Le livre blanc de la Grande-Bretagne

Manifestation de Juifs contre le Livre blanc, à Jérusalem, le 18 mai 1939

Il est connu comme le « Livre blanc de Churchill », et fut publié pour répondre à l’opposition des Arabes de Palestine aux termes du mandat quant à l’établissement d’un « foyer national juif » et à l’immigration juive en Palestine. Winston Churchill remplit à l’époque les fonctions de secrétaire aux colonies.

Ce Livre blanc restreint le territoire destiné au foyer juif, et donne le contrôle des terres situées à l’est du Jourdain à l’émir Abdallah. Il réaffirme le droit au retour du peuple juif sur sa terre ancestrale, mais pose néanmoins comme condition à l’immigration le niveau des moyens financiers des postulants à l’immigration. Il précise également que la Palestine ne peut être conçue comme une entité politique exclusivement juive : les termes de la Déclaration à laquelle il est fait référence n’envisagent pas que la Palestine dans son ensemble soit convertie en un foyer national juif, mais qu’un tel foyer soit fondé en Palestine.

Population de la Palestine, 1872-1948

Les pourcentages indiquent la proportion de la population juive dans la population totale.

Sources : Scholch (1985) pour la population arabe de 1872 à 1882, McCarthy (2001) pour la population arabe de 1890 à 1948 et Gresh et Vidal (2011) pour les chiffres sur la population juive.

À la fin de la Première Guerre mondiale, l’Empire ottoman fut disloqué et la Palestine tomba sous mandat britannique. À première vue, la Grande-Bretagne était favorable à l’établissement d’un foyer national juif en Palestine. Dans une lettre rédigée en 1917, Lord Balfour exprimait cet accord, tout en garantissant « que rien ne sera fait qui puisse porter atteinte aux droits civils et religieux des collectivités non-juives existant en Palestine ». La Déclaration de Balfour donnait une base juridique à l’immigration juive et ainsi, l’encouragea.

La montée de l’antisémitisme en Europe incita plus de Juifs à quitter leur pays natal. En parallèle, l’Immigration Act de 1924 ou loi Johnson Reed aux États-Unis ralentissait grandement l’immigration en provenance d’Europe, fixant de stricts quotas par pays. Diverses limitations à l’immigration étant également décrétées en Europe, contraignant les migrants juifs à opter en partie pour la Palestine. À partir de 1932, avec la victoire du nazisme en Allemagne et l’intensification des persécutions en Autriche et en Tchécoslovaquie, l’immigration juive en Palestine s’intensifia franchement. De 1932 à 1939, la Palestine absorba 247,000 nouveaux arrivants, soit 46% de l’immigration juive hors d’Europe. Dans le contexte politique européen, cette cinquième Alya représentait davantage une fuite qu’un « choix sioniste ».

La politique britannique vis-à-vis de l’immigration juive en Palestine évolua durant la période du mandat, tout comme la réponse des juifs européens à celle-ci. Les Anglais étaient initialement favorables à l’établissement d’un foyer national juif en Palestine et les premiers sionistes, sous l’Empire ottoman avaient d’ailleurs pu s’établir dans le pays sous la protection des consulats étrangers, notamment britanniques. Cependant, avec la hausse de l’immigration durant les premières décennies du vingtième siècle, les Arabes de Palestine commencèrent à faire pression sur la Grande-Bretagne, qui se retrouva prise entre deux feux. À partir des années 1930, l’autorité britannique ne délivrait qu’un nombre de certificats d’immigration inférieur à la demande. Mais le véritable changement d’orientation ne se produisit qu’en 1939.

Dans une tentative de conciliation avec la population arabe de Palestine, la Grande-Bretagne émit en 1939 un « livre blanc » qui restreignait l’immigration juive en Palestine à 75,000 personnes en cinq ans et limitait l’achat de terres par les juifs. La création d’un État arabe indépendant dans les 10 ans était aussi prévue. Toutefois, cette politique ne freina pas réellement l’immigration juive puisqu’elle déclencha un exode illégal dans un contexte où la persécution des juifs en Europe ne faisait qu’accroître. Jusqu’au début de la Deuxième Guerre mondiale, et même après, des dizaines de milliers d’immigrants juifs arrivèrent illégalement dans le pays. Malgré l’interception de quelques bateaux par les Anglais, de nombreux immigrants parvinrent à s’implanter en Palestine.

Par le biais de quelques failles dans le système de régulation britannique, les migrants réussissaient à s’infiltrer en Palestine : N’étant pas contraints d’avoir un certificat d’immigration pour étudier en Palestine, plusieurs étudiants s’étaient inscrits à l’université hébraïque de Jérusalem, puis y sont restés. Certaines jeunes femmes entrèrent dans le pays en déclarant des mariages fictifs avec des Palestiniens. Ou encore, d’autres arrivaient en touristes et ne repartaient pas. Au final, de 1939 à 1948, 118,228 Juifs parvinrent à s’incruster en Palestine, faisant fi du blocus britannique.

Après la guerre, la Grande-Bretagne incarcéra des milliers d’immigrants illégaux dans des camps de détention à Chypre. Cette lamentable tentative de dissuasion échoua et fut reprochée à l’Angleterre dans le contexte post-holocauste, entraînant la chute des barrières à l’immigration. Avec la création de l’État d’Israël en 1948, les limitations à l’immigration juive furent toutes levées, plafonnant en un important afflux de migrants et de personnes déplacées au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale. L’État d’Israël promulgua aussi la loi du retour qui stipulait que tout Juif a le droit de venir s’établir en Israël. Les nouveaux arrivants affluaient de l’Europe, des pays du Proche-Orient et du Maghreb. Cela contribua à la quasi-disparition des antiques communautés juives de ces régions. L’immigration fit un nouveau bond durant les années 1989-1990 lors de l’ouverture des frontières des pays de l’Europe de l’est avec le démantèlement de l’Union Soviétique. L’État d’Israël aurait au total, absorbé 3,1 millions d’immigrants depuis sa création, dont 1 million de 1990 à 1999. Israël a en effet fortement encouragé l’immigration juive afin de maintenir une population majoritairement juive, en dépit des taux de natalité élevés des arabes d’Israël.

Raz-Krakotzkin, Amnon. Exil et souveraineté. Judaïsme, sionisme et pensée binationale. Paris : Éditions La Fabrique, 2007. p.106

Le terme aliya désigne l’acte d’immigrer en Terre sainte pour les juifs. On l’utilise pour parler des différentes vagues d’immigration juives en Israël

Gresh, Alain et Dominique Vidal. Les 100 clés du Proche-Orient. Paris : Fayard, 2011, p.71

DeVaumas, Étienne. 1954. « Les trois périodes de l’émigration juive en Palestine ». Annales de Géographie. Vol. 63, no. 335, p.71

Gresh, Alain et Dominique Vidal. Ibid

DeVaumas, Étienne. Ibid

Gresh, Alain et Dominique Vidal. Ibid., p.72

DeVaumas, Étienne. Ibid

Gresh, Alain et Dominique Vidal. Ibid., p.520

Gresh, Alain et Dominique Vidal, Ibid., p.72

Encyclopédie multimédia de la Shoah. La crise des réfugiés après la guerre et la création de l’État d’Israël. [En ligne]

http://www.ushmm.org/wlc/fr/article.php?ModuleId=207 (Page consultée le 29 mai 2013)

Institut de recherche sur la coopération méditerranéenne et euro-arabe. Immigration juive en Israël et dans les territoires occupés. [En ligne].

http://www.medea.be/fr/themes/conflit-israelo-arabe/immigration-juive-en-Israël-et-dans-les-territoires-occupes/

(Page consultée le 28 mai 2013)

Certains détails ont été puisés dans l’étude :

http://www.cjpmo.org/DisplayDocument.aspx?DO=795&RecID=1173&DocumentID=2839&SaveMode=0

Au début des années 2000, le peuple juif comptait deux pôles majeurs : L’État d’Israël avec 6 millions de personnes et les États-Unis avec un peu plus de 5 millions de juifs. Loin derrière, se trouvait l’Europe Occidentale où la communauté juive la plus importante, celle de France, atteignait à peine 500,000 personnes. Les communautés traditionnelles de l’Europe de l’Est, dont la Russie, sont peu nombreuses, celles des pays arabes ont quasiment disparu. Hors d’Israël, les communautés juives sont en voie d’assimilation rapide notamment par le mariage mixte. Un autre facteur de diminution peut être l’émigration vers Israël dans les pays où réapparaissent des signes d’antisémitisme.

Nous avons donc, là, réussi à définir les origines de la présence juive jusqu’au XXIème siècle.

EXTRAIT DE MON ŒUVRE – LE CANULAR SUR L’INVENTION DU PEUPLE JUIF OU L’ORIGINE DU PEUPLE JUIF HORS DU CONTEXTE BIBLIQUE

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1 Commentaire

  1. Nos amis juifs sont en danger hors d’Israël. Particulièrement en France où les actes antisémites explosent. C’est ignoble et dramatique. Pourquoi s’en prendre à des personnes tranquilles qui n’aspirent qu’à vivre en paix ? La corrélation entre immigration en France et l’antisémitisme n’est plus à démontrer, c’est une réalité.