ἀνάγκη : quand Victor Hugo nous parlait du destin de Notre-Dame de Paris…

Je me souviens de ma première rencontre avec le grec ancien, rencontre qui fut sans doute à l’origine de ma vocation – car c’en fut une- de  professeur de lettres classiques. J’étais haute comme trois pommes, et, de passage chez des amis – il n’y avait pas la télé chez moi- j’ai vu une adaptation de Notre-Dame de Paris de Victor Hugo et j’ai été éblouie, fascinée, marquée à jamais par ce mot gravé dans les murs de la cathédrale, ἀνάγκη.

Je ne connaissais pas, alors, son sens.

Laissons Victor Hugo en personne nous  expliquer :

Notre-Dame de Paris s’ouvre sur un graffiti (en grec) disparu, de même que Les Misérables s’achèveront par la disparition d’une épitaphe sur une pierre tombale du Père-Lachaise. Beaucoup plus loin dans le roman, Jehan Frollo verra son frère Claude inscrire ce graffiti sur la muraille de sa cellule : « Mon frère est fou, dit Jehan en lui-même ; il eût été bien plus simple d’écrire : Fatum ; tout le monde n’est pas obligé de savoir le grec. » (Notre-Dame de Paris, VII, 4) Et comme tout le monde n’est pas obligé de savoir le latin non plus, il eût encore été plus simple d’écrire : Fatalité, ou bien Nécessité.

Il y a quelques années qu’en visitant, ou, pour mieux dire, en furetant Notre-Dame, l’auteur de ce livre trouva, dans un recoin obscur de l’une des tours ce mot gravé à la main sur le mur :

’ANÁΓKH.

Ces majuscules grecques, noires de vétusté et assez profondément entaillées dans la pierre, je ne sais quels signes propres à la calligraphie gothique empreints dans leurs formes et dans leurs attitudes, comme pour révéler que c’était une main du Moyen âge qui les avait écrites là, surtout le sens lugubre et fatal qu’elles renferment, frappèrent vivement l’auteur.
Il se demanda, il chercha à deviner quelle pouvait être l’âme en peine qui n’avait pas voulu quitter ce monde sans laisser ce stigmate de crime ou de malheur au front de la vieille église.
Depuis, on a badigeonné ou gratté (je ne sais plus lequel) le mur, et l’inscription a disparu. Car c’est ainsi qu’on agit depuis tantôt deux cents ans avec les merveilleuses églises du moyen âge. Les mutilations leur viennent de toutes parts, du dedans comme du dehors. Le prêtre les badigeonne, l’architecte les gratte, puis le peuple survient, qui les démolit.

Ainsi, hormis le fragile souvenir que lui consacre ici l’auteur de ce livre, il ne reste plus rien aujourd’hui du mot mystérieux gravé dans la sombre tour de Notre-Dame, rien de la destinée inconnue qu’il résumait si mélancoliquement. L’homme qui a écrit ce mot sur ce mur s’est effacé, il y a plusieurs siècles, du milieu des générations, le mot s’est à son tour effacé du mur de l’église, l’église elle-même s’effacera bientôt peut-être de la terre.
C’est sur ce mot qu’on a fait ce livre.

Mars 1831.

Victor Hugo, Notre-Dame de Paris, 1832.
> Texte intégral : Ollendorff, Paris, 1904-1924

https://gallica.bnf.fr/essentiels/hugo/dame-paris/propos-oeuvre

 

Oui, le fabuleux et terrible roman de Victor Hugo est une métaphore de l’existence humaine, de l’humanité même, avec ses inconnues, ses hasards terrifiants. Mais si, chez les Grecs, ἀνάγκη désigne le poids d’un destin voulu par les Dieux, pour d’obscures raisons, Hugo a nettement montré que ce destin était lié non pas au hasard mais aux passions des hommes, aux pulsions sexuelles comme aux envies de pouvoir ; ce sont des hommes qui mènent l’homme et le monde à sa perte.

N’oublions pas les leçons de Victor Hugo qui s’exila de longues années à Guernesey, refusant de fouler le même sol que l’usurpateur ( avons-nous, nous, la même possibilité, les mêmes moyens financiers de ne pas respirer le même air que Macron ?

N’oublions pas les leçons de Victor Hugo qui, déjà disait qu’il voulait l’Etat chez lui et l’Eglise chez elle.

Qu’eût-il dit, en voyant l’islamisation de son pays, de notre pays ? Il eût été des nôtres, forcément, à coups sûr. Parce que, comme nous, il aimait passionnément la France et la justice.

France et justice détruites car aux mains de mondialistes qui détestent notre pays. Et ce ne sont pas leurs larmes de crocodile sur Notre -Dame de Paris qui vont changer les choses et nous les rendre sympathiques, au contraire. Des ordures... voilà ce que Victor crie depuis sa tombe. Et il eût croqué le monstre Macron avec un talent qui nous manque aujourd’hui.

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9 Commentaires

  1. S’acharner sur Napoléon III, ce n’est pas ce que Victor Hugo a fait de mieux. Un très grand nombre d’écoles de campagne ont été construites durant le Second Empire. De même, une veritable elite enseignante a été recrutée a cette époque, qui jettera les bases du personnel de l’Education Nationale. Durant les journées d’insurrection ouvrière de juin 1848, Hugo s’est positionné du côté de la bourgeoisie. Il a écrit « Histoire d’un crime » parce que le prince-président Louis-Napoléon avait refusé de l’élever à la paierie.
    Le Second Empire à été une période de transition qui a préparé le passage à la République. Le « crime » de Louis Napoléon a fait beaucoup moins de victimes que les massacres du général Cavaignac quelques années auparavant.
    On peut être un très grand écrivain et en même temps une saloperie opportuniste.

    • Je n’aime pas trop Victor Hugo non plus. Ses plaidoyers à deux balles (c’est d’ailleurs leur prix en librairie actuellement) contre la peine de mort ne sont pas le meilleur legs qu’il nous ait laissé…
      La loi du Talion est une loi vertueuse. Je n’ai jamais compris pourquoi certains historiens du droit trouvent naturel de l’éliminer au motif qu’elle entraînerait un enchaînement de violence. Il y a l’attaque injuste et la riposte qui rétablit l’ordre juste. Rien n’explique que la riposte juste devrait susciter une nouvelle attaque injuste. La loi du Talion est même en deçà du nécessaire, celui qui fait un mal devrait en subir deux pour sa punition. Or, aujourd’hui on fait tout le contraire, nous sommes comme du bétail prêt à être en permanence l’objet des pires actes de torture sans avoir commis de faute, juste parce qu’ils ne supportent pas notre existence, et en retour, on les bichonne dans des prisons devenues des hôtels confortables pour seulement quelques années. On est entré dans l’inverse de la loi du Talion, c’est la victime qui en prend le plus dans la gueule… V. Hugo n’y est pas pour rien !

      • On peut être en désaccord avec Victor Hugo sur la peine de mort ( et encore, quand il militait contre, au XIXème siècle c’était les pauvres, les démunis qui, pour peu de choses se retrouvaient ou au bagne ou exécutés. Victor Hugo est un grand, avoir écrit ne serait-ce que Notre-Dame de Paris et Ruy Blas montrent son géni e et il nous a laissé tant d’oeuvres qui font vibrer, qui font réfléchir, qui donnent à rencontrer la beauté qu’il serait monstrueux de faire comme nos ennemis qui jettent le bébé avec l’eau du bain dès qu’il y a un désaccord idéologique

  2. Une coquille dans le texte surligné :
    « quitter ce inonde  » : lire « quitter ce monde  »

    Quant à cette destruction, elle peut aussi faire penser à celle du palais des Tuileries en 1871.
    L’alliance islamo-anarchiste a de beaux jours devant elle… même si, la nature ayant horreur du vide, la charia prendra le relais s’ils triomphent et ils semblent bien ne pas être loin d’y parvenir face au consensus et la passivité des masses confortées par le pouvoir en place dans le sentiment de fatalité.

  3. Merci à ’Aνάγκη, au Destin de m’avoir fait rencontrer Christine, et d’apprendre par elle, ce matin, cette belle histoire de graffiti contée par Victor Hugo. Christine n’était pas née quand j’ai découvert l’’Aνάγκη et la langue grecque, mais on apprend tous les jours, pour peu que l’on ait de bonnes fréquentations !
    Cela me donne l’occasion de citer St Paul dans sa 1ère lettre aux Corinthiens, 9, 16 : « Ἐὰν γὰρ εὐαγγελίζωμαι, οὐκ ἔστιν μοι καύχημα: ἀνάγκη γάρ μοι ἐπίκειται: οὐαὶ δέ μοι ἐστίν, ἐὰν μὴ εὐαγγελίζωμαι. »
    Soit : « En effet, si je prêche l’Evangile, je n’ai pas sujet de m’en glorifier, parce que la nécessité m’en est imposée ; car malheur à moi, si je ne prêche pas l’Evangile ! »

  4. Tant de nos ancêtres qui se sont dévoués pour que nos villes soient belles et, aujourd’hui la présence d’autant d’étrangers qui, par leur hostilité, en quelques heures, détruisent des édifices millénaires…

    Il n’y a pas de hasard : après le saccage de Saint-Denis, l’incendie des portes de l’église Saint-Sulpice ou Saint-Eustache (je ne sais plus) tant le vandalisme est quotidien contre nos lieux de culte chrétiens, voici l’incendie de Notre-Dame… Je ne peux croire à un accident… Qui plus est la semaine Sainte…

    Par ailleurs, si chaque fois qu’il y a des travaux de restauration de nos bâtiments historiques, ils sont menacés de disparaître dans les flammes, peut-être vaudrait-il mieux y renoncer… En effet, précédemment on peut déplorer l’incendie du magnifique Hôtel Lambert, dans l’île de la Cité – devenu propriété d’un prince quatari ou saoudien, grâce à Sarkozi – « prince arabe » qui a voulu installer un ascenseur dans un hôtel historique, ce qui menaçait déjà l’édifice…

    Il y a aussi l’incendie de la cathédrale de Nantes, en restauration – encore…. Là, le sinistre serait dû à un chalumeau qu’un ouvrier aurait oublié d’éteindre sur le chantier…

    Quand on pense à la rigueur qui était la règle des équipes de Compagnons d’autrefois on ne peut que faire la comparaison avec les ouvriers d’aujourd’hui. Une mentalité qui est au diapason de toute la société d’aujourd’hui : négligence, laisser-aller, relativisme…

    Combinons les menaces terroristes, l’animosité de ceux qui occupent notre pays à ce malfoutisme généralisé et nous arrivons à ce bilan catastrophique : des édifices historiques millénaires, bâtis pour durer, et qui partent en fumée, dans l’impuissance de ceux qui aiment encore notre passé.

    Nous le savons. A notre douleur légitime s’ajoute celle de savoir qu’ils sont nombreux à se réjouir du drame de Notre-Dame de Paris, ici, sur notre sol et partout où se trouvent des musulmans.

  5. Merci, Christine, que d’émotion en te lisant… Et Victor Hugo c’est aussi Ruy Blas. Et bien sûr qu’il aurait été des nôtres – il l’est éternellement.

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