(Illustration : la vieille ville de Salzbourg. En médaillon, Herbert von Karajan (5 avril 1908 Salzbourg – 16 juillet 1989 Anif, près de Salzbourg)).
Avant de m’installer de façon définitive en Outre-Mer, j’ai résidé en région parisienne ce qui m’a permis d’assister à des concerts prestigieux avec des chefs qui ne l’étaient pas moins : Zubin Mehta, Daniel Barenboim, Claudio Abbado, Leonard Bernstein, Evgueni Svetlanov entre autres. Pas mal, non ? Par contre je n’ai jamais pu voir Herbert von Karajan et ceci pour deux raisons : dès que les billets étaient mis en vente, tout partait dans la demi-journée mais surtout les prix des places étaient inabordables. Vous me direz qu’à partir du moment où le chef autrichien débarquait à Paris avec son orchestre, c’était normal. Oui, mais Bernstein a bien dirigé un concert avec l’orchestre philharmonique de Vienne et Svetlanov était arrivé avec l’orchestre symphonique de Russie (ex orchestre de l’URSS). Alors, qu’y avait-il donc de spécial avec Karajan ? Ce n’était pas un chef comme les autres, je dirais plutôt que c’était un golden boy, une star system, possédant voiture de sport, voilier et avion. On commence l’article par une ouverture de Verdi, La Force du Destin :
« Directeur artistique et supervision », Karajan faisait tout, y compris dans ses opéras. Comme à mon habitude, je ne vais pas me lancer dans une biographie du chef, qui serait un copié/collé de Wikipédia. Karajan s’était inscrit par deux fois au parti nazi (Christa Ludwig a déclaré en riant « que la première fois il avait dû oublier ! »), mais comment lui en vouloir, combien d’Allemands avaient pris leur carte ? Je ne résiste cependant pas au plaisir de citer cet extrait de Wikipédia :
En 1939, Karajan s’attire l’inimitié de Hitler lors d’un concert de gala donné en l’honneur des monarques yougoslaves : en raison de l’erreur du baryton Rudolf Bockelmann, il perd le fil des Maîtres Chanteurs du compositeur Richard Wagner qu’il dirigeait sans partition, comme à son habitude , les chanteurs cessent alors de chanter et, dans la plus grande confusion, le rideau tombe ; furieux, Hitler donne cet ordre à Winifred Wagner : « Moi vivant, Herr von Karajan ne dirigera jamais à Bayreuth ». Karajan demeure cependant à la tête de l’orchestre de la Staatskapelle de Berlin à l’Opéra national.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Herbert_von_Karajan
Karajan a pratiquement régné sans partage sur « son » orchestre, le philharmonique de Berlin de 1955 à 1989. Sa recherche obsessionnelle du beau son a donné à l’orchestre sa sonorité particulière, reconnaissable entre toutes. Malheureusement sa quête de la perfection a agacé les musiciens qui ont fini par ne plus supporter leur chef. Personnellement si je devais un reproche à Karajan, c’est qu’il ne faisait JAMAIS les reprises, pourtant clairement indiquées, que ce soit dans Beethoven, Brahms ou Schumann. Cela ne retire rien au génie du chef autrichien et c’est toujours un bonheur de le regarder. Oui, Karajan a été un des plus grands chefs du siècle passé ! Le voici dans un morceau assez inattendu, Le troisième concerto brandebourgeois de Bach, tenant la partie de clavecin :
Et maintenant un concert complet, je suppose capté dans les années 70 et certainement pas en 2008 !
On termine avec la délicieuse valse de Johann Strauss Frühlingstimmen (Voix du printemps), chantée avec ravissement par Kathleen Battle au concert du Nouvel An 1987 :
Karajan a été souvent critiqué pour la lenteur de ses interprétations (on a pu le constater dans l’ouverture de Verdi), voilà un exemple édifiant avec le menuetto de la huitième symphonie de Beethoven, 5’59 » pour le chef autrichien contre 4’38 » pour son confrère et ami, Leonard Bernstein, la différence est considérable ! Je vous laisse en juger :
QUELQUES DOCUMENTAIRES
Ils vont nous éclairer sur la personnalité de ce chef emblématique !
Le jeune Karajan au palais de Chaillot en 1943 :
Karajan « super star » :
Comment Karajan est devenu un chef incontournable :
Un portrait d’une légende de la musique (sous-titres français disponibles) :
Karajan, génie et tyran :
Karajan à Salzbourg en 1987 :
Vous saurez tout !
Filoxe
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Je pense qu’Herbert von Karajan n’a pas déclenché des passions pour son activité de chef d’orchestre. Il était devenu une star qui passait partout et, comme toutes les stars populaires, cela déclenche des passions.
De plus son physique de don Juan, sa concentration quand il dirigeait impressionnaient les gens et la starisation augmente encore plus. Tout ça, c’est du folklore.
Comme chef, j’ai de nombreux enregistrements de lui, je trouve qu’il ne se détache pas des autres. Il dirige bien, tout est parfaitement calé, les nuances subtiles sont là, mais ces choses ne sont pas exceptionnelles pour un chef de haut niveau. A l’aveugle, il sera difficile de reconnaître Karajan.
Quant à la prétendue lenteur dont tu parles, ami Filoxe, c’est bien la première fois que j’entends cela. Pour avoir entendu des dizaines et des dizaines d’œuvres dirigées par Karajan, je n’ai remarqué aucun tempo plus lent que les autres à part peut-être quelques œuvres par-ci par-là.
Il y a effectivement des chefs qui dirigent relativement plus lentement que les autres, le plus connu d’entre eux, dans ses dernières années et dont les tempos étaient sensiblement plus lents que ses confrères pour la même œuvre, c’est bien Otto Klemperer (1895-1973).
Bonjour Cachou, j’espère que tu vas bien, si tu écoute les « quatre saisons’ de Vivaldi chez DG, la « Carmen » avec Grace Bumbry chez RCA,que tu compare les symphonies de Beethoven version 60′ ou 80′ avec le philharmonique de Berlin chez DG et Cluytens avec le même orchestre chez EMI, ses mozart par rapport à Bôhm ou Neville Marriner et que tu ne ressent pas la « Kollossalle pesanteur teutonne », je mange mes cordes de guitare en spaghetti bolognaise !😅😅😅 où alors ma courroie de ma platine TD était détendue. Bonne journée !
Bien sûr, mon ami Le chti français, Karajan a essayé, en tant que chef d’orchestre, à toucher à tous les répertoires. Mais bon, le public tant soit peu averti, s’est aperçu des catastrophes.
Karajan a été excellent dans le romantisme allemand, autrichien, et il s’est d’ailleurs fait connaître dans ce répertoire. Bien sûr ses symphonies de Beethoven qu’il a dû enregistrer je ne sais combien de fois sont assez différentes d’un Cluytens et de bien d’autres. Mais cela ne signifie pas qu’il a dirigé plus mal que d’autres, je pense que c’est une question de sensibilité musicale.
C’est loin d’être mon chef d’orchestre préféré évidemment, et je pense que dans le monde de la musique classique il est apprécié à sa juste valeur et pas au-delà.
J’ai oublié de préciser un point important : alors que les concerts de Karajan au théâtre des Champs-Élysées étaient hors de prix, Bernstein (qui n’était pas n’importe qui) a organisé deux concerts GRATUITS dans ce même théâtre (je ne sais plus si c’était en 79 ou en 80). Au programme : le troisième concerto de Rachmaninov avec Weissenberg et les suites de West Side Story et de On the Waterfront. Deux chefs, devenus amis, mais aussi deux humanités différentes, voilà.
Je ne pensais pas que mon article serait sujet à polémique ! Il y a de toute évidence un paradoxe Karajan. D’un côté, même des personnes ayant peu de connaissances en musique classique savent qui est Karajan, l’admirent et achètent ses disques et c’est plutôt une bonne chose, car ainsi cette musique se démocratise. Mais d’un autre côté les prix exorbitants des concerts du chef autrichien réservent ceux-ci à une élite friquée et certainement snob pour juste dire aux autres « j’y étais ». Je n’ai que peu de CD et DVD de Karajan. Pour ces derniers, je possède le Requiem de Brahms, les symphonies 4 à 6 de Tchaïkovski, le concert du Nouvel An 1987, le Don Giovanni de Salzbourg et c’est à peu près ça. Comme je l’ai écrit dans mon article, le reproche principal que je fais à Karajan est de zapper purement et simplement les reprises pourtant clairement indiquées dans les symphonies de Beethoven, Brahms, Schumann entre autres.
Mais en conclusion je dirai ceci : 35 ans après sa disparition, Karajan declenche toujours autant les passions !
Bon ou mauvais, il n’est plus là. Chacun juge et apprecie selon son affect pour tel ou tel musicien . Le fait qu’il a indisposé le Gross Führer ou Gröfaz me le rend éminemment sympathique. Merci Filoxe.
Au sein du Troisième Reich, il était quasiment obligatoire d’adhérer au NSDAP, si on espérait pouvoir faire une carrière quelconque, dans quelque domaine que ce soit… Un peu comme dans l’URSS d’autrefois, où l’adhésion au Parti Communiste était indispensable pour avoir un travail d’une importance quelconque.
C’est bien pour cela que l’adhésion de Karajan au NSDAP ne me choque pas.
Karajan était LA musique, elle sortait de ces mains quand il dirigeait. Mon enfance a été bercée par la musique classique et Karajan était mon Dieu. J’ai encore des vinyles vieux de 50 ans que je ne me lasse pas d’écouter, cela ne m’empêche pas d’être un fan de Rammstein ! Je pense que Karajan est le fils spirituel de Furtwangler, autre chef d’exception. Merci ami Filoxe de nous ravir (trop rarement) de ces instants musicaux.
Bon, voilà, il est fait votre article sur monsieur K, Filoxe! Et il est bien difficile de faire l’éloge d’un tel chef, qui je l’avoue m’insupporte, tout au plus ,on peut le qualifier de bon acteur, mais certainement pas de bon musicien! Je vais en choquer peut-être certains, mais ce sont les médias et surtout sa maison de disque (deutsch gramophon) qui l’ont mis sur un pied d’estale, son talent est surestimé. Néanmoins il y a parfois une lueur dans les ténèbres et cette perle rare est le Parsifal de Wagner, seul enregistrement de Karajan qui trouve grâce à mes yeux. Je laisse ci-dessous l’interprétation du prélude de cet opéra « sacré » (ou sacré opéra! 🙂). Bonne fin de semaine et à la prochaine.
https://youtu.be/JeJ0zqMyGNA?feature=shared
Tu es très injuste le chti, depuis plus de 60 ans d’écoute de musique classique, dire que Karajan n’était pas un musicien est pour le moins insultant. On aime ou on déteste, c’est le lot de tous les génies. On est habitué à voir tes commentaires à l’emporte-pièce,emprunts souvent d’une méchanceté gratuite.
Fonzi, je comprends très bien ton point de vue étant fan de monsieur K, c’est le seul chef d’orchestre connu d’un public non féru de musique classique! Mais pour les vrais amoureux de la musique, il ne représente pas le saint graal. Je n’ai jamais dit qu’il n’était pas musicien, mais pas un « bon musicien » Filoxe explique ses défauts dans son article, et tu es injuste car je reconnais son genie dans le Parsifal de Wagner! Or ce n’est pas une valse de Strauss mais bel et bien un chef-d’oeuvre. Je voudrais ajouter aussi que les commentaires ont pour but de donner un avis personnel et non pas de reproduire bêtement le communément admis, donc il va de soi, que mon avis personnel n’a rien d’une vérité dogmatique, tu es libre de penser différemment, c’est là tout l’intérêt des commentaires, ne pense tu pas? Bonne journée.