Professeur sous protection policière : l’Allemagne courbe l’échine devant l’islamisme

 

À propos de Susanne Schröter

 

Susanne Schröter est professeur à l’Institut d’Ethnologie de l’Université Frankfurter Goethe-Universität, membre du comité directeur de l’institut allemand « Deutsches Orient-Institut » et membre ainsi que co-initiatrice de l’usine à concepts R21 pour une nouvelle politique citoyenne. Elle fait partie du comité consultatif scientifique de l’association fédérale « Bundeszentrale für politische Bildung » ainsi que de l’association autrichienne Fonds de documentation d’actes politiques extrémistes à motivation religieuse (Centre de documentation islam politique).

Schröter est de plus membre des organismes du Land de Hesse « Hessische Integrationskonferenz », « Dialog Forum Islam Hessen » ainsi que « Hessischer Präventionsnetzwerk gegen Salafismus ». En novembre 2014, elle a fondé le centre de recherches sur l’islam « Frankfurter Forschungszentrum Globaler Islam » (FFGI) et elle est depuis directrice de cette organisation.

Susanne Schröter est placée sous protection policière depuis des années. Mais depuis l’attentat contre le détracteur de l’islam, Michael Stürzenberger, le sentiment d’insécurité est revenu en force. L’attaque au couteau à Mannheim révèle une fois de plus à quel point la société ignore la menace.

Quand les services criminels du Land de Hesse m’ont communiqué en 2017 que j’étais gérée comme personne en danger par suite d’une situation de menaces islamistes, j’ai été choquée. Au Centre de recherches que j’avais mis en place à l’Université Goethe de Francfort, nous traitions toutes les variétés de l’islam actuel, donc également l’islamisme, mais je n’avais nullement imaginé me retrouver ainsi dans la ligne de mire des extrémistes disposés à la violence.

Les sciences, pensais-je jusque-là, sont trop insignifiantes socialement parlant pour attirer une telle attention. S’y ajoute le fait que les islamistes menacent en premier lieu les musulmans libéraux parce qu’ils ne veulent pas admettre que quelqu’un leur conteste la supériorité en matière d’interprétation théologique ou parce qu’ils craignent des processus émancipatoires au sein de communautés orthodoxes.

Donc des menaces qui concernaient le politologue, Bassam Tibi, qui critique scientifiquement l’islamisme depuis des dizaines d’années, ou bien le théologien, Mouhanad Khorchide, qui s’était fait un nom à l’Université de Münster en tant que représentant d’un islam à orientation spirituelle. Cela vaut encore davantage pour des musulmans dont les voix résonnent loin dans la société. Hamed Abdel-Samad, Seyran Ates et Ahmad Mansour sont tributaires de la protection permanente par des fonctionnaires de police. 

Mannheim est la conséquence du dénigrement de ceux qui mettent en garde contre l’islamisme extrémiste

En tant qu’ethnologue non musulmane, je me sentais jusque-là plutôt en sécurité dans la tour d’ivoire académique. Après les premières sentiments d’insécurité par suite du contact avec l’office de la police judiciaire du Land, le Landeskriminalamt (LKA) il y a bien sept ans, je décidai de ne pas me laisser intimider.

Ma confiance en la police était grande et j’espérais qu’elle avait déjà tout sous contrôle. Après l’attentat contre le détracteur de l’islam Michael Stürzenberger, le sentiment d’insécurité est toutefois revenu en force.  La manifestation publique de Mannheim était placée sous protection par la police, et pourtant le délinquant était parvenu à blesser Stürzenberger avec un couteau et à assassiner un policier. Une sécurité à cent pour cent n’est pas possible et pourtant il faut se demander comment cet attentat a pu se produire. 

 

Dans l’affaire Stürzenberger, le compte-rendu se résumait pour une grande partie à annoncer par voie de conséquence qu’il était actif dans le passé chez Pegida et membre à présent d’une organisation surveillée par le service de la sécurité du territoire de Bavière. On peut ne pas partager l’opinion de Stürzenberger sur l’islam, mais une chose devrait être claire : le droit à intégrité physique ne dépend pas dans un État de droit des convictions politiques de la victime.

La critique de l’islamisme est volontiers dévalorisée comme étant de droite

La critique de l’islamisme est certes volontiers dévalorisée comme étant de droite, mais elle existe aussi bien dans des milieux de gauche et libéraux de gauche. L’enseignante anti-islamisme, Birgit Ebel fait partie des Verts, la musulmane libérale, Lale Akgün est membre du parti SPD. La même chose vaut pour une critique fondamentale de l’islam, qui ne suppose pas une affectation politique et devrait être permise dans une société libre tout autant qu’une critique fondamentale du christianisme.

Cette dernière n’est du reste pas contestée par ceux qui se manifestent rapidement là quand il s’agit de l’islam. Il existe manifestement ici des standards dédoublés, ce dont beaucoup de monde s’est accommodé. On retrouve des diffamations de dignitaires chrétiens tant dans les traités philosophiques historiques que dans la presse satirique.

Car la critique de la religion est fondamentalement un composant des Lumières européennes. Quand il s’agit de christianisme, cela ne semble pas être un problème. Dans le cas de l’islam, on fait toutefois une exception parce que faire des plaisanteries à propos de Mahomet est un danger mortel, comme l’ont montré les caricatures au Danemark ou bien l’attentat contre Charlie Hebdo à Paris. Les deux cas n’ont du reste jamais été l’occasion d’une réflexion sérieuse sur le potentiel de violence de l’islamisme.

Au lieu de cela s’est propagée la maxime qu’il valait mieux de ne pas revendiquer le droit à la liberté d’expression artistique et d’opinion quand il s’agit d’islam. Courber l’échine devant l’islamisme n’est pas un phénomène récent. En 1988 déjà, quand le chef de la révolution iranienne, l’Ayatollah Khomeini a mis à prix la tête de l’auteur britannique Salman Rushdie, on n’a pas perçu beaucoup de courage civil. British Airways tout comme la Lufthansa ont refusé de laisser l’écrivain monter à bord d’un de leurs avions.

Le respect signifie la reconnaissance de l’autre

Celui qui renonce à des droits de liberté quand cela est exigé par des représentants d’une communauté religieuse sous menace de l’usage de la force est volontiers disposé à en chercher une autre raison que la propre lâcheté. Le mot magique respect qui est utilisé depuis quelque temps de façon inflationniste dans les programmes politiques et principes directeurs s’impose.

Il faut montrer le respect à l’islam ou aux musulmans qu’on a déclarés opportunément dans les Universités un groupe nécessitant particulièrement la protection. Respect signifie reconnaissance de l’autre et de ses besoins. Quand les besoins des musulmans – et pas uniquement des islamistes – consistent à demander qu’on ne se moque pas de leur religion, alors on voudrait le reconnaître, bien que la même sensibilité soit habituellement refusée pour la chrétienté et les besoins de croyants chrétiens.

Que se passe-t-il en fait avec ceux qui ne montrent aucun respect ? La reconnaissance des états d’âme islamiques réclamée à grand bruit par les musulmans justifie-t-elle aussi le terrorisme islamiste ? Ceux qui portent avec eux le terme respect comme un ostensoir ne veulent certes pas aller jusque-là, mais ils sont prêts à relativiser et à trouver des excuses pour l’usage de la force au nom de l’islam.

Cela est également évident dans d’autres formes d’extrémisme islamiste. Quand le djihadiste, Abu Bakr al-Baghdadi a proclamé en été 2014 un État islamique à Mossoul et que de milliers de jeunes Allemands se sont mis en route pour torturer et assassiner dans les rangs de l’ÉI, on a vite parlé de terrorisme fait maison.

Par terroristes indigènes, on n’entendait pas seulement la petite minorité de convertis attirés par la Syrie ou l’Irak, mais avant tout les musulmans qui vivaient en Allemagne depuis des années voire y étaient nés. La raison pour laquelle quelqu’un se rallie à une association terroriste était habituellement expliquée par des conditions personnelles difficiles ainsi qu’une expérience de discrimination supposée. Les délinquants devenaient rapidement dans le discours politique de pauvres victimes à plaindre. 

Une telle chose désempare, parce qu’on ne sait pas comment agir contre

Ce virage présentait absolument certains avantages, car il résolvait le problème, à savoir que la plupart des experts consultés n’étaient ni aptes ni disposés à comprendre le pouvoir du fanatisme religieux. Quelqu’un qui assassine ou commet un attentat suicidaire sur ordre supposé divin, parce qu’il croit en être récompensé par des vierges célestes, est rationnellement incompréhensible pour une personne séculièrement socialisée.

Une telle chose désespère, parce qu’on ne sait pas comment agir contre de façon préventive. En se focalisant sur des raisons sociales concernant la radicalisation, on foulait par contre à nouveau un terrain supposé sûr, à savoir dans le domaine de propres manquements. Contre ça, il est possible d’entreprendre quelque chose.

L’approche promettait le regain de la possibilité d’agir, qui pouvait être exécutée par des travailleurs sociaux, thérapeutes et collaborateurs d’organismes non gouvernementaux antiracistes. Quand le succès faisait défaut, on pouvait de plus en rendre responsable la société, dont c’était seulement le racisme antimusulman qui avait mené au comportement déviant des musulmans.

Les arguments étaient analogues quand il s’agissait de criminalité de clans ou de la violence migratoire dans l’espace public, mot-clé « émeutes de la Saint-Sylvestre ». La responsabilité était toujours attribuée à la société. Pour consolider scientifiquement cette déclaration de décharge, des études ont vu le jour qui décrivaient un « racisme du milieu » comme problème sociétal pressant, un racisme qui devait être prouvé à l’aide d’items douteux.

Rôle particulièrement lamentable joué par les Universités

Pour être qualifié de raciste antimusulman, il suffisait jusqu’à présent de citer la discrimination des femmes dans les communautés musulmanes ou le refus de droits particuliers pour l’islam, par exemple les cours de sport dans les écoles. Bien entendu, les méthodes mises en œuvre dans de telles études étaient contestées, mais les médias et les milieux politiques s’en tenaient inlassablement à la fable d’un « racisme structurel » prétendument prouvé.

Une fois de plus sur cette base, des milliers d’ONG qui se sont vouées à ce combat contre le racisme sont alimentées par des subventions publiques. Les collaborateurs des NGO subventionnées ont, comme on peut se l’imaginer, tout intérêt à faire abstraction du sujet inconfortable de l’islamisme comme de toute critique envers des musulmans dans le cadre de la discussion sociétale.

Un rôle particulièrement peu glorieux est joué par les Universités, qui ont inventé autrefois le terme de racisme antimusulman et l’ont intégré dans un concept tortueux de suppositions théoriques qui a acquis dorénavant sous la dénomination « théorie postcoloniale » un certain degré de notoriété chez les feuilletonistes. L’idée que ledit « Sud global » est la victime inéluctable d’un Occident agissant de façon impérialiste et qui justifie sa domination par une dévalorisation raciste des personnes non occidentales, en est constitutive.

Dans cette construction, migrants et musulmans sont considérés comme l’Autre discriminé de l’Occident. Dans les Sciences humaines, les théories post-coloniales sont fermement ancrées dans les programmes d’enseignement et les principes directeurs. Cela influence également la recherche, à laquelle est dévolue la tâche de confirmer les thèses toujours identiques par une affirmation répétitive.

Celui qui ne participe pas au jeu est puni

Celui qui ne participe pas au jeu et traite les thèmes « mauvais » ou « controversés » est puni. Des campagnes diffamatoires et des empêchements du propre travail suivent. Les mauvais thèmes sont ceux qui dépassent le cadre étroit de l’opportun ou bien contredisent l’agenda postcolonial. Je connais ces intimidations de part ma propre expérience. Elles ont du succès.

Dans leur grande majorité, les scientifiques ne voudraient pas faire l’objet de harcèlement moral et traitent exclusivement des sujets qui ne sont pas controversés. Des recherches concernant des idéologies et organisations islamistes en font aussi peu partie que des recherches migratoires critiques. Dans le canon académique des recherches, des vides ont ainsi vu le jour ; rien n’a été opposé au caractère illégitime systématiquement attribué à la critique. En partie, des extrémistes sont même excusés ou rendus respectables.

Quiconque observe la banalisation de groupements antisémites, auxquels on ne met quasiment aucun holà actuellement dans les Universités, peut se faire une idée de la manière dont cela se terminera. Des activistes ont menacé des étudiants juifs, ont dévasté des bâtiments et exigé le refoulement de tous les Juifs d’Israël. Des professeurs, des collaborateurs scientifiques et même des membres de la direction d’Universités ont tout de même défendu les radicaux. Ils n’ont pas condamné les auteurs des faits, mais au contraire les interventions de la police et ont appelé à renoncer à des poursuites pénales

Désormais, des étudiants juifs n’osent presque plus s’aventurer sur un campus. Une telle situation serait impensable si les antisémites provenaient de milieux de droite. Il y aurait un tollé à l’échelle fédérale, les syndicats et les Églises appelleraient à manifester et les cadres de la police annonceraient des mesures énergiques. Mais les auteurs sont des musulmans ou des soutiens de musulmans.

Même le Hamas, une organisation islamiste, pour qui la destruction d’Israël est un élément constitutif de leur doctrine, est défendu par certains professeurs. Il s’agit d’un mouvement de résistance, a annoncé il y a quelques mois l’icône de gauche, Judith Butler. C’est là une déclaration qui est considérée dans certaines scènes comme un adoubement.

La relativisation du danger islamiste pendant des années a donné naissance à du champ libre

La relativisation durant des années et le masquage des dangers de l’islamisme ainsi que l’empêchement d’un débat public concernant la politique migratoire a créé du champ libre pour les criminels musulmans, dont il est activement fait usage. Le résultat peut se lire dans les statistiques policières de la criminalité et aussi dans le rapport du service de la sécurité du territoire pour l’année 2023.

On peut y lire que le danger d’attentats islamistes est élevé mais aussi qu’une menace émane de certains individus palestiniens ou que des extrémistes de droite turcs et des extrémistes de gauche turcs et arabes mettent à profit la crise actuelle au Proche-Orient pour la propagation de la haine antisémite.

Cette haine tombe sur un sol fertile et elle active une nouvelle spirale de radicalisation. Les islamistes ne semblent pas craindre l’État. Et oui, pourquoi ? Jusque dans les partis conservateurs on entend clamer que le danger principal pour l’État de droit démocratique vient de la Droite, tout en passant à dessein sous silence l’extrémisme de droite étranger.

La représentation simpliste d’une ouverture inconditionnelle sur le monde ne doit pas être ébranlée, car elle remettrait en question beaucoup de choses qui constituaient pendant des années la pratique politique. Et on en reste ainsi aux belles paroles rebattues – jusqu’à la prochaine attaque au couteau.

Traduction de Jean Schoving pour Résistance républicaine

https://www.focus.de/politik/meinung/kolumne-von-susanne-schroeter-professorin-unter-polizeischutz-deutschland-knickt-vor-dem-islamismus-ein_id_260076379.html

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6 Commentaires

  1. Il faut organiser la Remigration des musulmans fanatiques ,cela coutera cher mais pas aussi cher que les allocations de toutes sortes qu’ils perçoivent,et qui sont prélevées sur nos impôts,souvent indùment payés.On ne peut plus les contrôler car ils contournent nos lois,faites pour nous OCCIDENTAUX,personnes raisonnables.. ..Cela va devenir INTOLERABLE.Il ne s’agit plus de droite ni de gauche mais de la RAISON,qui fait défaut à ceux qui ont le pouvoir.Pauvre Allemagne de GOETHE et SCHILLER.,qui après Hitler, risque de tomber sous le joug des islamistes….

  2. Je retiens une chose essentielle, “tout le monde sait comment cela va se terminer”. Je ne vois qu’une révolte des Peuples Premiers et une décolonisation de l’Europe comme solution pour sauver leur civilisation et reprendre le contrôle de leurs terres ancestrales. Nous sommes tous Kanaks.

  3. Encore un témoignage qui prouve que le bon sens ne commande plus la société.
    On est très mal.