Le Génie des Carpettes, tel un chien dans un jeu de quilles
Liban : Israël voulait écarter la France
Le souhait exprimé il y a quelques jours par Tel-Aviv d’écarter Paris du comité de surveillance de la 1701 est le résultat d’un cumul, estiment les analystes.
OLJ / Par Jeanine JALKH, le 26 novembre 2024
Alors que la France est, aux côtés des États-Unis, l’un des principaux artisans d’un potentiel accord de cessez-le-feu entre le Liban et Israël, le récent souhait exprimé par ce dernier d’écarter Paris du comité de surveillance chargé de s’assurer de l’application de la résolution 1701 a surpris. Comment expliquer ce revirement de situation de dernière minute, qui s’est toutefois avéré réversible au cours des dernières 24 heures, la France ayant été de nouveau réhabilitée au sein de ce comité ?
Le coup de pression israélien est survenu au lendemain même de la décision de la Cour pénale internationale du 21 novembre, qui a confirmé les accusations de « crimes contre l’humanité et crimes de guerre », à l’encontre du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et de son ancien ministre de la Défense, Yoav Galant, délivrant des mandats d’arrêt à leur encontre. Si les États-Unis ont aussitôt rejeté cette décision, la France – à l’instar d’autres pays européens – s’est prononcée avec prudence sur ce jugement. Sans aller jusqu’à provoquer l’État hébreu, un allié, le Quai d’Orsay a indiqué que la France « prend acte de cette décision. Fidèle à son engagement de longue date en soutien à la justice internationale, elle rappelle son attachement au travail indépendant de la cour, conformément au Statut de Rome », dont la France est signataire. Avant de rappeler ses positions de principe concernant la situation à Gaza depuis le début du conflit et la nécessité de respecter le droit international humanitaire, condamnant au passage les violences de part et d’autre, y compris les « attaques terroristes antisémites commises le 7 octobre par le Hamas ».
Aussitôt dit, Israël a informé le médiateur américain Amos Hochstein dès son arrivée à Washington vendredi, qu’il refusait la participation de la France au comité de surveillance. Alors que pour certains observateurs, il s’agit d’une nouvelle manœuvre israélienne destinée à tergiverser et à gagner encore plus de temps avant d’avaliser un accord quelconque, d’autres considèrent que la raison est à rechercher dans la réaction française à la décision de la justice internationale. La goutte qui aurait fait déborder le vase, à l’ombre des tensions diplomatiques croissantes entre les deux pays et d’une méfiance certaine. Selon une source diplomatique européenne, le revirement d’Israël est surtout « un moyen de pression sur les négociations en cours pour obtenir une plus grande flexibilité concernant la position de Paris relative à la décision de la CPI ».
« La France a mis de l’eau dans son vin »
Pourtant, la France n’a pas affiché une position particulièrement hostile en comparaison avec d’autres pays comme l’Italie, l’Irlande, la Belgique, et les Pays-Bas. Elle s’est contentée d’évoquer l’aspect « administratif et procédural », comme le souligne la source diplomatique. Paris a ainsi laissé planer le doute au sujet de l’éventualité de l’arrestation sur son territoire des deux inculpés israéliens. Elle s’est distinguée, par ailleurs, de la position tranchée du responsable de la politique étrangère de l’Union européenne, Joseph Borrell, qui a affirmé que les mandats d’arrêt « doivent être respectés ». « On peut dire que Paris a mis de l’eau dans son vin. En menaçant la France d’exclusion du comité de surveillance, Israël cherche à éviter que Paris ne finisse par rallier la position de M. Borrell », commente encore la source diplomatique, avant de souligner que cette manœuvre ne constitue pas, cependant, un point de rupture.
Selon la chaîne israélienne 14, réputée proche de Benjamin Netanyahu, la France a fini par être « réintroduite » au sein du comité. Une information confirmée par plusieurs médias arabes. D’ailleurs, l’État hébreu pouvait-il en faire autrement sachant que le Liban insiste fermement pour que la France ait un rôle majeur dans l’application de tout éventuel accord ? Ayant été étouffé dans l’œuf, cet incident diplomatique furtif reflète cependant les relations tumultueuses entre Paris et Tel-Aviv, qui se sont aggravées depuis le début de la guerre du 7 octobre 2023.
Alors que la France avait condamné l’attaque sanglante du Hamas, elle a toutefois opéré un revirement dans ses positions au vu des crimes commis à l’encontre des Palestiniens de Gaza. Un rééquilibrage qui a suscité des positions fermes à l’encontre de Tel-Aviv. « Israël n’a jamais digéré les prises de position d’Emmanuel Macron, notamment lorsqu’il a rappelé que M. Netanyahu ne doit pas oublier que son pays doit son existence à la résolution 181 de l’ONU », décrypte Karim Bitar, politologue. Cette déclaration du 15 octobre en Conseil des ministres a fait monter les tensions entre Israël et la France.
Dix jours plus tard, une autre réflexion du président français a achevé d’irriter au plus haut point le Premier ministre israélien. Lors de la conférence de soutien au Liban organisé le 14 octobre à Paris, Emanuel Macron a conclu son intervention par ces propos cinglants : « On parle beaucoup de guerre de civilisation (…) Je ne suis pas sûr qu’on défende une civilisation en semant soi-même la barbarie », a-t-il lâché en référence au discours de Benjamin Netanyahu, qui se targue de défendre la civilisation occidentale dans le combat israélien à Gaza ou au Liban. « Cette déclaration a été très mal prise par M. Netanyahu. Alors il cherche aujourd’hui à humilier la France », commente M. Bitar. Et de rappeler au passage que les relations entre les deux États n’ont jamais été simples : « Tous les présidents français depuis Charles de Gaulle ont été traités d’antisémites par Israël. »
Outre ces deux flèches décochées à l’encontre du Premier ministre israélien, une série d’incidents ont achevé d’exacerber les relations bilatérales. Tout d’abord, lorsque Paris s’est abstenu d’inviter l’État hébreu au Salon mondial de la défense et de la sécurité en juin 2024, puis de nouveau en novembre, alors que se tenait le premier Salon mondial naval de défense, Euronaval 2024, à Paris Nord Villepinte. Entre-temps, M. Macron a publiquement appelé en octobre à la cessation des livraisons d’armes à Israël, en particulier celles utilisées dans les frappes contre Gaza, s’attirant les foudres de Benjamin Netanyahu qui a évoqué une démarche « honteuse ».
Début novembre, l’incident diplomatique qui s’est produit à Jérusalem a exacerbé encore plus les tensions lorsque deux gendarmes français en poste au domaine d’Eleona, une propriété française reconnue, ont été brièvement arrêtés par les forces israéliennes sans consultation préalable des autorités concernées. En réaction, Paris a convoqué l’ambassadeur israélien et dénoncé une violation des accords bilatéraux. Par ailleurs la France a multiplié les condamnations des actions militaires d’Israël au Liban et à Gaza, adoptant une position jugée par Tel-Aviv comme étant trop alignée sur les revendications arabes. D’autant que Paris est le seul acteur occidental à maintenir des canaux de communication avec le Hezbollah. Source : https://www.lorientlejour.com/article/1436906/pourquoi-israel-voulait-ecarter-la-france-au-liban.html?_gl=1*d6531n*_gcl_au*ODAxMzEzNDY1LjE3MzIyMjM2OTc.
QUOTIDIEN LIBANAIS INDÉPENDANT DEPUIS 1924
Pcc : Juvénal de Lyon
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La grandeur de la France vue par Macron : un pays devenu la risée du monde. Macron, notre mister Bean national.