Le ramadan en pays islamique, je connais. Ralentissement de la vie économique. OK.
Mais la dernière fois, j’ai eu un déclic, qui m’a fait peur, par extension, ou anticipation, pour la France de demain. Que se passerait-il dans une France « ramadanisée » en cas de sérieux coup dur technique, général, notamment dans le domaine de certains services publics ?
L’été dernier j’ai été recruté/expédié d’urgence en Mauritanie, dans le cadre de l’alimentation en eau potable de Nouakchott :
A – Redressement de l’exploitation de la première usine d’eau potable construite dans le pays, alimentée à partir du fleuve Sénégal ; réalisation française financée par un émirat arabe.
B – Essais de performance en situation extrême : mauvaise qualité extrême de l’eau brute du fleuve Sénégal (période de crue), tout en poussant l’usine à son débit max contractuel.
En fait il y a deux usines : une première usine de traitement dans un endroit perdu (Beni Nadji) proche du fleuve Sénégal, qui envoie ensuite l’eau à 200 kilomètres, où une deuxième usine complète le traitement et l’envoie à son tour à Nouakchott, à 17 kilomètres.
Cette dernière usine tourne assez bien ; il y a néanmoins des problèmes, par exemple une partie du génie civil demande à être refaite (fuites). Deux mois auparavant, deux français de l’entreprise sont arrivés sur place en renfort sur cette usine mais aussi pour la première usine, Beni Nadji, fleuve Sénégal, qui se casse la figure. Evidemment, envoyer quelqu’un à demeure à Beni Nadji n’est pas très aisé, c’est un trou infect ; il y a peut-être aussi un petit souci de sécurité… d’autant qu’il y a eu là-bas un conflit du travail qui a eu un écho national. L’entreprise a licencié des employés pour faire de la place à ce que j’appelle plus bas « les autre Mauritaniens ». J’hérite avec plaisir du gros lot : mission à Beni Nadji, à temps plein.
Moins de 48 heures après mon arrivée dans le pays, en route pied au plancher pour l’usine de Beni Nadji … avec trois grosses bagnoles bourrées essentiellement d’agents de sécurité, plus deux autres Français et les chauffeurs. Situation pénible pour un solitaire. Presque tout le monde repart le soir-même à Nouakchott sauf trois agents de sécurité chargés de veiller sur moi 24 heures sur 24. Je sèmerai l’un d’eux peu après –donc il s’est fait immédiatement virer- lors d’un bref aller-retour à Nouakchott, et il ne sera pas remplacé.
L’usine est gardée jour et nuit par des gendarmes. En arrivant, juste un coup d’œil pour me rassurer ; je sais où voler des armes -les leurs donc- en cas de besoin. Le pays redoute ces jours-ci une attaque de commandos-suicide d’AQMI, souci que j’adapte à ma manière : tenir les gendarmes à l’œil.
L’usine a été mise « modérément » en service (hum, je n’en ai pas vraiment trouvé de traces en arrivant sur site ; zéro traçabilité malgré des procédures quand même un peu strictes en la matière, d’habitude) 8 mois auparavant, à petit débit et dans des conditions dignes du Club Méd (eau du Sénégal très peu chargée, facile à traiter), mais elle est en train de se casser la gueule à l’approche des tests de performance. Et l’hivernage (saison des pluies) a commencé, la crue du fleuve Sénégal arrive.
Une bonne partie de cette usine serait presque inutile une partie de l’année vu la qualité de l’eau amenée du fleuve (pompage alimentation amont fait par les Chinois). Mais à partir de juin la qualité de l’eau commence à se dégrader jusqu’à atteindre des valeurs 200 à 300 fois supérieures à celles constatées pendant les autres mois, alors que l’usine n’a été dimensionnée que sur la base d’une aggravation de qualité d’un facteur 120 (sur le paramètre « turbidité »). A ajouter erreurs françaises de design et malfaçons de montage.
Autre point: mode de régulation du pompage aval, sortie usine vers Nouakchott, réalisation elle aussi chinoise, qui ne fait qu’aggraver la gestion de l’usine (violentes variations de débits). Toute la philosophie du système demande à être modifiée, depuis le Sénégal jusqu’à Nouakchott intra-muros. L’administration mauritanienne, son ingénieur-conseil, les Chinois, le bailleur de fonds, ont du souci à se faire. Sur ce coup l’entreprise française est parfaitement blanche, et on commence à enfoncer le clou bien profond.
Le personnel directement sous ma coupe, appartenant à l’entreprise française qui m’envoie, est mauritanien de race noire plus un arabo-berbère. Il y a aussi un cadre marocain, responsable de la maintenance électromécanique, que je fais virer rapidement ; il n’a rien fait depuis six mois et ne fait toujours rien, et en plus le ramadan le fatigue. Il a parfois un peu d’énergie pour engueuler les noirs comme des chiens. Je le remplace par un noir surdoué, officiellement « instrumentiste », très mobile, qui n’a pas peur de se salir les mains, et incapable de faire une faute d’orthographe en français.
Globalement, il y a là une équipe de choc incroyable, inconnue, abandonnée, -et sous-payée- qui tient en main, en amont, l’alimentation en eau de Nouakchott. Le petit commando de base jongle allègrement avec des dizaines de pages sur les écrans d’ordinateur et peut cavaler une minute plus tard n’importe où dans l’usine. Ils ont au moins une contrainte, physiquement : aller faire des prélèvements horaires en divers endroits de l’usine, alors que cela aurait pu facilement être évité techniquement, à peu de frais pour l’entreprise.
Tout le monde fait sa prière à l’heure requise, rapidement, en salle de contrôle, au labo, devant l’atelier, au parking, puis boulot à nouveau. Pas de problème. De temps en temps j’en trouve un qui sommeille un peu sur une chaise, un autre derrière un bâtiment etc ; c’est le ramadan. Pas de problème.
On en bave, mais on survit en rigolant. Les deux pires, question humour, sont aussi les meilleurs au boulot. Le premier jour j’ai eu droit à des « Monsieur Philippe » ; on est passé rapidement, pour me désigner, à « inspecteur Colombo » ou « Colombo ». Les autres Mauritaniens n’oseraient pas, ils rasent un peu les murs quand ils me voient.
Idem pour les représentants de l’ingénieur-conseil, des Mauritaniens et des Tunisiens qui ont tendance à s’éparpiller partout sauf au cœur de l’usine, et à faire beaucoup de bruit de manière inversement proportionnelle à leur compétence technique. Le pire d’entre eux est celui qui a eu une longue formation en France dans le domaine de l’eau. Rarement vu quelqu’un d’aussi nul. Je réussis plus ou moins à les contenir dans un bureau unique où ils peuvent s’adonner sans discontinuer à surfer sur internet pour leurs besoins personnels, ou dormir profondément, ramadan oblige. Quand ils viennent la ramener, mal réveillés, en salle de contrôle ou ailleurs, je les accueille vachement bien… et ils repartent pour se plaindre longuement de moi au téléphone.
« Les autres Mauritaniens » sont des représentants du client, l’administration mauritanienne qui doit prendre le relais de l’exploitation de l’usine et aussi de l’autre usine à 17 kilomètres de Nouakchott après essais de performance concluants et réception provisoire des installations. Ils sont censés assister l’exploitation actuelle et être ainsi formés. Mais :
. Ils ont été pistonnés parce qu’ils avaient de la famille ou des amis dans des administrations.
. Ils n’ont pas de compétence en quoique ce soit, et n’ont absolument pas le souci d’en acquérir.
. Leur motivation est de bénéficier, temporairement, d’une prime spéciale vu la localisation de l’usine (zone notoirement insalubre au moins une partie de l’année, paludisme en particulier). Aucun n’a l’intention de rester.
. Absentéisme important. Turn-over important; de nouvelles têtes apparaissent sans prévenir, qualification inconnue ; d’autres disparaissent.
Le « meilleur » du lot vient pointer au boulot et repart 15 minutes après. Pour les autres, tous eux-aussi arabo-berbères, marre de les trouver, quand ils sont là, roupiller dans un coin ; le ramadan n’excuse pas tout.
Avec tous ceux-là, et j’oublie des soit-disant stagiaires que j’ai virés surtout du labo, mon humour peut faire place à des scènes violentes, verbalement.
Le peu de travail qu’ils devaient faire, certains ont fini par le faire mais je n’avais pas vu arriver la fin du ramadan.
Avec mes gars, on a redressé la situation de l’usine, mais pas assez pour faire face à ce qui nous arrive maintenant du Sénégal en crue. L’eau du fleuve devient d’heure en heure beaucoup plus chargée que ce que prévoyaient nos ingénieurs parisiens qui ont dimensionné l’usine. Le poste essentiel de dosage de réactifs (sulfate d’alumine), sous-dimensionné et qui n’avait pas eu de maintenance jusqu’à une époque récente, passe son temps à partir en sucette. Il y avait des pièces de rechange, insuffisantes, mais rupture de stock déjà avant la crise.
J’ai demandé à apporter des modifications, assez simples, aux installations, pour faciliter la vie de tout le monde et assurer la pérennité du matériel. Mes propositions sont acceptées par l’entreprise en Mauritanie –à la grande satisfaction de l’administration mauritanienne qui maintenant accepte tout ce qui vient de moi, même quand j’enfonce son personnel- mais il faut que Paris valide, donc on n’est pas sauvés.
Nous faisons désormais des manipulations de plus en plus tordues sur l’usine jour et nuit, avec des risques sur le plan de la sécurité. Mais au fait, où sont passés « les autres Mauritaniens » ? Ces derniers temps beaucoup ont déguerpi à Nouakchott se mettre en « arrêt de travail ». Fin du ramadan oblige.
Maintenant c’est la fin du ramadhan ; une partie de l’équipe, la mienne, a été autorisée à rentrer pour la circonstance à Nouakchott ainsi qu’un malade. Un autre malade revient sans prévenir de Nouakchott ; un jeune grand costaud qui avait le palu. J’ai eu le palu moi aussi il y a longtemps. A voir ses yeux, pas besoin d’être médecin pour comprendre qu’il en est au même point. Je le fais reconduire direct à la route, à 30 kilomètres, pour qu’il se fasse ramener à Nouakchott.
Les « autres Mauritaniens » qui n’étaient pas en « arrêt de travail » ont tous disparu à leur tour, sans prévenir, direction Nouakchott.
L’usine va tomber en rideau et nous ne sommes plus qu’une poignée ; nous rejetons de plus en plus dans la nature d’énormes quantités d’eau traitée mais dépassant largement les normes. Et parfois, arrêt de l’usine une heure ou deux. Conséquence : le niveau d’eau dans les réservoirs de Nouakchott, que nous pouvons suivre depuis notre salle de contrôle, baisse (chute à 40%, au lieu de 90-95 %). A tout hasard quelques anciens forages d’eau un peu pourrie sont remis en service par l’administration, je ne sais où.
Je marche au café et au tabac ; jusqu’à 20 heures de travail par jour pendant deux semaines (Allo madame Aubry, vous m’entendez ?).
Nouakchott va se retrouver sans eau alors que la demande augmente du fait de la fête du Ramadan.
Tiens, çà fait longtemps qu’il n’y a pas eu de coup d’état en Mauritanie. Bonjour la révolution, avec ma tête au bout d’une pique.
Finalement, l’eau coulera toujours à Nouakchott en quantité suffisante.
MAIS LORS DE CETTE SITUATION DE CRISE, «TOUS LES AUTRES MAURITANIENS » CENSES ETRE AU TRAVAIL A L’USINE AVAIENT DISPARU SANS RIEN DIRE POUR ACCOMPLIR LEURS OBLIGATIONS RELIGIEUSES (FAIRE LA FETE) A NOUAKCHOTT.
Et ils auraient été les premiers à gueuler si ils avaient manqué d’eau.
A QUAND UNE SITUATION SIMILAIRE EN FRANCE ?
Philippe Jallade.
***
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Bonjour,
C’est l’évidence que le ramadan est AUSSI une machine à ruiner une économie …
Ce qui n’empêche pas nos chers zélites DRH du MEDEF de nous raconter que c’est trois jours de fêtes cathos qu’il faut neutraliser pour raisons économiques …
Avec l’enthousiasme des évêques et bien sûr du fourbe Boubakeur qui applaudit bien sûr à cette « neutralisation » qui serait une « bonne chose pour l’économie » …
Eh , bien non !
Si il peut y avoir un islam en France , ce dont je doute , une des premières conditions à poser à son acceptation par le peuple français est la NEUTRALISATION [Comme ils disent] DE TROIS SEMAINES DE RAMADAN avec engagements en conséquence des chefs musulmans …
Sinon , ouste , dehors !
Entièrement d’accord
illustration de ce qui fait que les pays arabo-musulmans seront toujours des pays soit riches du pétrole, soit pauvres et miséreux (cause de la colonisation bien sur !!!)
Fort instructif
J’attends que les anciens de la reconstruction de la France nous expliquent pourquoi des chefs d’entreprise ne voulaient plus d’immigrés algériens ou tunisiens… parce que ces derniers ne bossaient pas…
Monsieur Jallade à beaucoup de courage. Aider des gens qui ne veulent rien faire c’est quasiment un sacerdoce là.
En prenant mon poste à minuit trente j’ai parlé à un collègue musulman dont l,’épouse et ses enfants l’ont injurié car il ne jeûne pas.
Comme s’il pouvait conduire (ca c’est plutôt simple) charger (c’est plus dur) et décharger (encore pire car ca suis le reste et la fatigue est plus forte) puis recharger (on rentre pas à vide) et redecharger (au bout de 12 ou 13 heures de job) en faisant le ramadan.
La femme et les enfants de ce type sont simplement stupides, ils veulent du fric sans effort. Lui raisonne bien, il sait que le ramadan lui est impossible il à d’ailleurs pris ses congés en septembre puisque comme il dit « avoir libre le ventre vide il trouve ca idiot » mais les imams deviennent plus radicaux d’année en année et comme l’éducation nationale à montré à ces enfants que savoir est inutile et qu’ils ont pleins droits à tout ils ne réfléchissent plus, la loi du bled à franchis les frontières et leur père devient un exemple à ne pas suivre.
Il est tellement excédé par tout ca qu’il à prétendu qu’il travaillait samedi pour pas rester chez lui.
Au final un musulman passera la journée chez un vilain partisan FN pour être tranquille. Nous ca nous gènes pas il est sympa mais comment pourra t’il supporter ca jusqu’au bout du « mois sacré » ?
Incroyable témoignage aussi, je vais si vous en êtes d’accord faire un post avec plusieurs témoignages de lecteurs
Pourquoi demander mon accord ?
Nous sommes sur votre site vous êtes maitre à bord !
Bien sûr mais entre un commentaire qui reste relativement confidentiel et un post davantage visible et vu il y a un pas.
Je ne trouve pas moyen de vous contacter sans passer par un article, navré.
C’est peut être mon smartphone qui cafouille ou je suis pas assez attentif.
Enfin bref, publier ce que je dis me pose aucun problème.
Je suis pas un homme très brillant mes fautes en témoignent, mais j’ai toujours voulu être routier donc l’école et moi ca faisait deux. J’exagère j’étais un élève moyen (mais poli) mais je suis pas allé très haut.
Quoi qu’il en soit j’ai les épaules pour assumer mes propos.
Je ne veux pas importuner les lecteurs avec ma foi mais elle à son importance et comme dis plus haut je ne trouve pas comment vous contacter hors post public (pardon donc aux anticlericaux)
Je suis protestant je porte deux croix, un collier et un tatouage. Contrairement à un athée il est donc impossible pour un musulman de ne pas m’identifier comme étant autre chose qu’un infidèle.
Un produit halal je le refuse car la bible l’interdit (me demandez pas ou j’en sais rien j’ouvre jamais une bible) ma foi est sincère bien que très éloignée du dogme (adam et eve sans les dinosaures avant eux ca me laisse perplexe) donc pour être franc la croix me sert surtout comme symbole d’être NON MUSULMAN et de le montrer.
Je sais bien que votre site se veux laïc et je respecte cela, mais à part nos jeunes qui parfois ne sont pas baptisés je pense que beaucoup de nous le sont, et cela devrait être utilisé.
Dans une administration ou les signes religieux doivent être cachés on trouvera toujours un(e) musulman(e) clairement affiché (voile, kamis etc) pour répondre à celui qui vous dirait « cachez cette croix » un tonitruant « ma croix vous gène ? Ok et le voile de madame ne vous gène pas ? »
Pour résumer l’idée la résistance de républicaine ou laïque, pourrait devenir chrétienne (ou bouddiste ou adorateurs du camembert céleste on s’en moque)
Quand je dis chrétienne je devrais dire MENSONGEREMENT chrétienne en fait. La foi affichée ne serait pas un but mais un moyen.
Je serais incapable de créer un site web, et bien plus de m’en occuper je donne donc l’idée au cas ou.
J’y pense juste.
Le rassemblement saucisson pinard qui ennui tant les autorités car non halal de facto.
Imaginons que les participants portent tous une croix, le non halal s’en trouverait justifié (psaume 29 je crois mais sans garantie)
Voila,pardon aux non croyants qui me liront mais j’ignore comment faire passer cette idée autrement.
Merci Philippe pour ce message et pour l’idée. Vous pouvez aussi écrire à resistancerepublicaine@yahoo.fr. Je ne pense pas quant à moi que l’on puisse vaincre l’islam par le christianisme ni les atteintes à la laïcité par d’autres. Je respecte votre foi et je respecte tous les croyants, musulmans compris. Je demande seulement que la foi et la religion demeurent une affaire privée. Je ne crois pas à votre solution car on ne peut obliger les gens à croire et qu’au train où vont les choses c’est l’absence de foulard et de barbe qui va permettre d’identifier ceux qui ne sont pas musulmans. L’islam aura gagné, séparant les musulmans des autres qui n’auront plus le choix que de se convertir ou d’obtenir le statut de dhimmi en faisant semblant d’être chrétien pour ne pas être condamné à mort comme mécréant. Les musulmans seraient ravis qu’on arbore des croix pour justifier la prééminence de la religion, alors que le foulard est un signe d’asservissement de la femme et non de religion
A Philippe.
Vous parlez de « sacerdoce », c’est un peu cela ; je suis un peu fou, à croire que vous me connaissez…
Figurez-vous qu’au Rwanda, un Rwandais exceptionnellement remuant au boulot -ce qui ne l’empêchait pas d’être toujours hilare- m’appelait « le missionnaire ».
A bientôt sans doute.
On n’ a pas assez de fous comme vous, Philippe, continuez votre excellent et indispensable travail au service de la Résistance