Non, Judith Butler, l’humanité ne se scinde pas entre colonisateurs et colonisés

Réponse à Judith Butler

Liliane Messika – 7 mars 2024

 

Pour Judith Butler, dont les propos sont rapportés par Le Figaro[1], l’humanité se scinde entre les colonisateurs et les colonisés. Il n’y a rien entre les deux, mais l’appartenance à l’une ou l’autre catégorie dérive de critères pour le moins fluctuants.

 

Les colonisateurs sont une majorité et les colonisés une minorité.

Si l’on prend les colonies britanniques, un empire où le soleil ne se couchait jamais, cette notion est déjà mise à mal, car les colonisés étaient beaucoup plus nombreux que les colonisateurs. Il en allait de même pour les colonies françaises, portugaises ou belges qui comportaient plus d’habitants que la métropole.

 

Les colonisateurs sont riches et les colonisés sont pauvres.

Il est des colonies archétypales, qui passionnent Judith Butler et des millions de militants de par le monde : les territoires palestiniens. Là aussi, difficile de justifier le théorème de Butler : un tiers des Juifs habitant en Israël ont été chassés des pays arabes après 1948, et tous leurs biens ont été confisqués par les colonisateurs arabes de leurs pays respectifs (les Juifs étaient au Maghreb depuis avant les invasions de l’islam !). Ils ont donc enrichi les pays d’où ils ont été chassés et sont arrivés pauvres comme Job dans le jeune État juif. Ils n’ont été pris en charge par aucune des deux organisations de l’ONU qui s’occupent des réfugiés : ni le HCR, qui a en charge tous les réfugiés du monde sauf les Palestiniens, ni l’UNRWA, qui s’occupe exclusivement de ces derniers.

Les « réfugiés palestiniens » (statut héréditaire dépendant d’un ancêtre ayant passé deux ans dans ce qui est devenu l’État d’Israël[2]) vivent des milliards de la charité internationale depuis 1949, même à Gaza, d’où le dernier juif a débarrassé leur atmosphère en 2005.

L’Union européenne et les États-Unis leur procurent sans contrepartie un revenu supérieur à celui de nombreux pays africains : en 2023, le PIB par habitant en Palestine était de 3125,50 $[3], à comparer à 246 $ au Soudan du sud, 310 $ au Burundi, 348 $ en Somalie, 367 $ au Malawi…[4]

 

Les colonisés sont les autochtones et les colonisateurs sont Européens

N’en déplaise à Mme Butler, les Palestiniens sont de deux origines.

En Judée Samarie (ainsi nommée depuis 1050 avant Jésus-Christ jusqu’à 1967 par l’ONU), habitaient des « Arabes de Palestine ». Leur territoire, qui eût dû faire partie du foyer national juif que les Britanniques avaient mandat de faire advenir, fut annexé par la Jordanie en 1949, à la suite de la guerre menée par l’Égypte, la Transjordanie, la Syrie, le Liban et l’Irak contre l’État juif nouveau-né, le jour même où il a déclaré son indépendance vis-à-vis de la Grande-Bretagne.

C’est probablement pour faire oublier que le mot « Juif » vient de « Judée », que la France s’est mise, en 1967, à appeler ce territoire « Cisjordanie », quand Israël l’a repris à la Jordanie. Ses habitants ont eu une carte d’identité jordanienne jusqu’en 1988.

Hussein de Jordanie, que les militants palestiniens ont essayé plusieurs fois d’assassiner, les a expulsés après en avoir tué plusieurs milliers lors de l’opération Septembre Noir, en 1970.

Gaza était une colonie égyptienne jusqu’en 1967.

En 1979, lorsque la paix a été signée entre Israël et l’Égypte, cette dernière a repris toute la partie du Sinaï qui avait été conquise par Israël, mais elle a refusé de récupérer Gaza, prise à la même époque. Ce qui va sans dire va encore mieux en le précisant : tous les villages israéliens qui avaient été construits entre 1967 et 1979 dans le Sinaï ont été vidés de leurs habitants à la signature de la paix.

 

Les colonisés archétypaux, les Palestiniens, subissent une violence coloniale

« La violence contre les Palestiniens a lieu depuis des décennies. [Le 7 octobre] était un soulèvement qui résulte d’une situation de soumission, et contre un appareil d’État violent. » 

Depuis 1994, suite aux Accords d’Oslo, les Palestiniens élisent leurs dirigeants : en 2005 ils ont élu Mahmoud Abbas pour quatre ans (mandat toujours en cours, sans élections depuis). À Gaza, en 2006 le Hamas a obtenu la majorité, et l’année suivante, il a exterminé ses rivaux lors d’un coup d’État qui a tué 200 fonctionnaires de l’Autorité palestinienne. Depuis cette date, aucune élection n’a été organisée à Gaza, où il n’y a plus un seul Israélien depuis juillet 2005.

 

Madame Butler, spécialiste de rhétorique et de littérature, réécrit l’Histoire

Pour elle, le pogrome au cours duquel 1200 Israéliens ont été tués, 4500 ont été blessés et mutilés, des centaines de femmes ont été violées avec une sauvagerie qui vient d’être reconnue par l’ONU[5], des enfants ont été liés en « fagots » et brûlés vifs, 240 otages de 9 mois à 90 ans ont été enlevés, ce pogrome n’était pas une attaque : « le soulèvement du 7 octobre était un acte de résistance armée. Ce n’est pas une attaque terroriste, ce n’est pas une attaque antisémite : c’était une attaque contre les Israéliens. » 

Madame Butler est libre de ses opinions et elle peut même considérer que les déportations de Juifs pendant la deuxième guerre mondiale résultaient « d’une situation de soumission, et contre un appareil d’État violent », comme elle le justifie pour les attaques du Hamas, victime de son indépendance depuis 19 ans, qui a exterminé des jeunes spectateurs coupables d’assister à un festival de musique pour la paix et des militants de gauche, qui avaient choisi de vivre dans des kibboutzim (communautés agricoles collectivistes) en bordure de Gaza pour aider les habitants de toutes les manières possibles.

 

Ceux qui voient en Judith Butler une stalinienne ont tort 

Elle conçoit qu’on puisse ne pas être 100% d’accord avec elle : « on peut être pour ou contre la résistance armée, pour ou contre le Hamas, mais mettons-nous au moins d’accord sur le terme de ’résistance armée’, et ensuite on peut débattre de la question de savoir si c’est juste, s’ils ont fait ce qu’il fallait faire, ou s’il y a d’autres stratégies. »

On aimerait savoir ce qui reste à débattre sur le fait de torturer des enfants devant leurs parents, de violer à plusieurs des femmes avant de les achever, non sans leur avoir coupé les seins pour en faire des ballons de foot. Est-ce bien « ce qu’il fallait faire, ou y avait-il d’autres stratégies » ? Et pour obtenir quoi ? Une stratégie, en général, vise à un objectif.

Quel était celui de « l’héroïque résistance » (ainsi désignée par le mouvement des Indigènes de la république) contre des femmes et des enfants endormis ou contre des jeunes amateurs de musique électronique ?

 

Judith Butler a des homologues françaises, notamment Danièle Obono et Houria Bouteldja, auteur du best-seller « Les Blancs, les Juifs et nous ». Ces femmes ne se définissent pas comme antisémites : d’ailleurs, elles rappellent souvent qu’elles ont des amis juifs, avec qui elles militent pour la destruction de l’État juif. Et de citer deux groupuscules unicellulaires, qui se prétendent juifs. Comme s’il n’existait pas de femmes misogynes, de juifs antisémites ou de Français qui détestent la France…

L’antisionisme est à l’antisémitisme ce que les non-voyants sont aux aveugles : une nouvelle appellation qui permet de nier l’existence d’un handicap, qu’il soit visuel ou intellectuel.

 

[1] www.lefigaro.fr/actualite-france/pour-judith-butler-les-massacres-du-7-octobre-ne-sont-pas-une-attaque-terroriste-mais-un-acte-de-resistance-armee-20240305

[2] Comparer la définition de réfugié (www.unhcr.org/fr-fr/editions/rapport-du-comite-special-pour-les-refugies-et-les-apatrides-deuxieme-session-geneve) avec celle de « réfugié palestinien » (www.unrwa.org/palestine-refugees)

[3] https://fr.tradingeconomics.com/palestine/gdp-per-capita

[4] https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_pays_par_PIB_nominal_par_habitant

[5] « L’ONU dit avoir « des informations claires et convaincantes » sur des viols commis par le Hamas »- www.lemonde.fr/international/article/2024/03/04/attaque-du-7-octobre-l-onu-dit-avoir-des-informations-claires-et-convaincantes-sur-des-viols-commis-par-le-hamas_6220077_3210.html

Liliane Messika

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7 Commentaires

  1. Elle ne sait pas de quoi elle parle cette « philosophe » de Mé2! Personnellement, même si cette opinion devait me conduire en prison, j’avoue préférer la France colonisatrice– avec ses instituteurs, ses missionnaires, ses bonnes soeurs infirmières, ses médecins, ses bâtisseurs, ses ingénieurs agronomes, des Ponts et Chaussées, ses agriculteurs-défricheurs, ses gendarmes etc…– à la France actuelle en voie de colonisation par des barbares incultes dont la plupart s’auto-proclament ennemis de la France et de notre civilisation !

  2. Les FTP dont Manouchian faisait partie étaient ils des résistants ? Des terroristes ? Eux aussi avaient des atrocités et des viols collectifs à leur actif.
    Un ancien résistant gaulliste disait qu’il y avait 80% de voyous dans les FTP, seulement 20% dans la résistance gaulliste (ce qui n’était déjà pas négligeable).

  3. À vrai dire ce n’est pas « l’humanité (qui) ne se scinde pas entre colonisateurs et colonisés » mais des neurones de la dame qui sont aux antipodes, les liens qui auraient dû les relier les uns aux autres ont été endommagés, un peu à la manière de fils électriques défectueux d’où un fonctionnement inexistant des ampoules intermédiaires. Selon son raisonnement justifiant les horreurrs du 7 octovre 2023, si dix « migrants » la violent c’est parce-qu’ils n’ont pas le code, ce qui justifie leurs actes ?

  4. que cette antisémite qui porte la haine sur son visage puisse venir pérorer en toute quiétude en france entouré d’un aréopage antisémite et islamo collabos à son image, en dit long sur l’état du pays – mais que personne chez les patriotes ne soit venu manifester contre la venue de cette engeance dont les discours haineux et mensongers feraient pâlir HITLER de jalousie, comme sait si bien le faire avec chaos et désordre sos racisme et autres du même genre lors des réunions de patriotes, laisse interrogateur

  5. Cette Butler qui par son discours justifie et approuve le meurtre de bébés parce que juifs, le viol et le démembrement de femmes parce que juives, elle est philosophe, vous dites ? Dans quelle chiotte elle enseigne ?

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