Après plusieurs articles Un peu de douceur dans ce monde de brutes, cette fois on va appuyer sur le champignon et sans craindre de perdre son permis ! Pour cette fin de mois, des musiques « à toute vapeur », ça va chauffer ! Comme vous pouvez vous en douter, que des tempos rapides, soit, parce que tout simplement c’est écrit comme ça, soit, que le chef n’hésite pas à pousser son orchestre pratiquement hors limites. On va tout de suite commencer par une ouverture de Mendelssohn, Ruy Blas, écrite en 1839 pour la pièce éponyme de Victor Hugo que Mendelssohn détestait par dessus-tout (je parle de la pièce !). La musique avait été commandée par la Caisse de retraite du théâtre de Leipzig ! L’ouverture a été écrite en trois jours seulement et je vous livre ce texte savoureux de Mendelssohn dans une lettre à sa mère (source : Wikipédia) :
« Veux-tu savoir comment a été créée l’Ouverture de Ruy Blas ? C’est assez amusant. Six à huit semaines auparavant m’est parvenue une requête : la Caisse de retraite du théâtre (un établissement de bienfaisance très recommandable) voulait faire jouer Ruy Blas et elle me demandait de composer une Ouverture ainsi que la romance qui introduirait la pièce, parce qu’on escomptait une meilleure recette si mon nom figurait sur le titre. J’ai lu la pièce dont la nullité est au-dessous de l’imaginable, et répondu à mes solliciteurs que je n’avais pas le temps pour l’ouverture et me suis contenté de la romance. Le lundi (c’est-à-dire il y a huit jours) devait avoir lieu la représentation, et voilà que le mardi précédent, ils sont venus prodiguer leurs remerciements pour la romance et bien regretté que je n’eusse pas écrit d’Ouverture; mais ils comprenaient très bien qu’il fallait du temps pour un tel travail, et que, s’ils osaient, ils me la redemanderaient l’année prochaine. Me voilà bien embêté – le soir j’ai repensé à ce problème et ai commencé ma partition – mercredi toute la matinée a été consacrée à une répétition. Concert jeudi, mais, malgré tout, vendredi matin l’Ouverture était chez le copiste, et le lundi elle a été répétée trois fois dans la salle de concert puis une fois au théâtre ; jouée le soir pour cette pièce ignoble elle m’a fait un si grand plaisir qu’aucune de mes pièces ne m’en refera un tel de sitôt. Au prochain concert nous recommencerons à la demande ; mais je ne l’appellerai pas tout de même Ouverture pour Ruy Blas, mais Ouverture pour la Caisse de retraite du théâtre. »
Qu’en termes galants ces choses-là sont dites !
Maintenant si vous voulez tout savoir sur Ruy Blas, regardez ceci :
Dans le domaine des musiques endiablées, les Russes tiennent le haut du pavé, comme on pourra le constater avec ce Gopak, extrait du ballet Gayaneh écrit en 1939 par Aram Khatchaturian, d’origine arménienne ; l’orchestre de Vienne est dirigé par le compositeur, un moment historique !
En parlant de musique russe, voici justement La Danse des Bouffons, de Rimsky-Korsakov, le New York Philharmonic est dirigé par Leonard Bernstein :
Une question que tout un chacun s’est posée au moins une fois, concerne le mouvement perpétuel, est-ce possible ? Eh bien non, d’abord il faudrait une énergie inépuisable et toute mécanique est soumise à des frottements internes et dus à l’air. N’étant pas suffisamment calé en physique, je n’irai pas plus loin. Des compositeurs ont pourtant essayé ! D’abord Paganini avec son Moto Perpetuo interprété par Yehudi Menuhin, il faut bien que ça s’arrête !
Johann Strauss fils a écrit son propre mouvement perpétuel, Perpetuum mobile, créé le 19 janvier 1861. À la différence du morceau de Paganini, la composition de Strauss ne s’arrête pas mais se termine en « fondu », dans la plupart des cas le chef se tourne vers le public et lance Und so weiter (usw), ce qui signifie, vous l’avez compris « Et cætera (etc) ». Sur YouTube les versions de ce Scherzo musical ne manquent pas, j’ai choisi celle du 1er janvier 2002 à Vienne, l’orchestre étant placé sous la direction de Seiji Ozawa, la durée du morceau est de 2’47 » alors que la moyenne est de 3 minutes. On se souviendra que ce premier janvier a marqué la naissance de l’€. La mise en images est remarquable, malgré la brièveté de l’œuvre, les instruments, même ceux que l’on ne trouve pas forcément très souvent, sont tous mis en valeur (piccolo, glockenspiel, tam-tam, etc. ou plutôt usw.)
C’est juste une question de tempo (Philippe Lavil)
Au début de chaque œuvre classique, se trouvent deux indications importantes, celle du tempo et une indication métronomique, sur la Symphonie héroïque, on peut lire pour le premier mouvement Allegro con brio et 60 battements à la blanche pointée (une blanche pointée = trois noires).
Vous pourrez remarquer la barre de reprise à la mesure cinq, ignorée par certains chefs ! Sur Wikipédia, on vous informe que la durée de la symphonie varie entre 45 et 55 minutes, suivant que l’on exécute la reprise ou pas dans le premier mouvement. Giulini en 1978, Scherchen en 1958 jouent l’œuvre en respectivement 57’32 » et 43’50 » reprises incluses, la différence est absolument incroyable ! Rien que pour le premier mouvement, 20’33 » pour l’un, 14’39 » pour l’autre !
Voici la version complète de Scherchen (récupérée d’après un 33 tours), personnellement je la préfère à celle de Giulini :
Drame pendant un concert :
Une chance incroyable, j’ai pu retrouver l’interprétation de cette rhapsodie AVANT l’accident (ceci-dit, la version de Dorati est impeccable !) :
Retour à la musique russe pour terminer avec Reinhold Glière, dont vous n’avez, je pense, jamais entendu parler. Ce compositeur soviétique est né le 30 décembre 1874 à Kiev et décédé à Moscou le 23 juin 1956. Une de ses œuvres est Le Pavot rouge et nous allons entendre La Danse des marins. Comme La Danse des bouffons, le morceau est extrait du même CD, un véritable bijou (j’ai juste ajouté la photo de Glière sur la numérisation de la couverture) :
LES BONUS
Priorité à la culture avec cette exceptionnelle diseuse qu’était Robertine Hirsch :
On reste dans le domaine de l’humour, mais en musique avec le finale de la symphonie 45 de Haydn, Les adieux, donnée le 1er janvier 2009 à Vienne. Le chef paraît surpris ? Et pourtant la symphonie a été écrite comme ça !
À titre personnel je ne vous dis pas adieu, on se retrouvera en septembre avec le concert du mois qui sera consacré à Maurice Ravel. Mais avant de clore cet article, je ne peux pas m’empêcher de partager avec vous cette Danse du sabre de Khatchaturian que je viens juste de découvrir par hasard, jamais je ne l’ai entendue jouée comme cela !
Et bonnes vacances à tous (si vous avez la chance d’y être !)
Filoxe
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Quand j’ai lu le titre, je me suis dit : Filoxe va nous faire un article sur Arthur Honegger et « Pacific 231 », moi qui suis mordu de locomotives à vapeur.
Non, mais une autre fois peut-être…😏
En ce qui concerne cet article je suis époustouflé. Merci de partager tant de connaissances.
Et bonnes vacances ! 🌞
Oui vous avez raison je vais garder Pacific 231 sous le coude, je sais qu’il existe une version de concert classique et une autre tournée à bord d’une Pacific 231.
Si vous êtes passionné de trains, il existe une œuvre d’un compositeur danois, Lumbye, « le petit train à vapeur de Copenhague ». Deux musiques ne font pas un article mais je trouverai bien quelque chose pour septembre.
Et merci pour votre commentaire !
Et d’ailleurs voici le lien que j’avais publié sur ma chaîne, vous verrez à quoi je ressemble 🤣🤣🤣🤣 !
https://youtu.be/1GvxO7CGqEQ
Merci Filoxe pour ce travail de Titan. Nos caisses de retraite ne pourraient pas commander une musique de nos jours, vu l’état de leurs finances. Ou peut-être Prélude à l’Après-midi d’un faux-cul en hommage à Macron?
Ou d’un faux-nez…
Merci pour votre commentaire, en ce qui concerne l’hommage à Macron, je verrais plutôt le « Crépuscule de Jupiter », une sorte de concerto pour casserole et orchestre de marmites.