Dragana Trifković : « c’est l’USAID qui gouverne en Serbie »

 

Dans un article publié le 19 février 2025 sur Geostrategy.rs, Dragana Trifković, directrice générale du Centre d’études géostratégiques de Belgrade, examine l’implication de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) en Serbie depuis 2001, tout en mettant en lumière les investissements et les projets de cette Agence américaine, ainsi que les critiques et controverses entourant cette coopération. Selon les données américaines, jusqu’en 2024, l’USAID a investi environ 937 millions de dollars dans divers projets en Serbie, en partenariat principal avec le gouvernement serbe.



L’USAID en Serbie : des investissements colossaux


Depuis 2001, l’USAID a investi près de 937 millions de dollars en Serbie, principalement en partenariat avec le gouvernement serbe. Cet argent a été utilisé pour financer une multitude de projets dans des domaines variés :
• Réformes judiciaires
• Soutien à la démocratie et aux droits humains
• Éducation et développement économique
• Protection de l’environnement et efficacité énergétique
• Promotion de l’égalité des genres
• Appui à l’intégration européenne de la Serbie


En parallèle, l’agence américaine a également collaboré avec le secteur privé et la société civile, notamment en soutenant environ 500 organisations et 250 médias locaux pour promouvoir les droits des citoyens, la liberté de la presse et l’entrepreneuriat.


Une remise en question de la part des États-Unis


Récemment, l’administration de Donald Trump a ordonné une suspension de 90 jours des projets de l’USAID pour enquêter sur la gestion des fonds. Il s’agit d’une réponse aux soupçons d’un usage inapproprié de l’argent public, ce qui a entraîné une vague de critiques quant aux résultats concrets des investissements de l’agence en Serbie.
Dragana Trifković appuie cette remise en question en soulignant que malgré les sommes colossales injectées, la situation institutionnelle de la Serbie ne s’est pas réellement améliorée. Elle pointe plusieurs problèmes persistants :
• Un système judiciaire peu accessible aux citoyens
• Un haut niveau de corruption
• Un manque de liberté des médias
• Une protection insuffisante des droits de l’homme


Un gouvernement serbe en porte-à-faux


Trifković reproche au gouvernement serbe d’éluder sa propre responsabilité dans la mauvaise gestion des fonds, en détournant l’attention vers le secteur civil. Pourtant, l’État serbe a été le principal partenaire de l’USAID, et c’est lui qui a le plus bénéficié de ces financements.
Un autre point soulevé par l’auteur est le transfert des financements occidentaux vers le budget national serbe. De nombreuses ONG qui recevaient auparavant des fonds de l’USAID sont désormais financées directement par l’État serbe, ce qui signifie que l’argent des contribuables finance désormais certaines activités autrefois soutenues par les États-Unis.


Une infiltration du secteur non gouvernemental américain dans l’administration serbe ?


L’auteur met en évidence un phénomène qu’elle juge préoccupant : l’intégration d’anciens membres du secteur non gouvernemental occidental dans l’administration publique serbe. Parmi les exemples cités :
Ana Brnabić, Premier ministre de 2017 à 2024, qui a travaillé avec des organisations occidentales avant d’accéder au pouvoir.
Marko Blagojević, ministre sous son gouvernement.
Jelena Milić, actuel ambassadeur de Serbie en Croatie, issue elle aussi du milieu des ONG pro-occidentales.
Selon Trifković, cette proximité entre des figures issues d’organisations financées par l’Occident et le gouvernement serbe pose un problème de souveraineté nationale et remet en question l’indépendance des institutions publiques.


Le cas du système judiciaire


L’USAID a massivement financé la réforme judiciaire serbe, mais Trifković dénonce l’inefficacité de ces investissements. Malgré les millions de dollars injectés, le système judiciaire reste inefficace et soumis à des pressions politiques. Elle s’interroge sur la finalité réelle de ces réformes et sur la transparence de l’utilisation des fonds.


Une manipulation des opinions publiques


Enfin, l’auteur critique la stratégie du gouvernement serbe, qui tente d’utiliser l’USAID comme bouc émissaire pour détourner l’attention des véritables problèmes internes.
Elle explique que le régime de Aleksandar Vučić manipule l’opinion internationale de deux façons :
1. Envers la Russie, il présente les récentes protestations populaires en Serbie comme une révolution de couleur orchestrée par l’Occident.
2. Envers l’Occident, il alimente la crainte d’une ingérence russe dans les manifestations.
Trifković estime que ce double jeu vise à renforcer la position de Vučić en jouant sur les tensions géopolitiques, alors que la réalité est bien plus complexe.

L’article de Dragana Trifković met en lumière les ambiguïtés de la coopération entre l’USAID et le gouvernement serbe. D’un côté, des sommes considérables ont été investies, mais de l’autre, les résultats concrets sont contestables. La remise en question de ces financements par les États-Unis eux-mêmes suggère que ces fonds n’ont pas été utilisés de manière optimale.
Par ailleurs, l’intégration d’anciens membres d’ONG occidentales dans l’administration serbe et le financement d’initiatives autrefois portées par l’USAID via le budget national posent la question de l’indépendance de l’État serbe.
Enfin, l’auteure critique la manière dont le gouvernement serbe manipule ces dynamiques pour servir ses propres intérêts politiques, en attribuant aux ONG et à des forces étrangères la responsabilité de la situation actuelle.


Source :
https://geostrategy.rs/sr/%D0%B4%D1%80%D0%B0%D0%B3%D0%B0%D0%BD%D0%B0-%D1%82%D1%80%D0%B8%D1%84%D0%BA%D0%BE%D0%B2%D0%B8%D1%9B-usaid-%D0%B2%D0%BB%D0%B0%D0%B4%D0%B0-%D1%81%D1%80%D0%B1%D0%B8%D1%98%D0%B5/

Traduction et résumé par Nicolas Faure pour Résistance Républicaine



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5 Commentaires

  1. Et l’OTAN qui a bombardé la Serbie pour mettre au pouvoir les muzz au kosovo et permettre aux US d’y installer une gigantesque base . On peut remercier MM Kouchner, BHL. Lorsque l’on vous dit que les islamistes de tous poils sont les meilleurs ennemis des US.

  2. Bonjour,

    Un officier français, lors de l’agression de l’UE et des USA contre la Serbie, expliquait que des types de l’USAID étaient venus le trouver.

    L’USAID proposait de remettre en état le réseau téléphonique en échange d’une taxe en pourcentage du coût de chaque communication .

    Coût pour USAID : quelques centaines de millions.

    Gain pour USAID :potentiellement des dizaines de milliards.

    L’officier a envoyé USAID se faire voir.

    On aimerait aussi que Trump démantèle la base géanté US de Bondsteel au Kosovo : c’est une ligne de front, ptotégée par les USA, de l’invasion musulmane au coeur de l’Europe …

    • Bonjour @ Antiislam. Il y a des bases américaines en France, contrairement à ce que les gens pensent. Vont-elles être démantelées ? 19 en force!

      • Je sais que vous n’aimez pas mais c’est CdG qui a fait fermer les bases US et de l’OTAN en France. La plus connue Châteauroux.
        Le haut commandement européen de l’OTAN (SHAPE : Supreme Headquarters Allied Powers Europe) En 1954, le quartier général des forces américaines en Europe s’installe à Saint-Germain-en-Laye. Un ensemble de logements appelé « village SHAPE » est alors construit.
        Le 10 mars 1966, CdG annonce le retrait de la France du commandement militaire intégré de l’Alliance et exige la fermeture de toutes les bases de l’OTAN sur le territoire français.Les États-Unis évacuent vingt-sept mille soldats, trente-sept mille employés et trente bases aériennes, terrestres et navales, et l’OTAN transfère ses installations en Belgique. La France reconduit cependant son adhésion au pacte atlantique en 1969.
        C’est Sarkozy, l’americain , qui nous fera réintègre le SHAPE.

        • Bonjour,

          Oui, je me souviens, nous longions cette base, en allant de Paris en Corrèze.

          Les avions avaient de gros nez oranges.