a rendu une décision qui intéresse la question de savoir dans quelle mesure il est possible d’appeler au boycott, ce qui pose des difficultés en raison de l’interprétation délirante et excessive que certains donnent à la loi Pleven.

Interprétation retenue par la jurisprudence. En effet, en France, malgré la proclamation de la liberté d’expression, de la liberté d’opinion et de pensée en principe dans la Déclaration de 1789, on ne peut appeler au boycott de certains produits dans le cas où l’appel au boycott serait jugé discriminant…

Dans le cas présent, la décision est défavorable aux amis d’Israël. Mais si sa portée devait être générale, elle marquerait un recul de la loi Pleven.

A moins que, jouant de la casuistique, les juges ne retournent un jour leur veste. La liberté très large, et anormale, laissée aux juridictions en France de décider des revirements de jurisprudence, ou de distinguer subtilement en fait pour condamner avec facilité dans des cas où on ne s’y attendait pas, conduit à émettre quelques réserves de ce point de vue. Il devient urgent en effet, dans ce pays, que le statut des juges et l’encadrement de la Justice évoluent !
La Justice exerce un pouvoir dont les conditions d’exercice ne sont pas assez encadrées. Un important chantier devrait être mené dans ce domaine. On peut douter qu’il soit réalisé un jour. En attendant, l’abrogation de la loi Pleven ou, à tout le moins, une réforme réduisant son domaine afin de tenir compte davantage du principe de précaution, permettrait de limiter les dégâts.

Etait jugé dans cette affaire un « ancien président et président d’honneur de l’association France Palestine Solidarité ».
Le prévenu n’avait pas « contesté que l’appel au boycott puisse être assimilé à une incitation à la discrimination ».
Il faisait valoir que « tel n’est pas le message litigieux, dans lequel le mot «boycott» n’apparaît pas et qui ne contient aucune injonction ou exhortation ».
Il « se considère comme un « lanceur d’alerte » sur le problème d’intérêt général que constituerait un étiquetage insuffisamment précis des produits en provenance d’Israël ».
Le message avait été publié pendant le ramadan : « attention à vos achats. Ceci sont des feuilles de brick israéliennes : regardez en bas, au centre ». « Ceci sont », ou saucisson… il parle bien la France, le président d’honneur !
Les feuilles de brick, de marque JR, étaient suspectées de pouvoir provenir «des colonies» israélienne.

La cour d’appel a relaxé le prévenu et la Cour de cassation confirme sa décision en rejetant le pourvoi de « l’association Alliance France-Israël et de l’association Avocats sans frontières ».
Les juges sont approuvé d’avoir « rappelé que l’appel au boycott de produits en raison de leur seule origine est constitutif de l’infraction de provocation à la discrimination en raison d’une appartenance nationale, ethnique ou religieuse de leurs producteurs ».
La relaxe est admise car « dans le propos de l’intimé ne figure pas le mot “boycott”, le prévenu se contente d’un appel à la vigilance des consommateurs, sans injonction en direction de ceux-ci ».
Les juges ajoutent que « la “précision” qu’il apporte au message initial, même s’il en confirme le caractère militant, ne vise pas plus à enjoindre expressément le consommateur à ne pas acheter le produit du fait de sa provenance mais à protester contre un étiquetage qu’il estime trop imprécis ».
La belle excuse…

Surtout, il convient de relever que la cour d’appel a estimé que ce propos « exprimé sur un site militant, en conséquence prioritairement visité par des internautes a priori acquis à ses idées, ne s’analyse qu’en un signalement et non une exhortation au boycott, et reste dès lors dans les limites de la liberté d’expression ».

Joli ! D’autres ont pourtant subi poursuites et condamnations alors qu’ils s’exprimaient sur des sites militants. Deux poids, deux mesures, ou bien une évolution positive de la jurisprudence à ce sujet ?
Cela fait songer à une décision qui avait aussi fait preuve de mansuétude vis-à-vis de Sopo, dans un procès intéressant Marine le Pen : http://resistancerepublicaine.com/2018/03/17/marine-na-jamais-parle-de-fours-crematoires-et-pourtant-elle-est-diabolisee/
La Cour de cassation avait encore considéré qu’un militant devait bénéficier d’une indulgence des tribunaux… Est-ce que cela marche aussi pour les opposants de Sopo, France-Palestine etc. ? Pour l’instant, je n’ai pas eu connaissance de décision juridictionnelle apportant la même précision notamment pour les islamophobes militants condamnés en justice.

Finalement, la Cour de cassation rend une décision ambiguë car elle considère le fait que « les propos incriminés ne contiennent pas, même sous une forme implicite, en eux-mêmes d’appel ou d’exhortation à la discrimination envers l’ensemble des producteurs israéliens à raison de leur appartenance à cette nation ». Cela annonce donc des appréciations factuelles délicates tant le sens implicite d’un propos n’est pas toujours l’objet d’un consensus… Un appel implicite au boycott pourrait donc être sanctionné au titre de la loi Pleven.

Par ailleurs, l’affaire est bonne pour Jean-Claude X, le prévenu : Avocats sans frontières et Alliance France-Israël devront lui payer 2.500 euros, décide la Cour de cassation !
Il est à noter que le procureur de la République l’avait aussi fait citer devant le tribunal correctionnel, « pour y répondre du délit de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée M. X… à la suite de la publication sur son compte Facebook ».
Qu’en penser compte tenu du fait que les autorités françaises comme européennes recommandent à l’identique de mentionner l’étiquetage « colonie israélienne », ce qui donne d’ailleurs lieu à un contentieux pendant devant les juridictions administratives ? (http://resistancerepublicaine.com/2018/06/08/etiquetage-jerusalem-est-ne-ferait-pas-partie-disrael-pour-bruxelles/)
Le ministre de la Justice ne peut pas donner d’instruction particulière pour un dossier, selon le Code de procédure pénale, mais des directives générales. Il semble que de ce point de vue, les autorités de poursuite soient incitées à se surpasser et encouragées à ne craindre aucun excès de zèle. C’est sans doute pourquoi le procureur a agi dans cette affaire malgré une proximité idéologique forte entre le prévenu, Bruxelles et les socialistes au pouvoir.

A cet égard, le rapport Urvoas de mai 2017 sur la politique pénale du ministre était en effet très disert sur cette question et exprimait une intention de sévérité qui contraste totalement avec son laxisme en matière de terrorisme (http://resistancerepublicaine.com/2018/06/08/grace-a-belloubet-au-moins-500-fous-dallah-sortis-de-prison-vont-etre-dans-la-nature/).
La question est abordée dès la page 12 du rapport, alors qu’il faut attendre la page 21 pour voir évoqué le terrorisme.
La lutte contre les discriminations était prioritaire et on peut penser que sur ce point comme sur tant d’autres, Belloubet, dont la sensibilité politique est la même, marche dans les pas de son prédécesseur.
C’est une faute de viser dans ce rapport la lutte contre « les discriminations », alors que tout système juridique discrimine. Simplement, certaines discriminations sont autorisées et d’autres interdites. Mais le rapport Urvoas entretient sur ce point un flou artistique qui ne trompera pas ceux qui ont pris le temps de s’intéresser à cette question.
Le rapport (p. 12 et suivantes) loue en effet « la fermeté de la politique pénale menée en la matière depuis plusieurs années : en 2015, 7 251 affaires comportant au moins une infraction commise en raison de la religion ou de l’origine de la victime ont été orientées par les parquets, soit une augmentation de 34% sur ces trois dernières années. Parmi ces affaires, toutes ne donnent pas lieu à condamnation, soit que l’auteur n’est pas identifié, soit que le comportement dénoncé ne peut juridiquement être qualifié d’infraction. Cependant, chaque fois que possible, le ministère public apporte une réponse pénale aussi claire que symbolique, afin de signifier le refus de toute violence, verbale, physique ou psychologique et de tout acte haineux, raciste, antisémite ou discriminatoire ».
« Pour les infractions de « provocation à la discrimination, la haine ou la violence, injure et diffamation à caractère raciste », qui sont quantitativement les plus importantes (injures entre personnes, discours haineux idéologiques sur internet etc.), le taux d’emprisonnement prononcé a augmenté, passant de 33% à près de 40% entre 2013 et 2015 ».
La page 13 du rapport nous apprend qu’«afin de contribuer davantage à l’amélioration de la réponse judiciaire et à la prévention des comportements racistes, des stages et formations dédiés ont été mis en oeuvre, en partenariat avec des lieux de mémoire, tels que le Mémorial de la Shoah et le camp des Milles, notamment au sein des cours d’appel de Paris, Aix-en-Provence et Lyon. Ces stages peuvent être prononcés dans le cadre de mesures alternatives aux poursuites ou de peines complémentaires prononcées par les tribunaux ». Tiens donc, alors vont-ils envoyer les islamophobes poursuivis au Mémorial de la Shoah ou au camp des Milles ? Mais le rapport prend bien soin de ne pas aborder la question de l’islamophobie et l’anomalie que constituent les poursuites engagées dans ce domaine qui ne relève ni du racisme, ni de l’antisémitisme…
Pourtant, il ne fait pas de doute qu’Urvoas y songeait, mais sans le dire expressément dans le rapport. Qu’on en juge, à la lecture de la page 12 du rapport : « immédiatement après les attentats terroristes de juillet 2016, j’ai donc demandé aux parquets, comme cela avait été fait à la suite des attentats de janvier et de novembre 2015, de faire preuve de la plus grande réactivité dans la conduite de l’action publique envers les auteurs de ce type d’infractions, comme envers les auteurs de faits d’apologie ou de provocation au terrorisme, et d’y apporter une réponse pénale systématique ».

On croit comprendre que c’est le « risque » de rejet de la communauté musulmane et des immigrés des pays musulmans qui est en cause. Quel rapport y aurait-il en effet, autrement, entre les discriminations et les attentats ? Tout est, en tous cas, dans l’implicite, mais sans doute le message est-il bien passé auprès des procureurs, par exemple celui qui réclame à Albi trois mois de prison et 3000 euros d’amende contre la buraliste qui avait demandé le retrait du voile islamique à une musulmane venant retirer un colis auprès d’elle afin de vérifier son identité (https://www.sudradio.fr/justice/albi-3-mois-avec-sursis-requis-contre-la-buraliste-ayant-refuse-de-servir-des-femmes).

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5 Commentaires

  1. Quelle est donc cette folie qui voit les résistants se tirer une balle dans le pied en laissant sous-entendre dans une cascade d’argutie juridoco-juridiques qu’appeler au boycott serait interdit ?!
    C’est pourtant dit clairement dans votre propre article :
    “l’appel au boycott de produits en raison de leur seule origine est constitutif de l’infraction de provocation à la discrimination en raison d’une appartenance nationale, ethnique ou religieuse”
    Donc on peut lancer des appels au boycott tant que l’on veut sur les produits que l’on veut à condition d’avoir une bonne raison autre que le pur racisme.
    On peut vouloir boycotter une marque parce qu’elle fait travailler des enfants au pakistan ou encore on peut lancer un boycott de la viande halal parce que cette viande ne respecte pas les précautions sanitaires, donc risque infiniment plus d’être infectée par la bactérie E.coli que la viande normale.
    Ce qui est de base c’est que l’appel au boycott de n’importe quel produit est autorisé, ce qui est l’exception c’est l’appel au boycott raciste (ce qui s’appelle en fait un apartheid).
    Le seul apartheid “normal” qu’il est “raciste” de dénoncer c’est l’interdiction faite aux non-musulmans de visiter La Mecque, chercher l’erreur !

  2. “attention à vos achats. Ceci sont des feuilles de brick israéliennes : regardez en bas, au centre”
    Si je peux me permettre Maxime, tu loupes quand même le principal de cette histoire : “en bas au centre”, c’était un logo “casher” délivré par le rabbinat français ! Cette ordure de Lefort n’appelait pas à boycotter un produit israélien, mais un produit français, produit en France par des Français, mais des Français juifs.
    Je te laisse apprécier toute l’hypocrisie nauséabonde de la haute cour, une fois ce rappel fait.
    http://www.liguedefensejuive.com/un-depute-communiste-antisemite-appelle-les-musulmans-a-boycotter-un-entreprise-francaise-juive-2015-06-09.html

  3. et le teeshirt de Médine, il se classe où , d’après les juges, les procs et le parquet , dans cet embrouillamini de lois obscures et interprétables à souhait ?
    et son appel au Golgotha ??
    réveillez-vous, connards de juges !

  4. cette Cour de Cassés me fait penser chaque fois a la Cour Suprême d’ Israel
    tout faire pour se prononcer contre l’ autochtone au bénéfice du parasite allogène
    Traitres rémunérés ( grassement)

    • Quand je le dis que tout est pourri au royaume de France .Nous avons une immense tâche qui attend les Patriotes purger notre Patrie de toute cette gangrène qui tue notre France et empoisonne la vie des Patriotes.

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