Albert Camus a-t-il été assassiné par des barbouzes ou par les fellaghas ?

Le 4 janvier 1960, dans la commune de Villeblevin à 100 km de Paris, l’éditeur Michel Gallimard perd le contrôle de sa Facel Vega. Et Albert Camus, 46 ans, assis sur « le siège du mort » vient corroborer la statistique. Pour les journaux français de l’époque, et les sites web actuels, cela ne fait pas l’ombre d’un doute. Il s’agissait d’un accident.

Un étrange accident tout de même…

Selon le rapport de police, la route était droite, ni glacée ni mouillée. Le véhicule avait des pneus neufs. Il n’était pas dans une phase d’accélération ni de freinage. Il a brusquement quitté la route sans raison, pour aller percuter un arbre. Le voiture a été entièrement détruite.

Des médias anglophones ont émis des doutes sur la version officielle et les ont maintenus jusqu’à aujourd’hui. L’homme de lettres un peu délaissé en France, jouit toujours d’une grande popularité dans les universités américaines. À Palo Alto, le temple de l’anthropologie, Albert Camus était un phare de la pensée permettant d’être anticonformiste sans se vautrer dans le communisme. De son vivant, le Frenchie était qualifié d’écrivain français le plus audacieux.

Un titre mérité par un homme qui méprisait les courtisans et désobéissait aux mots d’ordres, en un temps où des nervis se disant gaullistes adoptaient des méthodes de gangsters pour faire taire les dissidents. À l’exception des cocos comme Sartre, ménagé pour ne pas mécontenter l’URSS.

Camus, une forte personnalité dans un contexte trouble

En janvier 1960, l’unique chaîne de télé et les trois stations de radio autorisées étaient fermement tenues par le ministre de l’Information Roger Frey. Ancien du bataillon du Pacifique, appelé à l’État major du général Mac Arthur, courroie de transmission avec la France Libre, il fut membre de l’OSS ancêtre de la CIA, avant de rejoindre le SDECE qui deviendra plus tard la DGSE. Frey était un centurion qui vénérait de Gaulle et avec qui on ne rigolait pas.

Les journaleux de l’audiovisuel devaient lui faire un rapport avant toute émission, et s’y tenir. Ceux de la presse écrite risquaient la saisie du journal, des condamnations pénales et un contrôle fiscal s’ils ne soumettaient pas leurs écrits à l’imprimatur. Fripounette et son ARCOM sont des amateurs à côté. Mais au moins, en ce temps-là, quand le peuple désavouait le leader, celui-ci faisait ses valises.

Début 1960, la guerre d’Algérie est à un tournant stratégique. Sur le plan militaire, les fellaghas sont vaincus presque partout. Et un contrôle serré des douars par les Harkis les empêche de reconstituer leurs forces. Or de Gaulle songe déjà à pactiser avec l’ennemi et à trahir. « Tous Français de Dunkerque à Tamanrasset ! », ce salaud a bien baisé son monde.

Le chef de l’État va recevoir le 10 juin à l’Élysée Mohamed Si Salah, chef de la wilaya IV qui égorgeait les Pieds Noirs et émasculait les soldats français. Seuls quelques ministres triés sur le volet parmi les plus proches serviteurs du président sont informés de cette forfaiture.

Dans ce contexte, Albert Camus est un caillou dans les rangers des culottes de peau. Certes, ce surdoué issu d’un milieu défavorisé incarne l’ascenseur social républicain. Engagé dans la Résistance lors de la précédente Occupation, il devient fin 1943 rédacteur en chef du journal Combat. Et reçoit le Nobel de littérature en 1957. Un CV trop parfait et une voix qui porte loin avec des amis tels que André Malraux, Raymond Aron, Claude Lévi-Strauss, Jacques Soustelle, Emmanuel Mounier…

« L’homme révolté » est par définition indocile.

Camus a théorisé la dérive des révolutionnaires dans le nihilisme, qui ont sacrifié le réel au profit de l’idéologie, et sanctifié le meurtre. Sa façon de penser, rejetant tout manichéisme, déplaît aux esprits obtus des deux bords. En Algérie comme en métropole.

Camus est un Pied Noir, attaché à son outre-mer et à sa culture. Ami des musulmans qu’on disait « évolués », il plaide pour leur intégration dans des structures de partage du pouvoir. Sans ignorer que la majorité des coraniques ont refusé de devenir Français quand les décrets Crémieux de 1870 leur ont offert le choix entre le code civil et la charia.

Internationaliste et patriote, réformiste tendance libertaire, il va se faire beaucoup d’ennemis dans une période agitée.

L’homme est inclassable en un temps où l’on veut déjà enfermer les individus dans des boîtes étiquetées. Ses prises de position notamment sur la question de l’indépendance de l’Algérie déplaisent à tout le monde. Les ultra de métropole qui prônent la guerre à outrance, les fellaghas qui rejettent toute entente, et le parti communiste acharné à déstabiliser le pouvoir, avec des traîtres comme Audin que Macronescu a réhabilité sur ordre des Algériens.

Camus irrite en mettant en parallèle la misère des indigènes d’Afrique du Nord avec celle des « petits Blancs » qui survivent tant bien que mal. Il sait de quoi il parle. Il n’a pas appris à manier l’imparfait du subjonctif dans les salons de thé du XVIe.

Il abhorre la caricature du Pied Noir exploiteur, et prend la défense des exilés espagnols anti-franquistes et des victimes du stalinisme qui ont trouvé refuge au Maghreb. Son anti-soviétisme lui vaut les anathèmes des intellectuels communistes, ainsi qu’une fâcherie avec Jean-Paul Sartre. Camus, homme de gauche jusqu’en 1937, sera honni et banni pour avoir défendu l’obligation morale de protéger les populations civiles européennes et musulmanes contre la barbarie du FLN.

Les gaullistes purs et durs, les Pieds Noirs activistes, les espions étrangers qui grenouillent dans le marécage algérien et les égorgeurs du FLN ont tous de bonnes raisons de l’éliminer pour le faire taire.

Sans oublier les islamistes radicaux. Car c’est une erreur, ou une falsification de l’histoire, de parler de guerre de libération coloniale. Cet aspect-là du conflit était secondaire. Une vitrine à l’usage des intellos germanopratins et des tiers-mondistes de l’ONU.

Le principal objectif était de chasser les Roumis de la terre d’islam, en fermant toute possibilité d’entente à l’avenir… Avec la ré-islamisation forcée d’une population indigène qui prenait, surtout chez les Kabyles, des libertés avec les élucubrations du prophète. Le djihadisme en France aujourd’hui, après la guerre civile algérienne, est la suite logique de ce fanatisme sanguinaire dans lequel les islamistes puisent leurs forces.

Plusieurs années après « l’accident de voiture de Camus », des témoins ont commencé à parler.

Des experts ont relevé des incohérences dans le narratif des faits. On les a traités de complotistes. Sans jamais répondre sur le fond à leurs allégations. En 2011, un journal italien a affirmé que le KGB avait causé l’accident. Camus critiquait vertement les Soviétiques pour leur emprise sur l’Europe centrale. Et ceux-ci armaient et finançaient les fellaghas par l’intermédiaire de Nasser. Le raïs égyptien servait de relais et de rideau de fumée. Il était intouchable depuis le désastre de Suez.

Parmi les soupçons crédibles, les propos sibyllins de Jan Zábrana, le traducteur tchèque de Camus. Contacté par l’universitaire italien Giovanni Catelli, Zábrana avait confirmé ses accusations : « L’accident qui a coûté la vie à Camus en 1960 a été organisé par des agents soviétiques. Ils ont trafiqué un pneu sur la voiture en utilisant un équipement sophistiqué pour le faire éclater au moment choisi. »

L’ordre aurait été donné par le ministre soviétique des Affaires étrangères, le turkmène Dmitri Shepilov, pour se venger d’un article publié dans « Franc-tireur » en mars 1957, où l’écrivain avait dénoncé les massacres de 1956 en Hongrie. Les fellaghas auraient suivi Camus et informé le KGB de ses déplacements.

Selon certaines sources, les services français connaissaient ce projet criminel. Mais ils ont laissé faire sur ordre supérieur. Appréciant que les Soviets leur épargnent le sale boulot.

Trop contents en haut lieu d’être débarrassés d’un électron libre dont on craignait les réactions imprévisibles, sans avoir à mettre les mains dans le cambouis. On peut imaginer les clameurs si Camus avait vécu assez longtemps pour dénoncer en 1962, le million de Pieds Noirs trahis, jetés à la mer, dépouillés jusqu’à l’os, et l’abandon de 250.000 Harkis livrés pieds et poings liés aux couteaux des égorgeurs.

Christian Navis

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5 Commentaires

  1. Excellente analyse. Sous de Gaulle, la barbouzerie ne manquait pas de fumiers. Camus fut un grand: lors de la remise de son pris Nobel, il rendit hommage a sa mère, analphabète et a monsieur Germain l’un de ses professeurs qui l’aiguillage dans la meilleure direction possible: on le dit dans l’oreillette que les barbouzes gaullistes fricotaient avec le FLN. Aujourd’hui, on a leurs successeurs: les melenchonnistes qui sont au mieux avec l’Islam.

  2. À l’époque, le contrôle technique n’existait pas, bon nombre de voitures étaient dangereuses. Et il y a eu de nombreux accidents sur cette portion de voie. Je ne crois pas une seconde à la théorie du complot.