Ode à l’automne de la vie
Extrait des petites fables de Thérèse
C’est sous la clarté lactescente des matins du mois d’août que je t’ai vu plier tes bagages et partir, balbutiant un timide au-revoir… Brusquement tu n’étais plus là. J’ai craint le vide que tu as laissé en moi… J’ai craint mes lendemains… et le retour de mes cauchemars.
C’était surtout l’été qui tirait à sa fin sous les timides avances de l’automne.
Mais c’est sous la fébrilité de septembre que je t’ai ressuscité, te façonnant de mes doigts de peintre et de ma sensibilité de poète. Nimbée de mystère, notre rencontre était prédestinée… par cet étrange mouchoir portant tes initiales, que j’avais trouvé sur mon chemin, jonchant le sol à mes pieds… Et puis le rêve prémonitoire m’annonçant ta venue.
Mais depuis, le rêve s’est brisé et la vie perpétua sa ronde… tant de mal a été proféré… tant de blessures qui refusent de se cicatriser, éclipsées soudain par le vent doux et parfumé de l’automne, lorsque renaît en spirale ma légende à jamais inachevée.
Qu’il fait bon revivre cet instant magique avant que les froids de l’hiver ponctués de creux et de regrets ne l’emportent.
À chaque bruissement de feuilles mortes, chaque brise matinale embaumée d’huile sainte, chaque fragrance de fleurs sauvages, et même l’odeur acidulée de l’herbe que je foule sous les couchants flamboyants du crépuscule automnal, tu réapparais, fantôme bien-aimé et tant exécré en ces quelques minutes de vaine nostalgie. Minutes où ni toi, ni moi n’avions d’âge, déambulant entre le feu d’artifice de l’été et celui indolent de l’automne.
Tu es l’éblouissant prince charmant à cette Cendrillon qui ne l’est plus depuis si longtemps… et le rêve reprend forme ne fût-ce que pour me plonger dans un état second, éphémère, narguant et trompeur.
Je suis cette rose qui s’ouvre imperceptiblement avant de courber avec humilité la tête, et toi cet oiseau bleu qui quitte la branche vers un horizon sans fin, sans but, ni destinée.
Petit oiseau bleu, le temps de ta légende est révolu… il te faut fondre dans le souffle vespéral de la fin du jour, de la fin de ce contrat qu’est la vie en ce bas monde.
Et moi, fidèle au rendez-vous de chaque année, je m’accroche encore à ces bribes de bonheur provisoire qui m’envahissent inlassablement comme sous l’assaut ininterrompu des vagues de l’océan.
Je te souris à chaque automne, tout en astiquant les chandeliers pour le Nouvel An. Tout en me préparant à comparaître devant mon Créateur et le glorifier le jour de Kippour, le remercier pour m’avoir par amour, créée, pour m’avoir bénie de Sa sagesse, de Sa clarté, de Ses gouttelettes d’affection et surtout de Sa protection…
Il n’y a au monde aucun amour aussi puissant et ineffable, aussi éternel et authentique, que celui du Créateur envers Sa création, envers l’homme.
Mais l’homme, ingrat, l’oublie trop souvent
Béni soit l’Éternel pour son magnifique cadeau de la vie.
Thérèse Zrihen-Dvir
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