L’Union européenne, et c’est là le vrai problème, ne nous permet pas actuellement de déchoir librement les terroristes de leur nationalité.
On ne sera donc pas étonné que les Européistes aient tout fait pour placer le débat ailleurs (la soi-disant idéologie de gauche, l’inefficacité de la mesure pour lutter contre le terrorisme – ce qui n’est pas son seul but, il s’agit surtout pour la France de ne pas honorer de sa nationalité des terroristes).
La législation française actuelle permet déjà d’opérer la déchéance de la nationalité des terroristes « fous d’Allah ». Les articles 25 et 25-1 du Code civil impliquent en effet cette possibilité, mais seulement dans un délai limité à partir de l’acquisition de la nationalité notamment (10 ou 15 ans) ou si les faits sont antérieurs à cette acquisition. La jurisprudence témoigne de cas où la déchéance de la nationalité a réellement été pratiquée pour des terroristes.
Au lieu de discuter pendant des mois de l’inscription de la déchéance de la nationalité dans la Constitution, le gouvernement et le parlement auraient dû commencer par une réforme législative supprimant la condition de délai, d’une part, et, d’autre part, dénoncer unilatéralement les conventions se rapportant à l’interdiction de créer des apatrides.
Les terroristes déchus de leur nationalité, même apatrides, auraient alors dû se débrouiller pour trouver un pays d’accueil. Ce n’est pas le problème de la France. Il existe d’ailleurs dans le monde des endroits qui ne relèvent d’aucune souveraineté. La peine de mort ayant été abrogée, cela aurait été notre dernier recours.
Certains articles dans la presse évoquent le poids de ces engagements internationaux mais laissent le sentiment qu’il n’y a rien ou pas grand chose à faire et qu’il faut s’y faire.
Ainsi, l’article du professeur de droit Dominique Rousseau, qui n’est pas du tout favorable à la déchéance de nationalité :
http://www.lefigaro.fr/politique/2016/01/05/01002-20160105ARTFIG00325-dominique-rousseau-la-decheance-de-nationalite-pour-tous-une-absurdite-juridique.php
Cet article évoque notamment les obstacles qui résulteraient de deux conventions internationales, d’où ressortirait un principe général du droit humanitaire interdisant de faire des apatrides.
Cependant, il n’y a là rien d’insurmontable. Il suffit de dénoncer (résilier, autrement dit) les deux conventions dont l’article fait état. Il s’agit d’une convention de 1954 dont l’article 40 permet la dénonciation, qui prend effet au bout d’un an : http://www.unhcr.fr/4b151d05e.html . Il s’agit encore d’une convention de 1961 également susceptible de dénonciation dans les mêmes conditions, selon son article 19
http://www.ohchr.org/FR/ProfessionalInterest/Pages/Statelessness.aspx.
Une fois ces conventions dénoncées, la Convention européenne des droits de l’homme pourrait encore s’opposer à la création d’apatrides. Qu’à cela ne tienne, en six mois, cette convention peut être dénoncée et il existe bien d’autres raisons de le faire encore (entre autres, son article 9 sur la liberté religieuse) : http://www.echr.coe.int/Documents/Convention_FRA.pdf (article 58)
Reste la question qui fâche : faut-il sortir de l’Union européenne pour étendre la déchéance de la nationalité ?
Depuis Maastricht, en effet, l’Union européenne se mêle de cette question car chaque national d’un Etat a la citoyenneté européenne. Pour le Conseil d’Etat, le risque est en effet qu’en procédant à la déchéance de la nationalité d’un terroriste, la France réalise une infraction à la législation communautaire, s’il n’est pas tenu compte, notamment, du délai écoulé depuis l’acquisition de la nationalité (on peut supposer que, plus il est long, plus la déchéance sera délicate à prononcer à cet égard) et de l’impossibilité de créer des apatrides.
Au contraire, aucun de nos principes constitutionnels ne crée un tel obstacle. Le principe général du droit humanitaire évoqué par l’article de D. Rousseau n’a pas valeur constitutionnelle. Il suffirait donc de demander une révision des traités pour abroger les dispositions relatives à la citoyenneté européenne des traités sur lesquels repose l’Union européenne pour y arriver et, en cas de refus des partenaires européens, de sortir de l’Union européenne pour avoir le champ libre.
Si le débat s’était tenu sur ce terrain, le Front national aurait naturellement été mis en position de force et les Européistes auraient commencé à blêmir dans un contexte d’affaiblissement de l’Union européenne.
C’est à ce prix, pour eux, que la réforme des articles 25 et 25-1 du Code civil aurait pu s’effectuer. C’est à ce prix, pour eux, que la déchéance de la nationalité aurait pu entrer dans la Constitution, sans condition de délai et sans condition de non-apatridie.
Le 23 janvier 2015, le Conseil constitutionnel a admis la constitutionnalité des textes du Code civil, sans exprimer de réserve : on peut donc penser qu’un élargissement des cas de déchéance de la nationalité serait faisable sans avoir à réviser la Constitution. Certes, le Conseil constitutionnel relève que la possibilité de rendre le terroriste apatride n’a pas été retenue ; toutefois, il ne dit pas explicitement s’il censurerait une loi décidant le contraire. Il ne pourrait pas s’y opposer si une volonté politique réelle existait pour élargir les cas de déchéance de la nationalité.
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