Ayaan Hirsi Ali : les islamistes ne conquièrent plus l’Occident avec les attentats mais grâce à nos lois

Article du Neue Züricher Zeitung, par Ayaan Hirsi Ali

La publiciste et politologue Ayaan Hirsi Ali est originaire de Somalie et vit aujourd’hui aux États-Unis. Le présent article a d’abord été publié sur “Restauration”, la plate-forme animée par l’auteur.

Le 11 septembre 2001, plusieurs terroristes musulmans ont commis des attentats aux États-Unis. Aujourd’hui, les islamistes opèrent moins par l’intermédiaire d’attentats terroristes que par la subversion. 

Les ennemis actuels de l’Occident ont appris avec succès les secrets de l’ancienne subversion communiste, les ont adaptés et brillamment mis en pratique. C’est la raison pour laquelle l’Occident est exposé aux activités impitoyables du noyautage et de l’infiltration. Nous nous trouvons aujourd’hui dans de nombreux secteurs clé dans un état de démoralisation. Le danger de la déstabilisation nous guette.

Il existe deux canaux par lesquels la subversion moderne progresse, l’un opère depuis l’étranger, l’autre est né à l’intérieur même du pays. Il s’agit à cet égard du développement de l’islamisme d’une part et de l’autre, de la renaissance du communisme sous ses différents aspects. Ces deux forces connaissent un tel succès parce qu’ils exploitent sans scrupules le temps, les groupes de populations insatisfaits, la technologie ainsi que les systèmes occidentaux constitutionnels et juridiques. Bien que ces deux forces semblent idéologiquement polarisées, elles poursuivent en commun l’objectif déclaré de détruire les idées et les structures des sociétés occidentales.

Les islamistes planifient un jeu à long terme. Par le processus de conversion ou de prosélytisme et l’islamisation progressive des institutions, l’islamiste aspire à transformer la société occidentale. À quelle vitesse espère-t-il introduire la sharia en Europe et en Amérique du Nord ? La réponse à cette question est différente d’un islamiste à l’autre.

Par le passé, des islamistes ont tenté de nuire physiquement et moralement à l’Occident par des actions terroristes. Ils ont décapité des civils, attaqué des foules entières et lors de leur acte le plus visible, ils ont projeté des avions remplis de passager sur des bâtiments, dans l’espoir de semer la terreur dans la démocratie occidentale. Ces attentats continuent à exercer une grande influence sur le psychisme de l’Occident. Des pays comme le Royaume-Uni ou les États-Unis ont sacrifié d’importantes libertés personnelles au profit d’une plus grande sécurité. Ce sont en partie des libertés qu’ils n’ont pas recouvrées à ce jour.

Modification de tactique chez les islamistes

Ce serait pourtant une erreur à courte vue que de prétendre que nous avons vaincu les terroristes. Au regard des opérations militaires permanentes et écrasantes menées contre eux par l’Occident, je considère qu’il est plus réaliste de dire que les islamistes, qui sont capables de s’adapter et plaident désormais pour les méthodes de la subversion, ont triomphé de ceux qui voulaient imposer à l’Occident en procédure accélérée le droit islamique par le djihad et la terreur. En d’autres termes : les islamistes prédominants ont simplement changé de méthode en faveur de la subversion dans les pays hôtes.

Cette forme de subversion n’exige pas de contact direct entre une source et une cible. Les auteurs de l’attentat à la bombe lors du marathon de Boston n’avaient par exemple aucun contact manifeste avec une cellule terroriste, mais ont au contraire été radicalisés par osmose, entre autres par leur mosquée et des réseaux sociaux islamistes.

Ces représentants de la radicalisation disent maintenant à leurs partisans de travailler au sein du système et via le système. « Convertissez une personne après l’autre ; amenez la sharia dans une commune après l’autre. Remportez une élection après l’autre. Modifiez et conquérez une institution après l’autre, et ce de manière tout à fait légale, sans tirer un seul coup de feu. Les grands attentats spectaculaires n’étaient pas la meilleure solution. Peut-être celle-là est-elle la bonne », voilà leur message.

Les islamistes se sont incrustés avec succès dans les mosquées, les groupes d’activistes, les établissements d’enseignement et les réseaux sociaux, si bien qu’ils peuvent submerger l’entourage de contenus pro-islamistes. Cela a mené à ce qu’aussi bien les Américains que les immigrants sont amenés à soutenir des objectifs politiques islamistes. L’exemple le plus manifeste en est le changement radical de l’opinion publique à l’égard d’Israël dans la génération la plus jeune. Aucun autre thème de notre époque n’a fait l’objet aussi rapidement d’un tel changement radical.

Terreau de la radicalisation

Il faut voir la progression et la propagation de l’islam politique face à l’arrière-plan de l’effondrement de l’Occident. Les idées islamiques ne peuvent s’épanouir que dans une société trop faible pour se défendre. Comme je l’ai déjà évoqué, les islamistes ont réussi à mettre à profit plusieurs avantages. Leur premier atout est le temps.

Le second atout est la population insatisfaite, c’est-à-dire des personnes insatisfaites, généralement des hommes jeunes, qui sont mûrs pour une radicalisation. Dans ce cas, il peut s’agir soit de la population autochtone, qui se sent étrangère du fait de ses origines, soit d’immigrants venant de pays en voie de développement qui ne peuvent s’intégrer que difficilement.

Dans les sociétés riches avec un État-providence développé, les réfugiés sont placés dans une situation dans laquelle ils peuvent vivre des aides sociales et ne sont pas incités à participer à un travail rémunéré. En même temps, il est de plus en plus difficile de fonder une famille, si bien que le pourcentage d’hommes jeunes célibataires augmente fortement chez les immigrants.

Difficile intégration des musulmans

Il est irresponsable de penser que tous ceux qui émigrent en Occident s’adapteront entièrement à notre mode de vie parce qu’ils viennent volontairement ici. Cela était certes le cas au XIX^e siècle ou dans les premiers temps du XX^e quand un grand nombre de gens ont émigré ou fui d’Europe vers l’outre-mer face aux guerres et à la stagnation économique. En l’espace d’une ou deux générations, ils ont été entièrement assimilés. Même si cela a duré un peu plus longtemps, on peut dire la même chose des immigrants venant d’Asie ou d’Amérique Latine.

Il est cependant évident que les immigrants, qui sont en majorité des musulmans, éprouvent des difficultés à s’adapter. Même s’ils connaissent la réussite économique, comme c’est souvent le cas en Amérique, ils sont confrontés aux insurmontables différences culturelles entre l’islam et l’Occident. Beaucoup de musulmans réussissent bien entendu à concilier leur foi et leur nouvel environnement. Mais cela est exigeant et malheureusement un nombre croissant de musulmans américains, britanniques, français et d’autres musulmans occidentaux se tournent au lieu de cela vers les islamistes.

Leur troisième atout est la technologie. Dans ce domaine, les islamistes ont appliqué avec un grand succès les techniques de la subversion. L’exemple le plus récent et le plus manifeste a été l’utilisation de la communication et des réseaux sociaux, pour isoler et radicaliser les individus, souvent à l’effet d’actions terroristes violentes. Avec la propagation croissante des réseaux sociaux, les islamistes peuvent inciter de grandes parties de jeunes usagers à sympathiser avec l’islamisme.

Comme je l’ai déjà évoqué, le rapide changement d’opinion parmi les jeunes gens à l’encontre de l’État d’Israël en est l’exemple le plus frappant à cet égard. En même temps, nous assistons également au renouveau stupéfiant de l’antisémitisme dans la même population et au réflexe compulsif d’attribuer à l’Occident et en particulier aux États-Unis tout ce qui va mal dans le monde. Récemment, une vidéo de la centrale du syndicat des ouvriers du secteur des transports a été envoyée à l’entreprise médiatique « The Free Press ». On y apprenait aux activistes à scander « À mort Israël » « À mort l’Amérique » en farsi. Oui, en farsi.

Il est important de nommer par son nom ce qui se passe sur les réseaux sociaux : c’est un renforcement de l’endoctrinement qui a eu lieu à l’école ou dans la mosquée. Ces jeunes gens ne comprennent peut-être pas ce qu’ils disent là ou bien qu’on les manipule. Les réseaux sociaux représentent le moyen le plus efficace jamais inventé pour manipuler les masses. Nous sommes justement en train de perdre la prochaine génération au profit de la subversion.

Exploitation abusive de la liberté de parole

Le quatrième et dernier atout est paradoxalement le cadre occidental constitutionnel et juridique. Cela mène à ce que je nomme l’excessive tolérance de l’Occident envers l’intolérance. Les islamistes ont réussi à avoir recours aux institutions juridiques contre leurs ennemis. Dans de nombreux cas, il suffit simplement d’invoquer l’islamophobie et tous les obstacles qui entravent leurs objectifs disparaissent d’eux-mêmes. La crainte d’une plainte pour discrimination suffit pour mettre en fuite presque chaque personne ou organisation.

Récemment des manifestants propalestiniens ont perturbé un dîner pour étudiants en droit de l’UC Berkeley, qui avait lieu dans le jardin du couple de professeurs gauchistes, Erwin Chemerinsky et Catherine Fisk. Chemerinsky et Fisk sont extrêmement avant-gardistes mais cette attitude politique a semblé ne jouer aucun rôle face au fait qu’ils soient tous deux des Juifs. Quand Fisk a demandé des explications à une invitée au dîner, qui se déclarait manifestante, et a voulu lui enlever le micro, l’activiste l’a accusée d’islamophobie et a fait valoir ses droits en vertu du premier additif à la constitution. 

Toute personne ne connaissant que les éléments de base concernant la liberté de parole sait que cela ne vaut pas pour des injures à des personnes dans leurs propres quatre murs. Mais cela n’a pas empêché cette étudiante en droit de faire justement cela. La fédération locale du mouvement des jeunes palestiniens de la Bay Area a même été jusqu’à qualifier « d’attaque » le comportement de Fisk et à l’accuser « d’islamophobie, de racisme antipalestinien et de discrimination religieuse ».

Berkeley n’a pas encore annoncé de mesures disciplinaires contre les étudiants. Dans le cas où l’Université prendrait des mesures, les étudiants vont simplement prendre un avocat. Ce qui rend le concept de l’islamophobie à ce point dangereux, c’est que le simple fait d’essayer d’analyser cette question est déjà considéré comme islamophobe. Il n’existe aucune possibilité de sonder les limites de ce qui est considéré comme islamophobie. La seule accusation est déjà synonyme de condamnation à mort dans certains milieux.

Les islamistes infiltrent les institutions et les organisations et se camouflent par l’intermédiaire de la langue et de l’héritage des mouvements historiques de défense des droits des citoyens. À chaque fois qu’ils sont confrontés à des objections formulées à l’égard de leurs activités, ils sont en mesure d’avoir recours aux lois du pays d’accueil de manière effective contre ces objections et à leur propre bénéfice.

Législateurs complaisants

De nombreux pays européens avancent dans une direction où les différences d’opinion violentes sont soit censurées, soit formellement interdites. Dans la plupart des pays européens règne à présent un système de censure.

En Allemagne, Marie-Thérèse Kaiser, membre du parti AfD, a cité les statistiques gouvernementales à titre d’argument contre la poursuite de l’accueil de citoyens afghans supplémentaires en Allemagne. Le quota de délinquants sexuels afghans en Allemagne est très élevé. Avec d’autres migrants venant de pays comme la Turquie ou la Syrie, ils commettent la moitié des viols en groupes – bien qu’ensemble, ils représentent tout juste 14 pour cent de la population.

Kaiser n’a pas inventé ces chiffres. Ils proviennent comme dit plus haut du gouvernement. Et pourtant, elle a été déclarée coupable en vertu de la loi allemande sur les paroles de haine et condamnée à une peine pécuniaire de plusieurs milliers d’euros. Il est incompréhensible de risquer une inscription au casier judiciaire quand on cite des chiffres créés par le gouvernement.

Dans la guerre pour le rétablissement de l’ordre, tout espoir n’est pas encore perdu. L’Occident dispose d’un nombre suffisant de moyens auxquels nous pouvons recourir, il suffit simplement de le vouloir.

Ayaan Hirsi Ali

Traduction par Jean Schoving

https://www.nzz.ch/feuilleton/islamismus-politologin-ayaan-hirsi-ali-befuerchtet-den-niedergang-des-westens-ld.1831024

Pour en savoir plus sur Ayaan Hirsi Ali

https://resistancerepublicaine.com/2015/02/20/loccident-doit-reconnaitre-le-lien-entre-islamistes-et-leurs-croyances-religieuses-par-ayan-hirsi-alii/

https://resistancerepublicaine.com/2017/11/08/hayan-hirsi-ali-la-dawa-ou-comment-des-immigres-musulmans-ensemencent-les-graines-de-la-haine/

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