80 000 gosses dans les foyers ou familles d’accueil devraient être remis. à leurs parents

Interview de Jacques Thomet : « Dans des foyers ou des familles d’accueil de l’ASE, au moins 80 000 n’ont rien à y faire et devraient être remis à leur parents ! »

Jacques Thomet, journaliste d’investigation et correspondant en France du Comité international pour la dignité de l’enfant (Cide), dévoile les conclusions glaçantes de son enquête de quatre ans sur les placements abusifs. Dans cet entretien, il dénonce un « rapt officiel » de dizaines de milliers d’enfants par l’Aide sociale à l’enfance (ASE), avec la complicité d’une justice défaillante.

Le Média en 4-4-2 : Qu’est-ce qui vous a poussé à enquêter pendant quatre ans sur les placements abusifs d’enfants en France, et comment votre rôle au sein du Comité international pour la dignité de l’enfant (Cide) a-t-il influencé votre travail ?

Jacques Thomet : Journaliste en retraite de l’AFP, auteur de livres d’investigation, j’enquête depuis 2011 sur la pédocriminalité en France. J’ai découvert cette véritable pandémie lors d’une étude sur l’affaire Outreau. La version officielle des assises ne correspond pas à la réalité. La plupart des accusés était réellement coupables, je l’ai écrit dans mon livre « Retour à Outreau » et je n’ai fait l’objet d’aucune poursuite judiciaire. Les procès d’Outreau ont fait passer les enfants pour des menteurs alors qu’ils avaient tous été victimes d’inceste ou de viol, et 12 d’entre eux ont été reconnus comme tels et indemnisés par l’Etat. Les avocats des accusés, dont Éric Dupond-Moretti, portent une énorme responsabilité dans ce dévoiement de la parole des petites victimes. Ils ont agressé pendant des heures les enfants dans le box des accusés alors que les prédateurs se trouvaient dans le public à côté des journalistes. Un psychiatre, Paul Bensussan, qui n’avait jamais rencontré un seul des enfants, est venu à la barre mettre en cause leur parole. Ce scandale m’a conduit à poursuivre un travail de lanceur d’alerte sur ces questions. Mes contacts de plus en plus étroits avec des victimes m’ont fait découvrir une autre horreur  : les placements abusifs d’enfants à l’Aide sociale à l’enfance (ASE). Avec le Cide de Lausanne, dont je suis le correspondant en France, nous avons enquêté sur ces graves entorse à la loi, interrogé leurs responsables et publié des communiqués sur ces injustices.



Le Média en 4-4-2 : Dans votre livre, vous parlez d’un « rapt officiel » de près de 100 000 enfants en France. Pouvez-vous expliquer ce que vous entendez par là, et pourquoi vous comparez cela à une rafle ?

Jacques Thomet : L’ASE ainsi que des juges procèdent à de tels placements systématiques sans aucune raison. Selon tous les spécialistes, sur les 150 000 enfants placés dans des foyers ou des familles d’accueil de l’ASE, au moins 80 000 n’ont rien à y faire et devraient être remis à leur parents. Il s’agit d’un véritable rapt officiel commis par des juges ignorants de la loi, ce qui est monnaie courante ainsi que le rappelle le magistrat Michel Huyette dans son « Guide de la protection judiciaire de l’enfant ».

« L’ASE est une croqueuse d’enfants. L’appât de l’argent en est la principale raison. Les départements français consacrent chaque année 12 milliards d’euros à l’ASE. Chaque enfant placé rapporte en moyenne 70 000€ par an à cet organisme. »

Le Média en 4-4-2 : Vous dénoncez l’« inversion accusatoire » où la victime devient l’accusé. Pouvez-vous illustrer cela avec un exemple concret tiré de votre enquête, et expliquer comment cela se produit dans le système judiciaire français ?

Jacques Thomet : L’inversion accusatoire est devenue systémique dans la justice civile. Ainsi de l’affaire Lola. Cette fillette de 9 ans avait donné tous les détails en 2020 sur les viols commis contre elle par son père avec d’autres hommes. Dans un entretien de 55 minutes sans aucune pause avec deux policiers en tenue, contrairement au principe de l’audition Mélanie, elle a été moquée et traitée de menteuse. Le Cide en possède l’enregistrement audiovisuel. La plainte de Gwenaëlle, sa maman, a été classée sans suite. Aujourd’hui Lola, d’abord placée à l’ASE, a été remise à son bourreau par une juge des enfants. Ce n’est que l’un des multiples exemples des scandales dénoncés dans mon livre. Dans la réalité, les juges concernés sont les exécutants de rapports souvent faux délivrés par les services de l’ASE sur les mères d’enfants victimes. L’ASE est une croqueuse d’enfants. L’appât de l’argent en est la principale raison. Les départements français consacrent chaque année 12 milliards d’euros à l’ASE. Chaque enfant placé rapporte en moyenne 70 000€ par an à cet organisme, et le double quand il s’agit d’un handicapé. Tous les moyens sont alors bons pour dénaturer les liens entre une maman et son enfant afin de maintenir la mainmise de l’ASE sur ces enlèvements. Ce scandale a été une fois de plus dénoncé par l’ONU dans son dernier rapport sur la France en 2023.

« Le cas d’Abélard est une bombe à retardement annoncée contre les pouvoirs responsables de ce scandale, véritable conjuration d’organismes officiels pour étouffer l’affaire. »

Le Média en 4-4-2 : Le cas d’Abélard, que vous placez en exergue comme un symbole de la rafle, est particulièrement accablant. Quels éléments de ce dossier (faux judiciaires, disparitions de preuves, etc.) vous ont le plus choqué, et pourquoi pensez-vous qu’il pourrait provoquer un « tsunami politique, judiciaire et social » s’il était publié intégralement ?

Jacques Thomet : À la lecture du premier message d’appel à l’aide lancé par la maman de ce garçon de 5 ans, j’ai compris l’énormité du scandale que j’allais dénoncer. Cette maman était jugée le lendemain pour non-représentation de son enfant (NRE) au père, et risquait la prison, alors que c’était un procureur qui lui avait ordonné de ne pas remettre son enfant à cet homme, accusé d’incestes répétés à la suite du signalement d’un médecin ! Avec le Cide, nous avons pu démontrer qu’une autre procureure en charge de l’enfance avait commis une erreur en accusant la mère de non-représentation de son enfant. La juge des enfants désignée par cette magistrate a ensuite placé le garçonnet, et il est toujours aujourd’hui dans une famille d’accueil. L’audience pénale contre la mère a été repoussée à une date ultérieure à deux reprises, ce qui traduit une gêne certaine de la justice. Dans ce dossier, un classement sans suite a été ordonné par la même procureure avant même le déclenchement de l’enquête, une docteure en médecine légale a commis un faux rapport pour démentir l’existence d’une sodomie contre le petit, et l’audition Mélanie de l’enfant a été « perdue » par la police. Tous les supérieurs de ces officiels ont été alertés par le Cide. C’est pourquoi le cas d’Abélard est une bombe à retardement annoncée contre les pouvoirs responsables de ce scandale, véritable conjuration d’organismes officiels pour étouffer l’affaire.

Le Média en 4-4-2 : Vous évoquez la « terreur blanche » subie par les enfants et leurs mères protectrices. Pouvez-vous décrire ce que cela implique au quotidien pour ces familles, et pourquoi vous comparez cela à une torture permanente ?

Jacques Thomet : Le ou la mineure victime et sa mère désenfantée ne vivent plus que dans l’angoisse, comme les prisonniers des régimes totalitaires contraints de passer jours et nuits dans une cellule avec un violent éclairage jamais éteint. Ils sont harcelés par les agents de l’ASE, malmenés dans les audiences judiciaires, minés par le désespoir, et nombre d’entre eux se scarifient quand ils ne sont pas poussés au suicide. J’en donne de nombreux exemples dans mon livre.

« Les agents de l’ASE éprouvent un malin plaisir, à de rares exceptions, à maintenir sous leur joug les mamans souvent contraintes à ne revoir leur progéniture qu’une ou deux heures par mois face à des référents et psychologues. »

Le Média en 4-4-2 : Vous critiquez sévèrement l’Aide sociale à l’enfance (ASE) et les juges pour leur responsabilité dans ces placements abusifs. Selon vous, quelle est la part de négligence, d’incompétence ou de complicité dans ce système ?

Jacques Thomet : Les agents de l’ASE éprouvent un malin plaisir, à de rares exceptions, à maintenir sous leur joug les mamans souvent contraintes à ne revoir leur progéniture qu’une ou deux heures par mois face à des référents et psychologues. Elles sont convoquées à tout moment pour une nouvelle enquête, et répéter à satiété leur curriculum. Chez les juges, l’immense majorité ignore la loi, comme je l’ai souligné. Quand ils ont commis la première erreur de placement, jamais il ne remettent en cause leur décision par la suite, même si de nouvelles preuves démontrent qu’ils ont eu tort.



« Les mineurs victimes perdent vingt années de leur vie. »

Le Média en 4-4-2 : Vous parlez de « placements abusifs » pour plus de 50 % des 150 000 mineurs à l’ASE. Sur quelles sources vous fondez-vous, et quels sont les impacts psychologiques sur ces enfants ?

Jacques Thomet : L’inspecteur général des affaires sociales, Pierre Nave, n’a cessé de le répéter, et l’avocate Christine Cerrada, auteure du livre « Placements abusifs d’enfants », me l’a confirmé. L’impact sur les enfants n’est pas seulement psychologique, mais physique. La députée Isabelle Santiago a ainsi affirmé que les mineurs victimes perdent vingt années de leur vie.

Le Média en 4-4-2 : Dans le cas d’Émile, qui s’est suicidé à 10 ans après une tentative précédente, vous pointez un « homicide judiciaire ». Comment la justice peut-elle obliger un enfant à retourner chez son agresseur déjà condamné ?

Jacques Thomet : Cette remise d’un enfant victime d’inceste paternel à son géniteur est courante. En France, la justice civile ignore le contexte pénal. C’est une autre aberration de notre système judiciaire. Les juges des enfants ne prennent pas en compte le fait qu’un père à qui ils remettent son enfant a déjà été condamné pour des violences contre le petit. Là aussi j’ai de nombreux exemples dans mon livre.

Le Média en 4-4-2 : Le silence des médias sur ces drames est un thème récurrent dans votre livre. Pourquoi pensez-vous que la grande presse ignore ces scandales, contrairement à des affaires comme Outreau ?

Jacques Thomet : La plupart des médias se limitent à traiter de la surface de ces événements sans enquêter sur leur ampleur et leur cause. La pédocriminalité touche toutes les classes sociales, y compris l’élite politique économique et sociale, et cette dilution explique la réticence de la presse à creuser davantage.

Le Média en 4-4-2 : Vous évoquez des réseaux pédocriminels et des impunités dans les hautes sphères, comme dans votre précédent livre « La pédocratie à la française ». Quelles preuves nouvelles apportez-vous dans cet ouvrage ?

Jacques Thomet : Je dispose de toutes les preuves, ce qui a permis à mon livre de ne subir aucune poursuite pour diffamation, y compris de la part d’un ancien ministre.

Le Média en 4-4-2 : Vous dénoncez la prévalence de l’ »incesticide » avec 160 000 enfants violés par an en France, et seulement 1 % des plaintes aboutissant à une condamnation. Comment expliquer cette impunité quasi-totale ?

Jacques Thomet : La parole des enfants continue d’être discréditée depuis Outreau, à tel point que les classements sans suite sont systématiquement décrétés malgré des preuves avérées. Et quand des poursuites sont engagées, les condamnations sont dans leur immense majorité infimes, ou même décrétées avec sursis.



Le Média en 4-4-2 : Quelles solutions concrètes proposez-vous pour mettre fin à ce « rapt à la française » : réformes judiciaires, formation des professionnels, ou création d’un ministère dédié ?

Jacques Thomet : En premier, il suffirait que les juges appliquent la loi. Or, je le répète, la justice civile ne la connaît pas. Nous disposons d’un attirail de lois suffisant. Par exemple l’état de nécessité ou le principe de précaution permettent à une maman de ne pas remettre son enfant au père si cet homme constitue un danger pour l’enfant. Dans tous les dossiers que j’ai étudiés, ces options ne sont pas respectées.

« La prise de conscience de la gravité des placements abusifs prend de l’ampleur jour après jour. Il ne manque plus qu’une étincelle pour provoquer un soulèvement général contre ces horreurs. »

Le Média en 4-4-2 : Après quatre ans d’enquête, quel message adressez-vous aux mères protectrices et aux enfants victimes ? Dans le prologue, vous conseillez presque aux mères de ne pas porter plainte pour éviter le piège judiciaire. Est-ce une provocation, ou une réalité fondée sur vos observations ?

Jacques Thomet : Je connais en effet une mère qui a décidé de ne pas porter plainte pour ne pas perdre son enfant une fois placé à l’ASE. Mais comment pourrais-je inviter toutes ces victimes à laisser le bourreau de leur enfant poursuivre ses crimes ! Mon message est optimiste malgré les difficultés rencontrées : la prise de conscience de la gravité des placements abusifs prend de l’ampleur jour après jour. Une première mobilisation de mamans désenfantées a eu lieu le 9 septembre 2025 à Paris. Il ne manque plus qu’une étincelle pour provoquer un soulèvement général contre ces horreurs.

Le Média en 4-4-2 : Après les enquêtes sur les Ehpad, les Pompes funèbres, à présent sur les viols et les injustices envers les mères et les enfants, sur quoi peut-on enquêter sans pleurer ou se mettre en colère ? En France ?

Jacques Thomet : Sur rien. Cf. le projet de M. Macron de « labelliser » les « bons » médias …

« Sur les vingt éditeurs contactés, un seul s’y était intéressé, mais on président a rompu le contrat, par crainte de poursuites. »

Le Média en 4-4-2 : Dans votre parcours pour publier « Les prédateurs : enquête sur un rapt de 80 000 enfants », avez-vous rencontré des refus de la part de maisons d’édition traditionnelles ? Si oui, quelles raisons ont-elles invoquées, et pensez-vous que le sujet sensible du livre (placements abusifs, inceste, etc.) a joué un rôle ?

Jacques Thomet : Sur les vingt éditeurs contactés, un seul s’y était intéressé  : L’Harmattan. Mais trois semaines après avoir signé un contrat avec moi, son président l’a rompu, par crainte de poursuites.

Le Média en 4-4-2 : Où et comment les lecteurs peuvent-ils se procurer votre livre actuellement ?

Jacques Thomet : En cliquant ici.

Le Média en 4-4-2 : Le Média en 4-4-2 vous remercie pour cet entretien ! Nous vous laissons le mot de la fin.

Jacques Thomet : Avec l’équipe de Contre-Propagande, que je remercie chaleureusement, nous avons pu mener à bien la publication de mon ouvrage en autoédition, au terme d’un travail acharné.

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