En classe de seconde l’obligation d’un stage en entreprise a été imposée par Bruno Le Maire et Gabriel Attal. Ils n’ont jamais travaillé. Cela leur a-t-il manqué ? En tout cas ils ont voulu faire connaître aux lycéens le monde de l’entreprise. La présentation de leur projet a donné la parole aux dirigeants de L’Oréal, Radio France, Airbus, Décathlon, Blablacar, etc. Inutile de préciser qu’il faut des parents avec des relations pour obtenir un stage dans ce genre d’entreprise. Ce n’était pas le cas de ceux qui viennent de mourir dans un chantier, une ferme, un supermarché, une usine.
Cinq stagiaires viennent de mourir… pour un stage
En stage d’observation, Lucas, 17 ans, succombe à ses blessures le 18 mai, deux jours après avoir été écrasé par une poutre métallique dans une usine métallurgique de Sémur-en-Brionnais en Saône-et-Loire.
Le 18 juin, chez GIFI, un magasin discount de décoration de Saint Lô, un élève de 16 ans est écrasé par la chute d’une palette de marchandises. « Le stagiaire en observation n’avait pas à être là », explique une source judiciaire. Une enquête préliminaire pour homicide involontaire a été ouverte par le parquet de Coutances. Au vu des premiers éléments, la responsabilité de l’entreprise GIFI pourrait être engagée. Le conducteur du chariot élévateur n’avait pas le CASES (Certificat d’Aptitude à la Conduite en Sécurité) nécessaire pour le maniement d’un tel engin.
Le Snes-FSU, premier syndicat des collèges et lycées, a demandé sur France Inter, « que les stages de seconde n’aient plus lieu ». La CGT de l’Éducation nationale a elle aussi dénoncé ces stages.
Autre forme de stage : l’apprentissage. Le 30 avril, Lorenzo, apprenti de 15 ans, étudiant dans un CFA de maçonnerie à Antibes, est mort percuté par un engin de chantier à Saint-Martin-du-Var, dans une entreprise de travaux publics appartenant à un cousin de son père.
Le 4 juillet, à Vivy (Maine-et-Loire), un stagiaire d’une Maison Familiale et Rurale âgé de 16 ans est mortellement entraîné par un engin agricole au fond d’une mare alors qu’il se trouvait sur la berge. L’enquête est ouverte pour homicide involontaire.
Le 26 juin, une stagiaire de 19 ans, en formation avec un inséminateur dans une exploitation agricole, à Masseret (Corrèze), a été tuée par un taureau, alors qu’elle se tenait derrière une barrière de sécurité.
Chaque décès est suivi d’une enquête préliminaire pour « homicide involontaire ». Comment éviter ces drames à répétition ? « Nous sommes contre le travail des mineurs sur les chantiers ou les sites industriels risqués. Certaines situations sont délirantes », répond Frédéric Mau, président de l’OPPBTP (Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics). Pour lui, les conditions de sécurité ne sont plus remplies.
« Quand j’étais jeune et que je commençais à aller sur un chantier, je collais aux basques de mon responsable, j’étais vraiment accompagné. Ce n’est plus le cas dans les entreprises aujourd’hui. »
1er responsable des homicides : François Rebsamen et son décret
Les lois régissant le travail des mineurs en formation professionnelle ont été assouplies depuis le décret Rebsamen du 17 avril 2015. Ce ministre n’a jamais hésité à valser avec l’argent public : repas gastronomiques, taxis longue distance, costumes sur mesure… En revanche il a réduit les fonctions des inspecteurs du travail afin de pouvoir supprimer des postes : la visite préalable d’un inspecteur du travail n’est plus obligatoire pour obtenir une dérogation pour faire effectuer certains travaux aux jeunes (travail en hauteur, manipulation de machines, exposition à des produits). L’employeur doit simplement informer les jeunes des risques, des conditions d’utilisation de certains équipements et permettre à l’inspection du travail de procéder à des contrôles inopinés. Un décret qui aggrave l’insécurité des stagiaires et des salariés en entreprise.
2e responsable : Astrid Panosyan-Bouvet, ministre du travail et de l’emploi
La ministre du Travail indique qu’il n’est pas prévu de revenir sur le décret Rebsamen, tout en précisant quelle souhaite « renforcer l’obligation actuelle de formation à la sécurité » pour ceux qui arrivent pour la première fois en milieu professionnel. Le président de l’OPPBTP (Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics), Frédéric Mau, reste sceptique sur cette annonce : « Dans les faits, les jeunes qui arrivent savent des choses. L’entreprise leur montre des vidéos sur la sécurité. Mais une fois sur le chantier, c’est un peu : “débrouille-toi”. »
Autre proposition de la ministre : interdire le recrutement, « pendant une certaine durée », d’un apprenti et l’accueil de stagiaires lorsqu’un employeur a été condamné pour faute inexcusable et/ou homicide et blessures involontaires. La vie des stagiaires est donc suspendue à des termes flous énoncés par une ministre indifférente qui dans sa vie professionnelle a géré la finance et non l’humain. Chez Unibail-Rodamco-Westfield, elle a gagné 6,1 millions d’euros de 2017 à 2021. Alors, le sort de stagiaires non rémunérés…
De moins en moins d’inspecteurs du travail
Entre 2015 et 2021, l’inspection du travail a perdu 16 % de ses effectifs et peine à en recruter. Dans son rapport du 28 février 2024, la Cour des comptes alerte sur les difficultés de cette administration qui joue un rôle essentiel de gardien de la loi dans les entreprises.
On compte un inspecteur du travail pour 1 200 entreprises, soit environ 11 000 salariés. Cela ne va pas s’améliorer avec la suppression de 3 000 emplois publics dès 2026, du non-remplacement d’un fonctionnaire sur trois à partir de 2027…
Le risque chimique n’est pas pris en compte par la ministre du Travail
Parmi les mesures annoncées par la ministre du Travail, aucune ne tient compte du risque chimique. Les secteurs les plus touchés sont l’agriculture – on y commence les stages parfois dès 14 ans – le BTP, la mécanique, les métiers de l’esthétique et de la coiffure. Les effets des risques chimiques se voient plusieurs années après, ils sont donc plus difficiles à prévenir. L’écart est colossal entre les connaissances scientifiques et la manière de les prendre en compte dans les dispositifs légaux. En Europe, 100 000 à 130 000 personnes meurent chaque année suite à l’exposition à des produits chimiques dans le cadre du travail.
La France est le pays européen où on meurt le plus d’accident du travail… après Malte
Le taux le plus élevé d’accidents mortels au travail parmi les pays de l’Union européenne est enregistré à Malte, suivi de la France et de la Bulgarie.
En France, le nombre d’accidents du travail est toujours de deux morts par jour, dont un ouvrier sur un chantier car le secteur du BTP est le plus mortel.
Ces statistiques sont d’ailleurs largement sous-évaluées : seuls sont recensés les salariés du privé cotisant au régime général. Les salariés de la fonction publique, ceux du secteur agricole, les marins-pêcheurs, les travailleurs indépendants ne sont pas décomptés.
De 2003 à 2023, en France, le travail a tué plus de 21 000 salariés et en a blessé 13,5 millions, selon l’Humanité, pour une fois sur la même longueur d’onde que… Gabriel Attal qui, Premier ministre, déclarait en mars 2024 : « On a trop de Français qui meurent au travail. » Sans commentaire.
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Merci pour cet article fouillé
allez voir un chantier en suede ou en Allemagne.
le jour et la nuit comparé a la France.
la France est un pays du tiers monde. manque de matériel, ouvriers qui comprennent pas les notices techniques car ils ne maîtrisent pas le français.
manque d’investissement dans le matériel de sécurité