Islam, islamisme et assignations à résidence : deux décisions judiciaires du 13 juin 2016

Les juridictions continuent à connaître du contentieux de l’assignation à résidence, qui révèle des informations que les médias peuvent dissimuler ou ignorer et donne l’occasion de s’informer quant à l’islamisme en France…

Ainsi deux décisions ont été rendues par la cour administrative d’appel de Marseille et le Conseil d’Etat le 13 Juin 2016.

Dans la première affaire, l’homme assigné à résidence à Bollène « se trouvait en relation avec des membres de l’association drômoise La Plume ; s’il relativise sa fréquentation de l’association en indiquant qu’il n’a participé qu’à un ou deux cours dispensés par celle-ci sur le dogme ou la jurisprudence islamique, l’intéressé ne conteste ni que cette association dispense un enseignement religieux très strict en décalage avec les valeurs républicaines françaises, ni que certains de ses adhérents ont rejoint des groupes terroristes évoluant en Syrie ou en Irak (…) ». Il fréquentait un homme qui « a été arrêté au Yémen en février 2013 pour son appartenance suspectée à l’organisation terroriste Al Qaïda pour la péninsule arabique (AQPA) » ; il « a effectué, dans les deux années précédant la décision contestée, un séjour en Egypte, dont l’objet allégué d’apprentissage de la langue arabe n’est assorti d’aucun commencement de preuve, et un voyage d’une durée d’au moins trois mois en 2013 en Turquie ».

Cette première décision, celle de la cour administrative d’appel est encourageante, dans la mesure où les indices retenus à la charge de l’intéressé sont assez limités. Face aux difficultés probatoires, il faut en effet éviter d’être trop exigeant, d’autant plus que l’assignation à résidence n’est pas une mesure très sévère. Elle laisse une certaine liberté à la personne assignée à résidence. Les contacts avec des personnes suspectes et les déplacements inhabituels suffisent ainsi à permettre l’assignation à résidence.

Quant à la décision du Conseil d’Etat du 13 juin dernier, elle concerne un homme astreint à résider dans la commune de Saint-Pierre-du-Mont.

Celui-ci n’était tenu que de « se présenter une fois par jour à 10 heures au commissariat de police de Mont-de-Marsan, tous les jours de la semaine, de demeurer tous les jours, entre 20 heures et 6 heures, dans les locaux où il réside et interdit de se déplacer en dehors de son lieu d’assignation à résidence sans autorisation préalable du préfet des Landes ».

Ce n’est pas très exigeant, la limite légale étant fixée à trois présentations par jour au commissariat de police.De plus, la loi prévoit généreusement que « l’autorité administrative devra prendre toutes dispositions pour assurer la subsistance des personnes astreintes à résidence ainsi que celle de leur famille »…

L’intéressé « est en relation avec la mouvance islamiste radicale ; en outre il diffuse des thèses “conspirationnistes” au sujet des attentats terroristes qu’il légitime par ailleurs ; il a effectué un voyage en Inde en 2013 et qu’à son retour, il a lancé une “jama du Tabligh” visant à “islamiser” la France » (NDLR : il semble s’agir de cela : https://fr.wikipedia.org/wiki/Tablighi_Jamaat).

Il a « diffusé sur les réseaux sociaux, le 17 mars 2012, après les assassinats commis en mars 2012 à Toulouse et à Montauban, une vidéo faisant l’apologie du terrorisme, accompagnée de son commentaire : “soyons prêts à mourir mes frères”».

Il a « déclaré en public, en janvier 2015, devant la mosquée de Mont-de-Marsan, que les journalistes de Charlie Hebdo, qui avaient “blasphémé le prophète” avaient “bien cherché” les actes terroristes commis le 7 janvier 2015 ».

« S’agissant de l’adoption récente d’une attitude plus modérée, il a lui-même affirmé que son changement de comportement est en réalité motivé par les conseils de discrétion que lui a donnés son entourage ».

Ainsi, le Conseil d’Etat confirme l’assignation à résidence, comme la cour administrative d’appel dans l’autre affaire jugée le même jour. Les indices relevés étaient plus forts que dans la première affaire.

Toutes ces affaires posent la question de la possibilité de distinguer un islam modéré qui serait acceptable et un islam radical qui ne le serait pas : c’est bien de cela qu’il s’agit quand le Conseil d’Etat évoque « une attitude plus modérée », « un changement de comportement ».

On attend toujours le jour où les juridictions nous donneront un argument permettant de discerner ce qui permet d’identifier l’islam « irréprochable », au-delà des affirmations de principe que la jurisprudence rendue dans le contentieux de la naturalisation et celui des assignations à résidence contient (http://resistancerepublicaine.com/2016/03/25/de-la-vaste-farce-de-lassignation-a-residence-un-cas-decole/ et http://resistancerepublicaine.com/2015/12/23/etre-de-gauche-nempeche-pas-de-prononcer-la-decheance-de-nationalite-la-preuve/).

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