Combien de fois avons-nous entendu des touristes français « bien de chez nous » déclarer « cette année je suis allé en Espagne, l’année prochaine je fais l’Italie » ? C’est que ce nous allons faire cette semaine, l’Espagne vue de l’étranger, mais surtout de la France. Dans la seconde moitié du XIXème siècle et le début du suivant, notre voisin était très à la mode chez nous.
En guise d’ouverture, la rhapsodie España écrite en 1883 par Emmanuel Chabrier, suite à un séjour en Espagne l’année précédente :
Contrairement à son compatriote, Georges Bizet n’a jamais mis les pieds en Espagne, et pourtant Carmen nous met tout de suite dans l’ambiance ibérique ! Après la mort du compositeur en 1875, son ami Ernest Guiraud tira deux suites orchestrales de l’opéra ; il l’avait déjà modifié en remplaçant les dialogues originaux par des récitatifs et d’ailleurs cette version de Carmen fut jouée jusque dans les années 60. Heureusement, aujourd’hui on est revenu à la version originale d’opéra-comique qu’était Carmen.
(Note : le retour à l’original de Carmen a parfois donné lieu à des résultats surprenants : ainsi en est-il de la version Bernstein de 1973. Outre des tempos lentissimes qui ont choqué le public et la critique, la distribution est à 100% américaine. Bernstein, pour plus d’authenticité, a refusé de doubler les chanteurs pour les dialogues ; le résultat est une kolossale catastrophe. Marilyn Horne (Carmen) est inécoutable de vulgarité et James McCracken (Don José) n’est pas mieux, c’est dommage car la prise de son est somptueuse).
La première suite, à l’exception des « Remparts de Séville », reprend exclusivement les parties purement orchestrales de l’œuvre originale et c’est ce qui fait son intérêt par rapport à l’autre. On part à Singapour ?
Édouard Victor Antoine Lalo est un compositeur français né à Lille le 27 janvier 1823 et mort à Paris le 22 avril 1892. Une de ses compositions les plus célèbres est La symphonie espagnole, écrite en 1874 à l’intention du virtuose espagnol Pablo de Sarasate. Elle fut créée par le dédicataire le 7 février 1875 à Paris, peu de temps avant Carmen, le 2 mars 1875. La symphonie espagnole est souvent considérée comme un concerto, puisqu’elle fait appel à un violoniste solo. L’œuvre est découpée en cinq mouvements :
- Allegro non troppo
- Scherzando : Allegro molto
- Intermezzo : Allegretto non troppo
- Andante
- Rondo : Allegro
Le Cid est un opéra de Jules Massenet (1842-1912), d’après la pièce éponyme de Corneille. Il est créé le 30 novembre 1885 à l’opéra de Paris. Comme l’exigeait la coutume, l’œuvre comporte un ballet dont voici de larges extraits interprétés avec énergie ! (On l’oublie parfois, mais Massenet est le père de plus de 450 compositions !).
La rapsodie espagnole, écrite en 1907, est la première œuvre orchestrale majeure de Maurice Ravel, même si au départ, cette rapsodie avait été écrite pour deux pianos. En ce qui concerne la première audition, je cite cet extrait de Wikipédia :
La création de la Rapsodie espagnole eut lieu le 15 mars 1908 au Théâtre du Châtelet par l’orchestre des Concerts Colonne sous la direction d’Édouard Colonne, où l’œuvre fut plutôt bien accueillie, avec, même, le deuxième mouvement, Malagueña, donné en bis. Après ce bis, depuis les galeries supérieures du Théâtre du Châtelet, Florent Schmitt, du cercle ravélien des Apaches, cria dans la salle : « Encore une fois pour les gens d’en bas qui n’ont pas compris ! »5 ou « Jouez-le une troisième fois, pour que ceux d’en bas comprennent ! ». À l’issue de l’audition du quatrième et dernier mouvement, Feria, Florent Schmitt cria de nouveau dans la salle : « Dites-leur bien que c’est du Wagner ! Ils trouveront ça très bien ! » ou « Dites-leur que c’est du Wagner, ils applaudiront à tout rompre ».
Ces cris dans la salle du théâtre anticipent la création scandaleuse du Sacre du Printemps, en mai 1913, où les spectateurs des galeries supérieures du Théâtre des Champs-Élysées se mirent à crier « Taisez-vous, les garces du 16ème ! ».
Quatre parties dans cette rapsodie : Prélude – Malagueña – Habanera – Feria
De la musique russe pour terminer :
Là je prends un risque, diffuser de la musique russe, n’est-ce pas en contradiction avec la loi du 25 août dernier pondue par l’ineffable Thierry Breton ? Bon j’ai vérifié, aucun interprète russe dans les deux œuvres qui vont suivre et surtout pas l’immonde Gergiev ! Et toc !
Le capriccio espagnol est une composition orchestrale de Rimsky-Korsakov construite sur des mélodies espagnoles. Elle a été créée le 31 octobre 1887 à Saint-Pétersbourg sous la direction du compositeur, dans le cadre des Concerts symphoniques russes. Fait rarissime : à l’issue de la première répétition, tous les musiciens se levèrent pour acclamer le compositeur. De plus, lors de sa première audition publique, il fallut bisser le morceau de bout en bout, malgré sa longueur (Wikipédia).
Cinq parties dans cette œuvre : Alborada – Variazoni – Alborada (reprise) – Scena e canto gitano (scène et danse gitane) – Fandango Asturiano. La seconde Alborada se termine en apothéose et souvent, très souvent, les spectateurs bobos applaudissent. Très finement le chef a « embrayé » tout de suite sur la scène gitane. Nous allons retrouver l’orchestre de la Radio de Francfort (il s’agit du même concert que pour Ravel) :
Et Tchaïkovski à présent avec la Danse espagnole extraite du Lac des Cygnes :
EN BONUS :
Le compositeur italien Luigi Boccherini, né à Lucques (Italie) et mort à Madrid le 28 mai 1805, écrit en 1780 le quintette La Musica Notturna delle strade di Madrid (La musique nocturne des rues de Madrid) en sept parties :
Ave Maria delle Parrochie – Il tamburo del quartier dei soldati – Minuetto dei ciechi – Rosario – Los Manolos (Passa calle) – Il primo violino imitando il tamburo – Ritirata
La dernière partie, Riterata nous décrit une garde de nuit invitant les habitants à rentrer chez eux. Elle se rapproche, passe devant nous et s’éloigne :
En 1975, le compositeur italien Luciano Berio orchestre le dernier mouvement du quintette, ce qui nous donne un formidable crescendo/decrescendo (tiens, ça me rappelle quelque chose !)
Bon, c’est décidé, la semaine prochaine je vais en Italie !
Filoxe
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L’Espagne c’est la source d’inspiration de Maurice Ravel , Georges Bizet , Rimsky Korsakov et tant d’autres en matière de musique classique mais c’est aussi un pays qui possède son histoire et une richesse culturelle malgré le Gauchisme qui règne en Espagne !
Entièrement d’accord avec vous c’est pour cela que les compositeurs que vous avez cités sont là !
🥱n’ étant pas snob, et detestant l Opéra ( sauf » la belle de Séville »), je préfère » que viva España », » Asejere », et bien sûr » Cara al Sol »!mais aussi » Carmela »
Olé!🏉
Merci, admirable Filoxe, pour ce travail de bénédictin. J’aimais bien l’Espagne sous Franco, on s’y sentait encore en sécurité.
@Argo. Lol! Il fallait juste aimer El Caudillo sinon c’était direct la prison. Et aussi c’est pour ça que les fenêtres étaient pourvues de grilles ? C’est pour ça que l’Espagne était en retard de 40 ans sur la France ? Je t’aime bien ami Argo, mais là stp revois tes classiques. La seule chose qui fonctionnait bien en Espagne sous Franco c’est la téléphonie, les trains et les prisons. L’Espagne était ruinée, n’arrivait pas à s’en sortir, sans l’aide des banques américaines elle aurait été dans un triste état. Franco était un dictateur sans aucune compétence autres que militaires.
Aujourd’hui l’Espagne est un coupe-gorge. Avec la gauche, en démocratie , l’Espagne s’enfonce dans la misère. C’est troublant.
@ Argo. Oui un coupe gorge comme chez nous. Mais le niveau de vie s’est élevé de beaucoup. Et encore quand je disais que Franco était un militaire émérite il faut nuancer car sans l’aide des Allemands il perdait la guerre. Enfin bref! On ne va pas refaire l’histoire. Que la gauche Espagnole soit aussi nulle que la nôtre je suis entièrement d’accord.