11 juin 2013 • Poutine au studio RT
Selon Moscou, les pays baltes sont médiatiquement des Pays-Bas. Mais cette bassesse possède sa légitimité et le rayon d’action médiatique du Kremlin y perd en puissance.
Avant d’évoquer la position de l’éthique baltique audiovisuelle, petite présentation des cinq principaux protagonistes russes.
1/5 Rossia Sevodnia ou Russie d’aujourd’hui est l’organisme de communication officiel russe à l’international. Cette agence de presse est un mastodonte audiovisuel et média de 2500 personnes créé fin 2013 par fusion de l’agence de presse RIA Novosti et de la radio La Voix de la Russie. Son DG est Dmitri Kisselev. Ne confondez pas ce label avec Russia Today ou RT car il n’y a officiellement « aucun lien entre les deux réseaux »
2/5 RT anciennement Russia Today. Cette chaîne télévisuelle est disponible en cinq langues : anglais, français, allemand, espagnol et arabe, vive la démocratie linguistique ! Avec RT Arabic, bonjour la guerre d’information… C’est avant tout une machine stratégique bien huilée, dans la plus pure logique institutionnelle poutinienne : faire savoir ce qu’est la Sainte Russie encerclée par l’OTAN et menacée par les mœurs décadentes véhiculées par les intellectuels dépravés. En parallèle, RT Documentary est ciblé docus, sorte d’Arte au profit du divan d’Ivan. https://rtd.rt.com/schedule/
3/5 Sputnik, synonyme Sputin. Même les Polaques y ont droit. Pas mal la rubrique des chiens écrasés. Pour l’analyse de fond, les opposants sont écrasés. À noter le maintien d’une belle tradition : l’infographie de matériel militaire comme le brise-glace atomique Rossija. Ici la pédagogie Sputnik se distingue favorablement. https://pl.sputniknews.com/infografika/
Vous avez vos MERDIAS, les Russes ont leur tactique MMRMR : Mentir, Manipuler, Répandre, Modifier, Répandre à nouveau (point de vue d’un analyste décrypteur polonais)
4/5 Dmitri Kisselev est l’incontournable du monde médiatique russe. Et ce n’est pas n’importe qui : diplômé en philologie scandinave à l’Université d’État de Leningrad, virtuose à la guitare classique, polyglotte. Intellectuellement, c’est du lourd, sauf que ses propos au sujet des Juifs et des homosexuels ne sont pas particulièrement appréciés en UE27. Nommé par Poutine en décembre 2013 à la tête de Rossia Sevodnia. Moscow Times : « C’est le nouveau propagandiste en chef du Kremlin ». Blacklisté en 2014 par les States et l’UE à la suite de la main basse anticonstitutionnelle sur la Crimée. Dmitri Kisselev est celui qui soulève des montagnes. Russes
Dmitri Kisselev : l’art du one-man-show
5/5 Margarita Simonian n’a pas assez d’une carte de visite 85x55mm (rien à voir avec les obus) pour se présenter : rédactrice en chef RT depuis 2005, rédactrice en chef Rossia Sevodnia depuis 2013, rédactrice en chef Sputnik depuis 2014. Bref, rédactrice en cheffe de la bien-pensance made in Russia. Âgée de 40 ans et ce n’est peut-être qu’un début…
Margarita Simonian en 2018 en compagnie du VIP VP
À chaque civilisation sa bien-pensance. En Russie 2020, soyez orthodoxe, ayez la nostalgie des anciennes frontières 1945-1990 et votez Russie Unie. Pour les libéraux-conservateurs russes athées, ça devient un peu plus compliqué, surtout s’ils sont en orbite bisexuelle.
Chasse à l’ours médiatique Russie Unie début juillet 2020
Pays baltes 2020 : une orientation scandinave avant tout
L’Estonie fut la première à répondre aux sanctions de l’UE contre Dmitri Kisselev. L’émission RT n’y a pas été interdite mais la succursale estonienne Sputnik a été priée début janvier 2020 de fermer ses portes et toute l’équipe éditoriale – 35 personnes tout de même – contrainte de démissionner. La police et les services frontaliers estoniens ont lancé un ultimatum aux membres du personnel : soit résiliation du contrat de travail Sputnik Estonie, soit lancement d’une procédure pénale à leur encontre. Sputnik y est accusé de publier régulièrement des fakes.
La Lettonie a interdit le 1er juillet 2020 la diffusion de RT sur son territoire et la chaîne a disparu des réseaux câblés lettons en laiton. Raison officielle ? Elle est contrôlée par Dmitri Kisselev qui fait l’objet de sanctions de l’UE suite à l’annexion de la Crimée sans validation par le Parlement de Kiev.
Kisselev a rétorqué qu’il n’exerçait aucune supervision directe sur aucune des stations de la large palette Rossia Sevodnia et a accusé les autorités lettones de russophobie : « Je pense que les Lettons doivent s’excuser auprès de RT et réactiver la chaîne dans leur pays ». À son tour, Margarita Simonian lui emboite le pas et se moque des autorités lettones sur Twitter : « Riga ne comprend même pas la structure organisationnelle de la station ». Ambiance…
Selon le régulateur letton des médias, RT et son réseau de chaînes sont sous contrôle effectif de Kisselev et tentent régulièrement de présenter la Lettonie comme un État en faillite. La diplomatie lettone n’est pas en reste : une porte-parole de la Représentation permanente de Lettonie à Bruxelles déclare informer les régulateurs des médias des États membres de l’UE de cet état de fait, tout en les incitant à stopper la retransmission RT, conformément à leur législation nationale. Le cas letton fera-t-il jurisprudence en Pologne ou en France ?
La Lituanie embraye le 9 juillet 2020 et la Commission Radio & TV lituanienne LRTK retire RT des réseaux câblés dans tout le pays. Son vice-président Mantas Martisius dit : « RT a été retiré du bouquet non pas pour des raisons de violation contractuelle mais parce que Dmitri Kisselev est associé aux programmes de cette télévision et qu’il figure sur la liste des personnes soumises aux sanctions de l’UE »
Linas Linkevicius, social-démocrate et ministre lituanien des Affaires étrangères, rappelle que des mesures de restrictions sur les émissions de certains radiodiffuseurs russes avaient déjà été prises en Lituanie, cette fois au motif d’incitation à la haine.
La position du Président russe
Selon Poutine, « Rossia Sevodnia a pour but de communiquer à des audiences étrangères des informations sur la politique ainsi que sur la société russe et cet organisme a été créé pour réduire et optimiser les dépenses des médias russes ». L’objectif est toujours le même : exporter l’image la plus favorable qui soit de la Sainte Russie. Je suis curieux de savoir si le concept d’exportation intérieure produirait les mêmes effets…
Le job RT au sein des pays baltes consiste également à maintenir le lien auprès des minorités russes en présentant sans cesse une Russie conquérante face à une UE27 exaspérante. Quoique discret, le militantisme politique pro-russe y existe bel et bien et on ne sait jamais de quoi l’avenir sera fait… La « leçon balte » a définitivement convaincu les services secrets russes qu’un Eltsine ne serait jamais la solution, LEUR solution. En 2005, Poutine déclare que la chute de l’URSS fut la plus grande catastrophe du 20ème siècle. Propos rien moins qu’ambivalents, pas vraiment appréciés à Varsovie…
En Ukraine, RT est muet depuis août 2014, ceci après avoir publié de fausses informations sur la situation à l’Euromaidan de Kiev ayant mené à la destitution de l’équipe pro-russe du président Viktor Ianoukovytch. Bien évidemment, les news relatifs à la Crimée et à la guérilla dans le Donbass ne font pas vraiment plaisir à Kiev…
En Pologne, l’audience du duo RT-Sputnik est franchement très faible et on se demande parfois pourquoi les traducteurs Sputnik PL se donnent autant de mal.
Œil d’aigle voit tout. Y’a pas intérêt à inverser les canaux les gars…
La position de l’UE
Chez nous, le groupe EAST StratCom ne chôme pas vraiment. Créé en 2015, sa mission est de monitorer les campagnes d’information/désinformation exportées par le Kremlin (entre autres les semailles de zizanie sur les champs UE27) et de communiquer ses conclusions à la Commission européenne. https://euvsdisinfo.eu/fr/
Volte-face balte définitive
Les pays baltes ? Ancrage à Bruxelles et à l’OTAN, membres zone monétaire Euro, le tout selon une décision souveraine : bye-bye Staline et ses annexions hold-up de 1939-1940 et 1944-1945 – aux centaines de milliers de déportations – et surtout bye-bye Eltsine & Poutine.
In fine, rappelons les référendums en Estonie et Lettonie de mars 1991 où respectivement 78% et 75% du peuple ont dit OUI à l’indépendance. Le référendum n’a pas eu lieu en Lituanie, le Soviet suprême siégeant à Vilnius ayant proclamé spontanément l’indépendance lituanienne.
Inversons les rôles
Imaginons un instant un organisme gaulois de communication multimédias à l’international, en version poupée russe Marianna.ru. La chaîne serait incluse dans le bouquet standard des opérateurs russes et des anciens satellites CCCP. On y fustigerait les nombreux déboires de la société contemporaine post-soviétique : monoculture économique, difficultés à boucler les fins de mois pour 80% des ménages russes (ce que Rosstat constate lui-même avec dépit en avril 2019), alcoolisme, dénatalité, fuite des cerveaux avec en parallèle une glorification des atouts sociétaux gaulois et par extension de la vilaine UE. Probabilité de faisabilité du projet : 0%.
Si un jour les vents d’Ouest devaient m’emporter, disons que je préférerais atterrir à Riga que sur la Volga.
Да здравствует Галлия ou Da zdravstvuyet Galliya ou Vive la Gaule !
Richard Mil+a
Petit survol présidentiel des « babys baltes »
Estonie • Capitale Tallinn
1.290.000 habitants dont la minorité russe, 350.000 âmes environ
Nombre de musulmans : moins de 0,1%
Indépendance de l’URSS : 20 août 1991
Présidente : Kersti Kaljulaid, ornithologue, master en biologie, sans parti
705 total views, 1 views today
La Russie a ses défauts, et ses problèmes, c’est sûr; mais face à l’avancée du basculement de l’Occident dans le chaos gauchiste, allié au capitalisme ultra libéral déshumanisé, et déroulant le tapis vert pour les musulmans visant le califat mondial (et la charia pour tous), sans oublier l’ouverture des vannes pour la déferlante noire africaine, je préfère de loin la Russie. Si on avait un Poutine à l’Elysée, avec tous ses défauts, on serait en bien meilleure situation qu’avec le traître qui s’y trouve actuellement, et qui continue, en l’amplifiant, la politique mortelle de ses prédécesseurs, depuis De Gaulle (même si De Gaulle avait aussi ses défauts, et pas des moindres …).
« Sainte Russie encerclée par l’OTAN et menacée par les mœurs décadentes véhiculées par les intellectuels dépravés ? » Eh bien tout à fait d’accord !
Richard Mil , je lui fais peut-être un procès d’intention mais donne l’impression et encore c’est un euphémisme de combattre systématiquement les etats qui ne s’alignent pas sur Washington, Bruxelles et Berlin. Que les médias russes diffusées en langues étrangères soient l’émanation du gouvernement russe et donc qu’il y ait une certaine présentation des événements sous l’angle de la vision politique qu’a le gouvernement russe de l’actualité internationale, c’est tout aussi vrai des médias occidentaux diffusés dans le monde . Que ce soit Euronews, BBC international, CNN, France 24 et RFI défendent de la même façon une vision orientée de l’actualité internationale et les positions politiques du bloc euro-atlantiste.
Franchement pensez vous sincèrement que France 24, Euronews dans leurs informations en langue russe ou anglaise donnent la parole aux euro-sceptiques et aux partisans du Frexit. Imaginez vous sur ces mêmes chaînes que des personnalités hostiles à l’OTAN puissent être interviouvés? Soyons sérieux la propagande euro-atlantiste à destination du peuple russes et de toutes les nations non encore alignées sur le bloc atlantiste est diffusée par les médias occidentaux qui se gardent bien de donner la parole à tous les courants hostiles à la mondialisation azu sein des pays occidentaux.
RT a le mérite d’exister. Généralement les nouvelles annoncées par ce média ne sont pas fausses. Ce ne sont pas des infox ou des infos fallacieuces , oublions les anglicismes « fake » et « news ». Simplement comme tout média, RT opère un choix rédactionnel dans les infos du jour comme le font les médias français ou américains qui ne traitent pas de façon objective la campagne présidentielle américaine.
Les internautes ne sont pas idiots et savent distinguer ce qui relève de la propagande russe ou d’un éclairage disons unilatéral avec certaines infos dérangeantes pour les gouvernements occidentaux que nos médias occidentaux se gardent bien de mettre en avant. Et puis Richard Mil personne ne vous obliger à regarder RT si ce média russe vous déplait. De là à souhaiter comme vous le suggérez entre les lignes que ce média ne puisse plus être diffusé en France , on ne vous suivre pas dans ce désir de censure.