La lutte pour le pouvoir de Weidel prend de l’ampleur

Consultation importante pour le chef de l‘AfD, Alice Weidel.

La lutte pour le pouvoir de Weidel prend de l’ampleur

Annika Leister, Lars Wienand

Alice Weidel est confrontée à un obstacle déterminant dans sa carrière politique. Dans son association de base en Bade-Wurtemberg, elle devrait se heurter à une opposition intestine.

Alice Weidel est au sommet actuel de son pouvoir. En tant que candidate à la chancellerie, elle est censée mener l’AfD jamais aussi influent qu’à présent, dans la campagne électorale parlementaire du Bundestag 2025. C’est du moins ce qu’ont convenu son co-chef Tino Chrupalla et Weidel elle-même comme l’a rapporté en premier le réseau rédactionnel « Redaktionsnetzwerk Deutschland ».

Cela fait l’effet d’un paradoxe : Weidel, vivant en Suisse dans une relation lesbienne avec une femme d’origine migratoire, doit devenir, dans une phase décisive, le visage unique d’un parti pour certains aspects nationaliste d’extrême droite. Comment y est-elle arrivée ?

Quelques réponses à cette question sont fournies par l’association natale de Weidel, Bade-Wurtemberg. Là, la femme de 45 ans doit être consacrée ce week-end candidate tête de liste lors d’une réunion de désignation à l’occasion de la foire-expo d’Ulm. C’est la condition préalable à tout ce qui va suivre en 2025 : sa campagne électorale, sa candidature à la chancellerie, les nombreuses apparitions au nom de l’AfD.

Mais en Bade-Wurtemberg – contrairement au reste de l’AfD – les protestations contre Weidel sont vives. On peut aussi y observer les méthodes avec lesquelles agit Weidel quand elle a des ennemis. Une clé importante dans ce cas : son caractère impitoyable.

Campagne de voix non contre Weidel

Depuis longtemps déjà, le Bade-Wurtemberg est le plus grand point faible de Weidel. Précisément dans son association d’origine, les critiques sont en effet les plus vives et les plus nombreuses, c’est de là qu’elle doit s’attendre aux attaques les plus virulentes et les plus nombreuses. Pendant des années, elle était pour cette raison une figure de proue sans pouvoir à domicile, qui vivait vers l’extérieur avant tout fortement de sa prééminence pendant des années au sein du parti.

L’année passée, tout cela a changé au bénéfice de Weidel. Après un congrès du parti chaotique à Rottweil et une lutte pour le pouvoir au beau milieu de la scène, le camp pro-Weidel est nettement aux commandes depuis février du comité directeur de l’association provinciale – Landesverband. La stratégie du chef du parti et de son camp peut se résumer depuis lors à la suivante : carotte et bâton. Carotte pour les partisans, bâton pour les voix critiques.

Des documents dont dispose t-online le mettent en évidence : les adversaires de Weidel sont réduits au silence et mis sous pression, des procédures d’exclusion du parti ou des menaces de mesures de rappels à l’ordre sont lancées. Les candidats dans les petits papiers de Weidel par contre sont sollicités au préalable par les directions de circonscriptions dans le cadre de larges listes de destinataires. Les membres se voient offrir des voyages en bus, des nuitées à titre gratuit et des « arrhes » en partie supplémentaires pouvant aller jusqu’à 150 euros pour voter lors de la réunion de désignation à Ulm.

Weidel et ses partisans seraient en mesure de prendre encore davantage le contrôle de l’association provinciale du Land, à l’aide de la réunion de désignation, et d’occuper des postes clés. Mais ses adversaires ne veulent pas se soumettre. Dans le cadre de groupes de conversation, ils appellent à une campagne de voix négatives contre Weidel : « Chaque voix négative contre Alice Weidel est une voix pour la démocratie de base », était le mot d’ordre dans ce cas.

Weidel aborde le personnage de son ennemi juré, Spaniel au comité directeur fédéral

L’ennemi juré de Weidel en Bade-Wurtemberg, c’est Dirk Spaniel. Tout comme Weidel, il a dirigé une fois l’association du Land et siège au Bundestag. Il y est porte-parole de l’AfD pour les Transports. Longtemps en activité chez Daimler comme docteur en ingénierie, il est considéré dans son groupe parlementaire comme expert en technologie électrique et de transmission.

Mais Spaniel est également le fer de lance du camp anti-Weidel en Bade-Wurtemberg – et place son combat contre Weidel au-dessus de pas mal de choses. Dans le Ländle (« petit Land » : nom donné au Bade-Wurtemberg par son président, N.d.T.), il rassemble derrière lui une large variété de critiques de Weidel, dont des défenseurs de la démocratie de base dans sa forme la plus pure ainsi que des partisans de l’aile Höcke d’extrême droite. Une chose les réunit principalement : le désagrément que leur cause Weidel.

Spaniel a vainement tenté par le passé de disputer à Weidel le poste de chef du groupe parlementaire au Bundestag. On met sur le compte de son camp une tentative de clôturer avant l’heure le congrès du parti en février, puis d’en contester la validité. Spaniel lui-même n’a pas signé cette contestation. Et pourtant, il a été exclu d’une rencontre du groupe provincial de Bade-Wurtember au Bundestag. Sur ce, Spaniel a publié une vidéo sous le titre : « Pas comme ça, Madame Weidel ! »

Une critique aussi claire à l’encontre de la dirigeante ne reste pas sans conséquence à l’AfD. Au comité directeur fédéral du parti, une possible procédure d’exclusion contre lui a déjà été discutée à plusieurs reprises selon les informations dont dispose t-online, en dernier lieu il y a tout juste une semaine. Dans l’entourage de la dernière commission, on révèle : lorsqu’est traité le cas Spaniel par la réunion de désignation, Weidel réagit de manière nerveuse et sensible. Inutilement.

Insultée comme « tas de merde »

Dans l’association provinciale du Land autour des fidèles de Weidel, Markus Frohnmaier et Emil Sänze, on a également déjà débattu d’une possible expulsion de Spaniel hors du parti. Mais peu de temps avant la réunion de désignation, on voulait manifestement éviter de créer des remous supplémentaires. Le comité du Land a pourtant envoyé un signal clair : dans un courriel du 25 septembre, il a fait savoir à la totalité des membres après une conférence des porte-parole des circonscriptions que Spaniel et deux de ses collaborateurs s’étaient comportés de manière « nuisible au parti ». Ce courriel est à disposition de t-online.

Markus Frohnmaier (à g.) et Sänze : depuis février présidents de l’AfD dans le Land Bade-Wurtemberg.

Sous le titre « Décision de la conférence des porte-parole des circonscriptions ‘Réorganiser l’association du Land – Réfréner destruction et sabotage’ », on peut lire que Spaniel n’a pas retiré la « vidéo cœur » contre Weidel de toutes les plates-formes malgré les demandes et une mise en demeure. Un de ses collaborateurs aurait en outre insulté un collègue du parti décédé et appelé le chef du parti un « tas de merde ». Un autre aurait proposé de « ridiculiser et rabaisser » des membres du parti lors de la réunion de désignation.

La conférence des porte-parole des circonscriptions aurait décidé de demander au premier collaborateur de Spaniels de quitter de suite le parti. Faute de quoi le comité directeur du Land devra entamer une procédure d’exclusion correspondante. Des mesures disciplinaires seront mises à l’étude contre Spaniel ainsi que son second collaborateur.

Selon des informations en possession de t-online, les citations émanent de groupes de conversation internes. Le premier collaborateur de Spaniel se serait excusé à plusieurs reprises pour son choix des mots. Dans les groupes de conversation règne souvent un ton très rude, qui génère toutefois rarement des conséquences.

Harcèlement d’une « saloperie de canaque » dans un moment hautement émotionnel »

C’est ainsi que circule justement une vidéo d’un membre de l’AfD de Constance de l’association du Land qui rapporte une altercation dans un train avec un « canaque ». « Si j’ai le câble sur moi la prochaine fois, je tabasse ce type », y dit le membre de l’AfD. Ou bien : « Nous devons les plier ». Et « Je passe devant, même si je dois me réveiller un jour avec un œil au beurre noir parce qu’une de ces saloperies de canaque m’a roué de coups ».

Une plainte a été déposés contre cet homme, dit-on au parti. Mais ses mots violents ne doivent pas entraîner son exclusion du parti. Dans un courriel du 27 septembre en possession de t-online, le comité directeur de la circonscription de Constance communique brièvement : l’homme a créé la vidéo dans un « moment hautement émotionnel ». Une mesure disciplinaire a été prise. C’est tout.

Les personnages critiques envers Weidel déplorent dans l’entretien avec t-online qu’on applique deux poids, deux mesures – et que de plus un congrès des porte-parole de circonscriptions n’est même pas habilité à prendre des décisions comme celle contre Spaniel. Ils traitent cela de « méthodes staliniennes ». Cela n’aurait rien à voir avec démocratie et chances égales. On parle de « cloaque » et de « népotisme » et d’une unique priorité du camp Weidel : maintien du pouvoir.

La démocratie en bus » est-elle illégale ?

Lors de ce congrès du parti, une autre particularité de l’AfD de Bade-Wurtemberg fait en outre l’objet de disputes : les congrès de membres du parti. Contrairement aux congrès de délégués du parti, comme ils sont en usage dans presque toutes les autres associations de Land, tous les membres y sont effectivement invités. En Bade-Wurtemberg, ils sont environ 6 000.

Lors du congrès chaotique du parti en février à Rottweil, la partie adverse avait encore espéré faire exploser le congrès du parti pour cause de surnombre et activement cherché à gagner des participants. Le réseau Weidel autour de Frohnmaier et Sänze semble utiliser maintenant sa supériorité dans les comités directeurs et leur infrastructure pour promouvoir de manière ciblée la participation et les propres candidats dans les associations de circonscription.

Au sein de la plus grande association AfD du Land, la circonscription Rhein-Neckar, dans un courriel aux membres, ce sont de suite trois politiciens qui sont proposés pour la liste du Bundestag et loués. « À souligner particulièrement est le fait que ce fort soutien est également renforcé par notre présidente de notre groupe parlementaire, Dr. Alice Weidel, le porte-parole du Land, Markus Frohnmaier ainsi que de nombreux autres détenteurs de mandats et de fonctions. » Des courriels analogues avec des formulations analogues provenant de trois autres associations de circonscriptions sont en possession de t-online.

La participation à la réunion de désignation serait de la « plus haute importance », poursuit un courriel de la circonscription du Rhin-Neckar. C’est pourquoi, le comité de circonscription avait réservé un bus et des chambres d’hôtel et organisé des possibilités de participer au voyage. Et : les participants pouvaient bénéficier d’une « subvention pour frais de voyage à hauteur de 50 euros » par jour de participation. Le comité directeur de circonscription propose encore plus à Constance, à savoir 50 euros par jour et 50 euros supplémentaires pour la nuitée – donc 150 euros pour l’ensemble du week-end.

Une question de t-online quant au fait que contrairement aux autres associations de l’argent était versé et à combien et quels membres cela était le cas n’a pas eu de réponse de la part des associations de circonscriptions Rhin-Neckar et Constance.

Car dans les groupes de conversation, il est toujours question de reproches de la part de certains du camp anti-Weidel dans les associations de circonscription : on se serait rapidement inscrit auprès du comité directeur pour une chambre d’hôtel ou une place dans le bus, mais bizarrement toutes étaient déjà réservées. Suspicion : celui qui n’est pas connu comme fan de Weidel ne bénéficie d’aucun avantage et est plutôt indésirable.

Est-ce éventuellement même une violation de lois en vigueur ? Sophie Schönberger, professeur de droit public à l’Université Henri-Heine de Düsseldorf, répond à t-online que ce n’est pas très simple au plan juridique. Des règles écrites que la manière d’agir transgresserait n’existent pas. « Si des groupements du parti subventionnaient effectivement certains membres pour la participation au congrès du parti et d’autres non, cela transgresserait le principe d’égalité démocratique de tous les membres. »

Protestations, d’une manière ou d’une autre

Les adversaires de Weidel s’offusquent de la « démocratie par le bus et l’hôtel », qui serait beaucoup mais certainement pas démocratique. Ce qu’ils craignent : aucun de leurs candidats ne peut ainsi arriver aux premières positions de la liste de candidature au Bundestag – de même qu’aucun autre des députés actuels au Bundestag de Bade-Wurtemberg qui ne figure pas à 100 pour cent sur la liste de Weidel. En font partie, outre Dirk Spaniel, également Christina Baum et Jürgen Braun, les deux porte-parole santé et droits de l’homme de leur groupe parlementaire.

Du côté de l’association de circonscription de Heilbronn, qui a seulement réservé des chambres d’hôtel et ne paye aucune somme d’argent, on entend : soutenir des membres par des subventions est certes controversé, mais légitime. Le favori de Weidel sur les lieux, Jürgen Koegel, déclare à t-online : les reproches sont incompréhensibles. « Nous avons malheureusement, comme c’est normal dans des groupes humains, également 1–2 % de personnes qu’on ne peut contenter en rien. »

Effectivement, les adversaires de Weidel tiennent eux-mêmes pour invraisemblable une victoire samedi. Weidel est devenue trop puissante entre-temps, ses soutiens sont trop nombreux. Mais une chose est sûre : il faut compter sur un tir de barrage. Ils vont continuer le combat, d’une manière ou d’une autre. Par principe. Par principe contre Weidel.

Traduction de Jean Schoving pour Résistance républicaine

https://www.t-online.de/nachrichten/deutschland/innenpolitik/id_100502464/afd-sperrfeuer-fuer-alice-weidel-in-baden-wuerttemberg-.html

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2 Comments

  1. Cette Weidel ne m’inspire aucune confiance, ne jouerait-elle pas la takya ?
    Sa copine pakistanaise a dû lui en apprendre de belles…

  2. Passer de Hitler à Weidel homosexuelle et maquée à une Pakistanaise pour défendre l’Allemagne tout en étant d’extrême-droite, je comprends qu’il y ait un gros malaise.

    C’est orwellien comme situation.
    Ca empeste l’opposition contrôlée en cas d’inévitable révolte populaire.

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