Enfin des nouvelles de Thérèse Zrihen-Dvir : elle avait rencontré des anges…

Nous étions très inquiets depuis plusieurs semaines, aucune nouvelle de Thérèse… Et voilà, nous sommes heureux de célébrer son retour et de goûter le récit de ses aventures, faites avec sa plume inimitable
Christine Tasin

J’ai rencontré des anges…

C’était le 10 septembre, date anniversaire d’une de mes petites filles, tandis que le 11 était celui de ma fille, et de mon autre petite-fille.

Toute prise par la préparation des festivités, je me suis lancée derrière un chat arrogant venu pour une énième fois me relancer. Je rate la marche d’escalier et me voilà affalée sur le gazon de mon jardin, impossible de bouger d’un millimètre. Je me mets à hurler à ma fille, qui de son donjon ne pouvait pas m’entendre. Le soleil de 14 heures est chaud, brûlant et je suis toute en eau. Je m’époumone avec mes « au secours »  – personne à l’appel. C’est ma fin, me dis-je en prononçant « Shema Israël ».

Soudain, je vis un passant éthiopien qui s’acheminait sur la chaussée et me mis à l’appeler : S’il vous plaît, jeune homme, arrêtez et aidez-moi. Quelques minutes d’hésitation avant de franchir le seuil de la porte d’entrée pour me découvrir blessée et affalée sur le sol.

Je vous prie, lui dis-je, ouvrez la porte d’entrée avec cette clef et ramenez-moi mon portable qui j’ai laissé sur la table.

Ce qu’il fit sans hésiter. Puis ce fut l’arrivée de ma fille, de l’ambulance, la course vers l’hôpital le plus proche. On me mène directement vers les radios. « Je n’ai rien de cassé, rassurai-je mon petit monde. Je sais que je ne me suis rien cassé ». Et en effet, les radios ne révèlent aucune cassure, sans que la doctoresse qui m’a prise en charge, n’en démordeJe vais vous faire une CT pour me rassurer. On y va pour une CT qui laisse deviner quelque chose de mineur – une fissure ?

 

Et c’est là que je me confronte au système médical et sa corruption totale.

Ni mes enfants et ni moi n’étions convaincus d’une cassure quelconque si minime fût-elle. Mais le système doit son existence à sa politique de l’obscur, du mensonge et de la connivence. Et c’est ainsi que je me suis retrouvée 24 heures plus tard, sur la table d’opération pour une soi-disant cassure ou félure.  Le martyre commença avec l’injection de plus d’une vingtaine de piqûres à la colonne vertébrale. Je hurlai de douleur, lorsque brusquement, un jeune homme vint à moi me serra la tête entre ses deux mains, me promettant :Ne vous inquiétez pas, je suis là pour superviser. Je ne leur permettrai pas de vous causer du tort. Il me serra la main et puis je perdis connaissance. Je me suis réveillée quelques minutes plus tard devant l’écran de mes coordonnées. Cela n’avait duré qu’une demi-heure. J’étais dehors. Je voulais remercier cet inconnu… Mais il n’était plus là. Le charcutier qui s’était chargé de mon opération était un géant russe, aussi froid que les terres glacées de Sibérie.

Malheureusement, après l’anesthésie, les douleurs réapparurent et mes larmes avec. Dans ma chambre de malade, je fis connaissance avec quelques autres infortunés dont l’une souffrait d’une déviation dangereuse de la colonne vertébrale qu’il fallait redresser. Ce n’est que devant la souffrance des autres que nous devenons plus réalistes face à la nôtre. L’intervention chirurgical de la malheureuse dura 8 heures et plafonna avec 12 heures de soins intensifs. A son retour dans notre chambre, je ne pus retenir mes larmes. Mais pourquoi et pourquoi vous ? Me demanda-t-elle perplexe. « La souffrance d’autrui m’a toujours touchée. Je n’y peux rien ».

Juste à ce moment-là, on vint m’annoncer mon départ immédiat vers le centre de rééducation. J’étais seule, mes filles étant absentes, et je me demandais comment faire pour empaqueter et partir. Toute la chambre est entrée en action, chacun voulait aider cette personne si compatissante, même le chauffeur de l’ambulance y a mis la main, promettant en ligne à mes filles de prendre soin de moi jusqu’à mon installation complète au centre. Je vous traiterai comme si vous étiez ma propre mère. Je partis sous les au-revoir chaleureux de tous les occupants de ma chambre, me demandant qu’ai-je fait de bon pour les mériter ?

Le centre ressemble beaucoup plus à une maison pour vieillards qu’autre chose. Pour un centre de rééducation, cela a mauvaise mine et affecte tout individu de façon irréparable. Je savais que ce n’est là que le début d’une lutte âpre si je voulais sortir saine de toute cette ambiance. L’image déprimante de malades comateux, de drogués jusqu’à l’inconscience, en top à celle des amputés de pieds, de bras, nous remet directement sur l’orbite de notre condition humaine, précaire, fragile et éphémère. Nous sommes en guerre, me dis-je ! Mais si ce n’était que cela. Il faut se frayer une voie vivable sous le joug de ceux qui se disent responsables et professionnels.  Aucun ne l’est, même pas celui qui affiche sa carte de docteur et qui se promène entre les malades comme si c’était son fief, ou son jardin.

Trois semaines durant lesquelles, je suis passée du désespoir à l’agonie. On me contraignit à avaler des pilules. Je suis une rebelle et je ne prends rien pour argent comptant. C’est ainsi que je me suis attirée les flammes de tout le personnel. Pourquoi, ne suis-je pas comme les autres qui avalent leurs pilules sans même prendre connaissance de leur nécessité ?

La Physiothérapie a été l’unique moyen de me remettre sur la voie de la vie, de la lutte pour ce qui me reste à vivre et dont la promesse n’est nullement certaine.

Des anges, oui, j’en ai rencontré, dans le chant de ce gentil monsieur qui me guidait tous les matins vers mes séances de physiothérapie. Ou dans le sourire triomphant de mon éducatrice Dafna. Celle qui a remporté le prix d’excellence a été ma petite fille, venue prendre de mes nouvelles, m’invitant de toute urgence de quitter ces lieux et retrouver mon petit coin paisible d’avant mon accident.

 

Chers amis, ne négligez rien en ce qui concerne votre bien être… nous sommes si fragiles… une minute d’inattention et tout bascule.

Que le Seigneur nous aide à nous mesurer avec nos propres erreurs.

Hag Sameach.

Thérèse Zrihen-Dvir

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11 Commentaires

  1. Revenez vite vers nous MME ZRIHEN-DVIR. Revenez vers la vie avec tout ce qu’elle a de magnifique et d’horrible; ne lâchez pas l’affaire.Vous êtes une voix que nous devons entendre pour Israël, pour tous les vôtres, pour tous ceux qui comme moi ne sont pas juifs ni de près ni de loin, mais dont le sort du peuple juif importe énormément.

  2. Tous mes voeux de bon rétablissement! Mon épouse et moi prions pour vous et vous suivons régulièrement depuis le sud de l’Italie et d’autres de nos amis depuis la Belgique.

  3. Heureux d’avoir de vos nouvelles, de savoir que vous allez un peu mieux et désolé d’apprendre que le système médical est également vérolé en Israël.
    Vos avez assez de malheurs comme ça.
    Votre description de la solidarité me donne un peu de baume au coeur. Elle est vacillante en France.
    Mais en effet, il y a des anges discrets parmi nous. Bénis soient-ils, il redonnent un peu foi dans la vie et dans l’humanité.