Que doit-on comprendre quand l’islam parle de paix ?

Paix : « Al-salam », dérive de la racine « S-L-M », signifiant « soumission » ou « sécurité ». Les occurrences les plus nombreuses dans le Coran (plus de 20 fois) sont les formules rituelles de salutation : « La paix soit sur lui », « La paix soit sur vous », « La paix soit sur toi » (« salam aleik »). Cette dernière a donné en français, depuis 1559, le très péjoratif « salamalecs »[1], au sens de protestations d’amitié exagérées dont il ne faut pas être dupe. « Al-salam » signifiant la paix entre des belligérants n’apparaît que 3 fois, tandis que les notions d’alliance et de choix des alliésawliya’a ») sont largement plus présentes (78 fois).

Les pactes

Le pacte primordial Ce pacte (le « mithaq ») aurait été contracté entre Dieu et les hommes dès leur création, engageant l’humanité à adorer son Seigneur : « Et quand ton Seigneur tira une descendance des reins des fils d’Adam, et les fit témoigner contre eux-mêmes : “Ne suis-Je pas votre Seigneur ?” Ils répondirent : “Mais si, nous en témoignons…” – afin que vous ne disiez point, au Jour de la Résurrection : “Vraiment, nous n’y avons pas fait attention”, » (7, 172). En échange de cette soumission, Allah est le protecteur des croyants, le seul allié qui vaille (4, 46 ; 3, 68 ; 3, 122) car ils n’ont « pas d’alliés en dehors d’Allah » (11, 113 ; 6, 51 ; 6, 70 ; 9, 74 ; 9, 116 ; 33, 4 ; 33, 17 ; 5, 55 ; 7, 3 ; 11, 20 ; 11, 113 ; 17, 97).

Les pactes impossibles De la primauté du pacte originel avec Allah, découle l’impossibilité pour l’islam d’envisager une paix durable avec ceux qu’il ne reconnaît pas comme les siens, qu’ils soient désignés comme polythéistes, mécréants, associateurs, infidèles, juifs ou chrétiens : « Ô vous qui avez cru ! Ne prenez pas pour alliés Mon ennemi et le vôtre, leur offrant l’amitié, alors qu’ils ont nié ce qui vous est parvenu de la vérité. » (60, 1) car « l’infidèle sera toujours l’allié des ennemis de son Seigneur ! » (25, 29). « Ceux qui ne croient pas combattent dans le sentier du Tagut [2]. Eh bien, combattez les alliés du Diable. » (4, 76). «  Nous avons désigné les diables pour alliés à ceux qui ne croient point» ( 7, 27 ).

Des trêves provisoires Le Coran envisage cependant des circonstances où il vaut mieux instaurer une trêve dans la guerre contre les mécréants, en cas d’infériorité des musulmans :  » Ne soyez point faibles et n’appelez pas à la paix lorsque vous êtes les plus forts et qu’Allah est avec vous !… » (47, 35). «  Que les croyants ne prennent pas pour alliés des infidèles aulieu de croyants. Quiconque le fait contredit la religion d’Allah; à moins que vous ne cherchiez à vous protéger d’eux d’eux» (3, 28).

« Un tel traité n’est pas censé remplacer l’état de guerre habituel entre le Dar al-Harb et le Dar al-islam[3]. La durée d’un tel traité est limitée à une période ne pouvant excéder 10 ans (limite fixée sur la base du premier traité que Mahomet conclut avec le peuple de la Mecque en 624), bien qu’il puisse être reconduit[4] Mais ce type de pacte peut être rompu … pour peu qu’on estime que l’autre partie est en tort : « Mais s’ils violent leurs serments après leur pacte et attaquent votre religion, combattez alors les chefs de la mécréance – car ils n’ont point de serments – afin qu’ils cessent. » (9, 12). Le « djihad » dit « défensif » reste obligatoire en cas d’attaque mais qu’est-ce qu’« attaquer la religion » ?

La taqîya de la paix

Face à la quantité de versets et de passages de la « sunna »  incitant à la guerre[5], donner de l’islam une image pacifique est un vrai travail. Les propagandistes de « l’islam, religion de paix » puisent alors dans quelques citations, toujours les mêmes. Elles ne sont pas si nombreuses qu’on ne puisse les examiner ni montrer les procédés manipulatoires qui les accompagnent.

Variations iréniques sur le « djihad»

« Nous revenons du petit djihad vers le grand djihad. » Ce « hadith » tient une place de choix, de nos jours, pour affirmer que le djihad ne serait pas tant le combat armé qu’un effort personnel, une discipline intérieure pour se maîtriser. Il aurait été prononcé par le Prophète, au retour d’une expédition militaire (ce serait le « petit djihad ») pour indiquer que l’’effort sur soi-même serait plus important (« le grand djihad »). Ces paroles souvent citées[6] ne figurent pas dans les recueils canoniques (comme Sahîh al-Bukhârî ou Sahîh Muslim). Ce « hadith » est cité par les auteurs soufis comme Al-Ghazâlî ou Abd al-Qâdir al-Jîlânî pour mettre l’accent sur le « djihad » spirituel, interprétation qui est restée marginale. On notera que, de toute façon, un des deux « djihads » n’exclut pas l’autre, comme le prouve l’action de célèbres « soufis » comme chefs de guerre.[7]

« Repousse délicatement ton agresseur et fais de sorte qu’il devienne ton ami intime », (41, 34) Cette traduction, donnée dans le discours officiel d’ouverture d’une conférence internationale « Pour un islam de paix »[8], surprend par sa mansuétude.  Le sens est déjà moins net dans la traduction d’un éminent linguiste arabophone de naissance [9]:. « Repousse [le méfait]de la meilleure manière. Et voilà que celui avec qui tu avais une inimitié devient comme un allié. » (walioun) ardent. » Cela semble davantage un conseil stratégique pour obtenir une alliance qu’un renoncement à la guerre. Le mot à mot est encore moins convaincant : « et ni/ne |–?–| l’aumône/ la vertu / le bienfait / la faveur / la bonne parole et ni/ne le mauvais |–?–| avec cette / avec celle qui elle (est) la meilleure Alors, lorsque qui /celui |–?–| et entre lui hostiles / opposants comme si il était un allié un liquide bouillant / un intime [10] Ce verset bienveillant est, de toutes les manières, censé être abrogé par le Verset du Sabre (9:5).

Le djihad croisade humanitaire

«  Les croyant sont ceux qui croient en Dieu et en son Prophètes, puis qui n’en doutent plus, et qui luttent dans le chemin de Dieu avec leurs biens et leurs personnes. Voilà ceux qui sont véridiques. » (49, 15).

Explication de Tariq Ramadan :  » On peut lire la formulation au sens strict et affirmer qu’il s’agit de la lutte armée (…) qui s’impose dès lors qu’il existe une agression. Cette lecture trouve des justifications dans le contexte de la révélation du verset mais il serait réducteur de n’en tirer que ce seul enseignement. Dans un sens plus large, que confirme l’ensemble du message coranique et les traditions (!), « lutter dans le chemin de Dieu»  veut dire mobiliser toutes les forces humaines, diriger tous ses efforts pour venir à bout de toutes ces adversités que sont l’injustice, la pauvreté, la délinquance et l’exclusion » ( ! ) On notera que le commentateur se garde d’exclure la lutte armée, qu’il qualifie même d’obligatoire en l’innocentant d’avance « dès lors qu’il existe une agression » (quel type d’« agression » ?). Il transforme le djihad en une offensive vague (morale ? idéologique ? militante ? militaire ?) contre des cibles tout aussi imprécises : injustice, pauvreté, délinquance, exclusion, qui sont autant de poncifs du discours socio-politique occidental. Le « djihad» du Coran serait donc le combat progressiste par excellence (!)[11]

« Ne suis pas ceux qui ne croient pas et lutte contre eux, avec force (au moyen du Coran) » ( 25, 52 ). Le texte ne dit pas explicitement « au moyen du Coran » mais « bihi » = « par ceci ». Sami Aldeeb traduit : « N’obéis donc pas aux mécréants et engage contre eux par ceci une grande lutte » [12] . En choisissant « au moyen du Coran », Tariq Ramadan extrapole ensuite à sa guise : « Il est fait mention ici d’une lutte (djihad) qui serait de nature savante, scientifique et qui s’appuierait sur un dialogue ». (!)[13]

Pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? Poursuivant sur son élan, il prétend que le « djihad » serait une guerre, certes, mais purement humanitaire : « Il s’agit d’une guerre. Nous sommes en guerre. C’est bien le sens de la formulation de l’Abbé Pierre quand il affirmait avec force : « je suis en guerre contre la misère », ou encore des appels du Pr Albert Jacquard et de Mgr Jacques Gaillot quand « ils partent en guerre » pour loger les sans-abri. » Et Tariq Ramadan de convoquer aussi « le pape, dans son encyclique sociale Centesimus annus (1991)… » [14] (!)

Prétendre qu’Allah offre la paix à tous

« N’est-ce pas au souvenir de Dieu que s’apaisent les cœurs ? » ( 13, 28 ), écrit benoîtement Tariq Ramadan[15], feignant de croire que cet apaisement est destiné à toute l’humanité. Il suffit de lire le contexte : «  13, 27 Ceux qui ont mécru disent: « Pourquoi n’a-t-on pas descendu sur lui un miracle venant de son Seigneur? » Dis: « En vérité, Dieu égare qui Il veut et Il guide vers Lui celui qui se repent, 13, 28 ceux qui ont cru, et dont les coeurs se tranquillisent à l’évocation de Dieu ». N’est-ce point par l’évocation de Dieu que se tranquillisent les cœurs « ?[16]. Il n’est pas question d’un apaisement universel mais de la tranquillité qui envahit le coeur de « ceux qui ont cru », les disciples de Mahomet, exclusivement, conformément à l’invocation qui est prononcée à la fin des prières « Ô Allah, Tu es la Paix, de Toi vient la paix, Tu es béni, Ô Détenteur de majesté et de noblesse. » Allāhumma anta as-salām wa minka as-salām, tabārakta yā dhā al-jalāli wa al-ikrām»)

«Dieu appelle à la demeure de paix (« dari alçalami » (10, 25)[17] ne signifie nullement, comme on voudrait nous le faire croire, qu’Allah appelle à la paix universelle mais qu’il recevra les pieux musulmans en son Paradis, c’est cela, « la demeure de paix ». « 10 : 25 – Dieu appelle à la demeure de la paix et guide qui Il veut vers un droit chemin. 10 : 26 – A ceux qui agissent en bien est réservée la meilleure (récompense) et même davantage. Nulle fumée noircissante, nul avilissement ne couvriront leurs visages. Ceux-là sont les gens du Paradis, où ils demeureront éternellement. 10 : 27 – Et ceux qui ont commis de mauvaises actions, la rétribution d’une mauvaise action sera l’équivalent. Un avilissement les couvrira, -pas de protection pour eux contre Dieu -, comme si leurs visages se couvraient de lambeaux de ténèbres nocturnes. Ceux- là sont là les gens du Feu où ils demeureront éternellement. » Il s’agit là simplement d’une des nombreuses occasions où Allah promet le Paradis à ses fidèles et l’Enfer aux non-musulmans, le Bien et le Mal n’étant considérés qu’en fonction de la soumission ou non à Sa religion, l’islam[18].

Tordre les mots pour rendre le message oecuménique

« Ô gens, nous vous avons créés à partir d’un homme et d’une femme, et nous avons fait de vous des nations et des tribus, afin que vous vous entreconnaissiez » ( 49, 13 ). Le sens n’est pas, comme l’a prétendu Tariq Ramadan : « vous êtes différents, cherchez à mieux vous connaître »[19] .  Le texte dit :« litaƐarafou » = « afin que vous vous identifiez »[20], c’est-à-dire que vous vous distinguiez les uns des autres, que vous sachiez qui appartient à tel groupe. Ce verbe n’apparaît qu’une seule fois dans le Coran, sa racine signifie « connaître », au sens de « se rendre compte de quelque chose », « définir », « fixer » … Habile tour de passe-passe sur la polysémie du verbe « connaître », qui n’est rien d’autre qu’un très opportun contresens. Cela pour rendre le dessein d’Allah conforme au slogan sur « l’amitié entre les peuples », prisé depuis le milieu du XXe siècle. D’ailleurs, si on lit le verset précédent, on constate qu’Allah ne s’adresse ici qu’aux croyants, c’est -à-dire aux seuls musulmans : « 49, 12 – Ô vous qui avez cru !… »

« Si dieu ne repoussait point certains hommes par d’autres, les ermitages seraient démolis, ainsi que les synagogues, les oratoires et les mosquées où le nom de dieu est fréquemment invoqué (22, 40). Explication de Tariq Ramadan : « On notera avec intérêt que les ermitages, les synagogues, et les oratoires sont mentionnés avant les mosquées et qu’il s’agit très clairement de l’expression de leur inviolabilité en même temps que du respect dû aux adeptes des différentes religions. »[21] Or « les ermitages » traduit ici très librement « sawamiƐou » qui est un hapax dans le Coran… d’autres traduisent « les minarets » !  La formule « les synagogues » traduit ici « wabiyaƐoun », également un hapax , qu’on trouve aussi traduit par « les commerces ! « Les oratoires » traduit ici « waSalawatoun » de « salawat », qu’on trouve aussi traduit aussi par « carrefours ». « Les mosquées » traduit « wamaçajidou », unique apparition de ce mot sous cette forme dans le Coran ; on peut y voir le mot « masjdid », « lieu de prosternation », qui apparaît deux autres fois, effectivement traduit par « mosquée » (2, 144 ; 17, 1 ).[22] Dans les phrases qui suivent immédiatement ce verset 22, 40, où, d’après Tariq Ramadan, Allah se montrerait soucieux, « du respect dû aux adeptes des différentes religions « , Allah ne semble plus du tout s’en préoccuper : «Allah soutient, certes, ceux qui soutiennent (sa religion ?), Allah est assurément Fort et Puissant, ceux qui, si Nous leur donnons la puissance sur terre, accomplissent la Salat, acquittent la Zakat, ordonnent le convenable et interdisent le blâmable. »… donc Allah soutient exclusivement les musulmans.

 » Le Messager d’Allah a dit : « Il y aura des troubles : celui qui est assis y sera meilleur que celui qui est debout, celui qui est debout y sera meilleur que celui qui marche, et celui qui marche y sera meilleur que celui qui court. Celui qui cherchera à s’y exposer y sera happé. Alors, que celui qui trouve un refuge s’y réfugie. » ( Bukhâri, n°3601 et Muslim, n°2886). Ce « hadith » appelle les musulmans à ne pas intervenir lors des guerres civiles entre eux (« fitna ») mais on ne craint pas de lui prêter un sens universel pour accréditer le pacifisme du Prophète[23], dont la «sunna» rapporte pourtant toute la cruauté de chef de guerre.[24]

« Dieu ne vous défend pas d’être bienfaisants et équitables envers ceux qui ne vous ont pas combattus pour la religion et ne vous ont pas chassés de vos demeures. Car Dieu aime les équitables. » ( 60, 8 ). Cette bienveillance est-elle applicable à ceux qui ont osé critiquer l’islam ? De toutes les manières, ce verset est abrogé par le Verset du Sabre (9, 5).

Tronquer les textes pour les humaniser

« Pas de contrainte en matière de religion. » (2, 256). Ce verset, si souvent invoqué pour prétendre que l’islam n’use pas de violence pour convertir[25], n’innocente en rien les non-musulmans ; il suffit de lire le verset qui suit :« Dieu est le défenseur de ceux qui ont la foi: Il les fait sortir des ténèbres à la lumière. Quant à ceux qui ne croient pas, ils ont pour défenseurs les Tagut[26], qui les font sortir de la lumière aux ténèbres. Voilà les gens du Feu, où ils demeurent éternellement. » (2, 257). De plus, tout le verset « Pas de contrainte en matière de religion » serait abrogé par le Verset du Sabre d’après de grands savants de l’islam.[27]

« Quiconque tue une personne non coupable d’un meurtre ou de corruption sur la terre, c’est comme s’il avait tué toute l’humanité. Et quiconque la sauve, c’est comme s’il avait sauvé toute l’humanité. »(5:32). Le passage souligné est la plupart du temps omis. En effet, non seulement tuer le coupable d’un meurtre est autorisé, mais il convient de tuer celui qui est « coupable d’une corruption sur la terre ». Le verset suivant renseigne sur ce que cela signifie : « La récompense de ceux qui font la guerre contre Dieu et Son messager, et qui s’efforcent de semer la corruption sur la terre, c’est qu’ils soient tués, ou crucifiés, ou que soient coupées leur main et leur jambe opposées, ou qu’ils soient expulsés du pays. Ce sera pour eux l’ignominie ici-bas; et dans l’au-delà, il y aura pour eux un énorme châtiment… » (5, 33). Ce qui s’appelle «semer la corruption sur la terre» est de faire la guerre à Allah et à son messager ! Les semeurs de corruption sont les réformateurs (2, 11-12), les juifs et chrétiens (2 27), ceux qui ne suivent pas la religion nouvelle prêchée par Mahomet (7, 56).

 « La vérité émane de votre Seigneur ». Quiconque le veut, qu’il croit, et quiconque le veut qu’il mécroie« . Les discours sur l’islam de paix omettent soigneusement de citer la suite du verset où Allah se félicite du châtiment auquel il destine « les injustes », terme qui désigne les non-croyants : « Nous avons préparé pour les injustes (« lilŽalimiyna » : « propagateurs d’obscurité ») un Feu dont les flammes les cernent. Et s’ils implorent à boire on les abreuvera d’une eau comme du métal fondu brûlant les visages. Quelle mauvaise boisson et quelle détestable demeure ! » (18 : 29). Ce verset serait abrogé par les versets 76, 30 et 81 29.[28]

Une interprétation pour un public, une autre pour un autre

«Je n’adore pas ce que vous adorez. Et vous n’êtes pas adorateurs de ce que j’adore. 4 – Je ne suis pas adorateur de ce que vous adorez. Et vous n’êtes pas adorateurs de ce que j’adore. A vous votre religion, et à moi ma religion«  (109, 2 à 6). On pourrait croire ici qu’il s’agit de prôner la tolérance religieuse et c’est ainsi que ce verset est présenté aux non-musulmans. Cependant l’interprétation s’avère tout autre lorsque ce verset est expliqué aux musulmans par une autorité musulmane.

«  Les mécréants ne suivent aucune religion prescrite par Dieu et il n’y a aucun point de convergence possible entre leurs croyances et celles des musulmans. Le début de cette sourate souligne donc des différences énormes qui ne peuvent être ignorées ni prises à la légère. Ces versets affirment clairement qu’aucun compromis n’est possible, avec les mécréants, en matière d’adoration. (…) D’autres affirment que cette répétition vise à rejeter les propositions répétées des leaders de Qouraysh qui voulaient que le Prophète intègre dans sa religion certaines parties de la leur (Coran 39, 64). (…) « cette sourate constitue une critique, mais d’autre part, elle sous-entend que les croyants ne devraient pas argumenter avec les mécréants lorsque ceux-ci s’entêtent dans leur façon de faire.  Il faut simplement les laisser poursuivre leur chemin et c’est Dieu qui, ultimement, les jugera ».[29] Ce verset serait abrogé par le Verset du Sabre (9, 5), d’après de grands savants de l’islam.[30]

Que faire du Verset du Sabre ?

 

« Une fois les mois sacrés expirés, tuez les polythéistes où que vous les trouviez ; capturez-les, assiégez-les, et guettez-les dans toute embuscade. Mais s’ils se repentent, accomplissent la prière et s’acquittent de la zakât, (= s’ils deviennent musulmans) alors laissez-leur la voie libre. » (9, 5). Ce verset abrogatif est bien gênant pour ceux qui nous affirment : « L’islam promeut la paix, la justice, la tolérance et l’amour envers les autres »[31] car il ne laisse guère d’échappatoire aux non-musulmans. En effet, on entend ici par « polythéistes » ceux qui rendent un culte à une autre entité qu’Allah, si bien que sont inclus parmi les polythéistes les païens mais aussi les juifs, accusés d’avoir « pris leurs rabbins pour seigneurs en dehors d’Allah » (9,31) et les chrétiens, accusés d’avoir divinisé Jésus (5, 72-73 et 9,30).

Ce verset est réputé avoir abrogé nombre de versets plus ou moins tolérants du Coran (plus de 100 ), mais il ne peut, à son tour, être abrogé aujourd’hui par les tenants d’un islam pacifique !

Il reste à tenter d’en réduire la portée à une circonstance historique unique : la sourate où se trouve ce verset aurait été révélée à Médine, lors de la guerre menée par Mahomet contre des tribus qui auraient rompu des pactes de paix et ne concernerait que ces « polythéistes », exclusivement.

Comment tout cela est-il possible alors que le Coran est censé transmettre la parole de Dieu, valable en tout lieu et en tout temps et cela de toute éternité ? (6, 115 ; 18, 27 ; 10, 64).

En conclusion, on peut admettre que certains croient sincèrement à leur plaidoyer pour un « islam, religion de paix« . En ce cas, il faut souhaiter qu’ils s’enferrent dans leur erreur, qu’ils restent fidèles à leur noble illusion et qu’ils ne songent désormais qu’à contribuer à la concorde universelle. Néanmoins, le doute est permis car l’Histoire nous a montré que le discours de paix peut être une arme de guerre.

………………………………………………………………………………………………………………………………………………………….

[1] Le Robert, Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, Paris, 1974, Tome VI, p. 123.

[2] « Tagut« : toute entité, divine ou humaine qui invite à la désobéissance envers Allah.

[3] « Domaine de la guerre » (terres des mécréants) et « Domaine de l’islam ».

[4] Encyclopédie de l’islam, article « Sulh », Bosworth, C.E. et al. (eds.), The Encyclopaedia of Islam, 2nd ed., Leiden: Brill, 1954–2005, p. 880.

[5] Cf. Agathe RABIER, « Djihad : la guerre sans fin ? », in Résistance républicaine, publié le 23/10/ 23.  https://resistancerepublicaine.com/2023/10/23/djihad-la-guerre-sans-fin/

[6] Prince Hassan Ibn TALAL de Jordanie, Ouverture de la conférence Pour un islam de paix , Question de, Albin Michel, Gordes, 2001, p. 42

[7] Abd el-Kader (1808–1883) en Algérie, Omar al-Mukhtar (1858–1931) en Libye, Usman dan Fodio (1754–1817) au Nigeria, Imam Shamil (1797–1871)en Daghestan et Tchétchénie, Ahmad al-Mahdi (1844–1885) au Soudan…

[8] Prince Hassan Ibn TALAL de Jordanie, Ouverture de la conférence Pour un islam de paix , op. cit., p. 42.

[9] Sami ALDEEB, Le Coran : texte arabe et traduction française par ordre chronologique selon l’Azhar, Centre de droit arabe et musulman, 2016, p. 229.

[10] Site Coran seul,   https://coran-seul.com/index.php/verset?sourate=41&verset=34

[11] Tariq RAMADAN, Jihad, violence guerre et paix, Questions contemporaines, Tawlid, Lyon, 2002, p.68-69.

[12] Sami ALDEEB, op. cit., p. 106.

[13] Tariq RAMADAN op. cit., p. 69.

[14] Ibid. , p. 73.

[15] Ibid. ,  p. 19.

[16] Traduction Coran seul  https://coran-seul.com/index.php/verset?sourate=13&verset=28

[17] Tariq RAMADAN, op.cit., p. 21.

[18] Cf. Agathe RABIER, « L’islam a-t-il une Morale ? », in Résistance républicaine, publié le 21/07/2024.   https://resistancerepublicaine.com/2024/07/21/lislam-a-t-il-une-morale/

[19] Tariq RAMADAN, op. cit. , p. 31.

[20] Traduction Coran seul  https://coran-seul.com/index.php/verset?sourate=49&verset=13

[21] Tariq RAMADAN, op. cit., p. 33

[22] Cf. la traduction mot à mot dans Coran seul. https://coran-seul.com/index.php/verset?sourate=2&verset=144

et   https://coran-seul.com/index.php/verset?sourate=17&verset=1

[23] Cheikh Khaled BENTOUNES, « L’avenir en commun ou la voie de l’espérance », Conférence Pour un islam de paix , Question de, Albin Michel, Gordes, 2001, p. 11.

[24] Cf. Agathe RABIER, « M.H.M.D. : y a-t-il quelqu’un derrière les 4 lettres de… Mahomet ? », in Résistance républicaine, publié le 16/03/2024.  https://resistancerepublicaine.com/2024/03/16/m-h-m-d-y-a-t-il-quelquun-derriere-ces-4-lettres/

[25] Prince Hassan ibn TALAL de Jordanie, Ouverture de la conférence « Pour un islam de paix », op. cit. p. 22.

[26] Cf. plus haut : « Tagut » = toute entité, divine ou humaine qui invite à la désobéissance envers Allah.

[27] Ibn Kathîr, At-Tabarî, ou encore As-Suyûtî…

[28] Sami ALDEEB, op. cit. p. 255.

[29] Imam MUFTI, in The religion of islam, Chapitre 109, « Al-Kafiroon (Les mécréants) ». https://www.islamreligion.com/fr/articles/11192/chapitre-109-al-kafiroon-les-mecreants

[30] Ibn Kathîr, At-Tabarî, ou encore As-Suyûtî…

[31] Mohammad ABOU el-NAGA, « La Paix en Islam et la Vraie Notion du Jihad », in L’Observatoire d’al-Azhar, 09/10/ 2023.  https://www.azhar.eg/observer-fr/details/ArtMID/1154/ArticleID/75531/La-Paix-en-Islam-et-la-Vraie-Notion-du-Jihad

 

 

 

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22 Commentaires

  1. « Nous revenons du petit djihad vers le grand djihad. » Ce « hadith » tient une place de choix, de nos jours, pour affirmer que le djihad ne serait pas tant le combat armé qu’un effort personnel ».
    Il existe un livre que tout pieux musulman se doit de connaitre. Il s’agit de « Reliance of the traveller ».A mon avis, jamais traduit en francais. Ce livre qui fait autorité en la matiere , a été ecrit à l’usage de tout musulman et parle bien de conquete militaire pour le terme « Djihad ».

  2. Un musulman qui parle de paix, cela ne peut être qu’envers un autre musulman. Et encore, ils arrivent même à se foutre sur la g…e entre eux.

  3. La réponse à la question est plus simple, il faut adopter la LOGIQUE CORANIQUE, pas la logique cartésienne, occidentale :
    La paix CORANIQUE, c’est l’absence de non-musulmans, ou localement quand tout le monde est musulman.
    Quand un musulman affirme qu’il veut la paix, il veut SINCEREMENT qu’il n’y ait PLUS AUCUN non-musulman, il veut SINCEREMENT que tout le monde soit musulman.
    Le musulman SAIT que pour le non-musulman, « paix » signifie seulement « absence de conflit », et sa religion lui impose de laisser croire au non-musulman que pour les musulmans c’est pareil, sauf que c’est faux mais permet au musulman de mieux atteindre SA « paix » : quand il n’y a pas de conflit avec les non-musulmans il est bien PLUS FACILE pour les musulmans de fomenter la disparition des non-musulmans, soit sans conflit (conversion) soit avec (massacre des non-musulmans).
    C’est résumé en dessin ici : https://bergolix.wordpress.com/2014/02/02/islam-religion-de-paix/

    • Bonjour,

      Oui, exactement : il faut appliquer la logique coranique.

      J’ai idée d’un article qui demenderait aux chefs musulmans « français » de signer ce qu’ils imposaient à ceux qu’ils colonisaient : le pacte d’Omar …

      Plus que juste retour des choses !

  4. Sont en paix ceux qui se sont soilis ( paix toute relative).. Sans soumission, le non musulman se met en état de guerre automatiquement.

  5. Paix ou pas paix, dehors, c’est une invasion destinée à faire de notre pays un pays islamique. Dehors l’islam, notre gouvernement veut le grand remplacement car favorable à cette secte satanique, violente et meurtrière . Le vivre ensemble ne se fera jamais. Dehors l’islam et les traîtres aussi.

  6. Attends, je vais faire court:
    C’est comme dans le film « Mars attacks » de Tim Burton. Quand les martiens couinent « terriens! Nous venons en paix! » et sortent leurs flingues laser en même temps.

  7. Bravo et merci pour ce riche article. Le « djihad » qui « serait une guerre, certes, mais purement humanitaire », à l’instar de celles des bienfaiteurs de l’Humanité ! Elle est bien bonne !

  8. AGATHE bonjour, je me répète avec le plaisir de vous lire. : encore merci de nous faire partager votre éblouissant travail… Merci, merci, merci !