Du Figaro :
ENTRETIEN – Les facilités rhétoriques utilisées par Christophe Castaner et Gérald Darmanin s’apparentent à des amalgames grossiers pour intimider leurs contradicteurs, s’inquiète l’historien.
LE FIGARO. – Christophe Castaner et Gérald Darmanin ont, ces derniers jours, commenté des faits d’actualité en se référant aux années 1930. Est-ce judicieux?
Georges BENSOUSSAN. – Une comparaison entre deux époques peut présenter un intérêt, à condition toutefois de faire la différence entre comparer et assimiler. On ne devrait jamais oublier le mot d’Héraclite selon lequel «on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve».
Assimiler notre présent aux années 1930 nous en apprend plus sur nos peurs que sur la réalité de 2018.
Nous télescopons les situations présentes et les situations anciennes en oubliant que le présent, par définition, est ce qui n’est pas encore advenu.
Commettre un amalgame entre les années 1930 et aujourd’hui, c’est oublier, par exemple, la catastrophe anthropologique que fut la Grande Guerre.
La Première Guerre mondiale a transformé l’adversaire en nuisible à éradiquer par des batailles d’extermination.
Il est permis de considérer que cette «brutalisation», cette accoutumance à une extrême violence a constitué l’antichambre des massacres génocidaires. Nombre de contemporaines, comme Élie Halévy, ont perçu cette rupture, qui conditionnera les années 1930.
Dans le contexte de l’été et de l’automne 1938, qu’on songe à des textes aussi différents mais chargés d’une même angoisse que sont la Lettre aux paysans sur la pauvreté et la paix de Giono et le roman de Sartre Le Sursis.
Or notre horizon occidental ne connaît rien de commun aujourd’hui. Garder le regard fixé sur les années 1930-1940 rend le présent opaque.
À quand remonte cette tendance à tout ramener aux années 1930 et à la Deuxième Guerre mondiale?
Il en est ainsi depuis au moins une génération.
En 1993, lors des conflits qui ont ensanglanté l’ex-Yougoslavie, le flux médiatique a télescopé le siège de Sarajevo par les Serbes et le ghetto de Varsovie pendant l’occupation nazie, car il se trouve qu’on commémorait au même moment le 50e anniversaire de son soulèvement.
Un amalgame inepte provoqué par la place devenue aveuglante de la mémoire de la Shoah depuis les années 1990.
Antérieurement, dans l’après-guerre, la mémoire de la Shoah avait longtemps été une mémoire aveugle – même si le silence absolu dont on affirme qu’elle aurait été alors entourée relève pour partie du mythe, comme l’a montré l’historien François Azouvi.
Pour comprendre menaces et enjeux actuels, la référence constante à la Seconde Guerre mondiale et aux «heures les plus sombres» ne vous paraît donc pas éclairante?
L’analogie permanente avec la Seconde Guerre mondiale ne relève pas de la seule ignorance, quand le discours médiatique majoritaire tend à culpabiliser les «mal-votants» et à réveiller la peur de la guerre en agitant le spectre des années 1930.
Assimiler les «gilets jaunes» sur les Champs-Élysées au 6 février 1934 comme l’a fait le ministre de l’Intérieur est le type même de l’amalgame polémique historiquement inepte, mais aujourd’hui banalisé, puisque certains vont jusqu’à comparer le sort des musulmans en France aujourd’hui à celui des Juifs sous l’Occupation.
S’agissant de l’émeute du 6 février 1934, rappelons qu’elle a fait au bas mot 15 morts, dont 14 parmi les manifestants, et plus de 600 blessés.
N’y a-t-il toutefois aucun motif d’inquiétude qui puisse trouver un écho dans le passé européen?
Certes, si le projet européen était désavoué, on pourrait craindre le repli de la part de populations dont l’écrasante majorité n’a plus aucun souvenir de la catastrophe du choc des nationalismes en Europe.
De surcroît, la démocratie est une construction politique fragile, élaborée par la raison, à l’opposé de la loi de nature.
Un rien peut l’emporter, et l’actuelle offensive contre les Lumières la met en danger.
Or, si l’on connaît bien la critique de droite contre les Lumières, arc-boutée sur le rejet de la Révolution française, on sous-estime le rejet de gauche des Lumières, qui veut y voir la matrice des totalitarismes.
Faut-il rappeler que tous les totalitarismes furent hostiles aux Lumières?
Goebbels proclamait:
«L’an 1789 sera rayé de l’histoire.»
Sans oublier ceux qui, aujourd’hui, dénigrent l’universel en y voyant l’une des sources de la domination occidentale, et finissent par faire l’éloge de la communauté et du repli tribal (indigénistes, «racisés»).
Une offensive qui ramène inévitablement toute vérité historique au niveau d’une simple et relative opinion.
Cela n’empêche pas de se demander si nous vivons réellement un rejet de la construction européenne ou simplement un refus d’une Europe régie par une technocratie hors sol.
Quel regard portez-vous sur ce qu’il est convenu d’appeler la montée des populismes?
La «montée du populisme» est une de ces formules écrans qui dispensent de comprendre.
Les définitions en sont nombreuses, elles se contredisent et, à ce jour, aucun régime ne s’en réclame.
Tout se passe comme si le mot populisme servait surtout à discréditer le discours de l’adversaire en jetant sur lui l’ombre du fascisme, comme s’il cherchait à délégitimer le désarroi social et culturel d’un monde populaire qui se sent abandonné.
Mieux vaut considérer le soubassement social de ce mouvement.
En France, hormis à la présidentielle, le niveau d’abstention aux élections atteint les sommets que l’on sait.
Sur le plan culturel, il n’y a plus de communion autour d’un socle de valeurs, de croyances, d’histoire et de projet d’avenir, qui fait vivre une nation au-delà des oppositions de classes.
Nous sommes donc dans une situation de déshérence que l’imprécation mille fois répétée contre le populisme honni ne suffira pas à conjurer.
La précarisation sociale, la mondialisation malheureuse pour une grande partie d’une population qui se sent méprisée, a nourri ce divorce des classes populaires et moyennes.
Cette révolte, dont le mouvement des «gilets jaunes» apparaît emblématique, traduit une coalition d’angoisses devant un avenir opaque, la crainte d’une immigration illégale de grande ampleur venant du Sud, la peur de se sentir minoritaire dans son propre pays: ce conglomérat d’anxiétés est qualifié par ce mot fourre-tout de «populisme».
Dans ce contexte, la multiplication des condamnations morales («propos nauséabonds», «vous faites le jeu de l’extrême droite») apparaît comme une arme de classe contre les «gueux».
Évoquer avec dégoût le «populisme», sans le définir, c’est aussi occulter les effets, et d’abord au plus bas de la société, du culte de la croissance dans un monde fini, de la religion du progrès et de la consommation, du primat de la norme et de la concurrence, bref, de tout ce qui aura détruit l’idée de civilisation, basée sur la mesure, et celle de société et sa notion de bien commun.
Cet univers mental aura pénétré jusqu’aux interstices les plus fins de nos vies et fait ressembler la planète à la Louison de La Bête humaine dans le film de Jean Renoir, cette locomotive folle, lancée à pleine allure, sans personne à bord pour l’arrêter.
* Derniers ouvrages parus: «Les Juifs du monde arabe. La question interdite» (Odile Jacob, 2017) et «L’Histoire confisquée de la destruction des Juifs d’Europe» (PUF, 2016).
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Excellente réponse aux « experts « collabo qui sévissent actuellement dans les médias (Boulouque et cie).
Comment les intimes de notre golden boy de Président peuvent-ils faire des allusions aussi démagos ???…..
Les réactions dites « populistes » des années 30 sont la conséquence du krach boursier de 1929 à Wall Street, lui même consécutif à une bulle de spéculation boursière conjuguée au crédit facile et à l’excès d’endettement … (très voisin du krach de 2008..)
Alors, oui, les populismes et peut être les nationalismes sont-ils nés de cette crise et non l’inverse !
Mais comme l’écrit Georges Bensoussan, le contexte et l’état d’esprit des européens n’a rien à voir avec ceux des années 30.
Ce sont les golden boys de l’époque et la finance folle non encadrée qui ont été la cause de la crise, de la situation de chômage et de pénurie de cette époque si souvent rappelée par notre actuel mandataire des milliardaires.
Je ne cherche pas à excuser les excès des populistes, mais je trouve incompréhensible qu’aucun opposant politique ne lui ai rappelé cette simple évidence.
Il est peu probable que les choses changent avec des banquiers apatrides aux manettes des Etats !
« Assimiler notre présent aux années 1930 nous en apprend plus sur nos peurs que sur la réalité de 2018 »
En 1936, « les ouvriers communistes disaient: s’il y a la guerre nous n’irons pas car nous n’avons rien à défendre ». Après le Pacte germano-soviétique de non agression, les communistes ont saboté les dépôts d’armes de leur « patrie », et Daladier les a envoyés en prison. Le 10 juillet 1940, les 70 parlementaires communistes auraient voté pour pétain s’ils n’avaient pas été interdits de sièger. Le soir de ce 10 juillet 1940, le manifeste de Thorez et Duclos soutient pétain et jusqu’en juin 1941 les communistes vont collaborer avec l’ennemi allemand. Toujours en 1936, la bourgicaillerie hurlait « plutôt hitler que le front-populaire ». En mai-juin 1940, face à l’invasion allemande, les français ont refusé le combat. Le pays est finalement tombé dans l’abîme et en novembre 1942, il a été radié de la carte géographique. En juillet 1945, de gaulle, président non-élu, a gracié pétain et amnistié thorez, discréditant toute Justice avec des conséquences toujours actuelles. Et j’en passe!
En 2018, il y a des dizaines de Réalités politiques, économiques, etc.., analogues à celles des années 30. Certes les politiciens en brandissent le spectre pour effrayer la population, mais les peurs des français sont parfaitement fondées sur la Réalité et n’ont rien d’irrationnel. La situation actuelle de la france est même pire que celle des années 30. L’Histoire est certes le changement dans la continuité, mais il serait difficile de prétendre que les mêmes causes ne produiront pas les mêmes effets, surtout quand des millions de personnes n’ont plus rien à perdre, et là Mr Bensoussan est bien silencieux.
Sauf erreur de ma part, je ne vois pas de mention ou d’analyse de la part de l’auteur du plus grand des périls qui menacent les pays occidentaux aujourd’hui, à savoir l’expansion mondiale de la « secte », de la même façon que l’expansion de l’hitlérisme laissait augurer de jours sombres pour le monde dans les années 30.
Finkelkraut, hier sur la 5, a fait une bonne analyse de la situation, mais il a complètement raté sa sortie en soulevant sa crainte du RN
Comme ce n’est pas un imbécile, son attitude peut s’expliquer de deux façons;
— soit il ruse pour rester bien vu et invité des journalopes,
— soit, malgré sa grande intelligence, il est toujours prisonnier de la peur et du spectre de la SHOAH
oui, sa pétainisation, ça se tient, en rapport avec sa collaboration avec les pays musulmans envahisseurs
mais maintenant, ce qu’il ne voit pas venir, c’est 1789,
à bas les privilèges ! les aristos à la Lanterne !
La référence des années 30 de MacronCon est tout simplement sa Pétinisation face à une invasion programmée créant un chaos social, de facto, et donc prôner une Europe de sauvegarde bunkeurisée pour les intérêts financiers, le temps qu’ils retrouvent une nouvelle forme de financiarisation positive.
Merci Antiislam pour ce partage.
Malgré quelques critiques parfois adressées au « Figaro », quand tel ou tel journaliste ou sans doute stagiaire tendait à reproduire des méthodes indignes (http://resistancerepublicaine.com/2016/04/23/israel-comment-le-figaro-essaie-de-faire-du-terroriste-palestinien-une-victime/ ; http://resistancerepublicaine.com/2017/08/15/enorme-mensonge-du-figaro-les-extremistes-blancs-tueraient-plus-que-les-islamistes/ ; http://resistancerepublicaine.com/2016/07/16/nice-le-figaro-decide-que-les-propos-islamophobes-seraient-illegaux-et-a-denoncer/), force est d’admettre qu’il mérite ses subventions et sa TVA de 2,1 % (http://resistancerepublicaine.com/2018/11/29/ue-la-presse-de-desinformation-taxee-30-fois-moins-que-le-carburant-a-linitiative-de-la-france/) lorsqu’il publie des Georges Bensoussan dont la parole est si importante de nos jours…
L’immigration est une source de richesse intellectuelle. J’en tiens pour preuve l’évolution de ce petit diction populaire:
Rends service a un vilain il te chie dans la main
version regionaliste ( ça pue le repli sur soi!!) rends service a Bertrand ti lou rendra en caguant!
Et là: dépenses sans compter pour un réfugié il saura bien te remercier!
https://news.suavelos.eu/reinbek-les-refugies-ravagent-les-appartements-fournis-degats-540-000-euros/
C’est ce que j’ai sorti ce matin aux quémenTEUSES de la banque alimentaire en allant faire mes courses.
« c’est pour aider ceux qui ont froid et faim »…. Surtout à l’hôtel hein!!
» Surtout à l’hôtel hein!!
merci pour l’ éclat de rire 😆 😆
ces vieilles et vieux cons qui t’ alpaguent aux portes de supermarchés je ne les regarde même plus…..je me demande s ils nont pas d’ enfants a aider, de petits enfants a distraire, d’ activités plus saines que cette commisération puante ….pour des populations profiteuses qui nous haissent mortellement
merci pour le lien,
ça me fait penser que chez nous, on ne sait rien de ce qui se passe dans les châteaux et les centres de vacances où ils ont été hébergés,
qu’est-ce qu’on nous cache ??
Les punaises de lit et les chiottes bouchées et vandalisées, les draps déchirés et les matelas brûlés ??
Une idée pour un journaliste , pas de gauche, aller enquêter sur les lieux d’hébergement
Excellente mise au point de Georges Bensoussan. Mais je suis en divergence avec lui lorsqu’il semble adhérer intégralement au fameux « L’Europe, c’est la paix. ». Georges Bensoussan est trop savant en histoire pour ignorer qu’il y a très longtemps que la France, depuis très longtemps, n’a plus de différents territoriaux avec le Royaume-Un , avec l’Espagne, la Suisse, ou l’Italie, pour ne rien dire de la Belgique, et son peuple ami avec la France. Même les flamands n’eprouvent aucune agressivité à notre encontre.
Quant à notre ennemi le plus récent, l’Allemagne, il n’a pas été neutralisé par L’Europe, mais par la pax americana.
A l’heure actuelle, ce seraient plutôt les nations de la communauté européenne, a la traîne des USA, qui nous entraîneraient dans un conflit avec la Russie.
De surcroît, OTAN et USA ont d’autant plus tendance à braver la Russie dans la question ukrainienne que leurs dirigeants savent qu’il y a une Europe prête à accueillir cette nation séparatiste. Sans cela, qu’auraient-ils pu faire de l’Ukraine? A quelle entité supra-nationale auraient-ils pu rattacher ce pays extraordinairement endetté, qui a fondamentalement besoin d’être traîné comme un boulet par des nations plus riches et mieux équipées?
Bonjour,
Exactement : d’alleurs l’ U »E » nous a entrainé dans une guerre contre la Serbie.
Toujours dans cette perspective anti-russe et pro-islamique.