Son jeune domestique refuse ses avances ? Elle l'accuse de harcèlement et le fait incarcérer

Scandale ! L’épouse d’un très haut fonctionnaire accuse de harcèlement et fait incarcérer son jeune domestique qui refusait ses propres avances.

 
Nil novi sub sole* : un fait divers d’il y a 37 siècles
Le “scoop” n’en est pas un, puisqu’il s’agit de l’histoire de Joseph, l’un des douze fils du patriarche Jacob qui aurait vécu vers 1700 avant Jésus-Christ.

L’analyse des chapitres de la Genèse où on lit cette histoire a permis aux savants d’y voir un conte moral, écrit d’une seule main, quelque 1000 ans plus tard, mais cela n’a aucune importance pour mon propos : le seul fait que cette histoire ait été écrite, reçue et transmise au long des siècles montre qu’elle entre dans les constantes des pratiques humaines.

Voici donc cette histoire, d’après les chapitres 39 à 41 de la Genèse, qui font suite au récit de la vente de Joseph par ses frères, jaloux, à des caravaniers arabes.

« Joseph fut emmené en Égypte, et Putiphar, officier de Pharaon, chef des gardes, Égyptien, l’acheta des Ismaélites qui l’y avaient amené. Yahweh fut avec Joseph, qui faisait prospérer toutes choses ; il habitait dans la maison de son maître, l’Égyptien. » Celui-ci lui confia la gestion de toutes ses affaires (comme la riche veuve Khadidja à son jeune employé Mahomet !)

« Or Joseph était beau de corps et beau de figure. Il arriva […] que la femme de son maître jeta les yeux sur Joseph et lui dit : “Couche avec moi.” Il refusa et dit à la femme de son maître : “Voici, mon maître ne s’informe avec moi de rien dans la maison et il a remis tout ce qu’il a entre mes mains. Il n’est pas plus grand que moi dans cette maison, et il ne m’a rien interdit que toi, parce que tu es sa femme. Comment ferais-je un si grand mal et pécherais-je contre Dieu ?”

« Quoiqu’elle en parlât tous les jours à Joseph, il ne consentit pas à coucher auprès d’elle ni à être avec elle. Un jour qu’il était entré dans la maison pour faire son service, sans qu’il y eût là aucun des gens de la maison, elle le saisit par son vêtement, en disant : “Couche avec moi.” Mais il lui laissa son vêtement dans la main, et il s’enfuit au dehors.

« Quand elle vit qu’il lui avait laissé son vêtement dans la main et qu’il s’était enfui dehors, elle appela les gens de sa maison et leur parla en disant : “Voyez, il nous a amené un Hébreu pour folâtrer avec nous. Cet homme est venu vers moi pour coucher avec moi, et j’ai appelé à grands cris. Et quand il a entendu que j’élevais la voix et que je criais, il a laissé son vêtement à côté de moi et s’est enfui au dehors.” »

Au retour de son mari, elle lui répète ces mots. « … sa colère s’enflamma. Il prit Joseph et le mit dans la prison […] où étaient détenus les prisonniers du roi. »

Par la suite, ses qualités lui firent gagner la confiance du chef de la prison qui lui donna d’importantes responsabilités. Le grand échanson et le grand panetier de Pharaon ayant été incarcérés, eurent des songes qui les inquiétaient. Joseph les leur expliqua et annonça au grand échanson sa libération et au grand panetier sa pendaison, ce qui se produisit.

Deux ans après, c’est Pharaon qui eut un songe étrange : « il se tenait près du fleuve [le Nil], voici que du fleuve montaient sept vaches belles à voir et grasses de chair, et elles se mirent à paître dans la verdure. Et voici qu’après elles montaient du fleuve sept autres vaches, laides à voir et maigres de chair […]. Et les vaches laides à voir et maigres de chair dévorèrent les sept vaches belles à voir et grasses. Alors Pharaon s’éveilla. » Un second songe lui fit voir des épis gonflés, remplacé par des épis maigres.

Pharaon ne trouvant personne pour lui expliquer ces songes, le chef des échansons se souvint de Joseph, et en parla à Pharaon, qui le fit venir. Et Joseph ayant annoncé à Pharaon sept années de grandes récoltes suivies de sept années de misère, Pharaon en fit son principal ministre, qui sut stocker l’abondance pour pallier ensuite la misère.

 
Je n’en dis pas plus, alors que me vient à l’esprit cette pensée de Montesquieu : « Tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser » (De l’Esprit des Lois, XI, 4). Bien évidemment, Montesquieu écrivant en français, « homme » couvre les deux sexes. Et je suppose qu’en cherchant dans les vies de reines et impératrices, on trouverait des « harcèlements » qu’elles auraient exercés sur de beaux hommes qui leur plaisaient…
La vraie question est celle du respect que chacun doit avoir pour son prochain, surtout s’il lui est socialement inférieur. Vaste problème !

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11 Commentaires

  1. Tout simplement parce que les femmes détiennent bien moins souvent un pouvoir dont elles peuvent abuser, comme les hommes.
    Mais n’est-ce pas inscrit dans la nature humaine, que seule la raison — et cle cœur — peu(ven)t dépasser ?

    • Oui, c’est inscrit dans la nature humaine, mais la nature humaine se façonne.
      Or les hommes ne sont pas « façonnés » par l’éducation qu’ils reçoivent de la même manière que les femmes.
      Faire croire que les femmes commettent ce genre d’abus moins souvent car elles ont moins de pouvoir est inacceptable.

  2. En effet, bien qu’il ait toujours existé, c’est vraiment infime en comparaison

  3. Bonjour,
    Merci pour ce rapprochement amusant.
    Statistiquement, ce cas de harcélement est quand même plus rare que celui qui est en cause en ce moment :=)

    • @ frejusien
      Phèdre de Racine.
      Coup de foudre à Athènes. Pauvre Hippolyte, fils de Thésée et de la Reine des Amazones, Antiope (?), et beau-fils de Phèdre.

  4. L’Impératrice de Chine, Tseu-Hi (1825 – 1908) entre autres abus de pouvoir, l’utilisa notamment pour satisfaire ses appétits sexuels en asservissant de beaux jeunes hommes, surtout vers la fin de sa vie. Malheur à celui qui lui refusait ses faveurs !
    Pearl Buck, dans son roman, « Impératrice de Chine », a plus ou moins survolé, voire occulté ce côté sombre de la personnalité de l’impératrice, préférant mettre en exergue ses qualités indéniables de fin stratège et politique sans état d’âme.

  5. Merci pour ce cours d’Histoire, très intéressant et révélateur.
    Pour ma part, j’aimerais que l’on évoque le harcèlement MORAL, dont sont capables les femmes, dans le domaine du travail, sur les autres femmes… Personnellement, j’ai connu de vraies pestes et de cela on parle peu. Mais, tel n’est pas le propos ici.

    • On ne peut pas comparer le harcèlement sexuel masculin (assez répandu) à celui féminin, beaucoup plus rare.
      L’auteur de cet article se trompe s’il cherche à démontrer que les femmes harcèlent moins car elle sont plus souvent en position de faiblesse que les hommes, et que quand les femmes sont en position de force, elles en abusent autant que les hommes.
      Pour preuve de cette erreur, référons-nous à la pédophilie, par exemple.
      Une femme est souvent en position de force face à un enfant. Elle est plus « forte » que lui physiquement et psychologiquement. Et pourtant, la pédophilie est beaucoup plus répandue chez les hommes que chez les femmes.
      Et si les femmes ont moins tendance à ce genre d’abus que les hommes, c’est parce-qu’elles ne sont pas élevées comme les hommes: elles sont élevées de manière à mieux contrôler leurs pulsions, qu’elles soient sexuelles ou non-sexuelles. L’éducation que reçoivent des femmes tend à leur apprendre à gérer la frustration dès leur plus jeune âge, alors que les garçons sont souvent plus ménagés de ce point de vue.
      Par exemple, quand j’étais jeune, on me demandait souvent de me calmer, de m’asseoir, alors qu’on était nettement plus permissif avec mon frère, car « c’est un garçon, il a besoin de se dépenser ».
      Pourtant moi aussi j’étais une enfant, et j’avais besoin de me dépenser aussi.
      Mais je devais gérer la frustration de ne pas pouvoir faire ce que je voulais.
      Et la société ne porte pas sur nous un regard aussi clément que celui qu’elle porte que les hommes.
      Pensons à ce qui se dit d’un homme dragueur et/ou fêtard:
      « C’est un bon vivant ».
      Une femme dragueuse et/ou fêtarde:
      « Une traînée ».
      Une éducation différente fait que les femmes sont beaucoup moins enclines que les hommes à abuser de leur position de force.

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