Traduction d’un article du magazine JACOBIN
La bataille pour la « culture dominante » fait le jeu de l’islamisme
Depuis l’attaque au couteau à Mannheim, tout le monde parle à nouveau d’islamisme. La politique et les médias réagissent par des expulsions, le débat migratoire et la « culture dominante » – et confirment ainsi le récit des islamistes.
par Ilyas Ibn Karim
Le 31 mai à Mannheim, il y a eu un attentat. Un homme a blessé six personnes. Dont un fonctionnaire de police qui a succombé à ses blessures. L’auteur de l’attentat était âgé de 25 ans et originaire de l’Afghanistan. Il est arrivé en Allemagne de quatorze ans et animait sans doute un compte YouTube sur lequel il diffusait un contenu islamiste.
La cible de l’attentat était manifestement l’activiste d’extrême droite, Michael Stürzenberger. Stürzenberger est un visage connu de la scène anti-islamique en Allemagne. Il est l’auteur de longue date du blog d’extrême droite PI-News animé depuis 2004 et participant particulièrement actif du mouvement PEGIDA et membre de l’association Mouvement civil Pax Europa. Tout trois mettent en garde contre une menaçante « islamisation de l’Europe ».
L’islamisation menaçante est susceptible d’être une élucubration de l’esprit, mais pas l’islamisme. Cette idéologie est un réel danger à prendre au sérieux. Elle menace avant tout des minorités au sein des communautés migratoires, par exemple les Alévis, les Yézidis, les personnes queer, les musulmanes séculaires, les areligieux ou tout simplement tout un chacun refusant l’idéologie islamiste. Dans le présent exposé, l’islamisme est considéré avant tout comme un danger pour « notre civilisation occidentale », donc comme une chose opposée aux valeurs du Siècle des lumières.
C’est un sujet permanent depuis des années. Il a déjà rempli des centaines d’heures d’émissions-débats télévisées et des milliers de pages de journaux. Et il y a toujours les mêmes réponses obtuses au problème : intégration, « culture dominante », expulsions. Et ce ne sont pas seulement les gens de droite qui préconisent cette solution. Comme l’auteur de l’attentat de Mannheim était un Afghan, le gouvernement en feux tricolores voudrait faciliter des expulsions vers l’Afghanistan. Qu’il faille chercher à cet effet l’entretien avec les talibans islamistes à cet effet est une tournure ironique de cette histoire.
L’histoire de l’islamisme
L’islamisme est plus que l’extrémisme ou fondamentalisme islamique. Une violence à motivation religieuse et le fanatisme ont existé et existent dans toute religion, de tout temps. Les exemples actuels en sont les radicaux chrétiens, comme la Westboro Baptist Church aux États-Unis ou bien les moines bouddhistes radicaux comme Ashin Wirathu au Myanmar. L’islamisme est également bien plus qu’un simple islam politique.
Le terme islamisme se rapporte principalement en majeure partie à des mouvements politiques nés aux XIXe et XXe siècles. Le politologue Armin Pfahl-Traughber considère l’établissement d’un ordre social et politique comme objectif principal de cette idéologie. L’islamisme veut une société déterminée dans tous les domaines par des normes « islamiques » et un État capable d’imposer cela. Les islamistes déterminent à cet égard eux-mêmes ce qui est « islamique » et ce qui ne l’est pas. Une opposition musulmane est également considérée comme danger pour l’ordre.
De plus, les islamistes ne sont pas d’accord entre eux sur la manière dont cet « ordre islamique » doit se présenter en détail et comment on atteint cet objectif. C’est ainsi qu’ils sont par exemple d’un avis divergent concernant l’usage de la question de la force : alors que certains misent sur des moyens non violents, d’autres essayent d’imposer le changement par la lutte armée ou le terrorisme. Ce dernier aspect est également appelé djihadisme.
En réponse à la question sur la façon dont l’islamisme est né, des historiennes et des islamologues citent en général trois personnes : Jamāl al-Dīn al-Afghani (1838–1897), Muhammad Abduh (1849–1905) et Rashid Rida (1865–1935). Alors que l’univers musulman était encore scientifiquement en avance sur l’Occident au Moyen-Âge, la situation a changé à la fin du XVIIIe siècle. Bientôt a suivi le colonialisme européen. Beaucoup de pays islamiques se retrouvent dans la zone d’influence des puissances européennes. Cela a déclenché une crise identitaire dans de vastes parties du monde musulman.
Les intellectuels comme al-Afghani, Abduh et Rida ont essayé de trouver aussi bien des solutions contre la domination coloniale que des réponses à la régression islamique. Leur réponse au colonialisme européen s’est appelée panislamisme : l’identité islamique partagée devait réunir tous les musulmans contre l’ennemi commun. À cet égard, les différences ethniques, culturelles, sociales, nationales et confessionnelles devaient être surmontées. Les musulmans ont été rendus eux-mêmes responsables de l’effondrement. .
Il faut souligner ici que al-Afghani et Abduh justement ne correspondent pas à notre image actuelle des islamistes. Tous deux sont considérés comme précurseurs d’une lecture progressiste et moderne de l’islam. Al-Afghani ne plaidait pas en faveur d’un ordre islamique totalitaire. Au lieu de cela, il était fermement persuadé que religion et science étaient à séparer l’une de l’autre. Et Abduh était tout sauf anti-occidental. Dans une citation réputée, le Grand Mufti de l’époque au Caire remarquait : « Je suis allé en Occident et j’y ai vu l’islam, mais aucun musulman. Je suis retourné en Orient et j’y ai vu des musulmans mus pas d’islam. » Pour lui, le siècle des Lumières occidental était plus proche du véritable islam que la culture des musulmans. « Retour à l’islam » signifiait pour Abduh un recentrage des valeurs centrales de la religion. Il refusait le fanatisme et la soumission aveugle à des lois religieuses.
Avec l’abolition du califat en 1924 en Turquie est intervenu un autre tournant pour l’islamisme des premiers temps. Alors que le califat avait déjà perdu politiquement et religieusement en pertinence au cours des siècles précédents, c’était maintenant définitivement de l’histoire ancienne. Le disciple d’Abduh, Rashid Rida, en a conclu que l’effondrement du califat avait massivement affaibli le monde islamique. Seul un retour au califat et à État islamique pourrait ramener les musulmans à l’ancien éclat. Cette théorie a également inspiré un instituteur égyptien dénommé Hassan al-Banna, qui a fondé en 1928 la compagnie des Frères musulmans.
Mais l’enjeu dans ce cas n’était pas seulement le combat contre la sécularisation. Les islamistes voyaient le monde islamique en danger. Des réformes séculières ainsi que l’influence de la culture et des médias occidentaux étaient à leurs yeux un signe d’effondrement culturel. L’ironie dans l’affaire, c’est que c’étaient justement les auteurs occidentaux qui les mettaient en garde contre cette décadence menaçante. Les noms devraient sembler connus à certains : Martin Heidegger, Ernst Jünger …
Des icônes islamiques comme Sayyid Qutb en étaient de grands adeptes. Sayyid Qutb est considéré comme le père du djihadisme. Le journaliste égyptien a rejoint les Frères musulmans en 1951. Le citoyen initialement plutôt libéral s’est radicalisé à la suite d’un séjour aux États-Unis en 1949. La société de ce pays l’a écœuré à un point tel qu’il s’est fixé comme objectif d’arrêter l’occidentalisation de sa patrie. Quand le putsch militaire a eu lieu en Égypte en 1952, les Frères musulmans saluaient au début la destitution de la monarchie pro-occidentale.
Mais cela a rapidement changé avec la politique de sécularisation sous Gamal Abdel-Nasser. Après un attentat manqué sur Nasser, beaucoup de Frères musulmans ont été emprisonnés et exécutés, dont également Qutb. C’est en prison qu’il a écrit son œuvre principale, Signes de piste. Les théories de ce livre devaient inspirer une nouvelle génération d’islamistes prêts à faire usage de violence On compte également parmi eux les fondateurs d’Al-Qaïda, Osama Bin Laden et Ayman al-Zawahiri. Mais un certain religieux iranien du nom de Rouhollah Khomeini entra en contact avec les idées de Qutb. Sayyid Qutb fut exécuté en 1966 sur ordre de Nasser.
Pour l’islamisme, « l’Occident » est le grand ennemi qui tente constamment de détruire l’islam. Par l’intermédiaire de la mondialisation, des médias et de guerres, il tenterait de propager ses idées – des idées qui décomposeraient l’islam. De la même manière qu’un Michael Stürzenberger met en garde contre une « islamisation » les islamistes mettent en garde contre un « occidempoisonnement » .
Mais l’histoire islamique a peu à voir avec la vision islamiste. Les Hizb ut-Tahrir et Co. rêvent d’un califat qui n’a pas existé ainsi jusqu’à présent. Si on plaçait certains des participants à la manifestation de Hambourg dans une machine à remonter le temps et les envoyait dans le Bagdad du IXe siècle, ils ne s’y sentiraient sans doute pas très bien.
Consommation d’alcool et poésie homoérotique existaient à foison dans la capitale du califat. Ce n’était pas non plus une utopie où comptait uniquement l’identité islamique. Les islamistes veulent unir l’islam par l’intermédiaire du califat, alors que c’étaient vraiment les conflits du premier califat qui ont divisé l’islam.
Progression de l’islamisme et arrivée en Allemagne
Dans la politique allemande, on se plaint de la Gauche jusqu’à la Droite des associations locales de mosquées. Beaucoup sont proches de groupes islamistes comme les Frères musulmans ou Millî Görüş. D’autres dépendent directement d’États étrangers comme la Turquie, ainsi par exemple DITIB, le plus grand groupement de mosquées en Allemagne. Rien que ces associations proches de la Turquie – outre DITIB par exemple ATIB et IGMG – représentent une menace directe pour les femmes kurdes, alévis, yézidies et les dissidents turcs. Si on connait quelque chose sur l’histoire de l’islam en Allemagne, on sait également que l’islamisme a trouvé ici des conditions idéales pour s’épanouir.
L’islamisme était une idée qui avait du moins l’apparence « d’originalité » et semblait ne pas être une importation occidentale. Les partis islamistes ont pu également renforcer leur popularité en intervenant dans des secteurs où les États inefficients échouaient. C’est ainsi que les Frères musulmans ont construit des écoles, des jardins d’enfants et des soupes populaires.
Ironie du sort, l’ennemi déclaré des islamistes – l’Occident – a soutenu initialement cette nouvelle idéologie. Pendant la Guerre Froide, des milices, partis et gouvernements islamistes ont été renforcés en partie en tant que forces anticommunistes – une stratégie qui a déjà été formulées dans les années 1950 sous Eisenhower. Le président des États-Unis à l’époque pensait qu’il fallait souligner « l’aspect de guerre sainte » au Moyen-Orient. Cela a été mis en pratique entre autres dans les années 1970 avec l’armement des moudjahidines islamistes en Afghanistan.
Les défis en Allemagne
Mais les associations de mosquées ne sont qu’un aspect de la scène islamiste en Allemagne. Les islamistes djihadistes ont découvert très tôt Internet comme medium pour eux. Par des plates-formes en ligne, c’est principalement un jeune groupe cible qui est atteint – spécifiquement une génération démunie de perspectives de jeunes musulmans avant tout masculins. L’islamisme propose des réponses simples aux questions économiques et sociales de jeunes migrants musulmans.
Avant tout, il propose un coupable, l’Occident. L’auteur de l’attentat de Mannheim est un parfait exemple de ce groupe cible. Il est arrivé en Allemagne à l’âge de quatorze ans avec son frère. Il a passé son examen de fin d’études secondaires, a appris l’allemand, a fondé une famille mais est resté au chômage. Sur You Tube, il a découvert alors les prêches d’islamistes afghans, qui appellent à la guerre contre l’Occident. Il s’est toutefois radicalisé en Allemagne.
Les résultats de recherches montrent que lors de la radicalisation, la religion ne joue souvent pas un rôle déterminant. Beaucoup de jeunes islamistes ne proviennent pas de ménages religieux, mais ont découvert au contraire une religion nouvelle pour eux. L’idéologie offre des réponses à leurs problèmes psycho-sociaux personnels. » Quant au problème avec les associations de mosquées, il est de naturelle structurelle.
L’islam n’est pas le contraire fondamental de l’Occident. Et le passé où veulent retourner les islamistes est un conte. C’est là qu’on devrait attaquer l’islamisme. La discussion actuelle en Allemagne n’empêche pas l’islamisme, elle ne l’affaiblit pas, elle lui donne raison. Chaque fois qu’on parle de « culture dominante », on lui donne raison. À chaque fois qu’on exige un islam « allemand », français » ou « européen » d’une manière quelconque on est d’accord avec lui. Chaque fois qu’on parle de « siècle des Lumières » ou de « réforme », on le renforce.
Le bilan du traitement de l’islamisme est une preuve d’incapacité. D’abord la société majoritaire a ignoré à ce point les communautés musulmanes de la génération des travailleurs immigrés qu’elles sont devenues un bon terreau pour l’idéologie. Au lieu de réfuter l’image du monde de l’islamisme, on s’est embarqué dans un combat pour la civilisation et alimenté davantage ce dernier. Et toutes les alternatives présentées comme un « bon islam » ne sont pas créées pour les musulmans, mais pour la population allemande majoritaire. Et alors on s’étonne que cela ne s’améliore pas ?
https://www.jacobin.de/artikel/islamismus-kalifat-radikalisierung-religion
Traduction de Jean Schoving pour Résistance républicaine
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Dans le magazine allemand Spiegel,en 2005,les journalistes reconnaissent avoir massacré 6 millions de juifs.Les juifs sont des occidentaux,ils donnent des prénoms chrétiens à leurs enfants.C’est une abération de laisser entrer tant de musulmans en Allemagne..Nos pays occidentaux sont beaucuop trop précieux ainsi que notre merveilleuse culture occidentale pour l’anéantir par cet islam qui ne respecte RIEN.Icompatibilité totale.Ils rentrent chez.eux.
On ferme nos frontières.
On ferme l’OFPRA et l’OFII qui sont les moteurs de l’invasion.
On supprime les aides indument versées aux étrangers.
On expulse tous les islamistes , avec leur familles élargies aux cousins.
On ferme progressivement les mosquées.
On retrouve notre France où il faisait bon vivre, sans eux.
Beaucoup trop long.
Merci quand même pour l’effort de traduction.
Jean Schoving Vous êtes sérieux ? Je suis pratiquement en porte à faux avec les 3/4 de votre texte, historiquement, intellectuellement, socialement et « religieusement » C est bon pour un livre scolaire du secondaire dont le programme est de mentir et de cirer les babouches…