Irma la douce, deuxième partie : nuit d’angoisse, réveil difficile, pillages

 

Pour lire la première partie, c’est ici :https://resistancerepublicaine.com/2024/10/01/pour-tout-savoir-sur-irma-la-douce-premiere-partie-de-1998-a-2017/

Trois jours avant le passage du phénomène, nous savions que nous allions prendre cher :

 

Dans l’après-midi du 5 septembre, le préfet de l’époque, Anne Laubies, avait fait fermer la distribution d’eau (à Saint-Martin elle est dessalée) afin d’éviter que les conduites ne soient bouchées par des détritus. Et nous-mêmes avons bien travaillé dans la journée du 5 :

On ne peut qu’être étonné par celle lumière qui baignait l’île à 18h34 (la photo n’a jamais été retouchée). Les deux grands du jardin, le washingtonia à gauche et le cocotier à droite n’ont pas résisté. Les quatre images insérées nous montrent le salon avec tous les meubles fragiles habituellement placés sur la terrasse couverte, plantes, chaises, armoire bien calées au fond de la terrasse, les transats jetés au fond de la piscine, le gazebo vidé de tout objet à part la tenture jaune qui a été arrachée mais retrouvée intacte un peu plus loin et le frigo qui, lui, a été emporté dans le jardin.

Avec nos quatre chats bien en sécurité dans la maison, il ne restait plus qu’à attendre. En début de soirée nous avons appris qu’Irma avait dévasté l’île de Barbuda et qu’il se dirigeait vers nous. Après avoir regardé la télé jusqu’à 22 heures, on est allés se coucher, les premiers effets du vent se sont fait sentir vers 23 heures et à 3 heures du matin le 6 septembre l’électricité a été coupée. Une heure plus tard, le vent a frappé directement le mur de la chambre, provoquant l’ouverture brutale des clayettes que l’on a dû protéger en les retenant fermement tout en éprouvant de violents maux dans les oreilles en raison de la faible pression atmosphérique. Et quand le jour s’est levé…

Le premier sentiment est la sidération, avec un soupçon de fatalisme :

Puis on se retrouve entre voisins, sans vraiment comprendre et même on plaisante !

On constate que nos maisons n’ont pratiquement pas été endommagées, protégées par le morne voisin, par contre ce sont les habitations situées sur celui-ci qui ont tout pris :

On a vite fini par se rendre compte que nous étions seuls au monde : pas d’eau, pas d’électricité, pas de téléphone et surtout pas de radio en raison des antennes de communication arrachées (des tornades à l’intérieur du phénomène ont dépassé les 300 km/h). Heureusement, deux jours après Irma, France Inter a créé une chaîne provisoire exclusivement pour nous (un grand merci à eux). Ainsi nous étions informés de tout ce qui se passait sur l’île, réouverture des stations-service mais surtout passage des camions de nourriture et d’eau, bref une véritable zone de guerre ! Et comme dans notre quartier ma femme et moi étions les seuls à posséder une cuisinière au gaz, on faisait la cuisine et le café pour tout le monde, on se retrouvait le soir pour manger et boire du pastis et vin rosé bien chambrés. Nuits difficiles, sans électricité, sous une chaleur écrasante, entourés de moustiques…même nos chats ne voulaient plus dormir dans la maison ! Au bout de huit jours, on a eu le droit d’effectuer quelques achats au Super U de Marigot, encadrés par l’armée ! Pas plus de dix clients à la fois, deux packs d’eau maximum par personne, une zone de guerre je vous dis, et encore s’il n’y avait que cela, il a fallu se méfier des pillards !

(J’ai transmis ces photos, ainsi que d’autres, à la brigade de gendarmerie).

Et craignant pour nos propres maisons, deux nuits de suite nous avons organisé des milices pour repousser les importuns, certains d’entre nous étant même armés avec de vraies armes qui tuent. Un hélicoptère avec un gros projecteur survolait l’île pour repérer ceux qui ne respectaient pas le couvre-feu. Une zone de guerre, je vous dis ! La troisième nuit, nous avons eu la visite des gendarmes ; très gentils, ils nous ont dit qu’il n’était plus nécessaire d’effectuer des milices car ils venaient de recevoir des renforts. Un souci de moins ! Au bout de quinze jours l’électricité est revenue dans une partie seulement de notre quartier. Un de mes voisins a installé une rallonge entre chez lui et chez nous pour avoir du courant au moins dans une pièce. Puis j’ai appris à bidouiller une rallonge mâle-mâle permettant d’avoir de l’électricité dans toute la maison, à condition d’allumer le disjoncteur principal. Surtout ne faites pas cela chez vous ! En effet, si EDF rétablit le courant chez vous, vous prenez du 440 volts ! Quand EDF est arrivé, trois jours après pour remettre le courant dans tout le quartier j’ai débranché ma rallonge et coupé le disjoncteur par sécurité…et puis l’eau est revenue peu après, nous avons pu enfin procéder à autre chose que des toilettes de chat !

Dans le prochain article, j’évoquerai les destructions de certains lieux emblématiques de l’île, certains ont été reconstruits, d’autres non.

À suivre…

Filoxe

 

 

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2 Commentaires

  1. Merci Filoxe pour cette suite effrayante ! C’est avec de tels événements que l’on voit la vraie nature de l’homme! Certains viennent automatiquement en aide aux autres et organisent la vie après la catastrophe, d’autres ne sont que des parasites et ajoutent du malheur au malheur par leur ignoble comportement. Je dois faire un petit correctif concernant votre « rallonge », si vous branchez un même appareil sur deux sources de courant différentes, la tension ne va pas s’ajouter pour donner 440v ou plutôt 460v, mais l’intensité disponible sera égale à la somme des intensités des deux sources. Bonne journée !